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L I T T É R A T U R E Françoise Lalande a mis l’écriture au centre de sa vie. Pour comprendre la douleur. La sienne et celle des autres. Elle écrit, entre autres, sur les artistes, les marginaux, les sans voix. Dans Sentiments inavouables, elle raconte la vie et les dernières années d’une femme juive qui a traversé tout le vingtième siècle. Une femme qui pourrait être toutes les femmes. Quand avez-vous commencé à écrire ? J’ai été une petite fille silencieuse qui aimait sa solitude. Je la comblais par des histoires que j’inventais et dont, bien sûr, j’étais le personnage central. Je me souviens que je reprenais sans cesse la même histoire et que j’y ajoutais des détails, que j’en supprimais des péripéties. Tout cela dans ma tête. N’était-ce pas déjà écrire ? Ensuite, je me vois toute jeune, sachant tenir une plume, en train d’écrire des histoires dans un cahier quadrillé. J’ai le souvenir que ces histoires deuxième période étaient moins audacieuses que les premières. Vous avez mené une carrière professionnelle en même temps que celle d’écrivaine, comment avez-vous allié les deux ? Je suis une privilégiée car j’ai été professeur de passion. Enseigner à des jeunes la littérature de l’intérieur, puisque je la connais de l’intérieur, ne m’éloignait pas de mes obsessions d’écrivain, au contraire. J’ai plongé mes étudiants dans les tumultes romanesques du XX e siècle et j’ai adoré les voir s’ouvrir à des littératures dont ils ignoraient tout. Ici, au Maroc, je rencontre parfois des étudiants et je retrouve ce même rapport merveilleux entre un prof et des jeunes curieux de tout. Plusieurs fois vous avez vécu dans des pays chauds mais il semble que votre territoire d’écriture ce soit les Ardennes… Mon territoire d’écriture est celui de la mémoire. Et, vous avez raison, cette mémoire est marquée par les Ardennes, là où je suis née, là où je passais toutes mes vacances, mais mon territoire d’écriture est surtout ma famille ma- COMPAGNE D’ÉCRITURE ternelle qui est ardennaise. Le goût astringent des myrtilles, rhubarbes, groseilles à maquereau, fruits ardennais, est le goût que ma famille maternelle m’a laissé dans la bouche ! L’œuvre de Françoise Lalande compte une quinzaine de livres. Plusieurs sont épuisés. Parmi ceux qui sont disponibles, nous vous conseillons tout particulièrement son « classique », Madame Rimbaud (Labor), Dans les replis nocturnes de mon cœur (Le Grand Miroir), recueil de nouvelles dont certaines étaient déjà parues dans La petite littéraire des éditions du Grand Miroir, et bien évidemment son très beau dernier roman : Sentiments inavouables (Labor). Vous pratiquez plusieurs genres littéraires, la biographie, le récit, la nouvelle, le roman, lequel est le plus cher à votre plume ? Quel est le point commun entre chacun ? Oserais-je vous l’avouer ? Je n’ai pas l’impression de pratiquer plusieurs genres littéraires, car souvent je brouille les frontières entre les genres, et surtout, chacun de mes livres porte en lui les mêmes thématiques. Je suis une obsessionnelle. C’est Barthes qui disait qu’il fallait cesser de mettre des étiquettes sur les productions littéraires, mais, plus simplement, parler de livres ! Dans Sentiments inavouables (comme dans d’autres de vos textes), vous écrivez avec des phrases très longues. Pourquoi ? Comment faites-vous pour ne pas y perdre le lecteur ? Mes phrases sont des énergies libérées. Elles me viennent comme ça, d’un seul mouvement. Comme un rythme, un souffle que je libère, et que rien ne doit entraver. J’aime l’idée que mon lecteur soit emporté par ma phrase comme moi je l’ai été en l’écrivant. J’aime l’idée d’une fusion entre mon lecteur et moi. D’où vous est venue l’idée de ce roman autour de ce très beau personnage de vieille femme juive, Liza Keil ? Je capte tout ce qui se passe autour de moi. Je capte aussi tout ce qui se passe en moi. J’ai observé que cette période où les parents deviennent dépendants de leurs enfants est une épreuve cruelle pour tout le monde. J’ai voulu parler de cela, de cette cruauté, mais j’ai voulu aussi que Liza Keil soit toutes les femmes, non seulement une femme âgée, faible, mais aussi celle qui fut une amoureuse, une mère aimante, une femme de la communauté juive dont le corps porte les stigmates du passé innommable. J’ai voulu écrire à travers mon personnage un roman bourré de sentiments inavouables (mais si humains), dont tous relevaient de l’amour. Vous allez animer un atelier d’écriture avec des lectrices et des lecteurs de la Libre Essentielle. Est-ce qu’un atelier est avant tout la transmission d’une pratique ou a-t-il d’autres buts ? A travers les exercices d’écriture, je voudrais amener les participant(e)s à préciser, peut-être à découvrir, quel est leur rapport au monde, à la société, à eux-mêmes ET quel est leur rapport a leur langue. Car c’est cela qui fait un écrivain. C’est aussi cela que fait un écrivain. PROPOS RECUEILLIS PAR MICHEL ZUMKIR LA LIBRE ESSENTIELLE 32
A T E L I E R UNE PLONGÉE DANS L’ÉCRITURE La Libre Essentielle vous propose un atelier d’écriture animé par À MARRAKECH Françoise Lalande dans la Médina de Marrakech. Du 3 au 10 décembre 2006. Prix : 1199 euros. Ce prix comprend le vol aller et retour, les transferts à l’aéroport, le logement en pension complète à Dar El Qadi et au riyad Berbère (4 palmiers), les animations en atelier, une journée d’excursion à la montagne, les taxes d’aéroport et la tva. Ce prix ne comprend pas les assurances, les boissons et les pourboires. LE THÈME > mémoire ludique, mémoire tragique, mémoire menteuse. « J’aimerais amener les participants à plonger en eux-mêmes pour en tirer un texte qui soit vrai. Dans cette démarche, je prendrai des écrivains comme compagnons, notamment Gilles Deleuze : « Ecrire, c’est peut-être amener au jour cet agencement de l’inconscient, sélectionner les voix chuchotantes, convoquer les tribus et les idiomes secrets, d’où j’extrais quelque chose que j’appelle MOI ». Pour illustrer ces « vois chuchotantes », j’inviterai aussi des écrivains marocains comme Mohammed Loakira, Jalal El Hakmaoui et des écrivaines telles Fatima Mernissi, Fatna El Bouih ou Rajae Benchems. Afin que l’atelier soit l’occasion d’un travail sur soi, mais aussi le temps de découvertes chaleureuses puisqu’au Maroc, il ne peut en être autrement ! » LE PROGRAMME DÉTAILLÉ > Dimanche 3/12_Bruxelles / Marrakech_Arrivée et installation dans les riyads Dar El Qadi et Berbère. Repas du soir dans un riyad. / Lundi 4/12_Accueil et découverte de Marrakech _Petit déjeuner. Découverte de la Médina : l’exubérance des souks, la finesse de l’architecture, la palette infinie des couleurs, les odeurs et atmosphères. Atelier d’écriture dans l’aprèsmidi. / Mardi 5, mercredi 6 et jeudi 7/12 _Atelier d’écriture et rencontre d’écrivain(es) marocain(es) / Vendredi 8/12_Découverte d’un marché de campagne_ Visite d’un marché et balade dans des vallées et villages de montagne. / Samedi 9/12_Atelier d’écriture et rencontre d’écrivain(es) marocain(es)_Le soir : soirée d’adieu, danse et musique traditionnelle. / Dimanche 10/12_ Vol Marrakech / Bruxelles_Matinée : temps libre dans la Médina et les souks. Après-midi : envol vers Bruxelles. LE LIEU > Au cœur de la Médina, vous logerez dans deux splendides riyads sauvés de la ruine par l’architecte belge Quentin Wilbaux : Dar El Qadi et le riyad Berbère, petits palais rénovés dans le respect des matériaux et de l’architecture traditionnelle. Vous pouvez découvrir les deux riyads sur le site www.darelqadi.com. RENSEIGNEMENTS ET RÉSERVATIONS > Annie Henneffe à l’agence Eole : 02 227 57 84. Gsm : 0479 46 57 72. annie.henneffe@uniclam.com LICENCE A 1740
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