COLLECT Belgique Mai 2022
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« La bande dessinée<br />
est le seul art où<br />
des pièces muséales<br />
se trouvent<br />
encore chez des<br />
collectionneurs. »<br />
ALAIN HUBERTY<br />
UNE OFFRE TRÈS FERMÉE<br />
La BD demeure un marché de niche.<br />
« Lorsque j’ai commencé ma galerie en<br />
1986, on le qualifiait de marché de bulle.<br />
Même avec l’arrivée de nouveaux acheteurs,<br />
cela n’a pas changé. On est peu à s’en<br />
occuper, mais cela marche bien », se réjouit<br />
Thierry Goossens, expert en planches<br />
et dessins originaux chez Millon. En<br />
quinze ans, le groupe qui se pose comme<br />
un des acteurs incontournables du marché<br />
du Neuvième Art en France et en <strong>Belgique</strong>,<br />
recense 60 millions d’euros adjugés<br />
et plus de trente records. Sa dernière vente<br />
annuelle, en mars <strong>2022</strong>, a totalisé 920.000<br />
euros et 96 % de lots vendus. « C’est<br />
un marché qui évolue bien et qui peut<br />
atteindre des prix extraordinaires pour les<br />
pièces exceptionnelles. Le plus compliqué,<br />
c’est de trouver des belles pièces, pas de les<br />
vendre », précise Arnaud de Partz, directeur-général<br />
de Millon <strong>Belgique</strong>. Quand<br />
on aborde le marché de la BD, il y a Hergé<br />
et puis les autres. Ainsi, le dessin à l’encre<br />
de Chine réalisé pour la couverture initiale<br />
de l’album de Tintin, Le Lotus Bleu (1936),<br />
était adjugé 2,6 millions d’euros en janvier<br />
2021 lors d’une vente chez Artcurial, un<br />
record absolu pour la BD franco-belge qui<br />
s’explique par la rareté des pièces disponibles<br />
ainsi que par le statut de l’auteur du<br />
reporter à la houppe. « C’est un marché<br />
très sélectif, où les grands auteurs sont<br />
les plus demandés et certains lots partent<br />
Frank Frazetta, Egyptian Queen, 1969, peinture originale. Heritage Auctions, Dallas, 16-05-2019. © Heritage<br />
Auctions 5.400.000 $ (4.820.000 €) – record mondial<br />
plus vite que d’autres », note Eric Leroy, expert<br />
chez Artcurial. Les belles pièces sont<br />
rares. Pour une planche de Franquin, si on<br />
a de la chance, il faudra débourser entre<br />
40.000 et 100.000 euros, pour un planche<br />
d’Uderzo entre 150.000 et 200.000 euros,<br />
pour Asterix ou encore Enki Bilal, le mieux<br />
côté des auteurs vivants, entre 50.000<br />
et 100.000 euros la planche. La bande<br />
dessinée est un marché où l’offre est très<br />
fermée. De nombreuses œuvres sont protégées<br />
par des fondations qui verrouillent<br />
la sortie des planches, comme pour Hergé,<br />
E. P. Jacobs ou Jean Graton. Pour d’autres, il<br />
s’agit des ayant-droits, comme dans le cas<br />
de Franquin, Morris ou Peyo. Toutefois,<br />
des trésors peuvent toujours apparaître<br />
sur le marché lorsque des collections sont<br />
mises en vente. « La bande dessinée est le<br />
seul art où des pièces muséales se trouvent<br />
encore chez des collectionneurs. Il y a une<br />
vingtaine d’années, les musées ne s’y intéressaient<br />
pas encore», observe ainsi Alain<br />
Huberty de la Galerie Huberty & Breyne.<br />
MATURITÉ ET DIVERSIFICATION<br />
Aujourd’hui, la bande dessinée est devenue<br />
plus mature. C’est un acteur majeur de l’édition,<br />
il y a des musées, des fondations et des<br />
expositions. Ce ne sont plus des histoires<br />
pour enfants qu’on lisait parfois en cachette.<br />
« Il y a vingt ans, toutes les planches d’un<br />
même auteur valaient la même chose.<br />
Aujourd’hui, suivant qu’il y a de l’action ou<br />
des dialogues, si le personnage principal<br />
apparaît ou non, elles n’auront pas la même<br />
cote. Et quand un auteur vend pour la première<br />
fois, il a intérêt à ce que cela se vende<br />
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