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— Oui, je sais, l’avait-elle coupée, d’une voix tranchante. Tu l’as déjà dit.<br />
— Tout ira bien, avait répété sa mère.<br />
Hadley avait empoigné son sweat-shirt et détaché sa <strong>ce</strong>inture.<br />
— Bon, alors <strong>ce</strong> sera ta f<strong>au</strong>te s’il arrive quelque chose.<br />
— Comment ça ? avait demandé sa mère d’un ton las.<br />
Et, toute vibrante d’une colère qui lui donnait à la fois une formidable sensation d’invincibilité et<br />
l’impression de se comporter comme une vraie gamine, Hadley avait ouvert la portière à la volée.<br />
— Si mon avion s’écrase, par exemple, lui avait-elle craché, sans vraiment savoir pourquoi elle lui<br />
disait un truc pareil d’ailleurs, s<strong>au</strong>f qu’elle l’avait m<strong>au</strong>vaise, qu’elle était à cran et qu’elle avait la<br />
trouille – c’est bien dans <strong>ce</strong>s cas-là qu’on dit <strong>ce</strong> genre de vacherie, non ? – alors là, tu <strong>au</strong>ras réussi à nous<br />
perdre tous les deux.<br />
Elles s’étaient regardées, les terribles, les impardonnables horreurs qu’elle venait de pr<strong>of</strong>érer tombant<br />
entre elles comme <strong>au</strong>tant de briques édifiant un infranchissable mur d’incommunicabilité. Au bout d’un<br />
moment, Hadley était des<strong>ce</strong>ndue de voiture, balançant son sac à dos sur son ép<strong>au</strong>le pour aller récupérer<br />
d’un geste rageur sa valise sur la banquette arrière.<br />
— Hadley, l’avait interpellée sa mère, en bondissant hors du véhicule pour lui lan<strong>ce</strong>r un dernier appel<br />
des yeux par-dessus le toit de la voiture. Tu ne peux quand même pas…<br />
— Je t’envoie un texto en arrivant, lui avait-elle lancé, en se dirigeant déjà vers le terminal.<br />
Elle avait senti le regard de sa mère tout le long du trajet, mais un stupide orgueil mal placé l’avait<br />
empêchée de se retourner.<br />
Maintenant, assise dans la brasserie de l’aéroport, le pou<strong>ce</strong> <strong>au</strong>-dessus de la touche du numéro<br />
préenregistré, elle hésite. Elle respire un bon coup et appuie. Les battements de son cœur comblent les<br />
silen<strong>ce</strong>s entre les sonneries.<br />
Les mots qu’elle lui a dits résonnent encore dans sa tête. Non qu’elle soit superstitieuse de nature, mais<br />
qu’elle ait eu l’inconscien<strong>ce</strong> d’évoquer la possibilité d’un crash juste avant de décoller… ça la rend<br />
malade. Elle pense à <strong>ce</strong>t <strong>au</strong>tre avion, <strong>ce</strong>lui à bord duquel elle devrait se trouver et qui est probablement<br />
déjà bien loin <strong>au</strong>-dessus de l’Atlantique. Qu’est-<strong>ce</strong> qu’elle regrette de l’avoir raté, à présent ! Pourvu<br />
qu’elle n’ait pas, d’une manière ou d’une <strong>au</strong>tre, mis la pagaille dans les mystérieux plans du hasard et du<br />
temps.<br />
Quand elle tombe sur le répondeur, elle est à moitié soulagée. Elle commen<strong>ce</strong> à l’informer de son<br />
changement de programme, quand elle aperçoit Oliver qui revient. Pendant une seconde, elle croit<br />
reconnaître son expression : <strong>ce</strong>tte angoisse qui l’habite à l’instant même. Mais, dès qu’il la voit, il change<br />
de visage et voilà l’Oliver du début qui resurgit, <strong>au</strong>ssi décontracté, joyeux presque, avec un sourire<br />
lumineux jusqu’<strong>au</strong> fond des yeux.<br />
Elle s’était interrompue en plein milieu de son message et, tout en attrapant son porte-habits, Oliver lui<br />
désigne son téléphone du doigt pour l’inciter à poursuivre, avant de pointer son pou<strong>ce</strong> en direction de la<br />
porte d’embarquement. Elle ouvre la bouche pour lui dire qu’elle n’en a que pour une minute, mais il a<br />
déjà tourné les talons. Alors, elle se dépêche de terminer :<br />
— Donc je t’appelle demain quand j’arrive, conclut-elle dans l’appareil, d’une voix qui tremble un<br />
peu sur la fin. Et, maman, je suis désolée pour tout à l’heure, O.K. ? Je ne le pensais pas.<br />
En se dirigeant à son tour vers la porte d’embarquement, elle balaie les environs du regard à la