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&Arm;ées - Ãcole du Val-de-Grâce
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Tricentenaire du Service de santé des armées<br />
LE SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES AU CENTRE DU<br />
CHAMP DE BATAILLE<br />
R. WEY<br />
I. INTRODUCTION.<br />
L'Édit signé par Louis XIV le 17 janvier 1708 est l'acte de<br />
naissance reconnu du Service de santé, même si, depuis<br />
1689, une ordonnance royale régissait l'organisation et<br />
le fonctionnement des hôpitaux des armées navales et<br />
dans les ports.<br />
1708 – 2008 : trois siècles d'une histoire en dents de scie<br />
depuis que furent créées les charges de médecins et de<br />
chirurgiens dans les armées françaises. Trois siècles qui<br />
virent la lente maturation d’une organisation rationnelle<br />
des secours aux blessés et malades, avec des périodes<br />
fastes ou sombres, avant de parvenir, aujourd'hui, à<br />
l'évidence de la nécessité de disposer d'une chaîne de<br />
prise en charge thérapeutique cohérente, continue et<br />
adaptée aux besoins des forces armées.<br />
La médecine militaire trouve ses racines, il y a cinq<br />
millénaires, dans les affrontements qui opposèrent les<br />
civilisations alors dominantes. Dès l'Antiquité<br />
apparaissent quelques préoccupations sanitaires,<br />
généralement au bénéfice sinon exclusif, au moins<br />
prioritaire, des grands personnages. Il faut attendre le<br />
règne de l’empereur romain Trajan et la création de<br />
garnisons permanentes jalonnant le Limes pour<br />
qu'apparaisse une véritable organisation sanitaire,<br />
confiée le plus souvent à des médecins d'origine grecque<br />
au statut subalterne, dont le but évident était la<br />
préservation des effectifs aguerris. S'organise alors dans<br />
chaque légion, un soutien médical pourvu de matériels<br />
mobiles permettant d'apporter les premiers soins sur le<br />
champ de bataille, adossé à de véritables hôpitaux<br />
d'évacuation installés dans les camps les plus importants.<br />
Notre Moyen-Âge oubliera toute forme d'organisation<br />
sanitaire avant que n'émergent les ordres<br />
hospitaliers militaires qui fondent, au profit du<br />
combattant, leur démarche sur des valeurs de charité et<br />
de dévouement complétées par des règles rigoureuses<br />
R. WEY, médecin général inspecteur (2s), Spécialiste des techniques d'organisation<br />
et de logistique de la santé.<br />
Correspondance : R. WEY, 5, rue Eugène Renault, 94700 Maisons Alfort.<br />
de fonctionnement. Avec eux s'ouvre une ère nouvelle,<br />
scientifique, qui sera amplifiée par la Renaissance.<br />
L'apparition des armes à feu et la nature nouvelle des<br />
blessures qu’elles provoquent, vont profiter à la chirurgie<br />
de guerre, empiriquement encore, mais déjà par l'apport<br />
des connaissances anatomiques. Ambroise Paré,<br />
chirurgien attaché au Prince mais dévoué au soldat, «le<br />
gain étant éloigné seul demeure l'honneur et l'amitié de<br />
tant de soldats », sera la figure emblématique de cette<br />
évolution et de l'affirmation de la place que prennent les<br />
chirurgiens et, dans une moindre mesure, les médecins<br />
au sein des armées.<br />
Par la suite, les rois vont démontrer leur volonté que soient<br />
assurés aux blessés des secours médicaux. Des offices de<br />
médecins et d’apothicaires sont progressivement ouverts<br />
dans les forces permanentes. L’organisation reste toutefois<br />
élémentaire, les blessés étant répartis dans les<br />
hospices rencontrés sur la route des armées. De même, le<br />
sort des survivants, trop souvent invalides, est pris en<br />
considération, même si cette démarche n'est pas toujours<br />
exempte d’arrière-pensées visant à éviter la dérive de ces<br />
anciens soldats vers le vagabondage et le brigandage.<br />
Dans ce mouvement, la fin du XVI e siècle verra en<br />
germe une première structuration du soutien médical<br />
dans les armées. Lorsque Vauban fortifie les frontières<br />
de la France, des établissements de soins sont prévus,<br />
pas toujours réalisés. De même, il est envisagé que<br />
toute armée dispose d’un hôpital mobile et qu’un navirehôpital<br />
soit gréé pour dix bâtiments. Le service sanitaire<br />
des ports est réglementé.<br />
L’Édit de 1708 est donc un aboutissement, capitalisation<br />
logique de toutes les initiatives réalisées depuis de<br />
nombreuses années. Il est surtout un commencement,<br />
car il représente la première officialisation d’une organisation<br />
étatique visant à assurer la cohérence du système<br />
de prise en charge des blessés et des malades militaires.<br />
Depuis, le Service de santé des armées n'a jamais cessé,<br />
au cours des trois siècles qui nous séparent de cet acte<br />
fondateur, de proposer, malgré les difficultés ou les<br />
aléas conjoncturels, les solutions d'ordre conceptuel ou<br />
matériel qui permettent de porter sur le champ de<br />
bataille toutes les possibilités offertes par la médecine.<br />
médecine et armées, 2008, 36, 5 409