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Cerveau & Psycho n°112 - juillet/août 2019

« C’est avec la logique que nous prouvons, et avec l’intuition que nous trouvons », disait le mathématicien Henri Poincaré. On ne saurait mieux dire les choses. L’intuition est cette reconnaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement : elle va droit au but, instantanément. Ce dossier le montre – joueurs d’échecs, footballeurs, médecins, peintres et même pompiers, tous prennent des décisions très rapides qui sont autant de solutions à des problèmes, de voies nouvelles et d’ouverture créatrices. Mais, comme nous l’explique le chercheur en sciences cognitives Sylvain Moutier, il faut ensuite prouver que l’intuition a vu juste, sous peine de graves faux pas. Alors oui, vous pouvez écouter votre instinct, mais prenez d’abord soin de l’éduquer à la sueur de votre front. Pour faire vôtre cette maxime de Thomas Edison : « Le génie, c’est 1 % d’inspiration et 99

« C’est avec la logique que nous prouvons, et avec l’intuition que nous trouvons », disait le mathématicien Henri Poincaré. On ne saurait mieux dire les choses. L’intuition est cette reconnaissance immédiate qui ne recourt pas au raisonnement : elle va droit au but, instantanément. Ce dossier le montre – joueurs d’échecs, footballeurs, médecins, peintres et même pompiers, tous prennent des décisions très rapides qui sont autant de solutions à des problèmes, de voies nouvelles et d’ouverture créatrices. Mais, comme nous l’explique le chercheur en sciences cognitives Sylvain Moutier, il faut ensuite prouver que l’intuition a vu juste, sous peine de graves faux pas. Alors oui, vous pouvez écouter votre instinct, mais prenez d’abord soin de l’éduquer à la sueur de votre front. Pour faire vôtre cette maxime de Thomas Edison : « Le génie, c’est 1 % d’inspiration et 99

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69<br />

L’ACTUALITÉ<br />

Le niveau en maths serait<br />

en chute libre : selon une<br />

récente étude de la<br />

Direction de l’évaluation,<br />

de la prospective et de la<br />

performance, les écoliers<br />

sont aujourd’hui bien moins<br />

capables qu’il y a trente ans<br />

de poser divisions<br />

et multiplications. En outre,<br />

le fossé entre les « bons » et<br />

les « mauvais » est immense.<br />

Ce qui crée un véritable<br />

problème de durabilité de<br />

notre système de formation.<br />

LA SCIENCE<br />

Aujourd’hui personne ne<br />

sait désigner de véritable<br />

explication à cette baisse.<br />

Les programmes en<br />

vigueur depuis une dizaine<br />

d’années ont moins mis<br />

l’accent sur les opérations<br />

arithmétiques, pour<br />

préparer les jeunes<br />

à d’autres enjeux dans<br />

un monde où le calcul<br />

mental pourrait être moins<br />

important. Mais cela<br />

ne suffit pas à expliquer<br />

une telle chute.<br />

L’AVENIR<br />

D’une certaine façon,<br />

se fixer pour objectif<br />

de réduire les inégalités<br />

pourrait être un bon<br />

moyen de sortir<br />

de l’impasse, en tirant<br />

tout le monde vers<br />

le haut. Et pour cela,<br />

le développement des<br />

sciences cognitives<br />

et des neurosciences ouvre<br />

une voie prometteuse,<br />

en montrant pourquoi et<br />

comment chaque cerveau<br />

peut devenir bon en maths.<br />

© Shutterstock.com/Mark Payne<br />

des élèves en mathématiques reste très dépendant<br />

du milieu social dont est issu l’élève, le poids<br />

des inégalités sociales dans la réussite scolaire<br />

étant persistant sur les trente dernières années.<br />

En somme, la France est le pays de l’OCDE dans<br />

lequel la relation entre le niveau des élèves et le<br />

milieu social dont ils sont issus est la plus forte.<br />

Comment expliquer ce constat alarmant ? À<br />

vrai dire, les facteurs à l’origine de cette diminution<br />

progressive des compétences en mathématiques<br />

restent mystérieux. C’est un problème qu’il<br />

faudra élucider. Rapidement, écartons tout de<br />

même deux explications abondamment relayées<br />

dans les médias et dans la société. Non le cerveau<br />

des enfants ne s’est pas transformé en l’espace de<br />

trente ans, et non, les enfants d’aujourd’hui ne<br />

sont pas moins intelligents que ceux d’hier. La<br />

découverte, pour la première fois depuis l’apparition<br />

des tests d’intelligence au début du<br />

xx e siècle, que les scores baissent dans ces tests<br />

(anti-effet Flynn) alors qu’ils avaient tendance à<br />

augmenter d’une génération à une autre (effet<br />

Flynn) ne signifie pas que les humains deviennent<br />

moins intelligents, mais bien que leur intelligence<br />

change. Et ce, essentiellement sous la pression<br />

d’un environnement qui s’est transformé en profondeur.<br />

C’est vrai dans notre vie quotidienne<br />

mais aussi à l’école. Les programmes scolaires ont<br />

évolué, la programmation pédagogique aussi. Ces<br />

deux facteurs, conjugués à un environnement<br />

dans lequel la puissance de calcul des ordinateurs<br />

est telle que le bien-fondé du calcul humain<br />

devient moins clair, sont sans doute pour partie<br />

responsables des difficultés rencontrées par les<br />

élèves de CM2 en mathématiques. Il faut toutefois<br />

bien garder à l’esprit que le classement de la<br />

France dans les études internationales Pisa est<br />

stable dans le temps, avec une très légère baisse<br />

de 10 points par rapport au dernier rapport qui<br />

n’est statistiquement pas significative : la France<br />

n’est donc pas en train de « décrocher » par comparaison<br />

aux autres états, et l’étude nationale<br />

menée par la Depp révèle en fait que l’enseignement<br />

ne met plus l’accent sur les mêmes compétences.<br />

En outre, d’autres capacités cognitives<br />

comme la maîtrise de soi (résister à des impulsions<br />

du moment, comme cela peut se mesurer<br />

dans le célèbre test du marshmallow, où un<br />

enfant doit résister à l’envie de manger une friandise<br />

tout de suite s’il veut en avoir deux plus tard)<br />

sont plutôt meilleures que par le passé. Ce qui<br />

s’est produit avec les résultats en mathématiques<br />

en France reste donc un véritable mystère, et tout<br />

n’est pas entièrement négatif, même s’il faudra<br />

N° 112 - Juillet-<strong>août</strong> <strong>2019</strong>

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