Bulletin des Anciens du Stade Toulousain
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sait cela avec ses yeux bleus exorbités ne lâchant<br />
pas les miens, je n'avais aucune envie de le contrarier.<br />
La concurrence était surtout quantitative car nous<br />
étions beaucoup de jeunes à avoir intégré le Club<br />
dont les caisses, paraît-il, étaient vi<strong>des</strong>. On m'avait<br />
promis d'être logé gratuitement. Je l'étais, certes,<br />
même si nous habitions à sept dans un F2, dont le<br />
couple Dany et Jean-Pierre Marty, très bon demi<br />
de mêlée et étudiant en médecine. Quatre étudiants<br />
et moi, le collégien, formions le reste de la<br />
troupe : Jean-Pierre Clet et Roger Guitter, étudiants<br />
en sciences, Pagès, étudiant en droit et<br />
l'adorable catalan, Paul Soucaille, étudiant en tout.<br />
Le couple Marty vivait dans la chambre et tous les<br />
autres nous étions « en parallèle-sardines » dans le<br />
salon, une cantine sous chaque lit pour ranger nos<br />
affaires.<br />
Vu d'aujourd'hui, cela paraît incroyable et inimaginable<br />
à vivre et pourtant... Qu'est ce qu'on était<br />
bien ! Que d'éclats de rires et de très rares disputes<br />
toujours sans lendemain.<br />
Cette tribu à laquelle de nombreux autres se joignaient<br />
ponctuellement porta le nom de la « Rue<br />
<strong>du</strong> Midi ». Cette rue, où nous habitions, fut associée,<br />
bien malgré elle, à une grande partie de la<br />
vie <strong>du</strong> <strong>Stade</strong> de cette époque. Il y avait beaucoup<br />
de camaraderie et de complicité entre nous, avec<br />
un trio inséparable : Jean-Pierre, Roger et Jean-<br />
Louis. Cette amitié in<strong>des</strong>tructible si elle le reste<br />
toujours avec Jean-Pierre Clet, elle a dû, malheureusement,<br />
s'interrompre lorsque Roger nous a<br />
quittés.<br />
Parler d'argent paraît bien ridicule aujourd'hui<br />
mais heureusement que nos parents, que nous appelions<br />
alors en PCV depuis la cabine « <strong>des</strong> Américains<br />
», pouvaient nous aider. Nous avions 5<br />
tickets repas, par semaine, pris au restaurant<br />
Dupuy à 3,25 francs – 3,75 francs avec le quart de<br />
vin. Dans ce restaurant, il y avait un mélange très<br />
éclectique où se côtoyaient, <strong>des</strong> rugbymans, <strong>des</strong><br />
employés de banque, un marchand « gueule cas-<br />
sée » de billets de loterie et le fameux Dédé qui<br />
distribuait « La Dépêche » à vélo en s'écriant<br />
« Enfin, ça y est ! », annonçant <strong>des</strong> nouvelles les<br />
plus extravagantes pour mieux vendre ses journaux.<br />
A la faveur de quelques rares places de match gratuites,<br />
qu'il nous fallait quémander au Secrétaire<br />
Trézy, nous avions droit à « Un supplément pour le<br />
stade ! », une phrase prononcée à haute voix par<br />
la serveuse au travers <strong>du</strong> passe plats qui donnait<br />
dans la cuisine. C'était à la fois amusant et appréciable<br />
même si cela nous mettait un peu mal à<br />
l'aise vis-à-vis de nos voisins de table.<br />
Pour le reste, nous étions aux primes de match et<br />
malgré notre bonne volonté et l'enthousiasme inébranlable<br />
de notre opiniâtre capitaine, Jeannot<br />
Fabre, nous n'en gagnions pas beaucoup. Cela se<br />
tra<strong>du</strong>isit la première année par une anecdote<br />
croustillante. Notre Trésorier était un brave boucher<br />
M. Andrau, auquel on fit bien <strong>des</strong> farces<br />
jusqu'à défiler la nuit sous son balcon en entonnant<br />
« nous avons faim ! », (prémices de 68) et lui<br />
envoyant par <strong>des</strong>sus son étal <strong>des</strong> sardines salées<br />
depuis longtemps. Il nous recevait, tous les trimestres,<br />
pour nous remettre les fameuses primes.<br />
La Rue <strong>du</strong> Midi allait être vite servie :<br />
« Vous avez votre logement qui fait « tant », vos<br />
tickets repas font ou tant » et comme vous n'avez<br />
gagné que tel ou tel match, vous me devez « tant »<br />
que je vous retiendrai le trimestre prochain ». Heureusement,<br />
il n'en fut rien.<br />
LES ANCIENS DU STADE TOULOUSAIN