Côté Cinéma n°316 - avril 2017
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ÉDITO<br />
Le cinéma des professionnels<br />
L’antichambre du bonheur... ou pas !<br />
Au cœur de tous les cinémas, qu’il s’agisse d’un petit<br />
mono-écran ou d’un gigantesque multiplexe, il existe<br />
un endroit dont on parle peu mais dont l’importance<br />
est primordiale : le sas d’entrée dans la salle...<br />
Sa fonction première est de permettre d’isoler le<br />
spectateur du bruit et de la lumière en créant une<br />
transition entre l’ambiance souvent animée du hall<br />
d’entrée (ou d’un couloir d’accès) et la douce quiétude du lieu où va être projeté le<br />
film tant attendu, « là où tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté »...<br />
Mais ce petit coin magique, souvent grand d’à peine quelques m², sert parfois<br />
également de «sas de décompression» au sens littéral du terme.<br />
Photo Yann Vidal<br />
Tous les exploitants qui ont eu la chance de recevoir des équipes de films connaissent<br />
ce moment où, à quelques minutes du générique de fin et cachés dans ce recoin<br />
protecteur, les «talents» attendent la réaction du public avec plus ou moins<br />
d’appréhension. Ils y patientent parfois seuls, souvent accompagnés par les<br />
responsables du cinéma et quelque fois entourés d’une large équipe d’attachés de<br />
presse, distributeurs ou journalistes. Et à ce moment précis de l’avant-verdit du<br />
public, on constate plusieurs types de comportements...<br />
Il y a les anxieux qui se rongent les ongles et regardent leur montre ; les impatients<br />
qui préfèrent rentrer dans la salle et voir la fin de leur film avec le public ; les colériques<br />
qui trouvent que le son n’est jamais assez fort et qui réprimandent les spectateurs<br />
qui auraient l’audace de vouloir sortir avant la fin ; les décontractés qui en sont à la<br />
45 ème ville de la tournée et qui savent déjà que le public est conquis ; les désespérés<br />
qui n’entendent aucun applaudissement et auxquels on dit « c’est un film courageux,<br />
tu as eu raison de le faire... » ; les gentils qui remercient toute l’équipe avant d’aller<br />
affronter la salle ; les optimistes qui se disent qu’ils sont mieux là que dans un «prime»<br />
à la télé en train de se faire descendre par des chroniqueurs en mal de gloire<br />
cathodique ; les fatigués qui baillent aux corneilles parce qu’ils ont pris le TGV de<br />
6h10 ce matin après une nuit mouvementée ; les coquets qui se recoiffent ou se<br />
remaquillent avant de monter sur scène (ce sont les mêmes habitués à l’exercice<br />
qui pensent à éteindre leur portable et confier leur affaires personnelles à l’entourage<br />
avant l’ovation du public) ; les consciencieux qui connaissent l’importance de la<br />
tournée province à la fois pour le film mais aussi pour leur carrière et enfin... les<br />
absents, qui n’ont pas pu venir «à la dernière minute» et dont le responsable du<br />
cinéma va devoir expliquer la défection à un public impatient...<br />
Mais certains sas n’ont jamais connu ce type d’émotions car il existe des équipes<br />
qui ne se déplacent pas ou des cinémas qui n’ont pas le loisir de les accueillir... Et<br />
pourtant, toutes les études qui ont été menées sur les fameuses «tournées province»<br />
ont prouvé leur efficacité, même (et surtout) à l’époque où le Web permet de<br />
transmettre l’information en temps réel.<br />
Comme un bon «bouche à oreille», par exemple...<br />
Jean Walker