Calibre 11 Marcel Gozzi - Pitbook.com

Tu l’aurais regretté longtemps.
Pour le travail, on pouvait te faire confiance. Tu étais
prêt à y consacrer toutes tes journées et une partie de tes
nuits (peut-être?) et même les samedis et les dimanches,
mais tu réussirais.
La chance ne t’a pas souri, l’occasion rêvée ne s’est pas
présentée. L’entreprise idéale: bon marché, rentable, à
taille humaine, était une utopie. Comme tu avais les
pieds sur terre, tu recherchais, en même temps, un
travail salarié, par le canal des petites annonces. Le
risque pour le risque, l’aventure vouée à l’échec, le saut
dans l’inconnu ne te captivaient pas. Tu n’étais pas
parieur.
Un an vient de s’écouler déjà depuis que tu as perdu
ton emploi. Tu as étudié les comptes d’exploitation et
les bilans de plusieurs entreprises. Tu as prospecté le
marché, noué des contacts, étudié, analysé, négocié
ferme et voyagé beaucoup. Tu as rencontré des
entrepreneurs, des banquiers, des comptables, des
notaires, des conseillers des chambres de commerce et
des représentants des administrations locales. Dans les
bureaux moquettés, ces messieurs t’ont fait miroiter
toutes sortes d’aides auxquelles pouvait prétendre un
chômeur (oh pardon, un travailleur involontairement
privé d’emploi) désireux de reprendre ou de créer une
entreprise. Et il y en avait beaucoup. Promesses!
Des messieurs compréhensifs encourageaient ton
initiative, " c’est bien pour l’économie locale ". Devant
toi ils déroulaient le tapis rouge des louanges, mais leur
escarcelle n’était pleine que de paroles. Leur langage
était flatteur, mais leurs mains étaient vides. Tu
moissonnais les espoirs, les déceptions et les regrets. Tu
apprenais beaucoup.
Quoi? A qualifier les concepts administratifs.