Edition du 28 avril 2000

Quang-Vinh Tran,
informaticien et inventeur
«Je suis confiant et positif envers
cette ville. Néanmoins, je
souhaiterais qu’on la débarrasse
au maximum des voitures,
cela me paraît modulable,
dans cette ville où on
peut aller n’importe où à pied.
Je vis ici depuis l’âge de 7 à 8
ans (Vinh, 26 ans, est naturalisé
depuis novembre dernier,
ndlr) et je trouve cette ville tolérante.
J’aimerais qu’il y ait
plus d’activités originales,
comme le récent festival de
films fantastiques; que la Braderie
se fasse chaque année
mais on peut supprimer le Carnaval.
Sur un plan général, je
pense que La Chaux-de-Fonds
a un avenir dans l’informatique.»
VENDREDI 28 AVRIL 2000 LA CHAUX-DE-FONDS 15
Elections Citoyens et candidats
disent leurs craintes et leurs espoirs
A la veille des élections communales, la rédaction
a voulu connaître l’avis des candidats
sur les grands thèmes qui interpellent
les électeurs.
La politique ne fait plus recette. Année après
année, la participation s’effrite. Pourtant, année
après année, des femmes et des hommes partent au
Sylvia Morel, rad.
Baisser les impôts «En ce
moment, ça bouge! La nouvelle
échelle fiscale cantonale
est adoptée, la réorganisation
des contributions va suivre.
Manque la péréquation, que
nous soutenons. Une crainte
à ce sujet: que les citoyens du
Haut ne votent pas en assez
grand nombre pour faire pencher
la balance au mois de
mai. Sur le plan local, baisser
les impôts est une nécessité
pour améliorer l’attractivité
de la ville. Il y aura un effet
boule de neige: attirer du
monde par une fiscalité
moins lourde permettra à
terme d’engranger des revenus
supplémentaires... condition
d’éventuelles nouvelles
baisses d’impôts. Parallèlement,
le Parti radical prône
le désendettement de la collectivité
publique. Ainsi, la
Commune pourra mieux assumer
ses tâches, y compris
dans le domaine social. Aujourd’hui,
quand le toit d’un
collège coule, on nous dit que
l’argent manque pour les réparations.»
Marie-Claire Pétremand Genzoni, E+L
Transports «Les normes fédérales en matière de pollution et de
bruit sont régulièrement dépassées à La Chaux-de-Fonds, depuis
plusieurs années; ce problème est largement passé sous silence.
Nous craignons que cette situation se poursuive, car d’année en
année, la circulation augmente. Il doit y avoir prise de
conscience. La Ville doit adopter un plan directeur des transports.
Jusqu’à présent, elle a mené une politique à court terme et
au coup par coup. Nous voulons une meilleure sécurité pour les
cyclistes, avec un réseau cohérent reliant collèges et centres sportifs.
Le confort des piétons doit être amélioré, notamment sur le
Pod. La fonction de cette avenue, comme artère routière centrale,
doit être repensée. Pour les liaisons avec l’extérieur, il faut
ressortir le dossier de la suppression du rebroussement de Chambrelien,
pour parvenir en 20 minutes environ à Neuchâtel.»
Marie-Claire Bonfanti,
coiffeuse
«J’aimerais que les choses
s’améliorent quant à la sécurité;
d’une part, les gens ont
peur avec l’augmentation des
vols et des escroqueries;
d’autre part, la majeure partie
des citoyens et citoyennes est inquiète
par rapport à l’emploi.
Ces deux points sont importants,
vitaux même.
Je souhaite aussi qu’il y ait plus
de femmes élues et, dans la
foulée, plus de femmes à des
postes-clés pour pouvoir dénoncer
les dysfonctionnements et
les corruptions. Leur présence
accrue dans des sphères de décision
permettrait d’améliorer
la situation; une femme chef
d’entreprise serait moins sectaire
à l’engagement.»
combat. Affirment leur volonté de prendre en main
une part du destin de tous.
C’est que, s’ils éprouvent comme chacun d’entre
nous certaines craintes quant à l’avenir, ils sont
convaincus que l’exercice de la démocratie laisse
une place à l’espoir.
A l’aube du troisième millénaire, à La Chaux-de-
Fonds comme ailleurs dans le monde, on se pose la
Patrick Haldimann, lib.-PPN
Sécurité «Nous ne voulons pas peindre le diable sur la muraille
et La Chaux-de-Fonds se trouve dans une situation comparable à
celle de villes de même importance. Mais nous devons constater
que la violence est de plus en plus présente dans la rue, comme
à la gare par exemple. La police doit avoir une présence plus soutenue
et effectuer des passages réguliers dans différents lieux.
Nous n’ignorons pas le problème d’effectif mais peut-être que certaines
tâches pourraient être réparties différemment. Nous avons
une motion pendante sur ce sujet dont la réponse tarde; elle viendra
peut-être avec le projet de réorganisation de la police...
Cette problématique rejoint aussi notre voeu de collaboration intercommunale
avec Le Locle; des synergies doivent être trouvées
comme pour les transports et le Cifom, sans pour autant que les
économies de la restructuration se fassent sur le personnel.»
Michel Mange,
agent de sécurité
«Je ne suis pas un fervent des
votations et élections et je n’ai
pas assez de connaissances
pour prendre position. Pour
l’instant, je préfère être actif
dans la vie associative. La
Ville devrait favoriser les associations
à but non lucratif;
elle pourrait, par exemple,
mettre des locaux à disposition
à un prix raisonnable,
une fois par année. Par les expositions
et manifestations
qui attirent un public de
l’extérieur, les sociétés font
connaître la ville, ses spécialités
et ses environs, en montrent
les avantages et pas que
les désavantages. Un petit
coup de pouce politique serait
bienvenu.»
question de la pérennité du cadre de vie. Veut-on
continuer à cohabiter harmonieusement et préserver
la qualité de vie dans notre cité? Avec quels
moyens?
Avec des accents parfois divergents, les partis
cherchent des réponses. Nous avons soumis à cinq
candidats quelques-uns des thèmes les plus importants
qui touchent la ville. Nous restituons ci-des-
Laurent Kurth, PS
Penser région «De l’extérieur,
les Montagnes neuchâteloises
sont déjà perçues
comme un tout. Chez nous,
cette vision est partiellement
acquise dans la jeune génération,
un peu moins dans
l’ancienne. Fusion avec Le
Locle? Pourquoi pas, mais
pas nécessairement. Le PS
pense qu’il faut saisir chaque
occasion d’en débattre et
examiner systématiquement
ce qui pourrait être mis en
route à deux plutôt que tout
seul. C’est ainsi qu’émergeront
les enjeux et les solutions.
La question ne doit pas
rester taboue, mais les
craintes de la population doivent
être prises en compte,
en gardant une administration
de proximité. La dimension
régionale ne doit pas se
limiter à la collaboration
entre deux communes mais
être élargie à l’échelle du
canton ou de l’Arc jurassien,
pour dégager un potentiel de
développement. Pensons aux
transports, à la santé, à la
culture...»
Aline Bise,
étudiante
«Majeure depuis 1999 (Aline
était l’oratrice de la cérémonie
des nouveaux citoyens, ndlr),
c’est la première fois que j’irai
voter pour des élections communales.
J’aimerais que certaines
choses changent; par
exemple, les études sont de plus
en plus ciblées et difficiles
d’accès au niveau des exigences,
les choix d’orientation
se font trop tôt. En ville, c’est
dommage que les terrains sportifs
ne soient pas accessibles le
soir, par manque d’éclairage, et
que les voisins soient trop souvent
intolérants. Quant à mes
souhaits, j’espère que les accords
bilatéraux seront acceptés
pour que nous devenions
plus ouverts et plus tolérants.»
Eva Fernandez Aeberhard,
POP
Fiscalité «Pour le POP, la fiscalité,
c’est ce qui permet à
l’Etat de redistribuer les richesses.
Grâce à l’impôt, l’Etat
peut fournir des prestations essentielles
de manière égale
pour tous les citoyens. Nous insistons
sur l’importance de
l’impôt direct. Progressif, il est
plus juste que l’impôt indirect,
qui coûte plus aux pauvres
qu’aux riches. La droite ne
cesse de faire des cadeaux fiscaux
aux gens fortunés. Dernier
exemple en date, la suppression
de la taxe foncière
votée au Grand Conseil annulera
les effets de la péréquation.
Or cette dernière n’est
pas encore votée. Si elle devait
être refusée par le peuple, ce
serait une catastrophe pour la
ville de La Chaux-de-Fonds,
qui perdrait quelque chose
comme 11 millions de francs
de recettes. Tout se passe
comme si la droite voulait
pousser les villes gérées par la
gauche à prendre des mesures
impopulaires de restriction
des services publics.»
Sevdiye Aydin,
bibliothécaire
«Réfugiée politique, j’ai un
permis C et j’irai voter, aux
élections, pour la première
fois. Ce sera une manière de
m’intégrer dans cette ville où
je réside depuis six ans; dans
le même but, j’aimerais aussi
trouver un travail stable
pour avoir plus de contact
avec les gens que je trouve
chaleureux même s’ils sont
moins exubérants que chez
moi. Ici, avec ma famille
(mari et un enfant de 10 ans),
je me sens libre et je n’ai plus
peur mais si la démocratie
s’installait en Turquie, nous
y retournerions. Pour l’instant,
je suis contente de voir
que mon fils est bien intégré
dans le système scolaire.»
sous cinq de leurs réponses. Représentatives de
leurs positions, mais non exhaustives.
Les thèmes soumis à la réflexion des partis
étaient les suivants: la fiscalité, la démographie, la
collaboration intercommunale, la sécurité en ville,
les transports (privés et en commun), la vie culturelle,
l’environnement et le patrimoine, la vie associative,
l’image de la ville à l’extérieur. /réd
En période électorale, les
partis politiques, leurs candidats
et candidates, savent
ce qu’ils veulent défendre
pour la ville. Normal, élémentaire
même. Mais le bon
peuple, que souhaite-t-il?
Qu’espère-t-il encore? Qu’attend-il
des élu(e)s?
Nous avons tenté de le savoir.
Les six personnes interrogées
ci-dessous ont une représentativité
quasi exemplaire,
formant un microcosme
de société crédible
mais là s’arrête la vérité
scientifique.
Commentaire
Prêter l’oreille...
Le reste de l’exercice,
contenu des mini-interviews,
est parfaitement aléatoire,
constitué d’idées individuelles
qui ne renvoient pas
systématiquement aux élections
et aux futur(e)s
élu(e)s. A croire que la société
civile ne compte guère
sur ses représentant(e)s, oublient
même qu’ils et elles
peuvent relayer leurs souhaits
et soucis. Des soucis qui
collent fort à la vie quotidienne,
à l’environnement, à
un désir de liens sociaux, le
tout sur une trame
constante, et tissée serrée, de
conscience collective. Les politiciens
ont les mêmes soucis,
direz-vous, mais à oeuvrer
aux échelons supérieurs
– où se décide, c’est vrai, ce
qui marque ensuite la vie
quotidienne – ne devraientils
pas plus souvent descendre
quelques marches et
prêter l’oreille? Il manque un
lien entre le cénacle politique
et la rue.
Irène Brossard
Six citoyens en quête d’un futur souriant...
Edmond Taillard,
retraité
«J’espère que les infrastructures
publiques seront maintenues.
Je ne suis pas d’accord
avec les options de la droite,
toujours moins d’Etat, toujours
privatiser. Il y a des choses dont
les pouvoirs publics doivent absolument
s’occuper: les transports
en commun, les travaux
publics, les écoles. Les prestations
sociales sont importantes,
sans l’aide que j’ai pour payer
l’assurance maladie et l’aide
ménagère, je ne tournerais
pas. Ma crainte, c’est qu’on ne
parvienne plus à financer tout
ça. Les rentrées fiscales sont insuffisantes.
Il faudrait augmenter
les impôts de ceux qui ont de
l’argent. Mais bien sûr, ils ne
veulent pas.»