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Anne Kellens Aurore Chapuis Brian D. Cohen Bob De Groof Pablo Flaiszman LUCE Colette Cleeren Claire Hilgers Takako Hirano Amir Shabanipour Céline Excoffon Hello Dada Galerie Épreuve d’Artiste
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Aurore Chapuis
Brian D. Cohen
Bob De Groof
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Amir Shabanipour
Céline Excoffon
Hello Dada
Galerie Épreuve d’Artiste
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Bob De Groof
Le cœur est humain dans la mesure
où il se révolte.
Georges Bataille
Élodie Lélu, historienne d’art et réalisatrice
qui a fait le documentaire sur Bob De Groof
sous le titre Deuxième chance, commence
son texte d’une précédente expo par les mots :
« S’immerger dans ». Difficile de trouver un
meilleur début…
En regardant les linos, on est immédiatement
aspiré dans un univers de chaos et d’angoisses.
Mort, destruction, sexe, danses macabres…
comme si le spectateur suivait une bande de
brutes sanguinaires des grandes compagnies
sortie tout droit de la guerre de Cent Ans avec,
en plus, le ricanement sardonique de l’artiste…
Hélas, il s’agit bien de notre réalité quotidienne…
notre histoire étant une longue succession de
morts et dévastations.
La Guerre civile anglaise du XII e siècle,
les guerres de Quatre-Vingts et Cent Ans,
les Première et Seconde guerres mondiales,
sans oublier tous les conflits intermédiaires,
en ne parlant que de nos régions... Aujourd’hui,
les mêmes images refont surface à Alep,
au Soudan, au Yémen, en Afghanistan, etc.
Les bouchers ne s’appellent plus Guillaume
d’Ypres ou Arnaud de Cervole, l’Archiprêtre,
mais bien Assad, Daesh, Boko Haram… Seules
les armes sont devenues encore plus efficaces,
plus mortelles… En revanche, la cruauté et la
bêtise de l’homme restent inchangées. C’est ce
qu’ont voulu exprimer Saïd Mohamed et Bob
De Groof dans Le Vin des crapauds. Il y en a
qui changent l’eau en vin, mais il y a aussi des
crapauds qui font passer leur bave pour du
vin. Cruauté fallacieuse et impitoyable. C’est
un texte apocalyptique, ce sont des figures
apocalyptiques.
En 1995, Saïd Mohamed et Bob De Groof
se rencontrent par l’intermédiaire du poète
récemment disparu Jacques Izoard. Ils
collaborent au modeste journal underground
Kitoko Jungle Magazine édité à Vilvorde.
De cette rencontre naît également une première
version du Vin des crapauds, illustrée par le
peintre, dessinateur et graveur belgo-libanais
Fatmir Limani. Cette première version est publiée
par Jacques Morin dans la revue Polder.
L’idée d’illustrer Le Vin des crapauds par
les dessins de Bob existait déjà à l’époque.
Ce vin a dû pourrir pendant vingt-deux ans
avant de voir le jour. Le texte devient images.
Et quelles images…
Il s’agit souvent de personnages de bandes
dessinées, destinés à divertir jeunes et vieux.
Le genre qui ne sert pas à faire peur, et
pourtant… Bob De Groof inverse très souvent
les conventions. Un procédé bien connu qu’on
retrouve chez Bosch, Bruegel et Ensor, pour ne
nommer que les plus connus et qui ne sont pas
par hasard une importante source d’inspiration.
Ces personnages ont l’air comiques, mais ne le
sont en aucun cas. Ils sont le pur produit d’une
société qui a érigé le plaisir en idéologie. Un
plaisir doit cacher la dure réalité.
La Société du spectacle, comme l’appellent
les situationnistes.
Bob De Groof est peintre, collagiste, graveur-imprimeur
et photographe. Il a fait des assemblages, installations,
du street art, et a sculpté des totems.
Des expositions de ses œuvres ont eu lieu en Belgique,
en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et aux États-
Unis. Au fil des années, il a exposé une quarantaine de
fois individuellement et a participé à une cinquantaine
d’expositions de groupe. Ses travaux se trouvent entre
autres dans des collections de pays aussi divers que
les États-Unis, la Russie et le Maroc.
Pendant leur collaboration respective au Kitoko Jungle
Magazine, il a fait la connaissance de Saïd Mohamed. Plus
récemment, tous deux ont décidé de réaliser un vieux rêve :
la réédition et l’illustration du poème apocalyptique
Le Vin des crapauds, écrit par Saïd Mohamed.
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