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BONDOM<br />
A l K A<br />
Je t’ai cherché<br />
mais en vain<br />
Jusqu’à la lisière<br />
De ma folle folie:<br />
TUER LA MORT<br />
Et chaque fois<br />
Que je vois un défunt<br />
Sans souffl e vital<br />
Le corps vidé de tout rythme<br />
Je fi xe ce masque mortuaire<br />
Pour essayer de pénétrer<br />
Dans les moindres fi ssures<br />
De sa dignité altière<br />
A l’instar des ancêtres Baoulé ou yoruba<br />
Impénétrables dans leurs<br />
Formes de cire fondue<br />
Ou de terre cuite<br />
Ce masque mortuaire qui est là<br />
Splendide dans sa solitude<br />
Son indifférence à nos insultes<br />
A nos médisances<br />
A nos louanges posthumes<br />
Tout comme à nos larmes de crocodile<br />
Le visage droit et fi er<br />
Comme un sexe de victoire<br />
Tu es là devant nous<br />
Loin des pleurs des rumeurs<br />
Et des murmures susurrés<br />
Tu avances SEUL<br />
Dans la nuit armée d’ombres et de<br />
mystère<br />
I K A<br />
J’ai essayé de farfouillé (au<br />
Fond de ta libido<br />
Pour déceler tes mille et<br />
TEMOIGNAGES<br />
BONDOM - par Elolongué EPANYA YONDO<br />
12<br />
Un trésor<br />
Dans les recoins de tes secrets les<br />
mieux gardés<br />
Les plus préservés<br />
Mais je me suis heurté au<br />
BON DOM<br />
En essayant de toucher avec mes<br />
doigts<br />
Le fond d’une calebasse comme le<br />
tien<br />
Nul n’a pu jauger l’autre<br />
avec certitude<br />
I K A Tu laisses un vide<br />
Que seuls<br />
Nos petits enfants rempliront<br />
De leur clameur pour saluer<br />
Le jour que nous sommons<br />
De se Lever<br />
Paris le 23/07/1996<br />
Elolongue Epanya Yondo<br />
semble «grand» comme le suggèrent les<br />
noms des lycées environnants de mes<br />
classes préparatoires: Louis-Le- Grand,<br />
Henri IV...<br />
Et pourtant, des hauteurs de ces sommets<br />
de la culture et en profondeur de<br />
ce «halo», j’allais pour ainsi dire être<br />
assigné ce jour-là à une leçon d’écriture<br />
et de lecture quasi- méthodiquement<br />
préparée par P’a Ika comme un retour à<br />
l’école d’une autre amplitude.<br />
Et, ici, la table du repas avec son menu<br />
quotidien judicieusement choisi et apprêté<br />
avec son vin blanc, allait un moment<br />
se muer en une solennelle et pourtant<br />
discrète table d’écriture et de lecture.<br />
Car P’a Ika aura décidé de m’offrir, avant<br />
le repas et pour célébrer l’évènement,<br />
le livre de Cheikh Anta Diop: « Nations<br />
Nègres et Cultures». Et la leçon de P’a<br />
Ika, à la suite d’Anta Diop, n’est pas tout<br />
à fait consommée: il faut aller au plus<br />
profond.<br />
Alors vint le moment de l’écriture et de<br />
lecture: P’a Ika prit le plaisir de déployer,<br />
avec son stylo, une dédicace qu’il écrivit<br />
et énonça méthodiquement à l’intention<br />
de son jeune ami : et cela, en une langue<br />
bantoue, en une langue duala pure, ma<br />
langue maternelle, une des langues nationales<br />
du Cameroun. Nous fûmes ainsi<br />
conduits au cœur d’une intimité culturelle<br />
et, à travers le « format» d’un proverbe<br />
duala, comme au sens édicté par les ancêtres<br />
qui interpellent pour ainsi dire les<br />
générations futures et qui placent les «<br />
pères» sous le soleil divin de l’expérience,<br />
et les «fi ls» sous celui non<br />
moins divin de la nouveauté, de la<br />
connaissance et de la science, et cela<br />
TEMOIGNAGES<br />
17<br />
non en termes de contradiction mais de<br />
fécondation et d’engendrement réciproques<br />
et continus.<br />
Notre repas fut ainsi d’abord servi sur<br />
une table d’initiation aux nouvelles belles<br />
lettres et à la musique de la langue<br />
maternelle. Et cela, pour le jeune agrégé<br />
des lettres françaises<br />
désormais placé non plus au sommet<br />
comme au terme d’une messe de couronnement<br />
des connaissances préparant<br />
à un crépuscule des acquis, mais à<br />
l’aube des grandes<br />
commencements en tant qu’écoles de<br />
l’humilité, de l’autonomie et de la responsabilité<br />
que doivent assurer le bain<br />
et l’enracinement dans le dialogue des<br />
générations et des cultures<br />
perpétuellement ouvertes au «halo» de<br />
l’universel et à la complémentarité requise<br />
de l’expérience. C’est «une génération<br />
dans le beau et l’immortalité» pour<br />
reprendre ici les<br />
propos de Platon dans son dialogue «Le<br />
Banquet».<br />
Et la suite de notre repas fut un vrai banquet<br />
déployé en échanges de connaissances<br />
en même temps qu’une école de<br />
la responsabilité ouverte dans la société<br />
et la culture.<br />
II. P’A IKA ET LES AMPLITUDES DE<br />
L’ÉCRITURE ET DE LA RESPONSABI-<br />
LITÉ<br />
Si, comme l’affi rme Roland Barthes cité<br />
par Christian Salmon (p.15), «le récit est<br />
là comme la vie», il faut pourtant savoir<br />
et pouvoir le monter, le nouer, le vivre<br />
et le faire s’irradier à sa manière en des<br />
instances topologiques spécifi ques car il<br />
s’agit de le monter en ces lieux d’actions