mai-juin - Bibliothèque municipale de Lyon
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LES JALONS HISTORIQUES<br />
DU CAS LYONNAIS<br />
RÉSISTANCES ET PÉRÉGRINATIONS…<br />
Dès les XVIe et XVIIe siècles, plusieurs projets d’établissements<br />
<strong>de</strong> bienfaisance prêtant sur gages sont envisagés<br />
à <strong>Lyon</strong> par <strong>de</strong>s compagnies religieuses pour<br />
combattre les ravages <strong>de</strong> l’usure et à offrir une ai<strong>de</strong><br />
ponctuelle aux plus pauvres :<br />
« En 1679, un Bureau <strong>de</strong> Prest charitable est établi à<br />
<strong>Lyon</strong> ; il prête sur gages, en principe pour six mois,<br />
jusqu’à 50 livres, sans prendre aucun intérêt. (…) Un<br />
article du règlement du Prest charitable manifeste<br />
pleinement les buts <strong>de</strong> moralisation <strong>de</strong> la société que la<br />
Compagnie poursuivait à travers ses œuvres ».<br />
L’établissement d’un véritable Mont-<strong>de</strong>-Piété qui serait<br />
indépendant d’un office <strong>de</strong> charité religieuse reste<br />
néanmoins très controversé. Divers projets sont<br />
présentés aux lyonnais au cours du XVIIIe siècle, <strong>mai</strong>s ils<br />
rencontrent <strong>de</strong>s oppositions farouches. La Chambre du<br />
commerce <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> est particulièrement réticente à<br />
l’instauration d’un Mont-<strong>de</strong>-Piété, elle dénonce le<br />
risque que ces prêts cautionnent la « débauche <strong>de</strong>s<br />
hommes » et la « vanité <strong>de</strong>s femmes » en facilitant l’engagement<br />
<strong>de</strong>s biens courants contre <strong>de</strong>s sommes rapi<strong>de</strong>ment<br />
dépensées. Elle redoute également qu’un tel<br />
établissement <strong>de</strong> crédit puisse servir à recéler <strong>de</strong>s<br />
biens volés et <strong>de</strong>s marchandises acquises à crédit, et ne<br />
concurrence <strong>de</strong> façon déloyale le marché drapier en revendant<br />
en <strong>de</strong>ssous du cours les étoffes qui y seraient<br />
engagées. Mais les raisons <strong>de</strong> cette hostilité rési<strong>de</strong>nt<br />
également dans la crainte d’une remise en cause d’un<br />
système <strong>de</strong> financement <strong>de</strong>s manufactures lyonnaises,<br />
fonctionnant jusqu’alors avec <strong>de</strong>s prêts octroyés par<br />
<strong>de</strong>s capitalistes aux commerçants :<br />
« La Chambre <strong>de</strong> commerce manifeste clairement son<br />
hostilité à voir les « entrepreneurs <strong>de</strong> manufacture d’un<br />
ordre inférieur », c’est-à-dire probablement les maîtresouvriers<br />
marchands qui achètent <strong>de</strong> la soie, tissent et<br />
ven<strong>de</strong>nt les étoffes, se servir du Mont-<strong>de</strong>-Piété comme<br />
d’une banque. Il y a vraisemblablement là un épiso<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
la lutte <strong>de</strong>s maîtres marchands <strong>de</strong> la ‘gran<strong>de</strong> fabrique’<br />
contre les maîtres ouvriers fabriquant pour leur propre<br />
compte ».<br />
Il faut finalement attendre le décret impérial du 23 <strong>mai</strong><br />
1810, pour que le Mont-<strong>de</strong>-Piété <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> ouvre ses<br />
portes. Il connaît tout <strong>de</strong> suite une forte activité. En 1845,<br />
il enregistre ainsi une moyenne <strong>de</strong> 500 gages par jour,<br />
soit environ 150 000 prêts annuels :<br />
« Jusqu’alors aucun établissement <strong>de</strong> ce genre n’avait<br />
existé dans la ville. Le Mont-<strong>de</strong>-Piété ne possè<strong>de</strong> pas <strong>de</strong><br />
revenu ni <strong>de</strong> dotation. Les fonds nécessaires pour subvenir<br />
à ses opérations lui sont prêtés et, aux termes <strong>de</strong><br />
son acte constitutif, les bénéfices qui en résultent sont<br />
versés à l’hospice <strong>de</strong> l’Antiquaille, qui lui a fourni la plus<br />
gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> son capital et dont les propriétés<br />
servent <strong>de</strong> garantie à ses opérations. »<br />
L’établissement connaît plusieurs localisations successives,<br />
avant d’être définitivement installé en 1891 sur le<br />
site <strong>de</strong> l’actuel Crédit Municipal, rue Duguesclin. Cette<br />
pérégrination dans divers quartiers <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> <strong>de</strong>ssine à<br />
sa façon une topographie symbolique du prêt sur gage<br />
dans la ville. Le Mont-<strong>de</strong>-Piété est tout d’abord installé<br />
sur la presqu’île dans le couvent <strong>de</strong>s Jacobins (actuelle<br />
place <strong>de</strong>s Jacobins), puis accolé à la cathédrale dans la<br />
manécanterie du quartier Saint-Jean, puis <strong>de</strong> nouveau<br />
sur la presqu’île dans le quartier Grôlée, alors célèbre<br />
pour sa décrépitu<strong>de</strong>.<br />
« MA TANTE » S’EMBOURGEOISE<br />
Dans son numéro du 28 décembre 1891, L’Écho <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong><br />
relate l’inauguration du nouveau Mont-<strong>de</strong>-Piété en<br />
présence <strong>de</strong>s notables <strong>de</strong> la ville. Cet événement illustre<br />
non seulement les projets d’urbanisation et <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnisation<br />
<strong>de</strong> la ville, <strong>mai</strong>s accompagne également une<br />
évolution du statut <strong>de</strong>s monts-<strong>de</strong>-piété, désor<strong>mai</strong>s<br />
autorisés à « prêter sur titres » aux petits emprunteurs,<br />
à l’instar <strong>de</strong>s banques. Comme en témoigne l’article,<br />
le nouveau bâtiment est conçu pour rationaliser le<br />
stockage <strong>de</strong>s biens et s’adapter à l’accueil du public :<br />
« Le nouveau Mont-<strong>de</strong>-Piété, construit rue Duguesclin,<br />
à l’angle <strong>de</strong> la rue <strong>de</strong> la Part-Dieu, a été inauguré hier.<br />
(…) Dans les sous-sols, on a placé les appareils <strong>de</strong><br />
chauffage, les calorifères, le magasin <strong>de</strong>s matelas et<br />
tous les objets lourds. Le rez-<strong>de</strong>-chaussée du bâtiment<br />
donnant sur la rue <strong>de</strong> la Part-Dieu, est affecté au public<br />
- là, tous les bureaux d’engagement, la caisse. Enfin,<br />
dans le bâtiment situé sur la rue Servient, se trouvent<br />
les magasins, les salles <strong>de</strong> vente et <strong>de</strong> réunion. Tout le<br />
premier étage est occupé par les meubles, sauf une<br />
gran<strong>de</strong> pièce où sont les dépôts <strong>de</strong> bijoux. La valeur <strong>de</strong><br />
ces <strong>de</strong>rniers objets atteint actuellement près <strong>de</strong> cinq<br />
millions. Au <strong>de</strong>uxième étage et dans les combles sont<br />
déposés les dépôts consistant en objets légers,<br />
communément appelés « har<strong>de</strong>s ». Tous ces locaux sont<br />
parfaitement aménagés en vue <strong>de</strong> la bonne et prompte<br />
exécution du service. Un ascenseur relie les sous-sols<br />
et les combles ».<br />
Cette installation d’un Mont-<strong>de</strong>-Piété mo<strong>de</strong>rnisé et plus<br />
fonctionnel dans <strong>de</strong>s nouveaux locaux (qu’il partagera<br />
à partir <strong>de</strong> 1927 avec la Mairie du 3e ), influence la repré-<br />
f<br />
DOSSIER REPÈRE<br />
topo : 05-08.12 : page 27<br />
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