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12 Courrier <strong>international</strong> | n° 1040 | du 7 au 13 octobre 2010<br />

Les opinions<br />

10 <br />

dans les grands chantiers de travaux publics à Montréal, tandis que des<br />

éléments mafieux donnaient au maire, Gérald Tremblay, des raisons de<br />

craindre pour sa sécurité. Enfin, tout récemment, d’innombrables allégations<br />

crédibles dirigées contre le gouvernement du Premier ministre du Québec,<br />

Jean Charest, ont fait état de tours de passe-passe dans le financement des<br />

campagnes électorales ainsi que de trafic d’influence.<br />

Oui, il y a de la corruption politique dans chaque province et dans chaque<br />

parti. La question n’est pas là. Seul le Québec s’est trouvé aux prises pendant<br />

cette période avec une aussi riche collection de situations embarrassantes.<br />

Il importe de souligner qu’aucun de nos critiques n’a présenté de raisons<br />

valables pour attribuer à une autre province le titre de dernière de classe.<br />

Le Québec a bel et bien un problème. Son système politique ne répond<br />

plus aux attentes de sa population. Mais soyons clairs. Il s’agit là d’un problème<br />

politique, qui met en cause les politiciens et la culture politique de la<br />

province, mais non son caractère ou sa population. Dans sa lettre, le Premier<br />

ministre Charest prétend que nous avons décrit les Québécois comme “génétiquement<br />

incapables d’agir avec intégrité”. Comme toutes les accusations de<br />

Québec bashing, celle-ci n’est pas seulement fausse, elle est aussi mesquine,<br />

dans la mesure où l’ensemble des citoyens se trouvent ainsi mêlés aux agissements<br />

des politiciens et de leurs petits copains. La population du Québec<br />

est déjà bien assez pénalisée par la corruption au sein des charges publiques,<br />

elle n’a pas à en être éclaboussée par la même occasion.<br />

Les électeurs québécois ont prouvé à maintes et maintes reprises qu’ils<br />

supportaient mal les politiciens corrompus. Ils ont souvent montré la porte<br />

à des gouvernements entachés par le scandale. C’est là une source d’optimisme<br />

quant à l’avenir de la culture politique au Québec. Autre source d’espoir<br />

: la vigueur du journalisme d’enquête dans la province. Une bonne partie<br />

des irrégularités que nous décrivions dans notre article ont aussitôt fait l’objet<br />

d’enquêtes et d’exposés dans les quotidiens et les journaux télévisés. Si la<br />

population et la presse du Québec continuent d’exiger de la part des élus les<br />

plus hauts standards de déontologie et de probité, les choses changeront.<br />

Nous croyons sincèrement que les Québécois méritent mieux que la situation<br />

actuelle. <br />

* L’hebdomadaire anglophone a publié cet article en français sur son site Internet.<br />

Sombre bilan<br />

pour Berlusconi<br />

Aldo Schiavone, La Repubblica (extraits) Rome<br />

Un vide gouvernemental sans précédent et une faillite sociale<br />

explosive : la crise finale du berlusconisme, annoncée depuis<br />

belle lurette, est désormais sujette à une accélération imprévisible.<br />

Depuis le dernier vote à la Chambre des députés et la<br />

naissance du nouveau parti de Gianfranco Fini [Futur et liberté<br />

pour l’Italie, FLI], un mécanisme implacable s’est mis en place.<br />

Une page de l’histoire italienne vient de se tourner : celle qui avait commencé<br />

entre 1993 et 1994 avec l’aventure politique de Silvio Berlusconi. Dix-sept ans :<br />

c’est presque toute une génération qui a grandi sous le signe d’une “machine<br />

politique” censée changer notre société, et qui semble aujourd’hui n’avoir<br />

d’autre but que de protéger le destin personnel de son leader. Le cycle s’achève<br />

exactement, impitoyablement, là où il avait commencé : sur les rapports difficiles<br />

– pour ne pas dire impossibles – qu’entretient le président du Conseil<br />

avec les juges et la justice [lors d’un meeting de son parti, le 3 octobre, Berlusconi<br />

a une nouvelle fois reproché aux magistrats de lui être défavorables<br />

et demandé une enquête parlementaire sur leur travail].<br />

Un monde politique et idéologique s’écroule. Politique, surtout. Berlusconi<br />

avait cru pouvoir réunifier la droite italienne en mélangeant traditions<br />

et cultures dans un creuset inédit, issu d’une interprétation unilatérale et<br />

simpliste de la nouvelle modernité italienne – celle qu’a déclenchée la révolution<br />

technologique postindustrielle – et d’une idée pauvre et désincarnée<br />

de la démocratie : les institutions représentatives (et surtout ce fameux Parlement<br />

qui le met toujours si mal à l’aise puisqu’il n’en comprend pas la signification)<br />

ont été évidées au nom d’un populisme médiatique qui a pour seule<br />

fonction la célébration de son leader charismatique. Dessein qui a explosé<br />

entre les mains de ce dernier. Car la vérité nue, la vérité crue, la voici :<br />

Contexte<br />

Une Italie “sans<br />

leader”, titre<br />

l’hebdomadaire<br />

de centre gauche dans<br />

sa dernière livraison.<br />

Contesté de toutes<br />

parts et en grande<br />

difficulté depuis la<br />

rupture avec son<br />

ancien allié Gianfranco<br />

Fini, Silvio Berlusconi<br />

a tout de même<br />

obtenu la confiance<br />

du Parlement<br />

le 29 septembre.<br />

Mais cette victoire<br />

à la Pyrrhus, due<br />

au vote des partisans<br />

de Fini, ne fait que<br />

différer la fin annoncée<br />

du berlusconisme.<br />

“Irlande, repose en<br />

paix !” titre l’Irish Daily<br />

Star le 1 er octobre – la<br />

veille, le gouvernement<br />

avait annoncé que<br />

le renflouement des<br />

banques irlandaises<br />

toxiques pourrait<br />

coûter 50 milliards<br />

d’euros. Le quotidien<br />

populaire estime<br />

qu’après ce “jeudi<br />

noir”, le pays va être<br />

confronté à des<br />

“décennies d’enfer<br />

financier” à cause<br />

de “la cupidité<br />

des banquiers<br />

et [de] la stupidité<br />

des politiques”.<br />

Berlusconi ne sait pas gouverner. Au crépuscule du berlusconisme vacille un<br />

pays exténué. L’épuisement social de l’Italie est impressionnant. La plupart<br />

des liens qui unissent les régions ou les classes sociales sont compromis. Le<br />

taux d’emploi des jeunes compte parmi les plus bas d’Europe. Le travail ouvrier<br />

se réduit comme une peau de chagrin, les nouveaux emplois hautement qualifiés<br />

sont abandonnés à leur triste sort, dépourvus de règles et de protection.<br />

Le prélèvement fiscal, de plus en plus inéquitable, pénalise presque uniquement<br />

les plus démunis. Aucun nouvel investissement n’a été effectué dans<br />

les grandes infrastructures technologiques, l’éducation ou la recherche.<br />

Ces deux urgences – politique et sociale – sont liées. C’est d’ailleurs leur<br />

lien qui souligne l’importance du problème. Ce n’est pas un hasard si le parti<br />

qui semble pouvoir le mieux pr<strong>of</strong>iter de la situation est celui d’Umberto Bossi<br />

[fondateur et dirigeant de la Ligue du Nord], dont le caractère populiste est<br />

justement alimenté par la déroute politique et la faillite sociale.<br />

La démocratie ne peut reposer sur du vide. Elle présuppose le maintien<br />

du corps dans lequel elle vit, maintien dû à une cohésion pr<strong>of</strong>onde et reposant<br />

sur la solidarité entre ses membres, aussi différents soient-ils. Alors voilà,<br />

aujourd’hui je me demande si l’une des conséquences les plus catastrophiques<br />

du berlusconisme n’est pas celle-ci : qu’une partie non négligeable de nos dirigeants<br />

– et pas seulement politiques – aient cessé de considérer l’Italie comme<br />

un ensemble, comme un tout, et soient en train de cultiver l’idée d’une scission<br />

entre deux sociétés : l’une qui s’enfonce dans l’obscurité de ses peurs, de<br />

ses rancœurs et de sa récente pauvreté ; l’autre qui se tire d’affaire parce qu’elle<br />

a réussi – aux dépens de la première – à s’approprier le monde et ses défis. <br />

Le cauchemar<br />

irlandais n’est pas fini<br />

The Guardian Londres<br />

De la Grèce au Japon, en passant par les Etats-Unis, la crise bancaire<br />

a fait des ravages dans le monde entier. Mais aucune économie<br />

n’a été victime d’une mise à sac aussi brutale que celle<br />

de l’Irlande. L’ancien tigre celtique a vu son revenu national<br />

dégringoler de 17 % au cours des trois dernières années – la<br />

contraction la plus sévère et la plus rapide en Occident depuis<br />

la Grande Dépression. En 2008, quand les financiers, pour plaisanter, disaient<br />

que la seule différence entre l’Islande en faillite et une Irlande fauchée, c’étaient<br />

une lettre et quelques jours, ils avaient tort : la catastrophe qui a englouti l’île<br />

d’Emeraude est infiniment pire que celle qui secoue l’Islande.<br />

Et, jusqu’au bout, les ministres de Dublin ont promis à leurs électeurs que<br />

les choses étaient sur le point de s’améliorer. Les prêts d’urgence consentis<br />

aux banques, c’était la bonne solution. Les réductions radicales des dépenses,<br />

ça allait marcher. Et cette décision qui, en gros, revenait à cautionner l’ensemble<br />

du système bancaire (sans aucun droit de regard ou presque) et qui<br />

réglerait tout ? Eh bien, non, non, et encore non : tel un corps balancé du toit<br />

d’un gratte-ciel, l’économie irlandaise a simplement continué à plonger.<br />

Le 30 septembre, Brian Lenihan, le ministre des Finances irlandais, a<br />

assuré aux électeurs que le “cauchemar” national qu’ils sont contraints de<br />

subir depuis à peu près deux ans était sur le point de cesser. “Nous sommes<br />

désormais en train d’en finir avec ça.” Il n’a pas convaincu les financiers, qui l’ont<br />

entendu dire la même chose chaque fois qu’il a proposé un nouveau plan mal<br />

ficelé. Même à l’aune de ses coups de poker précédents, celui-ci est franchement<br />

énorme. Le renflouement qu’il propose va englober l’Anglo Irish, la<br />

banque préférée des promoteurs, ainsi que l’Allied Irish et l’Irish Nationwide<br />

– et devrait accroître le déficit budgétaire, qui passerait de 12 % du revenu<br />

national au niveau astronomique de 32 %.<br />

Lorsqu’un pays connaît une banqueroute aussi spectaculaire, il est évident<br />

que la crise a des causes multiples et pr<strong>of</strong>ondes. Nous pourrions en tout<br />

premier lieu citer une trop grande confiance dans les prix de l’immobilier à<br />

la fois en tant que facteur de bien-être illusoire et en tant que source de revenus<br />

publics. Dès que la bulle a éclaté, ces derniers se sont effondrés. Sur certains<br />

aspects, les décideurs peuvent prétendre qu’ils se sont contentés de<br />

respecter les règles du succès économique selon l’orthodoxie <strong>international</strong>e<br />

– il faut attirer les capitaux étrangers par tous les moyens et rester ouvert.<br />

Mais l’une des leçons de ce que Gordon Brown a décrit comme la 14

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