CHRONIQUE D'HISTOIRE MARITIME - Société Française d'Histoire ...

de cette présence sont associés au redressement de l’influence politique
et commerciale au Levant 40 . La reprise des travaux hydrographiques
dans les îles de l’Archipel (1816-1821) et l’assistance que la Marine
accorde en 1817-1818 à la mission archéologique du comte de Forbin
montrent parallèlement la volonté de renouer avec la tradition savante
de la marine de Louis XVI 41 . Les intérêts des catholiques d’Orient ne
sont pas comptés au début de la Restauration parmi les objectifs avoués
de ce relèvement naval. La défense des Lieux Saints et des intérêts
catholiques en Orient constitue toutefois un enjeu complexe. La
protection des Lieux Saints représente un patrimoine dynastique que
Louis XVIII, descendant de Saint Louis et « frère du roi martyr »,
n’entend pas abandonner. Les honneurs liturgiques qui consacrent la
prééminence française dans les affaires catholiques et l’appui des
missionnaires, si bien informés des affaires proche-orientales, forment
en outre un ensemble de droits et d’atouts d’autant plus précieux que
notre redressement régional doit alors s’insérer dans le concert des
Nations. Mineurs, les intérêts moraux et charitables, que l’on appelle
alors les « intérêts de sentiment » représentent les enjeux que l’opinion
instruite connaît le mieux. Depuis le XVIII e siècle, le sort des chrétiens
d’Orient suscite la compassion. Les sentiments proprement
philanthropiques ou humanitaires ne sont pas moins forts que la
sympathie confessionnelle. Evoquant le soutien accordé aux Pères de la
Terre Sainte par l’ambassade de France sous le Consulat, Chateaubriand
avait exalté en 1811 dans « L’Itinéraire de Paris à Jérusalem » la
vocation bienveillante de la France qui veille « jusqu’au fond de l’Asie à
la défense du misérable et protège le faible contre le fort » 42 . A la suite
de Chateaubriand, les voyageurs français en Orient associent à la Terre
Sainte les thèmes de la chevalerie et de la grandeur nationale. Dans la
dédicace de son voyage en Orient, le comte de Forbin (1779-1841),
directeur des Musées, rappelle en 1819 l’enracinement séculaire
charitable de la Maison de France en Palestine : « Le nom de vos
illustres ancêtres protège encore Bethléem, le Thabor et le Saint-
Sépulcre. Partout le voyageur est rassuré à la vue de cet emblème des lis
40
BB 4/397, Capitaine de vaisseau M. de Rigny, Mémoires sur les Echelles du Levant,
29 septembre 1817.
41
TAILLEMITE (E.), « La Marine française en Méditerranée Orientale », Académie de
Marine. Communications et Mémoires, Année académique 1995-1996, n° 3, p. 18-20.
42
CHATEAUBRIAND (François-René, comte de), Œuvres Romanesques et Voyages,
vol. 2, collection de la Pléiade, 1969, p. 1101.
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