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A NOS AMOURS

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4<br />

Les acteurs non<br />

professionnels de<br />

Passe ton bac<br />

d’abord (ci-contre),<br />

et les acteurs<br />

vedettes de Sous le<br />

soleil de Satan,<br />

Depardieu et<br />

Bonnaire<br />

(page suivante).<br />

■ LE RÉALISATEUR<br />

Pialat, la cicatrice intérieure<br />

« Je dis qu’on peut faire des entrées avec des bons films. La preuve a été faite. Il y a Pagnol, par exemple,<br />

seulement il est auteur. C’est ça ! Il n’est pas nécessaire de faire des films moins bons pour faire des entrées. Alors<br />

que tous ces gens qui tiennent le haut du pavé et qui imposent leurs produits dans le cinéma, en particulier en<br />

France depuis plus d’une décennie maintenant ! Pratiquement depuis la Nouvelle Vague. Ce sont ces gens qui<br />

prétendent que les films qui marchent sont des films faciles, qui font un tas de concessions. [...] C’est quand<br />

même pas par hasard que je cite Pagnol à tout bout de champ, et même à l’intérieur des films, parce que je ne<br />

rêve que de ça, de faire des films qui aient le succès qu’il a eu ». Maurice Pialat, au moment de la sortie de A nos amours.<br />

> Regarder en face<br />

On se souvient de la palme d’or attribuée sous les sifflets à Maurice Pialat,<br />

en 1987 à Cannes, pour Sous le soleil de Satan, et de cette phrase : « Vous ne m’aimez<br />

pas… Eh bien, je ne vous aime pas non plus ! » Ce n’est pas sous le signe de<br />

l’esthétique, de la morale ou de la métaphysique que Pialat place alors son<br />

triomphe, mais sur le plan affectif. La vie, l’amour, la mort, comme chez<br />

Lelouch, mais chaque plan de Pialat rappelle que le cinéma n’a pas été inventé<br />

pour fermer les yeux ou se boucher les oreilles, adoucir la vie ou anesthésier les<br />

consciences. « Le soleil ni la mort ne se peuvent regarder fixement », lit le Roi Soleil<br />

à la fin du merveilleux film de Roberto<br />

Rossellini, La Prise de pouvoir par Louis XIV,<br />

citant La Rochefoucauld (maxime n°26).<br />

Pialat en fait la matière même de son cinéma :<br />

regarder en face – et fixement, longuement–<br />

ce que, d’habitude, le cinéma nous permet<br />

d’éluder.<br />

Si cette exigence peut expliquer en partie la<br />

carrière difficile et chaotique de Maurice<br />

Pialat – dix longs métrages pour le cinéma en<br />

trente ans –, il faut ajouter que son parcours<br />

même ne ressemble à aucun autre dans le<br />

cinéma français. Maurice Pialat est né le 21<br />

© Gaumont<br />

août 1925 à Cunlhat, dans le Puy-de-Dôme. Son père, commerçant en « tout »,<br />

fait faillite alors que le petit Maurice a deux ans. Il sera élevé dans un milieu<br />

populaire à Courbevoie et à Montreuil. Comme tous les enfants, il aime le cinéma<br />

de l’époque, qu’il découvre surtout au patronage (Chaplin, Laurel et Hardy,<br />

Carné, La Bête humaine, Les Trois Lanciers du Bengale…), mais son intérêt pour la<br />

pratique du cinéma sera tardif. Il s’oriente d’abord vers d’autres arts. Après les<br />

Arts Décoratifs et les Beaux-Arts, où il est l’élève de Brianchon, Oudot et<br />

Desnoyer, il envisage un temps l’architecture, qu’il trouve trop technique, avant<br />

de se tourner vers la peinture. Il expose en 1945, 46 et 47 au Salon des moins de<br />

trente ans. Cet intérêt pour la peinture, qui le rapproche d’un homme tel que<br />

Bresson, un des rares cinéastes dont il reconnaisse l’influence, demeure essentiel<br />

pour comprendre son œuvre de cinéaste 1 . Parallèlement, Pialat fait du<br />

théâtre en amateur, écrit et monte des pièces et des spectacles burlesques.<br />

> L’irrémédiable<br />

C’est Pierre Braunberger, producteur de nombreux courts métrages de la<br />

Nouvelle Vague, qui lui permet de réaliser en 1960 L’Amour existe, un documentaire<br />

remarqué qui reçoit le Prix Louis Lumière et le Lion du court métrage<br />

au festival de Venise, et qu’on peut considérer comme la matrice de toute<br />

l’œuvre de Pialat. Apparaît déjà la veine autobiographique, puisque le film est<br />

nourri de visions et de souvenirs d’enfance et de jeunesse, Courbevoie,<br />

Montreuil… Ce documentaire est d’abord le constat douloureux de ce que le<br />

1. À l’époque d’À nos amours, il confie à Positif :« J’ai longtemps été paralysé par le fait d’avoir abandonné la peinture, parce que pour moi, il n’y a pas de comparaison, non seulement entre la peinture et le cinéma,<br />

mais entre la peinture et la littérature » (voir « Bibliographie », p. 23).

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