une bande dessinee idéologique : rahan - Revue des sciences ...
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(17) M. Douglas, p. 44.<br />
(18) F. Engels, «Herrn Eugen Dùhrings»,<br />
p. 294.<br />
(38, 9), démentie par les faits, comme<br />
il est bien connu. L'intrusion <strong>des</strong><br />
étrangers est assez rarement suivie<br />
d'<strong>une</strong> simple interrogation : «Que<br />
fais-tu sur le territoire de la horde ?»<br />
(2, 25). Il s'agit, plus souvent, de le<br />
capturer (84, 5), de l'éliminer : «L'inconnu<br />
chasse sur notre territoire,<br />
tuons-le !» (64, 2). Toujours, il est<br />
<strong>une</strong> menace : « Tous ceux qui viennent...<br />
sont <strong>des</strong> ennemis » (30, 4). On<br />
se méfie, pour le moins, de l'étranger<br />
qui n'appartient à aucun clan connu<br />
(91, 64), de celui dont l'apparence est<br />
inhabituelle (30, 6). Il est soupçonné<br />
d'espionnage (72,24), accusé d'empiéter,<br />
comme R, sur l'autorité du maître<br />
local : «De quel droit viens-tu lancer<br />
<strong>des</strong> ordres ? » (77, 55).<br />
3. Ignorance et religion<br />
La mise au pas <strong>des</strong> faibles par les forts<br />
connaît un pendant moins visible.<br />
Croyances et rituels consolident un assujettissement<br />
intellectuel dont profite<br />
un «clergé», généralement réduit au<br />
seul sorcier. Ce dernier s'en prend au<br />
clan tout entier (7, 71 ; 38, 9 ; 103, 9)<br />
ou plus précisément au chef (60, 7;<br />
103, 6).<br />
R reconnaît en lui son ennemi principal,<br />
l'«anti-héros» permanent qu'il<br />
trouve en face de lui lorsqu'aucun<br />
homme ne lui est hostile (102, 34). La<br />
religion, thème omniprésent de ces albums,<br />
est la forme détestable d'un<br />
pouvoir théorique, inverse du pouvoir<br />
pratique <strong>des</strong> autorités laïques. Elle se<br />
situe, de ce fait, au même plan que la<br />
philosophie de R, tout aussi théorique.<br />
Mais, si ses conceptions visent à<br />
ouvrir les yeux sur les pratiques réelles,<br />
le sorcier agit à rebours : « Ce que<br />
vos yeux ont vu n 'importe pas ! Seul<br />
compte ce que pense Tamud» (24,14).<br />
Toutes les ruses lui sont bonnes : affirmation<br />
d'un pouvoir sur les volcans<br />
(38, 9), imposition d'un chef encore<br />
dans l'enfance (19, 24), ordalie truquée<br />
(7, 39), divination d'autant plus<br />
crédible qu'il exécute lui-même les menaces<br />
qu'il prétend savoir peser sur<br />
l'autorité légitime (103, 6), promesse<br />
de bonheur éternel (74, 8). Parfois, il<br />
se déguise en «esprit» (69, 63), affirme<br />
représenter dieu sur terre (66,<br />
26) et se réserve le droit de pénétrer<br />
dans le «territoire <strong>des</strong> nuages» (90,<br />
53). Ces «vieilles superstitions», le<br />
sorcier les entretient pour en tirer profit<br />
(6, titre) et les crée si nécessaire. On<br />
retrouve la conception frazerienne<br />
d'<strong>une</strong> religion fondée sur la fraude <strong>des</strong><br />
prêtres (17) : «Tous mentaient pour<br />
assurer leur pouvoir» (66, 26). Toujours<br />
l'ignorance et la crédulité conditionnent<br />
le succès de l'entreprise et le<br />
sorcier se gausse de «tous ces chasseurs<br />
qui croient au pouvoir de Yakoba»<br />
(36, 57). Il faut, par conséquent,<br />
se garantir du monde extérieur,<br />
d'où peut venir le démasquage. Non<br />
seulement le sorcier n'a «rien à apprendre<br />
d'un inconnu» (47, 9), mais il<br />
«hait les idées nouvelles» (68, 48) et<br />
refuse, pour éviter le danger d'<strong>une</strong><br />
contestation, toute comparaison avec<br />
les nations lointaines : « Tu affirmes<br />
que d'autres clans vivent mieux et plus<br />
heureux que le nôtre ! » (68, 47). Son<br />
originalité, cependant, s'arrête là.<br />
Comme tous les exploiteurs, il tend<br />
aux fins les plus triviales : « diriger le<br />
clan», «dominer le clan» (56, 14;<br />
102, 74), garder «le trésor pour lui<br />
seul» (74, 18). Il lui faut encore la suprématie<br />
sur les sociétés voisines (69,<br />
66) et tâche d'orienter dans ce sens la<br />
politique du chef, suggérant que les<br />
«bambous qui tonnent», remplis de<br />
poudre, «donneront la toute puissance»<br />
(21, 16), c'est-à-dire P«arme<br />
absolue» : il n'y a qu'un pas de l'Intérieur<br />
aux Affaires Etrangères.<br />
Toutefois, l'ignorance est, pour <strong>une</strong><br />
part, inhérente à la nature de<br />
l'homme, dont les techniques <strong>des</strong> sorciers<br />
aggravent certaines faiblesses. La<br />
religion n'est qu'un reflet gauchi <strong>des</strong><br />
forces externes, naturelles et sociales,<br />
qui s'imposent à l'esprit (18). Elle est<br />
<strong>une</strong> « exploitation » de la peur, qui empêche<br />
de reconnaître les choses pour<br />
ce qu'elles sont et fonde un polythéisme<br />
à la Mannhardt, aux multiples<br />
«démons» et «esprits» de la nuit (17,<br />
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