Joseph Césarini et Jimmy Glasberg - Arald
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Une Prison dans la ville<br />
2007, 52', couleur, documentaire<br />
réalisation : Catherine Réchard<br />
production : Zarafa Films, France 3 Normandie,<br />
Cityzen TV<br />
participation : CNC, CR Basse-Normandie,<br />
Maison de l’image/Basse-Normandie,<br />
Procirep, Angoa<br />
A Cherbourg, les passants ne prêtent plus<br />
vraiment attention aux grands murs gris<br />
qui s’élèvent en plein centre ville, face<br />
à la bibliothèque, <strong>et</strong> auxquels le marché<br />
s’adosse chaque jeudi. Derrière ces murs,<br />
les détenus de la maison d’arrêt observent,<br />
à travers les grilles de leurs fenêtres,<br />
le quotidien se dérouler sans eux.<br />
Suite d’impressions croisées entre dedans<br />
<strong>et</strong> dehors, le film questionne la place<br />
de la prison dans la communauté.<br />
Quelques refl<strong>et</strong>s dans les vitres<br />
de la bibliothèque, des pans de toits <strong>et</strong> de rues,<br />
des odeurs de feu de bois les jours<br />
de marché… Voilà ce que les prisonniers<br />
perçoivent du monde extérieur depuis<br />
leur cellule. De leur côté, les Cherbourgeois,<br />
employés <strong>et</strong> usagers de la bibliothèque<br />
ou habitants des immeubles voisins, essaient<br />
d’imaginer ce qui se passe à l’intérieur :<br />
“On ne les voit pas ces gens-là, mais on est<br />
obligé de penser à eux quand même !”<br />
Qu’ont-ils fait pour se r<strong>et</strong>rouver là ?<br />
Supportent-ils l’enfermement, notamment<br />
quand arrive la nuit <strong>et</strong> ses angoisses ?<br />
Ont-ils même une cour pour sortir un peu ?<br />
Que deviennent-ils après leur libération ?<br />
Au fil des entr<strong>et</strong>iens, ponctués par des scènes<br />
de la prison au quotidien, Catherine Réchard<br />
tente de percer l’imperméabilité des murs<br />
<strong>et</strong> fait sien le propos d’un des détenus :<br />
“Quand on ne voit pas, on ne peut rien faire.<br />
Si on voit la vie carcérale <strong>et</strong> comment<br />
les gens vivent dans leur cellule, ça peut<br />
changer les mentalités.” D. T.<br />
Le Déménagement<br />
2011, 54', couleur, documentaire<br />
réalisation : Catherine Réchard<br />
production : Candela Productions,<br />
France Télévisions, TV Rennes 35<br />
participation : CNC, CR Br<strong>et</strong>agne, Procirep,<br />
Angoa<br />
A la veille de leur transfert dans une nouvelle<br />
prison située en périphérie de Rennes,<br />
détenus <strong>et</strong> gardiens s’interrogent.<br />
L’ancienne prison manque certes d’hygiène<br />
mais par les fenêtres, on peut voir le ciel,<br />
des voitures qui passent, parfois quelqu’un<br />
qui salue. On y jouit aussi d’une relative<br />
liberté de déplacements dans les couloirs.<br />
Là-bas, dans la zone industrielle, tout sera<br />
moderne <strong>et</strong> rationnel mais, chacun le pressent,<br />
déshumanisé.<br />
Tourné dans la durée, pendant la période<br />
qui précède <strong>et</strong> qui suit le déménagement,<br />
le film rend compte, à travers de multiples<br />
entr<strong>et</strong>iens individuels, des rapports<br />
complexes que les détenus entr<strong>et</strong>iennent<br />
avec leur lieu de détention.<br />
Certes, ils ne l’aiment pas, mais ils se sentent<br />
attachés aux plus p<strong>et</strong>ites bribes de liberté<br />
qu’il autorise : déambuler entre les étages<br />
ou troquer des biens à l’aide de “yoyos”,<br />
ces fils tendus à travers les barreaux<br />
d’une cellule à l’autre. La prison moderne<br />
dans laquelle ils arrivent répond à des normes<br />
de sécurité plus élevées, elle perm<strong>et</strong><br />
à davantage de détenus d’avoir une cellule<br />
individuelle, de travailler, de pratiquer<br />
un sport <strong>et</strong> même une ou deux fois l’an<br />
d’avoir une vie de famille, mais elle atomise<br />
les rapports humains. Le grillage quadrillé<br />
qui couvre toute la façade, empêchant<br />
les regards d’embrasser le ciel <strong>et</strong> les mains<br />
de se tendre par-delà les barreaux,<br />
symbolise un enfermement plus radical<br />
<strong>et</strong> quasi mortifère. E. S.<br />
Film r<strong>et</strong>enu par la commission<br />
Images en bibliothèques<br />
Le film est fondé sur des entr<strong>et</strong>iens menés<br />
avec une poignée de détenus <strong>et</strong> quelques<br />
agents pénitenciers. Ils témoignent à visage<br />
découvert avec une remarquable sérénité.<br />
C<strong>et</strong>te confiance dans l’équipe de réalisation<br />
est sans doute le fruit d’un long travail de<br />
préparation, sur lequel repose le succès du<br />
film. Catherine Réchard est d’abord photographe<br />
<strong>et</strong> sait remarquablement filmer les<br />
espaces carcéraux dans leur rapport à la<br />
ville. Elle m<strong>et</strong> également la photographie au<br />
service de son film. En montrant les clichés<br />
“publicitaires” de la nouvelle prison aux détenus,<br />
elle les incite efficacement à exprimer<br />
leurs attentes ; elle place aussi le spectateur<br />
dans la même attente, en renforçant son<br />
empathie à l’égard des prisonniers. Dès lors,<br />
les questions d’architecture <strong>et</strong> d’organisation<br />
carcérales deviennent miraculeusement sensibles,<br />
<strong>et</strong> nous entrons de plain-pied dans le<br />
quotidien des prisonniers. Les principaux<br />
aspects de la nouvelle vie des détenus sont<br />
évoqués. L’hygiène <strong>et</strong> le confort se sont significativement<br />
améliorés, mais le silence <strong>et</strong><br />
l’isolement règnent. L’atmosphère générale<br />
est à l’apaisement. La violence carcérale<br />
semble mise entre parenthèses par les<br />
espoirs <strong>et</strong> les inquiétudes suscités par le<br />
déménagement. Ce moment particulier est<br />
cependant l’occasion de s’interroger sur l’efficacité<br />
de l’enfermement <strong>et</strong> les conditions<br />
d’incarcération dans ces nouveaux centres<br />
pénitenciers.<br />
Julien Farenc<br />
(Bibliothèque nationale de France, Paris)<br />
contrechamp des barreaux 101