mai-juin - Bibliothèque municipale de Lyon
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là, les camps <strong>de</strong> la mort lente : double face <strong>de</strong> cette folie<br />
qui l’emporte. Ravissement et terreur.<br />
Mais la fiction ne prend pas et la représentation impossible<br />
<strong>de</strong> son drame intérieur le livre à une répétition<br />
sans fin. La tragédie n’a pas eu lieu faute <strong>de</strong> lieu. Horizon<br />
perdu ou la scène introuvable. »<br />
À 16H00<br />
STANISLAS RODANSKI<br />
par Patrice Béghain<br />
L’article que Patrice Béghain consacre à Rodanski dans<br />
le Dictionnaire historique <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> commence par ces<br />
mots, « S’il est avéré que le poète… », sous-entendant<br />
d’emblée que beaucoup d’autres choses, encore aujourd’hui,<br />
ne sont pas avérées, que <strong>de</strong>s incertitu<strong>de</strong>s subsistent<br />
sur sa généalogie, ses ascendants, même si son<br />
ancrage lyonnais est indéniable.<br />
Et cet article se clôt presque sur ces mots, « Rétrospectivement,<br />
le silence volontaire <strong>de</strong> Rodanski donne au<br />
<strong>Lyon</strong> <strong>de</strong>s années 1950-1980 une <strong>de</strong>nsité et une intensité<br />
neuves. Pour un peu, <strong>de</strong> ces années-là, on n’entendrait<br />
plus que lui. »<br />
« j’ai été marqué par les lieux où j’habite et […] j’habite<br />
<strong>de</strong>s lieux marqués », Rodanski aurait pu ajouter qu’il a<br />
marqué les lieux qu’il a habités.<br />
Le <strong>Lyon</strong> <strong>de</strong> Rodanski serait-il, sous son regard et sous<br />
sa plume, un <strong>Lyon</strong> surréaliste ? Peut-on établir un parallèle<br />
entre le <strong>Lyon</strong> qu’il décrit dans Cours <strong>de</strong> la Liberté,<br />
un texte <strong>de</strong>s années 1946-1947, et le Piéton <strong>de</strong> Paris<br />
d’Aragon ou Nadja et L’Amour fou d’André Breton ?<br />
Parmi les choses avérées, on sait qu’il s’était inscrit à<br />
l’école <strong>de</strong>s Beaux-Arts <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> à 19 ans, bien qu’attiré<br />
par l’écriture. Qu’il a lu le premier Manifeste du surréalisme.<br />
En 1947, par l’intermédiaire <strong>de</strong> son ami le peintre<br />
Jacques Hérold, il a rencontré André Breton, tout juste<br />
rentré <strong>de</strong>s États-Unis, qui cherchait à reconstituer à<br />
Paris le « Groupe ». Il en est <strong>de</strong>venu membre la même<br />
année, a signé le manifeste collectif « Rupture inaugurale<br />
» et a participé à la gran<strong>de</strong> exposition éponyme organisée<br />
par Breton à la Galerie Maeght. Il s’est alors lié<br />
d’amitié avec Julien Gracq. Il a fait partie d’un petit<br />
groupe <strong>de</strong> jeunes gens qui visitaient régulièrement le<br />
peintre Victor Brauner, dans l’atelier duquel ils ont créé<br />
la revue Néon, premier organe surréaliste d’aprèsguerre.<br />
Rodanski en a trouvé le titre. Il y a publié ses premiers<br />
textes. Mais il a été exclu du groupe à la suite <strong>de</strong><br />
l’un <strong>de</strong> ces différends fréquents à l’époque, accusé par<br />
Breton <strong>de</strong> « travail fractionnel », lui-même prenant parti<br />
pour Brauner. Les tensions ressenties dans le groupe<br />
l’ont déçu. Cette rupture l’a affecté durablement. Dès<br />
lors il n’a cessé <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s allers-retours entre <strong>Lyon</strong><br />
et Paris et a semblé progressivement perdre amis et<br />
repères. La vie, l’œuvre, la moindre citation <strong>de</strong> Rodanski<br />
sont autant <strong>de</strong> questions. Ainsi <strong>de</strong> :<br />
« Nous allons faire une promena<strong>de</strong> : prenons le cours <strong>de</strong><br />
la liberté. C’est le seul <strong>de</strong> tous les chemins qui ne mène<br />
pas à Rome. Il va beaucoup plus loin, une fois qu’on s’y<br />
est engagé il faut s’y tenir <strong>de</strong> toutes ses forces pour ne<br />
pas s’égarer – et pourtant on ne sait pas où il mène… »<br />
« Et il faut encore dire aux assis qu’il n’y a pas <strong>de</strong> culs<strong>de</strong>-jatte<br />
<strong>de</strong> naissance, il faut à tout prix que ceux qui défrichent<br />
dans la forêt le sentier <strong>de</strong> la vie apprennent que<br />
le surréalisme est une cause libre au cœur <strong>de</strong>s hommes<br />
qui marchent.<br />
Fanal <strong>de</strong> Maldoror, où gui<strong>de</strong>s-tu nos pas ? »<br />
Aux énigmes que posent Rodanski et son œuvre, cette<br />
exposition et cette conférence risquent <strong>de</strong>s réponses.<br />
Patrice Béghain est professeur agrégé <strong>de</strong> Lettres<br />
classiques. Il a été directeur régional <strong>de</strong>s Affaires culturelles<br />
<strong>de</strong> trois Régions, délégué général <strong>de</strong> la FEMIS,<br />
administrateur <strong>de</strong> l’École d’architecture et du paysage<br />
<strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux, conseiller technique aux politiques interministériellles<br />
et territoriales dans le cabinet <strong>de</strong> Catherine<br />
Tasca, adjoint au <strong>mai</strong>re <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong>, délégué à la Culture et<br />
au Patrimoine, <strong>de</strong> 2001 à 2008. Il est l’auteur <strong>de</strong> Le Patrimoine<br />
: culture et lien social (Presses <strong>de</strong> Sciences Po,<br />
1998 – dont une nouvelle édition vient <strong>de</strong> paraître sous<br />
le titre Patrimoine, politique et société), Inconnus et<br />
célèbres : regards sur 30 portraits du Musée <strong>de</strong>s Beaux-<br />
Arts <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong> (éditions S. Bachès, 2004) et Le Cours du<br />
fleuve fait le mien suivi <strong>de</strong> Lettre au successeur d’André<br />
Malraux (La Passe du vent, 2009), Une histoire <strong>de</strong> la peinture<br />
à <strong>Lyon</strong> (éditions S. Bachès, 2011). Il est l’un <strong>de</strong>s<br />
quatre contributeurs du Dictionnaire historique <strong>de</strong> <strong>Lyon</strong><br />
(éditions S. Bachès, 2009).<br />
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ÉVÉNEMENT<br />
© Association Stanislas Rodanski<br />
topo : 05-08.12 : page 9