CHRONIQUE D'HISTOIRE MARITIME - Société Française d'Histoire ...

qui s'expatrient, combien peu fondent un établissement sans une arrière
pensée de retour […]. L'anglais au contraire, quand il se décide à
émigrer, réalise toute sa fortune. Il embarque avec lui sa femme et ses
enfants et dit un adieu éternel à sa patrie. Aussi quelle différence entre
son établissement et celui du français ! Rien de provisoire, chez le
premier, sa maison est bâtie pour y mourir. » 76
Après avoir rétabli l'ordre à bord des baleiniers français et complété
leurs équipages par des hommes de son bord, Cécille appareille d'Hobart
le 24 février 1838 pour se rendre à Port Jackson où il demeure un mois
et demi à réparer les avaries dont avait eues à souffrir la corvette depuis
son départ de France. Ces travaux terminés, l'Héroïne quitte le 15 avril
Sydney pour se diriger vers la Nouvelle-Zélande. Deux semaines après,
le 28 avril 1838, la corvette arrive à la baie des Iles. Au mouillage,
Cécille trouve un baleinier français, le Gange, en proie à de grandes
difficultés : une mutinerie s'est en effet déclarée à bord et dix-huit de ses
hommes ont déserté. Faute d'un équipage suffisant, le Gange n'a alors
pu rejoindre les champs de pêche et attend depuis plus d'un mois les
secours de la corvette 77 . Aussi, pour permettre au capitaine Grandsaigne
de continuer sa campagne, Cécille donne l'ordre à huit de ses matelots
d'embarquer sur le baleinier. Selon lui, ces troubles à bord des baleiniers
qui relâchent à la baie des Iles, sont principalement le fait des "grog
shop's keepers" - Cécille désigne par ce terme les cabaretiers de
Kororareka, principal point de relâche de la baie - :
« Ces hommes sont le fléau de la baie des îles. Ils employent tous les
moyens possibles pour faire déserter les matelots qu'ils hébergent, et les
vendent ensuite 100 à 150 francs aux capitaines qui, ayant perdu leurs
équipages par les manœuvres de ces misérables, sont trop heureux de
trouver à embarquer les déserteurs d'un autre bâtiment. » 78
De plus, à la différence d'Hobart, aucune autorité officielle ne s'exerce
sur la baie, ce qui laisse bien entendu la place à toutes sortes de trafics.
Pendant son séjour à la baie des Iles, Cécille reçoit plusieurs fois
Monseigneur Pompallier, évêque de Maronée et vicaire apostolique de
76 A.N. BB 4 1023, op. cit., pp. 33-34.
77 A.N. CC 5 595 Déclaration de retour du Gange.
78 A.N. BB 4 1023, op. cit., 2 ème partie, p. 1.
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