evaluation echographique de l'infertilite masculine - Lazraq info

MISE
AU POINT
RESUME
INTRODUCTION
N. EL GHAZOULI, F. AMRAOUI, A. SKALLI, N. CHIKHAOUI
Service de Radiologie des Urgences, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
Le partenaire masculin est à l’origine de 50% des infertilités
du couple. La prise en charge d’une infertilité masculine doit
faire appel à un examen clinique, à des examens de laboratoire
(spermogramme, dosages hormonaux) et à un bilan ultrasonore
urogénital. L’infertilité masculine est due à diverses causes
incluant des pathologies testiculaires (infertilité d’origine
sécrétoire) et des lésions obstructives de la voie séminale
(infertilité de cause excrétoire). L’échographie avec une voie
abdominale, une voie scrotale et une voie endorectale est
devenue l’examen d’imagerie de référence pour analyser
l’infertilité masculine et plus particulièrement pour mettre
en évidence des causes obstructives dues à des lésions
inflammatoires, à une agénésie déférentielle ou à un kyste
du carrefour urogénital. Le but principal de cet article est
d’illustrer par échographie l’anatomie normale de l’appareil
génital masculin et de détailler les caractéristiques ultrasonores
des lésions responsables d’une infertilité chez l’homme.
Mots clés : appareil génito-urinaire ; ultrasons ; testicule ;
épididyme ; vésicule séminale ; canal déférent ; stérilité
Correspondance : Dr. N. EL GHAZOULI, Service de
Radiologie des Urgences, CHU Ibn Rochd, Casablanca,
Maroc. E-mail: nawalelghazouli@yahoo.fr
L’infertilité de couple définie par l’absence de
conception après deux ans de rapports sexuels non
protégés concerne 15% des couples [1]. Le partenaire
masculin est responsable de l’infertilité dans environ
50% des cas en raison d’une baisse temporaire ou
définitive de la qualité du sperme [2]. Si l’infertilité est
due à un défaut de la spermatogenèse, elle est d’origine
« sécrétoire » ; si elle est la conséquence d’une anomalie
du transport des spermatozoïdes dans la filière génitale,
elle est d’origine « excrétoire ». En fonction du caractère
réversible ou non réversible de leur déficit, le traitement
peut faire appel à un geste curateur sur l’appareil génital
(intervention chirurgicale) ou à une assistance médicale
à la procréation. L’exploration d’une infertilité masculine
doit inclure un examen clinique, des dosages
hormonaux sanguins, un bilan spermiologique et un
bilan ultrasonore uro-génital. L’échographie a remplacé
la déférentographie qui était un geste vulnérant pouvant
engendrer des lésions définitives de la voie séminale
[3].
EVALUATION ECHOGRAPHIQUE DE
L'INFERTILITE MASCULINE
-7-
ABSTRACT
J Maroc Urol 2008 ; 10 : 7-11
SONOGRAPHIC EVALUATION OF HUMAN MALE
INFERTILITY
The male partner is responsible for 50% of infertility in
couples. Assessment of male infertility should include clinical
examination, laboratory tests (semen analysis, dosage of
gonadal and gonadotropic hormones) and sonographic
examination of the urogenital tract. Male infertility is related
to diverse abnormalities including testis lesions (infertility of
secretory type) and obstructive disorders of the genital tract
(infertility of excretory type). Sonographic examination with
abdominal, scrotal and transrectal probes has become the
major imaging modality to evaluate male infertility and
especially to analyze infertility of excretory type related to
inflammatory lesions, congenital agenesis of vas deferens
and congenital cyst of the distal genital tract. The main
purpose of this paper is to illustrate with sonography the
normal anatomy of the male genital tract and to detail
sonographic features of current pathologies reponsible for
human male infertility.
Key words : genitourinary system ; ultrasound ; testis ;
epididymis ; seminal vesicle ; vas deferens ; sterility
BILAN PRATIQUE DANS LE CADRE DE
L’INFERTILITE MASCULINE
- L’interrogatoire recherche des antécédents de lésion
testiculaire (cryptorchidie, traumatisme, torsion,
orchite...), d’infection génito-urinaire, de maladie
cancéreuse ou endocrinienne, d’intervention
chirurgicale abdominale ou pelvienne et d’exposition
à divers types de substances toxiques ou de
rayonnement [3].
- L’examen physique permet d’analyser le morphotype
du patient (recherche d’hypogonadisme) et d’apprécier
l’état des testicules, des épididymes, des canaux
déférents et de la prostate.
- Le bilan spermiologique doit être réalisé après 4 à 5
jours d’abstinence sexuelle. Il doit inclure un
spermogramme, une spermoculture et une biologie
séminale avec mesure du pH.
- Les dosages hormonaux sanguins comprennent un
dosage de LH, de FSH et de la testostérone.

Evaluation échographique de l’infertilité masculine
- Le bilan ultrasonore uro-génital doit comporter une
exploration génitale (testicules, épididymes, canaux
déférents, vésicules séminales et prostate) et urinaire
(reins et vessie) [3, 4].
ANATOMIE ECHOGRAPHIQUE DE L’APPAREIL
GENITAL MASCULIN (fig. 1)
Les testicules mesurent normalement entre 30 et 50
mm de longueur et entre 20 et 40 mm d’épaisseur. Ils
sont analysés par voie scrotale grâce à des coupes
longitudinales et transversales. Leur échostructure est
homogène et symétrique (fig. 2). Seule l’albuginée est
hyperéchogène. Les replis de l’albuginée au pôle
supérieur du testicule délimitent le hile testiculaire qui
apparaît triangulaire hyperéchogène par rapport au
reste de la glande (fig. 3). Les canaux efférents sont
visibles sous la forme de fines lignes hypoéchogènes
au sein du hile testiculaire.
Bec séminal
Canal
éjaculateur
Prostate
Ampoule
déférentielle
Vésicule séminale
Tête d’épididyme
Corps d’épididyme
Queue d’épididyme
Fig. 1. Anatomie de l'appareil génital masculin
Canal déférent
Testicule
-8-
N. EL GHAZOULI et coll.
Fig. 2. Testicule normal à contours réguliers (flèche)
Fig. 3. Hile testiculaire normal (flèche)
Les épididymes sont analysés par voie scrotale grâce
à des coupes longitudinales et transversales. Elles
possèdent trois parties :
* La tête (fig. 4a) est triangulaire, mesurant 8 à 15 mm
de grand axe, d’échostructure proche de celle du
testicule et localisée au pôle supérieur du testicule.
* Le corps (fig. 4b) est une structure tubulaire se
localisant sur la face postérieure de la glande.
* La queue (fig. 4c) est une structure arrondie située
au pôle postéro-inférieur du testicule.
Les canaux déférents sont des structures tubulaires
prolongeant les épididymes dont l’échostructure est
proche.

Les vésicules séminales sont des structures tubulaires
situées en arrière des canaux déférents. Elles mesurent
3 ± 0,5 cm de grand axe (fig. 5).
La prostate est d’échostructure homogène chez l’adulte
jeune (fig. 6). L’urètre apparaît comme une structure
tubulaire hypodense à la partie médiane de la prostate.
Il peut exister à l’état normal quelques calcifications
périurétrales dans la zone de transition (sympexions).
a b c
Fig. 5. Vésicule séminale (flèche) et terminaison
du canal déférent droit (têtes de flèche) normales
Fig. 4. Epididyme normal (tête, corps et queue)
-9-
J Maroc Urol 2008 ; 10 : 7-11
ECHOGRAPHIE DANS L’EXPLORATION DES
PATHOLOGIES COURANTES
Les lésions testiculaires sont en général responsables
d’une infertilité sécrétoire à FSH élevée [1, 5, 6]. On
distingue deux types de situation :
• L’interrogatoire retrouve un point d’appel testiculaire
(antécédent d’infection, de torsion, de cryptorchidie...)
et l’examen clinique confirme une atrophie des deux
testicules. L’échographie met en évidence une atrophie
glandulaire hétérogène et bilatérale (fig. 7).
Fig. 6. Canaux éjaculateurs (têtes de flèche)
et prostate (flèche) normaux

Evaluation échographique de l’infertilité masculine
Fig. 7. Atrophie testiculaire gauche à contours irréguliers
• Il n’y a pas de point d’appel testiculaire lors de
l’anamnèse et lors de l’examen clinique.
L’échographie oriente le diagnostic vers une cause
sécrétoire en mettant en évidence des anomalies de
l’échostructure testiculaire telles que des microlithiases
(fig. 8) ou des hétérogénéités parenchymateuses [7].
Fig. 8. Microlithiases testiculaires (têtes de flèche)
-10-
N. EL GHAZOULI et coll.
Lors des malformations de la voie séminale à type
d’agénésies uni- ou bilatérales des canaux déférents
[3, 6, 8], l’échographie scrotale démontre l’absence
uni- ou bilatérale des corps et queues d’épididymes et
parfois une rétention kystique de spermatozoïdes au
niveau des têtes épididymaires (spermatocèle) (fig. 9).
Par voie endorectale, l’absence d’une ou des deux
ampoules déférentielles est facilement mise en évidence
à la face postéro-supérieure de la prostate. La vésicule
séminale homolatérale à l’agénésie déférentielle est
pathologique dans 90% des cas et peut présenter une
atrophie, une dilatation kystique, des calcifications ou
un aspect anormalement échogène de sa lumière dû
aux phénomènes de rétention de liquide séminal
(fig. 10).
Fig. 9. Spermatocèle épididymaire avec agénésie du corps
et de la queue de l'épididyme ainsi que du canal déférent
Fig. 10. Dilatation kystique de la vésicule séminale
droite due à une rétention de liquide séminal
dans le cadre d'une agénésie déférentielle

Il faut aussi rechercher une agénésie rénale unilatérale
associée :
• Les infections de l’appareil génital asymptomatiques
sont à la longue responsables de lésions épithéliales
irréversibles à l’origine de sténoses ou d’occlusions
canalaires (épididymes, canaux déférents, vésicules
séminales, canaux éjaculateurs). Les germes en cause
sont surtout le Chlamydia trachomatis et l’Ureaplasma
urealyticum [1]. Le diagnostic de certitude n’est
apporté que par la mise en évidence du germe
pathogène sur la spermoculture. L’échographie peut
montrer [9] :
* Au niveau des épididymes, des zones
hypoéchogènes ou hyperéchogènes, voire calcifiées
plus ou moins étendues associées à une
augmentation de calibre (fig. 11).
* Au niveau des canaux déférents, des vésicules
séminales et des canaux éjaculateurs, des zones
hyperéchogènes ou des calcifications intrapariétales
ou intraluminales.
* Au niveau de la prostate, des zones hypo ou
hyperéchogènes voire des calcifications
intraglandulaires.
• Les kystes du carrefour urogénital se situent au niveau
de la confluence des canaux éjaculateurs et peuvent
ainsi les comprimer [10].
Fig. 11. Lésions infectieuses de l’épididyme (flèches)
-11-
CONCLUSION
La prise en charge de l’infertilité du couple nécessite
une approche multidisciplinaire et spécialisée dans
laquelle le radiologue doit tenir toute sa place. Dans
l’exploration du partenaire masculin, l’échographie est
un examen non vulnérant, de réalisation simple qui
fournit une analyse anatomique précise de l’appareil
génital et oriente en association avec le bilan
spermiologique et les dosages hormonaux sanguins
vers une cause dans la majorité des cas.
REFERENCES
J Maroc Urol 2008 ; 10 : 7-11
1. Ardaens Y, Cornud F. Imagerie et infertilité du couple.
Paris, Masson 1998.
2. Schlosser J, Nakib I, Carré-Pigeon F, Staerman F. Infertilité
masculine : définition et physiopathologie. EMC,
Urologie 2007 ; 18-760-A-10.
3. Brunereau L. Imagerie de l’hypofertilité masculine. EMC,
Radiodiagnostic V, Urologie-Gynécologie 2006 ; 34-
510-A-10.
4. Kuligowska E, Baker CE, Oates RD. Male infertility :
role of transrectal US in diagnosis and management.
Radiology 1992 ; 185 : 353-60.
5. Kuligowska E, Fenlon HM. Transrectal US in male
infertility : spectrum of findings and role in patient care.
Radiology 1998 ; 207 : 173-81.
6. Carmignani L, Gadda F, Mancini M, Gazzano G, Nerva
F, Rocco F, Colpi GM. Detection of testicular
ultrasonographic lesions in severe male infertility. J Urol
2004 ; 172 : 1045-7.
7. Von Eckardstein S, Tsakmakidis G, Kamischke A, Rolf
C, Nieschlag E. Sonographic testicular microlithiasis as
an indicator of premalignant conditions in normal
and infertile men. J Androl 2001 ; 22 : 818-24.
8. Abbitt PL, Watson L, Howards S. Abnormalities of the
seminal tract causing infertility : diagnosis with endorectal
sonography. AJR 1991 ; 157 : 337-9.
9. Goullet E, Rigot JM, Blois N, Lemaitre L, Mazeman E.
Role of systematic scrotal ultrasonography in the
management of male infertility : prospective study of
609 cases. Prog Urol 2000 ; 10 : 78-82.
10. Cornud F, Belin X, De lafontaine D, Amar T, Hélénon
O, Moreau JF. Imaging of obstructive azoospermia. Eur
Radiol 1997 ; 7 : 1079-85.