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Un pont sur la Souffel - Décembre 2006.pub - Maire de Dingsheim

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FAITS D’HIVER<br />

Nous vivons dans une région où le ciel n’a jamais<br />

<strong>la</strong> même couleur. Dans les thermomètres, le mercure<br />

grimpe ou chute, aux ordres <strong>de</strong>s dieux du vent et <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> pluie. Notre position <strong>sur</strong> le globe nous offre toute<br />

<strong>la</strong>titu<strong>de</strong> <strong>de</strong> jouir <strong>de</strong> quatre saisons nettement différenciées<br />

au fil <strong>de</strong>squelles les jours se suivent et ne se<br />

ressemblent pas. Assis à sa fenêtre il suffit <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r<br />

fleurir son jardin, mûrir les fruits, voler les feuilles<br />

puis tomber <strong>la</strong> neige. Voyageurs immobiles, nous<br />

assistons aux métamorphoses du paysage que les<br />

mois qui passent façonnent à leur goût. Voir ainsi<br />

évoluer son environnement sans <strong>la</strong>rguer les amarres<br />

pour parcourir vingt mille lieues <strong>sur</strong> les mers, sans<br />

trébucher <strong>sur</strong> les fuseaux horaires, est un avantage<br />

inestimable. Plus question <strong>de</strong> prendre le <strong>la</strong>rge au vo<strong>la</strong>nt<br />

<strong>de</strong> sa voiture sous le regard désapprobateur <strong>de</strong>s<br />

protecteurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète. Nous changeons d’horizon<br />

sans lier notre <strong>de</strong>stin à <strong>de</strong>s aérop<strong>la</strong>nes que l’Internationale<br />

Angoissante <strong>de</strong>s Terroristes Associés compte<br />

parmi ses armes <strong>de</strong> <strong>de</strong>struction massive préférées.<br />

Source intarissable <strong>de</strong> commentaires et <strong>de</strong> conjectures,<br />

le temps qu’il fait, qu’il a fait ou qu’il fera<br />

constitue l’essentiel <strong>de</strong>s préoccupations <strong>de</strong> ceux qui<br />

n’en ont pas d’autres. Il alimente les conversations et<br />

nourrit les météorologistes à qui l’on pardonne volontiers<br />

<strong>de</strong> se tromper si souvent. Bardés <strong>de</strong> satellites<br />

et d’ordinateurs, ces spécialistes ont cessé <strong>de</strong> nous<br />

intimi<strong>de</strong>r à coups d’hectopascals et d’isobares <strong>de</strong>puis<br />

que nous avons compris que leurs cumulonimbus<br />

fantasques nous réservent régulièrement <strong>de</strong>s <strong>sur</strong>prises<br />

sous forme <strong>de</strong> douche écossaise ou d’embellie<br />

inattendue.<br />

Voici l’hiver. L’héliotropisme <strong>de</strong>s occi<strong>de</strong>ntaux<br />

pourrait faire craindre le mécontentement général<br />

d’une armée <strong>de</strong> râleurs réc<strong>la</strong>mant le retour rapi<strong>de</strong> du<br />

soleil. Ce serait oublier trop vite que les jours les<br />

plus beaux ne sont pas nécessairement les plus<br />

chauds ni les plus ensoleillés. Les couleurs d’un matin<br />

d’hiver <strong>sur</strong> les champs dénudés, les branches givrées<br />

<strong>de</strong>s arbres aussi resplendissants que dans leur<br />

floraison printanière sont autant d’étrennes, pour peu<br />

que l’on prenne le temps <strong>de</strong> regar<strong>de</strong>r autour <strong>de</strong> soi.<br />

Les merveilles <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature ne sont pas l’apanage du<br />

bout du mon<strong>de</strong>. Elles se trouvent à nos portes, renouvelées<br />

jour après jour.<br />

On objectera que les rêveries et les contemp<strong>la</strong>tions<br />

ne réchauffent pas leur homme. Les fluctuations<br />

du prix du brent (1) , du cours du dol<strong>la</strong>r et <strong>de</strong><br />

l’humeur <strong>de</strong>s émirs méritent également quelque intérêt<br />

lorsqu’il gèle à pierre fendre et que le coût <strong>de</strong> l’énergie<br />

suit une courbe inverse <strong>de</strong> celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> température.<br />

Il y a aussi péril en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>meure et frissons<br />

garantis lorsqu’il faut partager <strong>de</strong>s routes verg<strong>la</strong>cées<br />

avec <strong>de</strong>s têtes brûlées qui n’ont pas froid aux<br />

yeux. Croiser <strong>de</strong>s kamikazes <strong>la</strong>ncés dans le brouil-<br />

<strong>la</strong>rd tels <strong>de</strong>s boulets <strong>de</strong> canon hisse le dép<strong>la</strong>cement<br />

quotidien familial au rang <strong>de</strong> <strong>la</strong> roulette russe.<br />

Mais tout n’est pas noir dans <strong>la</strong> b<strong>la</strong>ncheur <strong>de</strong> l’hiver.<br />

Les sé<strong>de</strong>ntaires soucieux <strong>de</strong> se maintenir en forme<br />

se réjouiront <strong>de</strong> commencer leur matinée par un petit<br />

échauffement : gratter le pare-brise givré <strong>de</strong> sa voiture<br />

qui a dormi à <strong>la</strong> belle étoile, dégager <strong>la</strong> neige qui<br />

tapisse l’entrée du garage et un trottoir long comme<br />

un jour sans kouglof sont autant d’exercices salutaires,<br />

accessibles à tous et ne nécessitant qu’un minimum<br />

d’accessoires. Les frimas <strong>de</strong> l’hiver nous ras<strong>sur</strong>ent<br />

quelque temps <strong>sur</strong> l’imminence du réchauffement<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>la</strong>nète. Faible probabilité d’orages, risque<br />

zéro <strong>de</strong> canicule. Les économies réalisées <strong>sur</strong> les<br />

lotions so<strong>la</strong>ires, les pomma<strong>de</strong>s anti-moustiques et les<br />

crèmes g<strong>la</strong>cées pourront être consacrées à l’achat <strong>de</strong><br />

moufles et <strong>de</strong> marrons chauds (le défi consistant à<br />

associer <strong>la</strong> consommation <strong>de</strong> ceux-ci et le port simultané<br />

<strong>de</strong> celles-là.)<br />

Les courtes journées d’hiver <strong>la</strong>issent toute leur<br />

p<strong>la</strong>ce aux distractions nocturnes et au sommeil réparateur<br />

que les plus paresseux, dans <strong>la</strong> chaleur douillette<br />

<strong>de</strong> leur cocon, prolongeront sans vergogne par<br />

<strong>de</strong>s siestes nullement troublées par les mélopées <strong>la</strong>ncinantes<br />

<strong>de</strong>s ton<strong>de</strong>uses à gazon. L’arrosage du potager<br />

et <strong>la</strong> cueillette <strong>de</strong>s mauvaises herbes sont reportés<br />

à <strong>de</strong>s jours « meilleurs ».<br />

La vérité qui, chacun le sait, sort <strong>de</strong> <strong>la</strong> bouche <strong>de</strong>s<br />

enfants, c’est que l’hiver, chez nous, c’est une saison<br />

« trop bien ». La luge, les glissa<strong>de</strong>s, les boules et le<br />

bonhomme <strong>de</strong> neige sont <strong>de</strong>s jeux que l’on ne trouve<br />

pas partout. Puis, quand vient <strong>la</strong> nuit, le mystère<br />

nous enveloppe. Dans les rues, dans les jardins, <strong>de</strong>s<br />

lumières remp<strong>la</strong>cent les fleurs. <strong>Un</strong> sapin pousse dans<br />

le salon ! Les fêtes se succè<strong>de</strong>nt dans un cortège <strong>de</strong><br />

personnages magiques et bienveil<strong>la</strong>nts. On se raconte<br />

<strong>de</strong> belles histoires, on s’offre <strong>de</strong>s ca<strong>de</strong>aux à <strong>la</strong> hotte.<br />

Même les plus b<strong>la</strong>sés succombent aux rites <strong>de</strong> <strong>la</strong> saison.<br />

Dans un mon<strong>de</strong> où le réalisme brutal nous assène<br />

au quotidien que tout n’est pas possible, il est si<br />

doux <strong>de</strong> croire au Père Noël. En cette pério<strong>de</strong> préélectorale,<br />

au moment <strong>de</strong> dresser <strong>la</strong> liste <strong>de</strong> leurs promesses<br />

<strong>de</strong> campagne, les candidats à <strong>la</strong> magistrature<br />

suprême s’en souviendront sans doute.<br />

Mais pour que <strong>la</strong> féerie soit complète il faut un<br />

Noël au tison. Au premier radoucissement, si d’aventure<br />

les flocons se font gouttes, nous rejoignons les<br />

anciens et déplorons avec une infinie nostalgie que,<br />

décidément, il n’y a plus d’hiver…<br />

Jean-Marc Schmitt<br />

(1) Le brent est un pétrole extrait <strong>de</strong>s champs pétrolifères<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Mer du Nord. Le prix du brent sert <strong>de</strong> référence<br />

internationale au prix <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> <strong>la</strong> moitié du pétrole<br />

extrait dans le mon<strong>de</strong>.<br />

Page 46 Retrouvez ces infos <strong>sur</strong> le site Internet : http://<strong>la</strong>.souffel.free.fr/

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