Bases neurophysiologiques et évaluation d'une douleur aiguë et d ...
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Faculté de Médecine de Marseille<br />
<strong>Bases</strong> <strong>neurophysiologiques</strong> <strong>et</strong> évaluation d’une<br />
<strong>douleur</strong> aiguë <strong>et</strong> d’une <strong>douleur</strong> chronique (65)<br />
J.C. Peragut - P. Roussel<br />
Février 2006 (Mise à jour 2006-2007)<br />
Objectifs :<br />
• Reconnaître <strong>et</strong> évaluer une <strong>douleur</strong> aiguë <strong>et</strong> une <strong>douleur</strong> chronique.<br />
Connaissances requises :<br />
• Connaître les voies de transmissions du message nociceptif, les mécanismes de<br />
contrôle de la noniception au niveau périphérique, spinal <strong>et</strong> supraspinal, les<br />
médiateurs chimiques de la noniception.<br />
• Connaître le caractère plastique du système nociceptif.<br />
• Savoir différencier <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> nociception <strong>et</strong> intégrer le caractère<br />
pluridimensionnel de la <strong>douleur</strong>.<br />
• Savoir identifier les <strong>douleur</strong>s par excès de nociception, les <strong>douleur</strong>s<br />
neuropathiques, les <strong>douleur</strong>s sympathiques, les <strong>douleur</strong>s psychogènes <strong>et</strong> les<br />
principaux mécanismes sous-jacents à chacune d’entre elles.<br />
• Reconnaître une <strong>douleur</strong> aiguë <strong>et</strong> une <strong>douleur</strong> chronique.<br />
• Savoir évaluer la <strong>douleur</strong> dans ses différentes dimensions : échelles uni <strong>et</strong><br />
multidimensionnelles, évaluation du r<strong>et</strong>entissement.<br />
• Savoir mener un entr<strong>et</strong>ien avec un patient présentant une <strong>douleur</strong> chronique.<br />
Glossaire :<br />
• Allodynie : <strong>douleur</strong> provoquée par une stimulation normalement non douloureuse.<br />
• Analgésie : abolition sélective de la perception douloureuse sans altération de la<br />
conscience.<br />
• Anesthésie : abolition totale, locale ou générale, de la sensibilité.<br />
• Anesthésie douloureuse : <strong>douleur</strong> ressentie dans une zone hypoesthésiée.<br />
• Douleur centrale : <strong>douleur</strong> associée à une lésion du système nerveux central.<br />
• Douleur proj<strong>et</strong>ée : <strong>douleur</strong> perçue à distance de la lésion, phénomène expliqué<br />
par la convergence anatomique des branches d’un même neurone sensitif ou de<br />
plusieurs neurones sensitifs sur le même relais spinal.<br />
• Hyperalgésie : perception excessive des stimulations nocives.<br />
• Hypoesthésie : diminution de la sensibilité à toute stimulation somatique.<br />
• Nociception : ensemble des fonctions physiologiques de l’organisme qui perm<strong>et</strong> de<br />
détecter, de percevoir <strong>et</strong> de réagir à des stimulations potentiellement nocives.<br />
• Paresthésie : perception anormale, non douloureuse, spontanée ou provoquée,<br />
pouvant devenir désagréable, nommée dysesthésie.<br />
• Seuil de perception de la <strong>douleur</strong> : intensité minimale d’un stimulus, suffisante<br />
pour qu’un suj<strong>et</strong> perçoive une <strong>douleur</strong>.<br />
• Seuil de tolérance à la <strong>douleur</strong> : intensité maximale d’un stimulus nociceptif qu’un<br />
individu peut supporter.<br />
1. Préambule<br />
La <strong>douleur</strong> est une rupture, un obscurcissement du sens que nous voulons donner à notre vie.<br />
La <strong>douleur</strong> est une diminution d’être qui affecte notre liberté humaine, notre être physique <strong>et</strong><br />
la réalité de notre monde.<br />
Dans les grandes souffrances physiques <strong>et</strong> psychiques, la terre se dérobe sous nos pieds, les<br />
mots aussi. Les mots manquent <strong>et</strong> aux frontières de l’indicible la souffrance est la solitude<br />
absolue. La souffrance montre l’impuissance des mots, mais le silence est démission. Celui<br />
qui souffre rompt le silence : aidons le à r<strong>et</strong>rouver, à être, à rester dans sa dignité d’homme.<br />
DCEM3 – Module n° 6<br />
Douleur – Soins palliatifs - Mort<br />
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Faculté de Médecine de Marseille<br />
« La <strong>douleur</strong> s’aviva, mais il ne fit pas un geste, n’appela personne. Il se disait seulement :<br />
vas-y, vas-y cogne ! Mais pourquoi ? Que t’ai-je fait ? Pourquoi ? »<br />
Léon Tolstoï. La mort d’Ivan Illich . Traduction de Michel Hofman. Livre de poche – 1976.<br />
2. Introduction<br />
La <strong>douleur</strong> est un des premiers motifs de consultation en médecine générale : 54% des<br />
patients allèguent une <strong>douleur</strong>, toutes pathologies confondues. Chez 15% des patients<br />
interrogés, elle dure depuis plus de trois mois. La fréquence de la <strong>douleur</strong> est mal connue chez<br />
les très jeunes enfants qui ne parlent pas, les polyhandicapés physiques ou mentaux <strong>et</strong> les<br />
suj<strong>et</strong>s âgés qui ne peuvent plus s’exprimer. En institution la <strong>douleur</strong> affecterait 80% des<br />
personnes âgées.<br />
Soulager la <strong>douleur</strong> passe par des volontés <strong>et</strong> des actes individuels, collectifs <strong>et</strong> politiques :<br />
• adm<strong>et</strong>tre la <strong>douleur</strong> de l’autre, la comprendre <strong>et</strong> la traiter, tous les jours, tous les<br />
jours...<br />
• organiser l’enseignement du traitement de la <strong>douleur</strong> : étudiants en médecine,<br />
médecins en exercice <strong>et</strong> tous les acteurs paramédicaux confrontés à la <strong>douleur</strong><br />
• rendre disponibles <strong>et</strong> accessibles tous les moyens antalgiques<br />
• appréhender <strong>et</strong> traiter toute forme de <strong>douleur</strong> dans les établissements de santé<br />
• faire connaître les centres anti-<strong>douleur</strong> identifiés par les Agences Régionales<br />
d’Hospitalisation.<br />
3. Définition<br />
3.1. définition de l’association Internationale d’Etude de la<br />
<strong>douleur</strong> (I.A.S.P) :<br />
« la <strong>douleur</strong> est une expérience sensorielle <strong>et</strong> émotionnelle désagréable liée à une lésion<br />
tissulaire existante ou potentielle ou décrite en terme d’une telle lésion ».<br />
C<strong>et</strong>te définition restitue à la <strong>douleur</strong> sa dimension psychologique, son caractère subjectif,<br />
adm<strong>et</strong> des mécanismes physiopathologiques somatiques <strong>et</strong>/ou psychologiques, mais a des<br />
limites, en particulier chez l’enfant où la notion d’expérience est mal adaptée.<br />
3.2. la <strong>douleur</strong> n’est pas une nociception<br />
• La nociception fait référence à l’ensemble des fonctions physiologiques de<br />
l’organisme, lui perm<strong>et</strong>tant de détecter <strong>et</strong> percevoir des stimulations<br />
potentiellement nocives ;<br />
• La <strong>douleur</strong> associe à c<strong>et</strong> aspect perceptif sensoriel, des dimensions affectives <strong>et</strong><br />
cognitives : elles colorent la sensation de son aspect désagréable-pénible <strong>et</strong> font<br />
réagir le suj<strong>et</strong> agressé.<br />
4. Comprendre la <strong>douleur</strong><br />
La <strong>douleur</strong> aiguë, brève, est avant tout une fonction physiologique, dont le rôle est de protéger<br />
l’organisme des agressions environnementales : « sentinelle rapprochée qui protège notre<br />
corps » H. Bergson) mais dès qu’elle se prolonge « la <strong>douleur</strong> ne protège pas l"homme, elle le<br />
diminue » (R. Leriche. Chirurgie de la <strong>douleur</strong> – 1938).<br />
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4.1. physiologie de la <strong>douleur</strong><br />
4.1.1. le circuit du message douloureux<br />
4.1.1.1. de la périphérie à la moelle épinière<br />
Figure 1 Les trois neurones successifs de la voie spino-thalamique<br />
Figure 2 – Physiologie de la <strong>douleur</strong>.<br />
• Une agression tissulaire par stimulus chimique, thermique ou mécanique (pression,<br />
écrasement, distension) active les nocicepteurs.<br />
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• Les nocicepteurs ne sont pas des cellules spécifiques mais sont les extrémités libres<br />
des fibres nerveuses qui transportent les messages douloureux (fibres C <strong>et</strong> fibres Aδ<br />
peu myélinisées) (Figure 4)<br />
• Les nocicepteurs sont activés directement par le stimulus ou indirectement par les<br />
médiateurs chimiques libérés par le tissu lésé. Ces molécules algogènes (histamine,<br />
bradykinine, prostaglandines...) excitent les nocicepteurs ou les rendent plus sensibles<br />
aux stimuli. (Figure 3)<br />
• Les premiers neurones périphériques transportent le message douloureux du tissu<br />
agressé vers la corne postérieure de la moelle <strong>et</strong> font relais dans la substance grise<br />
médullaire.<br />
Figure 3 – Physiologie de la <strong>douleur</strong> – étape cutanée<br />
Figure 4 – Caractéristiques <strong>et</strong> signification fonctionnelle des trois catégories de fibres sensitives contenues dans<br />
un nerf d’origne cutanée<br />
4.1.1.2. de la moelle aux structures sous corticales<br />
Au niveau spinal, le message douloureux est repris par les seconds neurones, avec ou sans<br />
interneurones entre les premiers <strong>et</strong> les seconds. Ces neurones spinaux seront activés par des<br />
messages nociceptifs <strong>et</strong> transm<strong>et</strong>tent l’information vers les centres supérieurs.<br />
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Deux groupes de neurones spinaux sont impliqués (Figure 5) :<br />
• des neurones spécifiques nociceptifs activés par des stimulations nociceptives<br />
cutanées mécaniques <strong>et</strong>/ou thermiques<br />
• des neurones convergents activés par des stimulations nociceptives mais aussi non<br />
nociceptives de faible intensité. Ils seront activés par des stimulations nociceptives<br />
cutanées mais aussi viscérales. C<strong>et</strong>te convergence de messages nociceptifs cutanés <strong>et</strong><br />
viscéraux sur les mêmes neurones peuvent expliquer les <strong>douleur</strong>s proj<strong>et</strong>ées (à<br />
distance) des souffrances viscérales (Figure 6).<br />
Figure 5<br />
Figure 6 – Douleur référe (proj<strong>et</strong>ée)<br />
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Ces seconds neurones, spécifiques ou convergents, croisent la ligne médiane au niveau<br />
médullaire <strong>et</strong> se regroupent en faisceaux au sein de la substance blanche antéro-latérale<br />
(Figure 7). Les fibres activées par l’agression vont se proj<strong>et</strong>er pour les unes dans le thalamus<br />
<strong>et</strong> pour les autres dans la substance réticulée. Le thalamus décode l’intensité <strong>et</strong> la qualité du<br />
message alors que la formation réticulée lui donne sa coloration émotionnelle désagréable,<br />
pénible : la nociception devient <strong>douleur</strong> (Figure 8).<br />
Figure 7 – Les deux faisceaux principaux du tractus antéro-latéral<br />
Figure 8<br />
4.1.1.3. des structures sous corticales aux relais corticaux<br />
• Un troisième neurone transporte le message douloureux entre ces deux structures. Le<br />
message nociceptif devient de plus en plus difficile à suivre.<br />
• Le cortex somesthésique joue un rôle dans les aspects sensoriels de la <strong>douleur</strong>. Dans<br />
ses aspects émotionnels, la <strong>douleur</strong> impliquerait le lobe frontal.<br />
• La multiplicité des voies ascendantes <strong>et</strong> des régions du cerveau mises en jeu rendent<br />
illusoire la recherche d’un centre de la <strong>douleur</strong>. C’est bien toute la personne qui est<br />
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mobilisée lors d’une agression douloureuse : ce n’est pas un organe, un tissu, mais<br />
bien une personne qui souffre.<br />
Figure 9 – Principales voies de transmission des messages nociceptifs<br />
Figure 10 – Activations corticales déclenchées par stimulation nociceptive<br />
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4.1.2. le contrôle du message douloureux<br />
4.1.2.1. au niveau périphérique<br />
• Les systèmes freinateurs :<br />
- le système immunitaire qui contient des précurseurs morphiniques est en alerte<br />
- l’inflammation tissulaire déclenche une analgésie morphinique locale.<br />
• Les systèmes amplificateurs :<br />
- le premier neurone va créer, par voie rétrograde, une inflammation des tissus sains<br />
avoisinant le tissu lésé : inflammation neurogène, responsable partiellement de<br />
l’hyperalgésie périphérique (Figure 11)<br />
- le système sympathique aggrave ou atténue le phénomène douloureux<br />
périphérique.<br />
Figure 11<br />
4.1.2.2. au niveau médullaire<br />
Le message douloureux est freiné par :<br />
- la sensibilité au tact : alertés en même temps que les neurones nociceptifs, les<br />
neurones transportant le tact, par leur collatérale spinale postérieure, ferment la porte<br />
au message douloureux C’est la théorie du Gate Control, de la porte. Un simple<br />
souffle sur un doigt meurtri freine <strong>et</strong> apaise la <strong>douleur</strong>. C’est la base théorique de<br />
l’application de la neurostimulation (Figure 12, 13, 14)<br />
- des voies descendantes, inhibitrices, noradrénergiques <strong>et</strong> sérotoninergiques activent,<br />
au niveau médullaire, la libération d’endorphines.<br />
Figure 12<br />
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Figure 13 – Organisation schématique des influences périphériques s’exerçant sur les neurones à convergence<br />
Figure 14<br />
Le message douloureux est amplifié par (Figures 15, 16 <strong>et</strong> 17) :<br />
- par l’émission prolongée d’un message douloureux qui rend les seconds neurones plus<br />
sensibles à des stimulus d’intensité moindre : hyperalgésie centrale fonctionnelle, par<br />
activation de récepteurs situés sur le second neurone. « Plus on souffre longtemps plus<br />
on devient douill<strong>et</strong> physiologiquement »<br />
- par la mise en jeu réflexe du système sympathique efférent dont l’action périphérique<br />
est une activation de l’inflammation locale donc des premiers neurones ;<br />
- par la stimulation médullaire des motoneurones avec contraction musculaire <strong>et</strong><br />
modification généralisée des muscles posturaux.<br />
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Figure 15 – Hyperalgésie primaine<br />
Figure 16 – Hyperalgésie secondaire<br />
Figure 17 - Hyperalgésie<br />
Ces conséquences centrales d’une stimulation douloureuse périphériques aboutissent à un<br />
dysfonctionnement cellulaire <strong>et</strong> à une réduction des mécanismes inhibiteurs naturels.<br />
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4.1.2.3. au niveau sous cortical<br />
Le contrôle s’exerce par<br />
• Les voies inhibitrices descendantes : nés dans le tronc cérébral ces contingents<br />
descendants viennent moduler les interneurones de la corne postérieure : système de<br />
contrôle endogène de la <strong>douleur</strong> sous la dépendance de médiateurs chimiques (la<br />
dopamine, la noradrénaline, la sérotonine <strong>et</strong> les opiacés endogènes) (Figures 19 <strong>et</strong> 20).<br />
• Les contrôle inhibiteurs diffus : (Figure 18)<br />
• en dehors de toute agression, les neurones spinaux dits de convergence seront<br />
activés par toutes les stimulations non douloureuses de notre organisme. C<strong>et</strong>te<br />
activité transmise aux centres supérieurs peut être appelée « bruit de fond » vis à<br />
vis de la <strong>douleur</strong>, empêchant le message nociceptif d’être perçu.<br />
• Les contrôles inhibiteurs diffus (CIDN) constituent le filtre grâce auquel un signal<br />
spécifiquement nociceptif est extrait. Lorsqu’un tissu est agressé, les neurones<br />
spinaux spécifiques <strong>et</strong> de convergence, segmentaires sont activés <strong>et</strong> envoient un<br />
message vers les centres supérieurs. Ce signal active les CIDN qui activent<br />
l’ensemble des neurones à convergence non concernés par l’agression ce qui<br />
éteint le bruit de fond <strong>et</strong> perm<strong>et</strong> à la population neuronale concernée par<br />
l’agression d’être perçue. «Pour être entendu, il faut obtenir le silence » A<br />
contrario, restaurer le bruit de fond est antalgique (Figures 21 <strong>et</strong> 22).<br />
• Des neurones spinaux activés par une agression peuvent être inhibés par une<br />
seconde lésion tissulaire survenue dans un autre territoire « une <strong>douleur</strong> peut en<br />
masquer une autre ». C’est le concept des contrôles inhibiteurs diffus dont l’eff<strong>et</strong><br />
s’exerce sur les neurones convergents par une boucle spino-bulbo-spinale.<br />
Figure 18 – Déclenchement des contrôles inhibiteurs descendants par stimulation nociceptive<br />
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Figure 19 – Systèmes inhibiteurs bulbo-spinaux de la nociception<br />
Figure 20 – Représentation schématique des contrôles inhibiteurs issus du tronc cérébral qui s’exercent sur la<br />
transmission spinale des messages nociceptifs<br />
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Figure 21 – Contrôles inhibiteurs diffus induits par la nociception<br />
Figure 22 – Application pratique des CIDN<br />
4.1.2.4. au niveau cortical<br />
Au niveau du cerveau, la complexité des projections anatomiques <strong>et</strong> leur rôle dans l’analyse,<br />
la mémorisation <strong>et</strong> le contrôle de la <strong>douleur</strong> sont mal connus. La projection sur le cortex, le<br />
troisième neurone, autorise l’analyse fine du message douloureux <strong>et</strong> rend efficace les<br />
stratégies de réaction face à la <strong>douleur</strong>. Le cortex frontal jouerait un rôle de médiation entre<br />
les activités cognitives <strong>et</strong> les caractéristiques de la dimension affectivo-motivationnelle de la<br />
<strong>douleur</strong>.<br />
4.2. psycho-physiologie de la <strong>douleur</strong><br />
4.2.1. la <strong>douleur</strong> expérience subjective <strong>et</strong> individuelle<br />
La <strong>douleur</strong> est influencée par de multiples facteurs : l’expérience personnelle de la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong><br />
le sens qui lui est donné par celui qui souffre, à travers sa personnalité, son milieu familial,<br />
culturel <strong>et</strong> religieux.<br />
C<strong>et</strong>te perception, résultat d’une subtile alchimie sensori-affectivo-cognitive, s’exprime par<br />
des comportements verbaux <strong>et</strong> non verbaux : nous ne connaissons de la <strong>douleur</strong> des autres que<br />
ce qu’ils en disent. Croyons les sur parole.<br />
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Le langage de la <strong>douleur</strong> peut amplifier ou pérenniser le comportement douloureux comme un<br />
comportement opérant.<br />
Le langage de la <strong>douleur</strong> est enfin un mode de représentation symbolique de la <strong>douleur</strong>.<br />
4.2.2. la <strong>douleur</strong> est la perception :<br />
Figure 23 – La <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> la perception<br />
4.2.2.1. de sensations<br />
La composante sensori-discriminative correspond au mécanisme neurophysiologique qui<br />
perm<strong>et</strong> le décodage des afflux nociceptifs : qualité, durée, intensité <strong>et</strong> localisation.<br />
C’est l’identification des caractéristiques de l’agent agresseur <strong>et</strong> du résultat sur le tissu lésé.<br />
4.2.2.2. d’émotions<br />
La perception de la <strong>douleur</strong> se singularise par sa dimension émotionnelle dominante, défense<br />
face à une menace contre l’intégrité de l’organisme. C<strong>et</strong>te composante émotionnelle exprime<br />
la tonalité affective plus ou moins pénible, désagréable de toute <strong>douleur</strong>. C’est la manière<br />
dont le patient ressent sa <strong>douleur</strong>.<br />
4.2.2.3. de cognitions<br />
Les processus cognitifs vont perm<strong>et</strong>tre la reconnaissance, l’interprétation de la perception<br />
douloureuse <strong>et</strong> l’adoption de conduites adaptées pour y faire face. La composante cognitive<br />
fait appel aux acquis éducatifs, culturels <strong>et</strong> sociaux qui déterminent la manière de traiter<br />
l’information douloureuse. Les processus d’attention <strong>et</strong> d’anticipation vis-à-vis de<br />
l’expérience douloureuse module la perception <strong>et</strong> l’expression comportementale de la <strong>douleur</strong><br />
. L’aspect cognitif exprime aussi la place que le douloureux accorde à la <strong>douleur</strong> dans<br />
l’histoire de sa vie <strong>et</strong> reflète son savoir faire face à la <strong>douleur</strong>.<br />
4.2.3. la <strong>douleur</strong> s’exprime par :<br />
4.2.3.1. des comportements moteurs non verbaux<br />
La personne souffrant peut gémir, pousser des cris, pleurer. La mimique, les postures, les<br />
gestes pour se protéger ou atténuer la <strong>douleur</strong> sont des messages adressés à l’entourage autant<br />
que des moyens de défense <strong>et</strong> de protection vis à vis de l’agent agresseur.<br />
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4.2.3.2. des mots<br />
Les mots de la <strong>douleur</strong> ont une valeur sémiologique, diagnostique <strong>et</strong> expriment la sévérité de<br />
la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> le niveau de tolérance.<br />
Exprimer sa <strong>douleur</strong>, en parler, c’est rechercher l’aide de son entourage, c’est communiquer.<br />
Le langage de la <strong>douleur</strong> comme tout comportement opérant, peut pérenniser la plaine<br />
douloureuse.<br />
Au delà de la fonction, le langage de la <strong>douleur</strong> est un mode de représentation symbolique de<br />
la <strong>douleur</strong> : les mots des maux, voire les maux des mots.<br />
La perception de la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> son expression dépendent des apprentissages antérieurs<br />
modulés par l’environnement familial, social, culturel <strong>et</strong> religieux mais aussi de<br />
l’interprétation de c<strong>et</strong>te sensation pénible <strong>et</strong> de la personnalité de celui qui souffre. La <strong>douleur</strong><br />
perçue est chez l’adulte la réminiscence de la mémoire des expériences passées : combattre la<br />
<strong>douleur</strong> iatrogène est une nécessaire évidence.<br />
Apaiser la <strong>douleur</strong> de l’enfant est un devoir médical : « à l’aube de ma p<strong>et</strong>ite préhistoire<br />
personnelle il y avait eu l’agression, l’attentat un crime qui a ensanglanté mon enfance <strong>et</strong><br />
dont je n’ai pas encore surmonté l’horreur...Mais quarante cinq ans plus tard j’en porte<br />
encore les traces <strong>et</strong> je reste incapable d’évoquer c<strong>et</strong>te scène de sang-froid » Michel Tournier<br />
– le vent Paracl<strong>et</strong> – 1977 p15-16 à propos d’une amygdalectomie sans anesthésie ni analgésie.<br />
4.3. clinique de la <strong>douleur</strong> :<br />
4.3.1.1. les formes physiopathologiques<br />
Figure 24 – Schéma des deux grands mécanismes des <strong>douleur</strong>s organiques<br />
Les <strong>douleur</strong>s peuvent être différenciées en fonction des mécanismes physiopathologiques qui<br />
les génèrent. L’intérêt aujourd’hui de c<strong>et</strong>te reconnaissance est thérapeutique.<br />
4.3.1.2. les <strong>douleur</strong>s par excès de nociception<br />
. Les <strong>douleur</strong>s par excès de nociception, situations cliniques les plus fréquentes, sont<br />
liées à une activation du système de transmission des messages douloureux par une<br />
stimulation excessive des nocicepteurs. Il n’y a pas de lien entre la gravité de la<br />
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pathologie sous-jacente <strong>et</strong> l’importance de c<strong>et</strong>te stimulation. «Chacun peut maîtriser<br />
une souffrance excepté celui qui la sent. On n’a jamais vu un philosophe qui endurait<br />
patiemment le mal aux dents » Shakespeare – Othello.<br />
. Les <strong>douleur</strong>s cutanées, articulaires <strong>et</strong> musculaires : l’activation des nocicepteurs est<br />
d’origine lésionnelle (traumatisme, brûlures, agent irritant = stimulations mécaniques)<br />
inflammatoires ou ischémique (la contraction musculaire ischémique est très algique).<br />
C<strong>et</strong>te activation par les agents agresseurs est entr<strong>et</strong>enue par la libération tissulaire des<br />
substances algogènes <strong>et</strong> par les processus d’amplification du message douloureux.<br />
. Les <strong>douleur</strong>s viscérales : elles sont en relation directe avec l’organe malade ou sont<br />
secondaires à l’atteinte des séreuses qui entourent l’organe incriminé. La distension est<br />
le mécanisme algogène le plus efficient. Les neurones de convergence expliquent les<br />
<strong>douleur</strong>s viscérales perçues à distance de leur situation anatomique : la <strong>douleur</strong> du<br />
membre supérieur gauche dans l’infarctus du myocarde, par exemple. Les voies<br />
afférentes de la nociception viscérale cheminent avec les voies sympathiques pour<br />
atteindre la moelle épinière. Cela explique l’eff<strong>et</strong> antalgique d’une destruction par<br />
exemple du ganglion sympathique cœliaque dans le cancer du pancréas.<br />
Figure 25 – Principaux mécanismes physiopathologiques sous-tendant les <strong>douleur</strong>s par excès de stimulations<br />
nociceptives<br />
4.3.1.3. les <strong>douleur</strong>s neuropathiques<br />
Les lésions du système nerveux périphérique ou central en sont responsables : lésion<br />
traumatique ou chirurgicale d’un nerf, neuropathie diabétique ou autres, altération radiculaire<br />
(<strong>douleur</strong> post-zostérienne), lésion médullaire ou destruction des structures supraspinales<br />
(<strong>douleur</strong>s neuropathiques centrales).<br />
Les <strong>douleur</strong>s sont décrites en termes de brûlure, écrasement, décharges électriques,<br />
fourmillements. L’examen neurologique montre une hypoesthésie ou une anesthésie plus ou<br />
moins complète ou une allodynie <strong>et</strong>/ou hyperalgésie.<br />
Les mécanismes physiopathologiques sous-jacents sont :<br />
• la perte d’inhibition segmentaire : les voies de la sensibilité non douloureuse n’exerce<br />
plus leur contrôle inhibiteur sur les voies de la <strong>douleur</strong>, ce qui expliquerait la <strong>douleur</strong><br />
spontanée continue des <strong>douleur</strong>s neuropathiques (brûlures)<br />
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• les voies de la <strong>douleur</strong> sont le lieu d’activités électriques anormales responsables des<br />
<strong>douleur</strong>s paroxystiques des <strong>douleur</strong>s neuropathiques (décharges électriques)<br />
• au cours de la cicatrisation d’un nerf lésé, les fibres de la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> les fibres du tact<br />
présentent les interconnexions anormales : un message tactile devient douloureux<br />
(allodynie)<br />
• les nocicepteurs (premiers neurones) voient leur seuil d’activation diminuer<br />
(mécanismes habituels dans les <strong>douleur</strong>s par excès de nociception) processus<br />
expliquant partiellement l’hyperalgésie.<br />
• enfin, les seconds neurones spinaux deviennent hyperexcitables (sensibilisation<br />
centrale) <strong>et</strong> font le lit de l’allodynie <strong>et</strong> de l’hyperalgésie.<br />
C<strong>et</strong>te compréhension anatomo-clinique des <strong>douleur</strong>s neuropathiques a une implication<br />
thérapeutique directe.<br />
Figure 26 – Principaux mécanismes physiopathologiques sous-tendant les <strong>douleur</strong>s neuropathiques<br />
4.3.1.4. les <strong>douleur</strong>s sympathiques<br />
Lorsque le stimulus nociceptif alerte le premier neurone, une réaction spinale efférente peut<br />
être observée. C<strong>et</strong>te réaction crée sur le site lésionnel des troubles microvasculaires<br />
avec.activation réflexe des nocicepteurs : la boucle sympathique est en place, qu’il faudra<br />
désactiver pour soulager le patient douloureux.<br />
Les syndromes douloureux régionaux complexes de type 1 <strong>et</strong> 2 sont les dénominations<br />
actuelles des algodystrophies <strong>et</strong> causalgies.<br />
C<strong>et</strong>te nouvelle classification a pour intérêt de décrire des tableaux précis sans les rattacher à<br />
une dysfonction obligatoire du système sympathique. Le maintien de la <strong>douleur</strong> par le<br />
système sympathique doit être confirmé ou infirmé par des blocs sympatholytiques à visée<br />
diagnostique / thérapeutique.<br />
DCEM3 – Module n° 6<br />
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Figure 27 – Signes cliniques des SRDCI <strong>et</strong> II<br />
4.3.1.5. les <strong>douleur</strong>s idiopathiques<br />
• Elles ont souvent pour origine un traumatisme physique douloureux dont l’expression<br />
dans le temps est altérée par une personnalité morbide. Parfois, elles ne sont que<br />
l’expression de c<strong>et</strong>te personnalité.<br />
• La description de la <strong>douleur</strong> évoque une <strong>douleur</strong> par excès de nociception.<br />
• Le diagnostic doit être fait à partir d’une sémiologie psychopathologique positive. Le<br />
diagnostic r<strong>et</strong>ardé, d’élimination, ne peut que conforter le suj<strong>et</strong> douloureux dans sa<br />
conviction somatique <strong>et</strong> compliquer la relation médecin-malade.<br />
• La dépression, la phobie, la somatisation d’états anxieux, l’hypocondrie <strong>et</strong> la<br />
conversion hystérique sont les situations les plus souvent rencontrées.<br />
« dans l’hystérie, le malade offre son symptôme comme moyen de communication. Dans<br />
l’atteinte psychosomatique, le malade ne peut s’exprimer <strong>et</strong> être que par son symptôme. »<br />
Pr Y. PELICIER<br />
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4.3.2. <strong>douleur</strong>s aiguës <strong>et</strong> <strong>douleur</strong>s chroniques<br />
Figure 28 – De la <strong>douleur</strong> aiguë persistante <strong>et</strong> chronique<br />
Figure 29<br />
4.3.2.1. la <strong>douleur</strong> aiguë<br />
La <strong>douleur</strong> aiguë est un symptôme, un signe d’alarme qui joue un rôle de protection de<br />
l’organisme, de réflexe de survie, d’avertissement de phénomènes anormaux pour l’individu :<br />
inflammation, infection, fracture, brûlures... Le mécanisme est unifactoriel. L’anxiété, la peur<br />
en sont l’expression affective immédiate. L’attitude médicale est la recherche étiologique <strong>et</strong><br />
l’application immédiate d’un traitement symptomatique antalgique : calmer une <strong>douleur</strong> aiguë<br />
ne masque pas de diagnostic <strong>et</strong> attendre est inutile.<br />
C<strong>et</strong>te <strong>douleur</strong> aiguë peut être rebelle, comme en cancérologie, dans certaines pathologies<br />
articulaires, dans le syndrome douloureux complexe régional, ou récurrente comme dans les<br />
migraines ou l’algie vasculaire de la face.<br />
Le raisonnement linéaire (lésion →<strong>douleur</strong>) assorti d’une analyse physiopathologique de la<br />
<strong>douleur</strong> suffit pour comprendre <strong>et</strong> traiter les algies aiguës.<br />
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4.3.2.2. la <strong>douleur</strong> chronique<br />
Figure 30 – Evolution de la <strong>douleur</strong> brève (cause unique) vers la <strong>douleur</strong> persistante <strong>et</strong> rebelle (facteurs<br />
multiples)<br />
Au delà de trois mois, une <strong>douleur</strong> m<strong>et</strong> en grande difficulté celui qui souffre. Toutes les<br />
dimensions de la <strong>douleur</strong> s’expriment <strong>et</strong> tous les individus n’ont pas la capacité ou ne sont pas<br />
en situation favorable pour y faire face. La <strong>douleur</strong> occupe le champ de la conscience <strong>et</strong> rend<br />
inaudible les autres messages.<br />
La <strong>douleur</strong> se pérennise (Figure 31) :<br />
• lorsque le message douloureux persiste malgré un traitement médical bien conduit :<br />
<strong>douleur</strong> neuropathique, <strong>douleur</strong> sympathique mais aussi <strong>douleur</strong> par excès de<br />
nociception difficile à maîtriser (métastases osseuses)<br />
• lorsque le comportement douloureux s’autonomise ou n’exprime qu’une dysfonction<br />
psychique. Le comportement douloureux, qui n’est pas la <strong>douleur</strong> est le moyen pour le<br />
patient d’exprimer ce qu’il dit <strong>et</strong> le meilleur indice pour le médecin. Le comportement<br />
douloureux est l’expression des mécanismes biologiques sous-jacents, de processus<br />
psychologiques (sens donné à la <strong>douleur</strong>, capacité de faire face, terrain, trait de<br />
personnalité) des événements environnementaux (circonstances de survenue de la<br />
<strong>douleur</strong>, travail algogène...) <strong>et</strong> de conséquences renforçantes (repos, attention de<br />
l’entourage, évitement d’activités désagréables...).<br />
Figure 31 – Facteurs de risque de survenue d’un syndrome dououreux chronique<br />
Face à un douloureux chronique le médecin doit s’efforcer de décrypter l’ensemble des<br />
facteurs de pérennisation <strong>et</strong> appréhender sa plainte comme la résultante de tous les<br />
processus, avec des surfaces psychologiques, sociales <strong>et</strong> biologiques plus ou moins<br />
DCEM3 – Module n° 6<br />
Douleur – Soins palliatifs - Mort<br />
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importantes selon les suj<strong>et</strong>s. La dichotomie - somatique ou psychologique- conduit à l’échec,<br />
au rej<strong>et</strong>, à la chronicisation, à la souffrance.<br />
5. Evaluer la <strong>douleur</strong><br />
Les études médicales nous forment à apprécier des éléments objectifs pour établir un<br />
diagnostic <strong>et</strong> décider un traitement.<br />
La <strong>douleur</strong> est un phénomène subjectif qui peut être évalué objectivement à condition de<br />
considérer le patient comme le seul véritable expert pour juger de la qualité <strong>et</strong> de l’intensité<br />
de sa <strong>douleur</strong>. Croire le patient évite de sous ou sur estimer la <strong>douleur</strong>, ce qui ne veut pas dire<br />
que la plainte reflète de façon fiable <strong>et</strong> univoque une agression tissulaire : la plainte est la<br />
<strong>douleur</strong> du patient.<br />
5.1. Motifs de l’évaluation<br />
5.1.1. L’absence de concordance anatomo-clinique<br />
L’intensité de la <strong>douleur</strong> n’est pas en relation avec la gravité de la pathologie sous-jacente. Le<br />
traitement de la <strong>douleur</strong> est donc guidé par la sévérité de la <strong>douleur</strong> tout autant que par son<br />
étiopathogénie.<br />
5.1.2. la placebo-sensibilité<br />
Aucune <strong>douleur</strong>, aucun douloureux n’y échappe. L’eff<strong>et</strong> analgésique placebo mime la<br />
cinétique de la méthode utilisée. Tout traitement associe des eff<strong>et</strong>s spécifiques <strong>et</strong> non<br />
spécifiques, placebo. Amplifier l’eff<strong>et</strong> placebo d’un traitement aide le patient. Réaliser à son<br />
insu des traitements ou des tests placebo n’est pas convenable sur le plan éthique <strong>et</strong> médical.<br />
5.1.3. le degré d’amélioration<br />
L’eff<strong>et</strong> antalgique doit être évalué en terme de pourcentage de réduction de la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> non<br />
en terme de suppression. L’option <strong>douleur</strong>-zéro n’est pas obligatoire <strong>et</strong> devient irréaliste dans<br />
les <strong>douleur</strong>s chroniques.<br />
5.1.4. l’absence de marqueurs neurobiologiques<br />
Comment imaginer un marqueur qui refléterait les composantes affectives, sensorielles <strong>et</strong><br />
cognitives ? Le rapport verbal <strong>et</strong> l’observation comportementale du patient restent les<br />
meilleurs critères de l’évaluation.<br />
« Est <strong>douleur</strong> ce que le patient dit être <strong>douleur</strong> »<br />
Il faut disposer d’une méthodologie objective pour analyser un phénomène de nature<br />
subjective.<br />
5.2. Les moyens de l’évaluation<br />
5.2.1. les estimations globales<br />
5.2.1.1. l’échelle visuelle analogique (E.V.A) ( Figure 32 <strong>et</strong> 33)<br />
C’est un outil validé. Mesure sensible, reproductible <strong>et</strong> comparative, l’E.V.A est le moyen le<br />
plus sûr de quantifier la sévérité d’une <strong>douleur</strong> aiguë, subaiguë, chronique <strong>et</strong> de suivre<br />
l’évolution de la <strong>douleur</strong> ;<br />
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Figure 32 – Echelle Visuelle Analogique<br />
Figure 33 – Echelle Visuelle Analogique (EVA)<br />
5.2.1.2. l’échelle verbale numérique : zéro à dix<br />
C<strong>et</strong>te échelle est performante <strong>et</strong> indiquée chez les suj<strong>et</strong>s à faible capacité d’abstraction ou à<br />
faible compliance.<br />
Figure 34 – Echelle Numérique<br />
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5.2.1.3. l’échelle verbale simple<br />
Constituée de cinq descripteurs (absente, faible, modérée, intense, extrêmement intense) elle<br />
rend service chez les suj<strong>et</strong>s âgés par exemple. Sa sensibilité est modeste (Figures 35 <strong>et</strong> 36).<br />
Figure 35 – Echelle verbale Simple<br />
Figure 36 – Examen <strong>et</strong> évaluation de la <strong>douleur</strong><br />
5.2.2. les échelles verbales multidimensionnelles<br />
Le questionnaire <strong>douleur</strong> de Saint Antoine (QDSA) version française du Mac Gill Pain,<br />
perm<strong>et</strong> une évaluation pluridimensionnelle quantitative <strong>et</strong> qualitative de la <strong>douleur</strong>. Certains<br />
qualificatifs ont une valeur d’orientation diagnostique <strong>et</strong> tous impliquent une certaine intensité<br />
de la <strong>douleur</strong>. Leur différenciation en qualificatifs sensoriels <strong>et</strong> émotionnels autorise une<br />
appréciation des deux versants majeurs de la <strong>douleur</strong>.<br />
A ∟ I : qualificatifs de la sensation perçu e<br />
J ∟ P : qualificatifs du versant émotionnel dans ce que la <strong>douleur</strong> a de désagréable, dans son<br />
vécu <strong>et</strong> dans son r<strong>et</strong>entissement sur les affects.<br />
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Figure 37 – Echelle de qualification de la <strong>douleur</strong><br />
5.2.3. les échelles comportementales<br />
Elles perm<strong>et</strong>tent d’apprécier le r<strong>et</strong>entissement d’une <strong>douleur</strong> sur le comportement, indicateur<br />
plus objectif du degré du handicap, d’invalidité donc de sévérité de la <strong>douleur</strong>.<br />
5.2.3.1. l’échelle comportementale d’ A.Bourrhis (1970)<br />
Utilisée pour l’hétéro-évaluation des patients hospitalisés.<br />
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5.2.3.2. l’échelle comportementale de F. Boureau<br />
Figure 38<br />
5.2.4. l’évaluation de la <strong>douleur</strong> aiguë<br />
Elle peut se contenter de la seule évaluation de la sévérité de la <strong>douleur</strong> par les estimations<br />
globales citées.<br />
5.2.5. l’évaluation de la <strong>douleur</strong> aiguë rebelle<br />
En cancérologie ou dans les infections VIH, par exemple, il faut préciser :<br />
5.2.5.1. la sévérité de la <strong>douleur</strong> per les échelles d’estimation<br />
globale<br />
5.2.5.2. les caractéristiques de la <strong>douleur</strong> :<br />
• la localisation sur un Figure corporel<br />
• les variations sur le nycthémère<br />
• les descripteurs qualitatifs<br />
• la réponse aux traitements précédents<br />
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5.2.5.3. l’impact de la <strong>douleur</strong><br />
• le r<strong>et</strong>entissement sur la vie du patient : activité, humeur<br />
• l’interaction avec d’autres symptômes : asthénie, appétit, sommeil...<br />
• le r<strong>et</strong>entissement sur l’entourage<br />
5.2.6. l’évaluation d’une <strong>douleur</strong> chronique<br />
Une <strong>douleur</strong> chronique se comprend à travers l’histoire de la <strong>douleur</strong>, l’histoire du patient, ses<br />
événements de vie, sa personnalité. Elle est la résultante de processus biologiques,<br />
psychologiques <strong>et</strong> sociaux. Le modèle SEPIAC répond à l’aspect multidimensionnel en<br />
analysant :<br />
Figure 39 – Evaluation d’une <strong>douleur</strong> chronique<br />
5.2.6.1. sensations<br />
• qualité, intensité<br />
• variations temporelles<br />
• facteurs d’amplification <strong>et</strong> de réduction<br />
5.2.6.2. émotions<br />
• signes indirects : amaigrissement, insomnie, asthénie<br />
• humeur dépressive, irritabilité...<br />
• échelle HAD (Figure 40)<br />
5.2.6.3. pensées<br />
• sens de la <strong>douleur</strong> : modèle du patient, crainte d’une aggravation, peur d’un diagnostic<br />
mal établi<br />
• information médicale antérieure<br />
• peur d’une aggravation à la reprise du travail<br />
5.2.6.4. images<br />
• distorsion du Figure corporel<br />
• capacité imaginative, rêve<br />
5.2.6.5. activités<br />
• professionnelles, socio-familiales <strong>et</strong> de loisirs<br />
• maintenues, abandonnées ou majorées<br />
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• le degré d’attrait professionnel<br />
• relations interpersonnelles : quel changement la <strong>douleur</strong> a t’elle opéré dans<br />
l’entourage<br />
5.2.6.6. consommation d’antalgiques<br />
• prescription : compliance, hypo ou hyperconsommation<br />
• traitement antérieur : lesquels ? leurs eff<strong>et</strong>s ?<br />
• autre consommation de « drugs » : café, tabac, alcool...<br />
L’anamnèse SEPIAC est complétée par l’histoire de la <strong>douleur</strong> <strong>et</strong> des événements de vie<br />
marquants <strong>et</strong> concomitants, de la recherche des antécédents <strong>et</strong> d’un examen clinique<br />
(neurologique en particulier).<br />
Alors peut être formulée une hypothèse physio-psychopathologique de la <strong>douleur</strong> chronique<br />
évaluée dans une perspective biopsychosociale.<br />
La <strong>douleur</strong> chronique relève de l’interaction de facteurs psychologiques, biologiques <strong>et</strong><br />
sociaux <strong>et</strong> son approche thérapeutique ne pourra être que plurimodale.<br />
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Figure 40 – Echelle H.A.D.<br />
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