Passion Architecture n°3 - UNSFA - Le syndicat des Architectes
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• LES ARCHITECTES DE L'URGENCE<br />
AU CHEVET DES BÂTIMENTS DÉVASTÉS<br />
ET DES SINISTRÉS<br />
“<strong>Architectes</strong> de l'urgence” a été créée<br />
début 2001 par <strong>des</strong> architectes picards,<br />
au moment <strong>des</strong> inondations de la Somme.<br />
L'association a également beaucoup œuvré<br />
à Toulouse après l'accident de l'usine AZF.<br />
Récemment, elle a envoyé <strong>des</strong> missions<br />
en Afghanistan ou à Dresde…<br />
Si la plupart du temps, les sinistres sont<br />
moins graves que ce qui est redouté<br />
par les particuliers, l'absence d'expertise<br />
peut parfois avoir <strong>des</strong> conséquences<br />
dramatiques.<br />
Ainsi un architecte, membre de l'association,<br />
a demandé l'évacuation d'une famille qui avait<br />
dormi toute une nuit au premier étage<br />
d'une maison dont le plancher ne tenait<br />
plus que par miracle.<br />
<strong>Le</strong>ur tâche de mise en sécurité accomplie,<br />
les architectes bénévoles établissent ensuite<br />
<strong>des</strong> diagnostics sur l'état <strong>des</strong> maisons<br />
et les travaux à engager. “En cas de litige<br />
ultérieur, pour un juge, l'avis d'un architecte<br />
a une valeur. Dans la Somme ou à Toulouse,<br />
ces documents ont pu aider à faire valoir<br />
les droits sur <strong>des</strong> sinistres ou <strong>des</strong> évolutions<br />
de sinistre”.<br />
<strong>Le</strong> président fondateur de l'association,<br />
Patrick COULOMBEL peste contre les freins<br />
qui sont mis à son action, notamment,<br />
selon lui, par les directions départementales<br />
de l'équipement qui “ne veulent pas voir<br />
leur pouvoir entamé”. Il évoque avec amertume<br />
les 75.000 € promis par la Ministre du<br />
Logement de l'époque, Marie-Noëlle Lienemann,<br />
au moment <strong>des</strong> inondations de la Somme.<br />
La subvention n'a toujours pas été débloquée<br />
à ce jour.<br />
Si “<strong>Le</strong>s architectes de l'urgence” est confrontée<br />
à un problème financier, les subventions<br />
n'étant débloquées qu'après les interventions ;<br />
elle n'en est pas moins active comme<br />
en témoigne l'une <strong>des</strong> membres fondatrices<br />
de la délégation toulousaine, Anne Vézard, architecte<br />
: “L’architecte au service du particulier :<br />
l'exercice est difficile humainement, architecturalement,<br />
financièrement. Pourtant, c’est<br />
avec passion et conviction que je m’y frotte<br />
tous les jours depuis 15 ans lorsque l’un d’eux<br />
sollicite mon professionnalisme pour construire<br />
parfois, mais bien plus souvent pour agrandir,<br />
surélever, aménager. C'est un peu chaque fois<br />
comme un départ en croisade : plein d’espoirs<br />
avant de nombreuses désillusions...<br />
Tout d’abord, les convaincre de votre utilité<br />
lors du premier rendez-vous.<br />
Puis en faire autant lors de la proposition<br />
du contrat. Avec ces nouveaux contrats<br />
au temps passé, il devient plus facile<br />
de leur proposer <strong>des</strong> honoraires.<br />
Cette étape cruciale permet aussi de faire<br />
valoir leur savoir-faire.<br />
Il s'agit ensuite de mettre en ordre les phases<br />
d'avancement, de parvenir à ce qu’ils patientent<br />
pour ne pas mettre la charrue avant les bœufs,<br />
qu’ils vous laissent le temps de gérer<br />
leur urgence sans faire d'impasse, sans<br />
bousculer trop dangereusement les 10.000<br />
autres urgences qui piaffent sur vos bureaux.<br />
L’esquisse : après avoir longuement écouté<br />
les dits, les non-dits et les re-dits, après avoir<br />
épluché les contraintes diverses et cariées<br />
dont la sécheresse <strong>des</strong> budgets, tenter<br />
une proposition en parlant un peu d’architecture.<br />
Combien de fois sera-t-il nécessaire<br />
de couper le vin, de transiger, de renoncer,<br />
pour ménager la chèvre et le chou ? Faire<br />
que votre intervention permette d’enrichir<br />
tant le bâti dans son ensemble que dans<br />
son fonctionnement interne, faire que le projet<br />
reste réaliste et séduisant, faire que vous ayez<br />
encore quelque plaisir sans trop de regrets<br />
à le regarder quand, enfin, il parviendra<br />
à les séduire eux...<br />
Pour plus d’informations, www.unsfa.com p. 41<br />
La vie<br />
syndicale<br />
Puis les autorisations souvent si lour<strong>des</strong><br />
à obtenir, les consultations si surprenantes<br />
dans leurs résultats, les chantiers où l'immanquable<br />
coordination et les inévitables<br />
réajustements auprès de tous ceux qui<br />
n'avaient pas compris vos plans, et autres<br />
indications envahissent votre planning.<br />
L’usure parfois alors vous saisit, vous faisant<br />
douter de tout, vous donnant l’envie de<br />
rejoindre ceux qui disent : “non, jamais<br />
cela !!!”.<br />
Pourtant, quelles satisfactions lorsque ce long<br />
processus vous offre la sensation d’avoir permis<br />
que la ville se fasse un peu moins laide, que<br />
notre métier en ce lieu soit reconnu, remercié et<br />
vécu, sobrement maxi avec plaisir au quotidien.<br />
Mais à quel prix ces petits plaisirs d’architectes,<br />
pour quelques petits “bonheurs d'architecture”<br />
combien de projets usants et désespérants<br />
pour ces quelques uns satisfaisants ?<br />
Que d’humilité, de patience, de disponibilité<br />
à déployer, de doutes à combattre lorsque,<br />
las, vous baissez les bras face à leurs incultures<br />
et mauvais goûts. À gérer ces quotidiens,<br />
vous en perdez votre architecture mais le goût,<br />
bon ou mauvais, n'est-il pas subjectif ?<br />
Comment démissionner ? comment abandonner<br />
? Sans doute ce jeu est-il nécessaire<br />
et en vaut-il la chandelle. Sans doute que<br />
de ne pas baisser les bras, que de chercher<br />
toujours à offrir un meilleur service tant<br />
dans l’écoute de nos clients que dans la qualité<br />
architecturale ressortant de nos mo<strong>des</strong>tes<br />
projets, est-il le prix à payer pour que peu à peu<br />
notre profession n’ait plus à justifier de<br />
sa raison d’être et puisse enfin vivre et<br />
travailler honorablement…”.<br />
Janvier 2003 • <strong>Passion</strong> <strong>Architecture</strong> <strong>n°3</strong> •<br />
LA VIE SYNDICALE