Livre "Les tramways de Julien DULAIT"

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Le Tramway Électrique d’Ostende-Littoral (TEOL)
De prestigieux fondateurs…
Le colonel John Thomas North est un magnat
britannique qui a fait fortune dans les nitrates du
Chili. C’est dans ce milieu qu’il a dû faire connaissance
d’Alexis Mols, un homme d’affaires anversois fort
investi dans le commerce colonial. Les deux hommes
connaissent bien Ostende, la cité balnéaire à laquelle
Léopold II donne un certain lustre. John Thomas
North obtient de l’Etat belge, le 25 janvier 1895, la
concession d’un tramway entre la gare maritime
d’Ostende, le pont de la porte de Bruges et celui de
la rue de la Chapelle, Mariakerke (bains) et
Middelkerke (bains) sur la dune, côté mer.
La Concession comprend aussi l’usage d’un terrain
rectangulaire de 6.250 m² au coin de la route
d’Ostende à Nieuport et de l’avenue faisant la limite
du nouveau parc de Mariakerke et ayant 125 m de
longueur à front de cette avenue. La concession est
octroyée pour 90 ans. Sa régularité fera l’objet de
controverses. Fondée sur la législation applicable aux
tramways, elle n’en respecte pas les prescriptions,
notamment quant à sa durée extravagante. La SNCV
n’a sans doute pas apprécié l’irruption de ce
concurrent sur ses terres, dès lors qu’elle exploitait
depuis le 13 juillet 1885 une ligne vicinale parallèle
au tram électrique, mais « par les villages », à
l’intérieur des terres.
Le contrat du 7 février 1896 entre le colonel North et E&H
Le colonel North a beau avoir baroudé sur plusieurs
continents, il n’a pas d’expérience en matière de
trams électriques. C’est vers une société encore peu
accoutumée à fournir ce genre d’équipements qu’il se
tourne pour équiper « son » tramway. En cet hiver
1895-1896, Electricité et Hydraulique n’a en effet que
le modeste tramway de Cointe à son actif et, il est
vrai, de beaux contrats à exécuter à Koursk, Naples
et sur le Chemin de fer à voie étroite Bruxelles –
Ixelles – Boendael. La façon dont il a rencontré Julien
Dulait reste obscure. Serait-ce par le biais de
prospecteurs, par le cabinet du Roi, grâce à Alexis
Mols, ou aux frères Empain ? En tout état de cause,
Julien Dulait n’est pas un nouveau venu à Ostende
; il vient d’y assurer l’éclairage public et celui de la
villa royale…
Le 7 février 1896, avant même la constitution de la
SA TEOL, le colonel North, représenté par Alexis
Mols, et la SA Electricité et Hydraulique, représentée
par Julien Dulait, conviennent de l’équipement et
du montage financier du tramway à venir. Les articles
I et II de cette convention prévoient déjà la
constitution d’une SA dédiée et stipulent même son
capital et sa dénomination. Dans l’article V, E&H prend
l’engagement ferme de souscrire les
1.500.000 BEF d’obligations qui seront émises par la
SA TEOL, pour un prix d’ami, 1.350.000 BEF. En
échange de cette prise ferme, le colonel North
s’engage (article VI) : 1) à remettre à E&H les
commandes des installations complètes du tramway
Ostende – Middelkerke ; 2) à réserver à E&H la
fourniture et l’installation de tous appareils et
installations quelconques d’électricité dont lui ou la
société en formation fera usage, pour son compte
personnel ou pour celui de tiers, et notamment l’usine
centrale pour l’éclairage et le transport de force à
créer dans les terrains achetés par le Colonel North,
ainsi qu’à Mariakerke et à Middelkerke, si les
concessions sont obtenues ; 3) à céder à E&H des
actions complètement libérées de la nouvelle société,
pour une valeur de 50.000 BEF ; 4) Les prix de base
des fournitures seront facturés à la nouvelle société
seront ceux des fournitures faites aux clients les plus
favorisés pendant les quatre derniers mois qui auront
précédé la présente convention. L’article IX prévoit
que ces prix des clients les plus favorisés seront
encore réduits de 5%.
L’article X réserve deux places d’administrateur dans
la nouvelle société à des membres du CA d’E&H.
Un contrat aventureux pour E&H
Julien Dulait est prêt à tout pour obtenir ce marché
de prestige. En s’engageant à souscrire 1.500.000
BEF d’obligations (pour 1.350.000 BEF, il est vrai, et
avec 50.000 BEF d’actions et deux sièges), il finance
lui-même les achats que fera la SA TEOL à son
entreprise et ce à des prix « plancher », inférieurs de
5% à ses meilleures conditions. Mariakerke et
Middelkerke ne sont pas encore assez développées
pour justifier une exploitation toute l’année et une
ligne saisonnière sera difficile à rentabiliser. En 1890,
Ostende ne compte que 28.616 âmes, en 1900
41.547. A Middelkerke, ces chiffres ne s’élèvent
respectivement qu’à 1.154 et 2.044 habitants.