Quelques enseignements sur l'économie sociale et ... - ECO Consult

Durant le séjour, les animaux bénéficient de certains résidus de culture des agriculteurs du
Saloum. Toutefois, des concordes entre communautés semblent de plus en plus monétarisées
et les anciens contrats de fumure 59 se raréfient maintenant. Les complicités religieuses jouent
certainement un grand rôle dans la tolérance des transhumants. De grands marabouts du
Ferlo se rendent personnellement sur place pour activer ces types de réseaux (Marsan,
2007) 60 . Par ailleurs, les déplacements s’avèrent de plus en plus problématiques même si
l’histoire abonde déjà de conflits entre agriculteurs et pasteurs : Pélissier, (1966), Weicker,
(1993). La faible reconnaissance du droit des pasteurs par les communautés rurales du
Saloum accentue certainement les tensions (Häuser, 2002) allant jusqu’à la mise en fourrière
des animaux. L’absence de complémentarité offerte et de pouvoir de négociation des
pasteurs face aux agriculteurs aggrave le déséquilibre du rapport social.
Notons qu’à de telles latitudes, l’amélioration de l’alimentation de ces ovins grâce à des
parcours fournis a des conséquences positives sur leurs performances zootechniques. Mais ce
départ en transhumance sur de longues distances n’est possible que par le fractionnement de
la famille (donc de sa main d’œuvre) et de l’appareil de production (charrettes, contenants
pour l’eau, ânes, chevaux). Ce type de transhumance nécessite également un nombre suffisant
d’ovins afin de permettre à une partie de la famille de vivre sans aucune autre ressource
pendant plusieurs mois (6 à 8 mois). Ce sont donc des critères particulièrement sélectifs pour
les familles candidates à la transhumance.
Ces transhumances vers le sud permettent aux éleveurs de se rapprocher sensiblement des
foyers de consommation de viande et de lait et d’en tirer un profit substantiel. Ces contacts
commerciaux sont d’autant plus facilités que ces zones sont couvertes par la téléphonie
mobile (contrairement à la majorité du Ferlo). Elle permet, grâce à un réseau d’informateurs,
de suivre les prix pratiqués dans les grands marchés de revente, dont ceux de Dakar. Ce type
de fractionnement du troupeau permet également au fils aîné de gagner une autonomie
sociale et économique.
On note que sur trois forages étudiés (Amali, Bélél Bogal et Mbar Toubab) la conduite de la
transhumance est couplée avec la pratique de l’engraissement en vue de la revente des béliers
59 Il est intéressant de relever que Dupire soulignait l’importance de ces contrats en 1956 : Il ira fumer le
champ d’un Wolof avec son troupeau, ou se fera berger, métier que choisissent ordinairement les jeunes gens peu fortunés.
(In Dupire (1956), cité par Grosmaire, 1957 : Annexe « Pêche… » 22-23).
60 Cas du marabout du forage de Bélél Bogal qui part 3 à 5 mois par an avec des troupeaux d’ovins en
transhumance en tentant de créer des alliances durables sur des espaces pastoraux nouveaux :
exploitation de la vaine pâture et des espaces interstitiels de la brousse de Saloum (Marsan, 2007 : 56-57).
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