Yoga 32

À
GAGNER
3 panoplies
de yoga
Yogom
SANTÉ
Du yoga prescrit
par les médecins
9
postures pour
atteindre la
zénitude
RAJSHREE
PATEL
« Il faut
apprendre
à recharger
ses batteries. »
Amour,
espoir et yoga
aux camps
de réfugiés
de Lesbos
BEL/LUX : 6,90€ - DOM/S : 6,90€ - CAL/S : 750 CFP - POL/S : 800 CFP - CH : 9,9 FS - CAN : 12,50 $CAD - ESP/ITA/GR/PORT : 6,90€ - MAR : 67 MAD -TUN : 9,9 TND
Abondance
Il y en a pour tout le monde
JUILLET-AOÛT
2020 - N O 32
L 18873 - 32 - F: 5,90 € - RD

Rajshree Patel
« Tout
est possible,
dès lors que nous
nous ouvrons
à cette idée. »
14 Ce
RAJSHREE PATEL est experte en énergie vitale.
Indispensable, quand on arpente le globe de conférence en workshop !
sentiment d’infinies possibilités est, dit-elle, ce qui fait sa force aujourd’hui.
4 yoga magazine

SOMMAIRE
30 Bonjour, zénitude
Neuf postures
pour prendre du recul
et s’ancrer.
40 De l’espoir à Lesbos
Aux camps de réfugiés
de Lesbos, c’est de
l’union que naît l’espoir.
60 Mythologie
S’inspirer
de Sarasvati,
déesse de la sagesse.
90 Recettes ayurvédiques
Trois assiettes
légères, rafraîchissantes
et colorées.
PHOTOGRAPHIE Petra Hoogerbrug MODÈLE Evelien Nederhoed STYLISME Inge Holkenborg
VÊTEMENTS Noisy May (blouse), Iloveyoga.nl (top et pantalon)
8 WHAT’S UP
De la Dordogne à Los Angeles
en passant par votre salon, toute
l’actu de la planète yoga.
22 L’EMPRISE DU MAÎTRE
Comment distinguer une relation
maître-élève saine d’un rapport
d’emprise malsain ?
38 INTERVIEW : MAI HUA
La réalisatrice partage
des histoires aussi intimes
qu’universelles.
50 UN MONDE MEILLEUR
À Nantes, les médecins
prescrivent du yoga pour les
douloureux chroniques.
À
GAGNER
3 panoplies
de yoga
Yogom
52 SANTÉ, UNE APPROCHE
HOLISTIQUE
Rencontre avec Daniel Kieffer, le
fondateur du CENATHO, l’école
de la santé holistique.
56 DIS-MOI
QUI EST TON GOUROU...
Une professeure raconte sa
rencontre avec son maître,
Manshuk Patel.
64 BUDOKON YOGA
Une série à mi-chemin entre
le yoga et les arts martiaux.
72 UNE ABONDANCE
INSOUPÇONNÉE
Cinq récits de yogis confinés
qui ont trouvé de l’espace
dans la pratique.
Pour tenter votre
chance, c’est
page 28
76 YOGA WEB TOUR
Comment choisir entre les applis,
les lives et les plateformes ?
Suivez le guide !
78 IMAGINE...
Un monde où nous prendrions
(vraiment) soin de la Terre.
96 YOG’ASTRES
Un modèle s’effondre, un autre
s’invente... Que nous disent
les étoiles pour cet été ?
Et aussi...
2 Édito : Se contenter
6 Inspiration : se (re)connecter à la Terre
48 et 88 Vos offres d’abonnement
83 et 85 Shopping estival
86 Yoga spirit : à lire, à voir, à écouter...
89 Comment faire : Ardha Bhekasana.
EN COUVERTURE
yoga magazine 5

C’est comme si,
au fond, nous
recherchions
tous un contact
authentique
avec la Terre.
6 yoga magazine

INSPIRATION
Se connecter à l’énergie
de la TERRE
TEXTE Maartje Verhoeven
PHOTOGRAPHIE Karin van Til
Marcher pieds nus dans l’herbe procure un sentiment de liberté…
et la joie de sentir que la Terre nous les masse gentiment ! En
effet, cette pratique simple nous aide à nous enraciner, au sens
propre comme au figuré. On ressent une profonde détente et
un meilleur contact avec notre propre corps. Aujourd’hui, il est
de plus en plus courant de croiser des personnes qui marchent pieds nus en
pleine nature. Dans notre société majoritairement urbaine et notre mode de vie
hypercérébral, les besoins de contact authentique avec la Terre et d’ancrage
sont exacerbés. À part marcher pieds nus dans l’herbe, que peut-on faire d’autre
pour s’enraciner ? Clint Ober, pionnier du grounding – l’art de se connecter à la
Terre –, a créé le concept de earthing au début des années 1990. C’est à cette
même époque que l’on a obtenu les premières preuves scientifiques de l’action
positive du contact avec la Terre sur la physiologie et la santé de l’être humain.
Clint Ober a grandi parmi les Indiens d’Amérique. Lorsqu’il était enfant et qu’il
jouait dans un tipi avec ses amis, les mamans avaient coutume de dire : « Retirez
vos chaussures, elles vont vous rendre malades. »
Le grounding ou earthing consiste tout simplement à poser ses pieds nus sur
le sol. « Vos pieds absorbent la charge électromagnétique de la Terre », explique
le cardiologue Stephen Sinatra dans un documentaire consacré à cette pratique.
Notre organisme est une sorte de pile électrique, et il a besoin de se recharger
en énergie terrestre afin de mener à bien les différents processus biologiques
nécessaires à son fonctionnement. La connexion à la Terre diminue le stress,
et ce n’est pas tout : une vingtaine d’études confirment que cette énergie
bienfaisante contribue également à apaiser les inflammations, responsables
de nombreuses maladies.
Cette approche a inspiré la professeure de yoga américaine Silvia Neri, qui a
imaginé le Earthing Yoga. « Autrefois, le yoga nous permettait encore de nous
enraciner, explique-t-elle. Mais aujourd’hui, le yoga moderne se pratique dans
un espace confiné, sur un revêtement de sol ou un tapis en caoutchouc. Tout cela
nous sépare de la Terre. » Le Earthing Yoga se pratique donc en plein air, pieds
et mains nus, à même le sol. Cela permet à l’énergie tellurique de remonter dans
notre corps et de le recharger littéralement, contribuant ainsi à l’équilibre de
notre santé. Cette pratique aide également à entrer en contact avec soi-même.
Tout cela est si simple, si élémentaire, si logique. Alors, rendez-vous dans un
parc, déchaussez-vous, et root down to lift up (“Enracinez-vous afin de vous
élever”) grâce à vos petits petons dénudés !
Découvrez le Earthing Yoga en vidéo sur yoga-magazine.fr
yoga magazine 7

14 yoga magazine

PORTRAIT
« La VIE
QUOTIDIENNE
exige beaucoup
de nous »
Être chaque jour rayonnant et en pleine forme ? Selon la professeure
de yoga et enseignante spirituelle RAJSHREE PATEL, le plus important
est de veiller à recharger suffisamment ses batteries. « La solution,
ce n’est pas d’en faire moins, mais plutôt de créer davantage d’énergie. »
TEXTE Marlies Kieft PHOTOGRAPHIES Harold Pereira STYLISME Nicole de Werk
MAQUILLAGE Marvin Lumoneka VÊTEMENTS Biek Rotterdam TAPIS elramlahamra.nl
yoga magazine 15

À
GAGNER !
3 PANOPLIES
DE YOGA
YOGOM
Tentez de remporter
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• 1 gourde isotherme blanche 75 cl
• 1 brique en liège fabriquée au Portugal
• 1 masque d'épeautre bio pour les yeux
• 1 sangle d'étirements
• 1 sangle porte-tapis de yoga
• 1 eau de yoga naturelle pour nettoyer
le tapis et parfumer vos pratiques
Valeur : 150 €

JEU-CONCOURS
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Yogom
Yogom est une marque française de matériel de yoga écoresponsable créée
par l’entrepreneuse Mathilde Corbin en 2016. Ses produits yoga et bien-être
sont tous conçus avec sens et bienveillance.
Yogom est la fusion du mot YOGA et du mantra
hindou OM, mais GOM signifie aussi « méditer »
en tibétain…
Tous les produits de la gamme sont conçus pour
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de tapis de yoga différents au design et aux
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Règlement sur le site

30 yoga magazine

SÉRIE
Bonjour,
zénitude !
9 postures contre le surmenage quotidien
PHOTOGRAPHIES Hanke Arkenbout STYLISME Annemieke Paarlberg MAQUILLAGE Ronald Huizinga
VÊTEMENTS Yogasway.nl, ILU fitwear AVEC NOS REMERCIEMENTS À Seazetheday.nl
Après la période de confinement, le retour à
la vie normale, tous ces stimuli, cette frénésie
– notre mode de vie moderne – nous ont paru
encore plus intenses… Cela n’est bon ni
pour notre tranquillité d’esprit ni pour notre
corps. La professeure de yoga américaine
LAURA BURKHART nous explique comment
rester zen au quotidien, grâce à des
postures qui ancrent et qui renforcent.
nous fassions régulièrement du yoga ou non,
la plupart d’entre nous ont des vies bien remplies,
au rythme de plus en plus effréné. Et les yogis
«Que
n’échappent pas à la règle. Même moi, qui suis
professeure de yoga, je n’y coupe pas. Nos
modes de vie surstimulent nos cerveaux, la faute aux ordinateurs,
portables, réseaux sociaux, à notre travail, nos enfants… Et sur le plan
physique, les longues heures de sédentarité assis devant un ordinateur
engendrent un affaissement des épaules, et une crispation – ou juste
un affaiblissement – des muscles fessiers et des ischio-jambiers
ainsi que des hanches et du périnée.
À la longue, l’hyperextension des muscles peut provoquer des
blessures. Charles King, kinésithérapeute américain, affirme que
les débutants se blessent moins en faisant du yoga que ceux qui le
pratiquent depuis longtemps. Pourquoi ? Parce que ces derniers ont
tendance à étirer l’arrière de leur corps sans développer d’abord des
muscles ischio-jambiers et fessiers puissants.
Moi-même, je souffre d’une tendinite et d’une déchirure du labrum
– le cartilage qui entoure les articulations de la hanche. En effet,
pendant des années, j’ai pratiqué des asanas qui étirent tout le corps,
sans faire, en parallèle, des exercices qui le renforcent. Il est important
de faire les deux. Les postures simples qui suivent vous aideront à
traverser la vie avec plus de force et de stabilité. »
yoga magazine 31

40 yoga magazine

VOYAGE
De l’espoir
À LESBOS
Notre journaliste est partie faire du bénévolat
dans deux camps de réfugiés à Lesbos en Grèce,
où elle s’attendait à être confrontée à beaucoup
de misère. Ce fut le cas, mais elle y a aussi
trouvé de l’amour, de l’espoir et de la dignité.
TEXTE Heleen Peverelli PHOTOGRAPHIES Bonnita Postma
«Good morning, subagèr ! » dis-je à la petite
fille dans l’encadrement de la porte.
Elle tend les mains pour prendre un régime
de bananes. Je suis très fière de savoir
utiliser le mot persan – ce n’est que
maintenant que je réalise qu’il s’écrit Sobh bekheyr –
avec lequel je salue les gens du quartier, une trentaine
de familles afghanes, qui vivent dans des containers
transformés en maison. Je leur apporte des bananes,
du pain et un fromage à pâte cuite pour le petit déjeuner.
Ainsi qu’un peu de chaleur humaine.
Car, comme me l’a indiqué l’association Because We Carry,
nous sommes aussi là pour préserver la dignité des gens.
Nous prenons donc notre temps, les regardons dans les
yeux et plaisantons avec eux, malgré la barrière de la langue.
C’est agréable lorsque nous parvenons à établir un
yoga magazine 41

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Faire partie
du VIVANT
Fondateur du Collège
européen de naturopathie
traditionnelle holistique
(Cenatho), DANIEL KIEFFER
défend une naturopathie
holistique, donc spirituelle.
Il partage avec nous sa vision
généreuse et optimiste de
la vie et de l’homme en santé.
La naturopathie que vous
enseignez est empreinte de
spiritualité. Qu’est-ce que la
spiritualité a à voir avec la
guérison ?
Elle est l’identité même de l’être
humain, son essence. Dans toutes
les grandes cultures et médecines du
monde, on a intégré la dimension de
la vie intérieure, de la transcendance.
La quête de sens et la spiritualité
complètent l’édifice humain,
la pyramide humaine dans ses réalités
physiologiques, énergétiques,
émotionnelles, mentales, sociales et
environnementales. Si l’on prive l’être
humain de sa dimension spirituelle, c’est
comme si on le mutilait véritablement
de son essence. Que ce soit sa capacité
de se relier au centre (conception de
l’immanence ou reliance à l’intériorité)
ou celle à se hisser vers le Grand Tout
(conception de la transcendance). Mais
le haut rejoint le bas et la différence est
faible entre chercher l’absolu très haut
ou à l’intérieur de soi : les deux voies
sont justes et comblent les spiritualistes
d’Orient et d’Occident depuis des
millénaires.
Vous avez écrit sur des sujets
très divers, en apparence
du moins : cures de détox,
revitalisation, chakras, parfums,
encens, pardon… Mais alors,
qu’est-ce que la naturopathie,
52 yoga magazine

MOTS D’EXPERT
PROPOS RECUEILLIS PAR Céline Dupuy PHOTOGRAPHIES Cenatho
qu’est-ce qui relie toutes ces
techniques ?
La naturopathie demeure l’art et
la science de rester en santé, de
recouvrer la santé par des moyens
naturels, par une hygiène de
vie la plus impeccable possible,
c’est-à-dire la plus en phase avec la
biologie, les lois de la vie. Ce n’est
pas une mode, ou la création d’un
cerveau original qui aurait trouvé
un nouveau moyen de guérir. Il y a
surtout le respect et l’attention dus
à la nature, à la physiologie humaine
ainsi qu’à la biologie, puis leurs
applications à l’hygiène de vie et
aux comportements de la personne.
Certes, dans une naturopathie non
holistique – qui ne prendrait en
compte que la partie corporelle –, on
aurait beaucoup moins de techniques,
beaucoup moins de prétentions.
Il suffirait d’un bon régime, des
exercices, de surveiller ses éliminations
naturelles… Par contre, quand on
prend en compte les dimensions
énergétique, psychologique, voire
spirituelle, cela démultiplie les axes
de travail, mais c’est la seule façon
profondément honnête de respecter
la vie et l’être humain.
On parle de plus en plus de
santé holistique ainsi que de
médecine intégrative : est-ce la
même chose ?
L’approche holistique est une lecture
de l’être humain multidimensionnel.
Un être humain est comme
une poupée russe avec sept
plans d’existence absolument
indissociables : physique, énergétique,
émotionnel, mental et spirituel, puis,
dans sa relation aux autres, le plan
socioculturel et dans sa relation à son
milieu de vie, le plan environnemental.
Une bonne pédagogie serait de
faire prendre conscience aux enfants
qu’ils habitent différents plans, et
pas seulement le plan physique. Il
y a ainsi des causes de pathologies
pour ces différents plans ainsi que
des outils de guérison. En santé
holistique, on prend en compte tous
les plans du client dès le premier
bilan, jusqu’aux cures et aux conseils.
Quant à la dimension intégrative,
elle est très proche et désigne une
réconciliation entre l’approche
classique de la médecine allopathique
(majoritaire, institutionnelle) et la
psychologie, la naturopathie, le
yoga, le magnétisme par exemple…
Certains pays du monde ont mis en
place cette approche partenariale,
respectueuse et très efficace. On la
retrouve aujourd’hui dans 21 États
américains, en Australie, Nouvelle-
Zélande ou Inde qui, depuis 2014,
s’est dotée d’un ministère des
Médecines traditionnelles incluant le
yoga, l’ayurvéda, l’homéopathie et
L’iridologie participe
à la compréhension
de l’équilibre de
santé du client.
la naturopathie. En Chine, dans les
hôpitaux, on partage les diagnostics
des médecins traditionnels chinois
avec ceux des allopathes. Cela
commence à se faire aussi en Suisse,
en Grande-Bretagne, en Allemagne...
En France, il y a beaucoup de
résistance car le pouvoir en place
comprend mal notre profession.
D’autre part, les naturopathes ne sont
pas “vendeurs” de médicaments,
mais invitent à devenir plus
responsables, plus autonomes, de
meilleurs consom’acteurs plutôt que
des consommateurs.
Le yoga, la respiration, la
méditation font partie des
techniques corporelles et
de relaxation proposées en
naturopathie. Comment le yoga
s’articule-t-il avec la santé ?
J’ai très vite pris conscience
des nombreuses analogies entre
les deux approches. À l’origine,
yoga magazine 53

Écoutez votre
(propre) sagesse
Le divorce existait déjà chez les
divinités hindoues. Le féminisme
aussi – personnifié par la déesse
Sarasvati, qui refusait d’être
reléguée aux fourneaux et voulait
faire des études. La position des
mains Jnana mudra nous rappelle
qu’il existe une Sarasvati en chacun
de nous (même les hommes), qui
nous permet d’accéder à notre force
et à notre sagesse intérieures.
TEXTE Irina Verwer
PHOTOGRAPHIE www.christinelovehewitt.com
Au commencement, bien avant que notre
monde ne soit créé, régnait le chaos. Le
dieu Brahma errait, irrésolu et perdu, dans
cet océan de désordre infini. Il ne savait
pas du tout comment donner du sens à
tout cela. Cette question le turlupinait tant que, puisque
personne d’autre que lui n’existait, il se demanda conseil
à lui-même. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’une voix
féminine se fit soudain entendre, au plus profond de
lui, et lui dit : « Ce n’est que par le savoir et la sagesse
que tu pourras agir avec créativité. » Alors que Brahma
se demandait d’où venait cette voix féminine, il sentit
quelque chose lui chatouiller le palais – quelque chose qui
ressemblait fortement à un cheveu humain. Il entrouvrit les
lèvres et… une femme à la longue et épaisse chevelure
sortit de sa bouche. Elle se présenta sous le nom de
Sarasvati, déesse de la sagesse, de la perspicacité, du
son et du langage. Elle était accompagnée d’un cygne
et tenait à la main un instrument qu’elle appelait vina.
Assise sur son cygne et jouant de sa vina, elle chantait
60 yoga magazine

MYTHOLOGIE
Le mot de la professeure de yoga
Corrie Ananda Preece
« Cette photo a été prise à Srirangapatna,
aux portes de Mysore. J’y pratique le Yoga
Ashtanga en compagnie de mon professeur,
Sharath Jois. Je conclus ma pratique
quotidienne avec ce mudra. Il symbolise
le lien entre l’individu et l’univers, et nous
rappelle que nous sommes tous liés. »
yoga magazine 61

TEXTE Christel Jansen
PHOTOGRAPHIES Hanke Arkenbout
MODÈLE Ronald van Pijkeren, rumahyoga.nl
STYLISME Annemieke Paarlberg
MAQUILLAGE Clayton Leslie
VÊTEMENTS yogasway.nl, tapis : rozenkelim.nl/showroom
64 yoga magazine

SÉRIE
Budokon yoga
Le silence
intérieur
Accéder à la maîtrise parfaite
de ses mouvements, tel un chat
ou un guerrier se déplaçant à
pas feutrés : voilà ce que nous
enseigne le Budokon. Cette forme
de yoga moderne, influencée par
les arts martiaux, nous apprend
à bouger de manière souple,
fluide et sans effort. Le professeur
néerlandais Ronald van Pijkeren
témoigne : « Pour moi, c’est une
danse méditative qui fait le silence
dans ma tête. »
Le Budokon yoga nous vient des États-Unis.
Il a été créé par Cameron Shayne, le père
des Mixed Movements Arts. Yogi et adepte
assidu des arts martiaux, il a réalisé que ces
deux disciplines se complétaient très bien,
et a ainsi créé sa propre version mixte : le Budokon,
c’est-à-dire “la voie du guerrier spirituel” en japonais.
On ne trouvera pas d’étirements intenses dans le
Budokon tels que le grand écart, par exemple, mais
d’autres défis intéressants comme l’animal locomotion
(“démarches d’animaux”) où il s’agit de sauter comme
un singe ou d’avancer à pas feutrés tel un chat.
Ronald van Pijkeren enseigne cette forme de yoga à
Amsterdam. Pour lui, ce mélange de yoga et d’arts
martiaux représente bien plus qu’un simple effort
physique : « C’est surtout une manière d’apprendre
à se connaître. Nous appelons ça mind science, ou
“science de l’esprit” – autrement dit, une version
revisitée de la philosophie yogique ancestrale. En
plus des sutras de Patanjali, nous faisons aussi appel
à diverses études neurologiques portant sur le
fonctionnement du cerveau, mais aussi aux principes
de l’alimentation saine et à des stratégies pour faire
face à l’adversité. »
Le travail du corps reste le point de départ de
cette pratique car notre corps – mais aussi notre
esprit – est constamment en mouvement. On entre
donc en “lutte” avec son esprit, qui pense toujours en
termes d’opposés. On retrouve aussi l’influence des
arts martiaux, car l’on bouge de manière contrôlée
et ciblée, tel un guerrier marchant en tapinois. La
Première Série travaille sur la transition, le passage
d’une posture à l’autre, et non sur la tenue des
postures. La lenteur des mouvements fait que l’on
utilise sa force d’une autre manière. On détecte plus
aisément les moments où l’équilibre vacille. Une
fois la série maîtrisée, on pourra plus facilement se
concentrer sur le ressenti de chaque mouvement.
Pas-à-pas
Le Budokon possède, comme le Yoga Ashtanga,
une Première Série pour les débutants, ainsi
qu’une série avancée. La Première se divise en
sept sections qui se pratiquent d’une seule traite.
Dans les pages qui suivent, vous trouverez la
deuxième section de la série de l’Archer : l’esprit
divisé. Ici, le Guerrier entre en lutte contre son
ennemi intérieur : l’esprit scindé. Une fois que vous
maîtrisez les postures, pratiquez-les l’une après
l’autre, comme une danse au ralenti. Faites d’abord
tout à droite, et ensuite tout à gauche. Le flux
respiratoire correct viendra naturellement : il n’y a
donc pas d’instructions spécifiques pour le souffle.
yoga magazine 65

Une abondance
insoupçonnée
AU PRINTEMPS, YOGIS ET MÉDITANTS ONT DÉCOUVERT
UNE NOUVELLE FACETTE DE LEUR PRATIQUE, EN CONSTRUISANT
DANS L’ENFERMEMENT IMPOSÉ UN ESPACE DE LIBERTÉ
ET DE CONNEXION. TÉMOIGNAGES.
TEXTE Clémentine Kœnig ILLUSTRATIONS Shutterstock
La vidéo a fait le tour du monde, relayée
par le quotidien espagnol El Pais, puis
partagée par des milliers d’anonymes.
On y voit une douzaine de soignants
et soignantes en blouses bleues et
vertes, gants, charlottes et masques, entonner
un mantra : « ek ong kar sat nam siri wahe guru ».
Leurs yeux sont fermés, leurs visages fatigués,
impassibles, concentrés. On imagine à quel point
ce moment hors du temps résonne profondément,
pour ces hommes et ces femmes adossés contre
les murs d’un couloir d’hôpital – un court instant
de répit au milieu de la folie du coronavirus.
La vidéo d’une minute à peine, tournée à l’hôpital
d’Alcorcon à Madrid, a fait plus de 55 000 vues sur
le seul compte Instagram de Lili Barbery-Coulon.
La professeure de Yoga Kundalini a elle aussi, à
sa manière, construit un espace de réconfort tout
au long du confinement, pour la plus grande joie
de sa communauté : chaque soir, à 18 heures, ils
étaient des dizaines de milliers à se connecter à
ses méditations live. « Je partage sur Instagram
des outils magnifiques qui libèrent, guérissent et
déploient l’amour de soi et des autres, écrit-elle
sous la vidéo. Je sais bien que cela paraît farfelu
et même risible de chanter des mantras, de faire
72 yoga magazine

TÉMOIGNAGES
des gestes bizarres avec ses bras ou sa colonne
vertébrale. Mais je sais que cette technologie
fonctionne. Qu’elle transforme. Réconforte.
Sécurise. Alchimise. Voir des soignants dans un
hôpital s’approprier ces outils me bouleverse. »
On a beaucoup parlé, dès le mois de mars, de la
pression de planifier ses journées, de “profiter”
du confinement pour faire du sport et préparer
son summer body – faisant du yoga un outil
de productivité comme un autre, la mécanique
habituelle des réseaux sociaux alimentant cette
triste pression sociale. Mais pour beaucoup,
l’expérience fut – heureusement – tout autre :
dans la douceur de la pratique s’est dessiné un
espace salvateur de liberté et de connexion.
Un moyen de gérer ses angoisses et de nouer
une nouvelle relation au temps et à soi. En
témoignent Noémi, Arnaud, Léa, Louis et
Camille : cinq histoires qui donnent le sourire et
rappellent qu’en toute situation, nous avons le
pouvoir de transformer notre propre réalité.
« JE N’AVAIS QUE ÇA À FAIRE : M’ÉCOUTER »
Au premier jour du confinement, Noémi, 52 ans,
est déjà enfermée chez elle depuis deux mois.
Restée seule pour se remettre d’une lourde
opération, elle redécouvre doucement son corps.
« En sortant de l’hosto, je m’étais dit : “Chouette,
je vais enfin avoir une bulle pour bouquiner,
être tranquille…” Mais de janvier à mars, j’ai
beaucoup souffert. J’étais très handicapée, j’étais
mal dans mon corps, j’étais dans la douleur. Donc
je n’ai absolument pas profité de ce temps dont
je rêvais depuis 25 ans ! Une fois que je n’ai plus
eu mal, j’ai compris que le moment était venu,
pour la première fois de ma vie, de ne faire que
ce que j’aimais. » Noémi, ancienne sociologue
en reconversion, a deux passions : la céramique
et le yoga. Ce temps d’enfermement imposé,
qu’elle a vécu complètement seule, a été pour
elle l’occasion de tenter une expérience inédite :
faire du yoga tous les jours. Si elle pratiquait
en studio trois fois par semaine auparavant
– mais jamais seule : « la flemme ! » – ses
problèmes de santé l’ont obligée à appuyer sur
pause dès novembre 2019. Mais au printemps,
« tous les ingrédients étaient réunis pour faire
l’expérience du vide total. J’étais au chômage,
sans perspective. Aucune structure ne m’attendait
le 11 mai. Rien ne me forçait à me lever le
matin. C’était parfois un peu vertigineux, un peu
cafardeux. Mais je trouvais que le yoga avait
toute sa place dans cette expérience : c’était l’ici
et le maintenant total. Le yoga correspondait à
l’état dans lequel j’étais. Et très vite, c’est devenu
la seule chose que je m’imposais tous les jours
– sans vraiment me l’imposer, puisque j’en avais
envie. J’ai commencé tout doux, je choisissais des
cours selon mon état. Je n’avais que ça à faire :
m’écouter. »
Arnaud, 27 ans, garçon de café, fait part d’une
expérience similaire : touché par le chômage
technique, il dit avoir trouvé une forme de
réconfort dans la routine : « Avec ma copine, on
faisait du yoga tous les matins, je m’occupais du
déjeuner à midi, et on faisait du sport le soir. Faire
la Salutation au Soleil tous les matins permet de
Le masque et le mantra
Que signifiait le mantra chanté par le personnel de
l’hôpital d’Alcorcon ? “Ek ong kar sat nam siri wahe
guru” est un mantra connu des adeptes de Kundalini.
On l’appelle aussi le morning call, car il est chanté au
début de la sadhana du matin. Les paroles signifient :
“Le créateur et la création ne font qu’un. C’est notre
véritable identité. Cette sagesse dépasse tous les mots
et apporte une félicité infinie”. Écoutez la version de
Snatam Kaur pour un moment de pure sérénité !
yoga magazine 73

78 yoga magazine

IMAGINE
Imagine...
un monde où nous
prendrions soin
de la Terre
TEXTE Pauline Bijster ILLUSTRATIONS Behzad Ghaffarian/Unsplash
Selon la philosophie du yoga,
il ne faut pas tuer d’êtres vivants
ni voler les biens d’autrui.
Pourquoi cela ne s’appliqueraitil
pas également à la Terre ?
Pourtant, aujourd’hui, les
activités humaines continuent
de détruire les écosystèmes
et de décimer la faune. C’est
terrible, mais au lieu de se
lamenter, réfléchissons plutôt
aux nombreuses petites choses
que nous pouvons faire pour
prendre soin des plantes et des
animaux. Chacun peut apporter
sa contribution – comme le
colibri. Ainsi, un mini-jardin ou
un simple balcon aident à rendre
le monde un peu plus vert.
Laisser fleurir
toutes les espèces
« J’ai longtemps habité à Paris et
j’ai toujours planté des fleurs et des
arbustes sur mes balconnets, laissant
les “mauvaises” (quel drôle de nom !)
herbes prospérer dans les pots.
J’ai remarqué que cela protégeait
la terre et les racines de mes plantes.
Maintenant que j’ai la chance d’avoir
un petit jardin, je laisse également
pousser toutes les herbes et fleurs
sauvages : boutons d’or, pâquerettes
et autres plantes inconnues. J’adore
son petit côté indompté mais cela
surprend mes visiteurs qui me
demandent souvent si je vais bientôt
tondre. Il est envahi de limaces,
bourdons, abeilles, papillons mais aussi
d’une multitude d’oiseaux qui viennent
se régaler. Leurs trilles et pépiements
sont un vrai délice pour les oreilles. »
Céline, rédactrice en chef
yoga magazine 79

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