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Face-à-face avec la mort Frédéric Rossel, volée SCT 1999 – 2001 ...

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Chaque être humain se retrouve ainsi <strong>avec</strong> le défi d’une vie devant lui <strong>à</strong> faire croître<br />

librement.<br />

Tout ce qui précède donne un sens profond <strong>à</strong> toute vie pour les chrétiens, mais il faut se<br />

rendre compte du prix <strong>à</strong> payer de cette liberté de choisir sa vie et d’y donner soi-même un<br />

sens qui ne « tombe » pas d’en haut ; ce peut être le désespoir <strong>face</strong> <strong>à</strong> une trop grande<br />

douleur… « C’est aussi l’étrangeté de <strong>la</strong> souffrance, elle oblige <strong>à</strong> chercher le plus profond de<br />

sa vie, de sa force et de sa volonté. Au risque de ne pas trouver ! » 7<br />

La plus belle figure biblique qui, elle aussi, a tremblé devant l’ampleur de <strong>la</strong> souffrance et<br />

désiré s’y soustraire, c’est le Christ, dans le jardin de Gethsémani : alors que son âme est<br />

triste « <strong>à</strong> en mourir » (Mc 14, 34), il s’éloigne des disciples et prie son Père d’éloigner de lui<br />

<strong>la</strong> coupe de douleur de <strong>la</strong> Passion (Mc 14, 36).<br />

D’un point de vue existentialiste, on retrouve ici exactement l’angoisse de ces patients <strong>à</strong> bout<br />

qui demandent l’euthanasie. Et si le Christ a traversé seul cet extrême, <strong>à</strong> combien plus forte<br />

raison nous devons-nous d’accompagner et d’entendre <strong>la</strong> p<strong>la</strong>inte de ceux qui souffrent…<br />

Les risques<br />

Quels risques y a-t-il <strong>à</strong> tolérer l’euthanasie dans sa pratique courante en Suisse, quels risques<br />

<strong>à</strong> <strong>la</strong> libéraliser totalement, c’est ce que nous allons voir maintenant.<br />

Tout d’abord, le risque que nous avons déj<strong>à</strong> évoqué de court-circuiter le processus du deuil,<br />

que ce soit chez le patient ou pour sa famille; en hâtant artificiellement <strong>la</strong> <strong>mort</strong>, il se peut que<br />

le patient ne soit pas au terme du processus de récapitu<strong>la</strong>tion de sa vie et n’ait pas bouclé<br />

certaines étapes nécessaires, tout comme il se peut que sa famille ne soit pas prête <strong>à</strong> le <strong>la</strong>isser<br />

partir. Ce d’autant plus que les ADMD insistent sur le fait que <strong>la</strong> décision d’un suicide assisté<br />

ne doit pas trop tarder sous peine que le patient n’ait plus <strong>la</strong> capacité de s’administrer <strong>la</strong><br />

substance létale de manière autonome… On peut craindre de voir s’installer un climat<br />

d’urgence dans des situations où l’on sait pourtant que le cheminement d’un ma<strong>la</strong>de <strong>face</strong> <strong>à</strong> <strong>la</strong><br />

ma<strong>la</strong>die se traduit dans <strong>la</strong> durée.<br />

Ensuite, le risque pour ceux qui accompagnent le patient de valider trop vite son désir de<br />

mourir sans le décoder. Au lieu d’en chercher les motifs, on tombe alors dans l’excès<br />

d’accréditer sans réserve <strong>la</strong> déréliction du patient.<br />

Il y a une étroite marge de manœuvre entre, d’un côté, inviter <strong>à</strong> <strong>la</strong> vie de manière béate (du<br />

genre : « Vous verrez, ça ira mieux demain ! ») et, du coup, se montrer inadéquat <strong>avec</strong> le<br />

patient et, de l’autre, accentuer sa détresse en al<strong>la</strong>nt sans nuance dans le sens de <strong>la</strong> perte<br />

irrémédiable. La société est déj<strong>à</strong> bien assez encline <strong>à</strong> remettre en cause <strong>la</strong> dignité des<br />

personnes ma<strong>la</strong>des, c’est aux soignants dans chacun de leur geste d’essayer de restaurer le<br />

ma<strong>la</strong>de dans son corps et dans son âme, afin que sa vie ne soit pas niée.<br />

Sur un p<strong>la</strong>n global, il existe aussi le risque de voir petit <strong>à</strong> petit des pressions économiques et<br />

sociales s’exercer sur le choix de mourir ; on sait le manque de lits de certains services<br />

hospitaliers et les coûts de <strong>la</strong> santé liés au vieillissement de <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion. Ces facteurs<br />

7 E. Hirsch, Soigner l’autre, Ed Belfond, Paris, 1997, p.215

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