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01/02<br />
fonctionnement actuel du monde élitiste<br />
de l’art. Un univers bourgeois décadent et<br />
exécrable caricaturé par Dan Gilroy.<br />
Certes la bande annonce proposait une<br />
expérience horrifique, mais les traits<br />
d’épouvantes sont trop rares pour classer<br />
«Velvet Buzzsaw» dans cette catégorie. Il<br />
n’empêche que certains excès de violence<br />
gore ne sont pas édulcorés, pour le plaisir<br />
des amateurs d’hémoglobine, comme une<br />
réponse à la peinture rouge appliquée<br />
sur les toiles. Bref, «Velvet Buzzsaw»<br />
est un divertissement intéressant, qui<br />
offre de véritables visions d’auteur, loin<br />
du tout venant hollywoodien. Le long<br />
métrage aurait sûrement été un énorme<br />
bide en salles, à cause d’une réalisation<br />
qui manque peut-être parfois d’une réelle<br />
approche <strong>ciné</strong>matographique. Mais le<br />
<strong>ciné</strong>aste parvient néanmoins à se créer une<br />
esthétique moderne attrayante, qui tente de<br />
communier avec le 3e art.<br />
Le plus plaisant demeure les personnages.<br />
Tous assez ambigus, complexes dans<br />
leurs raisonnements et leurs choix, ils sont<br />
finalement les véritables œuvres d’art de ce<br />
long métrage. Jake Gyllenhall est inspiré en<br />
critique d’art mondain, une main de velours<br />
dans un gant de fer, à la recherche du scoop<br />
ou du scandale. Mais aussi un passionné<br />
en quête de l’œuvre d’art ultime. Il y aussi<br />
Toni Collette et Rene Russo dans leurs<br />
rôles d’attachés artistiques en compétition.<br />
La seconde réserve d’ailleurs un final<br />
frissonnant et véritablement bien pensé. Et<br />
enfin il y a John Malkovich, peut-être le seul<br />
véritable artiste de ces protagonistes. Le seul<br />
qui réfléchit par essence artistique et non<br />
par profit économique. C’est finalement<br />
ça la morale, certes peu originale, mais<br />
relativement bien retranscrite, de «Velvet<br />
Buzzsaw». Ça marche également avec le<br />
<strong>ciné</strong>ma. Comment l’argent à corrompu<br />
l’art, mais également les artistes. Et surtout,<br />
comment, de nombreux individus sans<br />
talent profitent de celui des autres. Une<br />
vision extrêmement réaliste du marché de<br />
l’art actuel, proposée de manière inédite<br />
dans le «Velvet Buzzsaw» de Dan Gilroy.<br />
Avec son approche sous forme de jeu de<br />
massacre où l’art puni ceux qui l’exploitent,<br />
«Velvet Buzzsaw» est une œuvre étonnante,<br />
qui a ses défauts, mais des plus pertinentes.<br />
Le casting est parfait, tandis que les morts<br />
restent jouissives. Le petit côté superficiel<br />
apporte de la crédibilité au message : la<br />
vacuité d’une partie mondaine de l’art, qui<br />
juge, s’approprie et exploite ce dernier. Bref,<br />
c’est superbe, étonnant, déroutant, et ne<br />
manque pas de quelques petites punchlines<br />
cinglantes pour mettre à mal une société qui<br />
ne sait plus considérer l’art à sa juste valeur.<br />
Aubin Bouillé<br />
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