Arts Premiers - Tajan
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PROVENANT DE COLLECTIONS DE DIVERS AMATEURS<br />
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MASQUE YUPI'K, INUIT, KUSKOKVIM RIVER, Alaska<br />
Masque attrapeur de rêves au visage en transformation<br />
chamanique. Il représente la transformation de l'homme<br />
en phoque dans les rites propiatoires à la chasse. Le<br />
masque dans lequel sont fichés quatre plumes, est surmonté<br />
d'un animal stylisé, poisson, la prise convoitée.<br />
L'ensemble est surmonté d'une arcature en bois flexible<br />
symbolisant le rêve. Cet ensemble constitue un attraperêve<br />
et un médiateur lors de la transformation de l'esprit<br />
en transe chamanique. Le chasseur intercède avec la<br />
Nature afin d'attraper la proie, ou pour la remercier de<br />
l'avoir attrapé.<br />
Bois sculpté, pigments et plumes.<br />
Seconde moitié du XIX ème siècle.<br />
H. 43 CM ; 16 3/4 IN ; H: TOTALE 65 CM; 25 3/4 IN<br />
Commentaire par le docteur Jeau-Loup Rousselot spécialiste<br />
de l'art Eskimo au Staatliches Museum für Völkerkunde de<br />
Munich :<br />
Bien que les masques soient présents dans presque toutes les<br />
cultures, peu sont conservés provenant des chasseurs Eskimo<br />
du Grand Nord. En effet, ceux-ci étaient, en général, fait en<br />
peau, et consistaient en une sorte de rideau, percé de deux<br />
trous pour les yeux. La peau était quelquefois peinte. Dans<br />
l'Alaska de l'ouest, c'est tout le contraire, le chasseur étant<br />
sédentaire, il ne cherchait à faire des masques particulièrement<br />
légers et facilement transportables, dans cette région on peut<br />
observer une grande richesse de masques en bois polychrome.<br />
Le bois ne manque pas dans les deltas du Yukon et du<br />
Kuskokwim, la débâcle, au printemps, apporte de milliers de<br />
troncs arrachés à la forêt boréale. Les eaux peu profondes du<br />
delta du Kuskokwim ont isolé cette côte au temps de la colonisation<br />
russe (jusqu'en 1867), les navires ne trouvant pas de<br />
point d'ancrage, passaient sans s'arrêter. Avec les chercheurs<br />
d'or (Yukon, Klondike, Nome) de la fin du XIX ème siècle, nombres<br />
d'aventuriers et de marchands de fourrures viennent ici chercher<br />
fortune. Avec eux, arrivent les missionnaires qui ouvrent au<br />
christianisme un pays jusque là très traditionnel. Les masques,<br />
encore en usage, font l'admiration des nouveaux venus qui<br />
s'empressent d'en décorer leurs maisons. Avec la christianisation<br />
de la population autochtone, les masque désacralisés font<br />
rapidement l'objet d'un commerce. Au début du XX ème siècle,<br />
les grands s'en procurent par leurs agents sur le terrain.<br />
A la fin des années 30 et pendant la 2e Guerre mondiale, le<br />
Museum of the American Indian de New York vent petit à petit,<br />
une partie de son fonds, ce qui permet, entre autres, aux surréalistes<br />
réfugiés à New York d'en acquérir un certains nombres<br />
qui sont plus tard arrivés en Europe.<br />
Le masque est en général utilisé dans une cérémonie retraçant<br />
un épisode de la mythologie. Ce faisant, les participants veulent<br />
rappeler aux ancêtres et aux esprits les besoins des hommes<br />
en nourriture, ou, après la chasse pour les remercier du succès<br />
de celle-ci. Mais témoigner sa reconnaissance n'était pas tout<br />
; le chasseur en tuant, avait détruit l'équilibre de la nature, le<br />
succès du prédateur faisait qu'il manquait quelque chose de<br />
vivant que la mort de l'animal avait emporté. Alors, il fallait tout<br />
faire pour rétablir l'harmonie originale : par des cérémonies, des<br />
offrandes, par l'observation de tabous on cherchait à compenser<br />
cette de vie. Certains os, ou la vessie, siège de l'âme,<br />
étaient rendus à la nature. Sur ce masque on peut reconnaître<br />
la figure d'un phoque. Donc, par exemple, les vessies des phoques<br />
tués étaient rendues à la mer par la procession des chasseurs.<br />
L'âme de l'animal rendue à la mer, pouvait y retrouver un<br />
corps, donc renaître et ainsi, rétablir l'harmonie originale.<br />
Le masque présenté ici, exhibe un orifice béant (la surface<br />
bleue noire, du haut et du bas), par cette ouverture apparaît la<br />
face du phoque (peinte en blanc), plus bas, une grande bouche<br />
vorace et monstrueuse. Elle est affamée, comme le montre le<br />
nombre de ses dents, mais ces dents sont aussi le signe de sa<br />
puissance. Pouvoir manger beaucoup est une garantie de survie.<br />
Le phoque étant un animal pacifique, s'il a ici, une bouche<br />
menaçante, c'est pour rappeler au chasseur ses obligations<br />
vis-à-vis de l'animal tué. Il faut respecter les traditions, si on<br />
veut s'assurer dans le futur la bonne volonté et la coopération<br />
des animaux. Ces derniers mettent à la disposition des hommes<br />
leur chair, leur peau, leurs os, leurs organes, leurs défenses<br />
(pour les morses), toutes ces parties du corps sont précieuses<br />
et utilisées à diverses fins par les Eskimo Yupik. En cotre<br />
partie, l'esprit de l'animal attend dévotion, respect, reconnaissance,<br />
et aussi d'être distrait pendant ce temps passé chez les<br />
hommes.<br />
Ce très beau masque de la fin du XIX ème siècle, en bois polychrome,<br />
a une longue histoire comme le montre les alésages<br />
sur sa périphérie, et les traces d'herminette au verso. En effet,<br />
ces marques témoignent d'éléments ajoutés, enlevés et remplacés,<br />
suivant les besoins du rite dans lequel était présenté le<br />
masque.<br />
Provenance : Collection Pascal Alcan Legrand, Paris.<br />
Ancienne collection Rasmussen.<br />
Bibliographie:<br />
Fienup-Riordan A., The Living Tradition of the Yupik Masks,<br />
1996.<br />
Nelson E.W., The Eskimo about Bering Strait, 1899<br />
Rousselot J.-L.; et al., Masques Eskimo d'Alaska, 1991.<br />
180 000/220 000<br />
A rare Yupi'k mask, Inuit, Kuskokvim River, Alaska.<br />
A YUPI' K MASK, INUIT, KUSKOKVIM RIVER, ALASKA.<br />
Dreamcatcher mask of a face in chamanic transformation. The<br />
mask represents the transformation of a man into a seal in the<br />
propiatory hunting rites. The mask in which four feathers are<br />
driven, is surmounted by a stylized animal, a fish, the coveted<br />
catch. The unit is surmounted by an arcature made out of flexible<br />
wood symbolizing dreams. This unit constitutes a dreamcatcher<br />
and allows the meditation during the transformation of<br />
the spirit in chamanic trance to intercede with Nature, in order<br />
to make Her allow the hunter to catch the prey or to thank Her<br />
for having caught it.<br />
Sculpted wood, pigments, and feathers may be later edition.<br />
End of 19th century 2nd S.<br />
Comment by Doctor Jean- Loup Rousselot specialist in Eskimo<br />
art in the Staatliches Museum für Völkerkunde of Munich:<br />
Although the masks are present in almost all the cultures, few<br />
are preserved coming from the Eskimo hunters of the Far<br />
North. Indeed, those were, in general, made out of skin, and<br />
consisted of a kind of a curtain, bored of two holes for the eyes.<br />
The skin was sometimes painted. In Western Alaska, it is all the<br />
opposite, the hunter being sedentary, he did not seek to make<br />
particularly light and easily transportable masks, (and) in this<br />
area one can observe a great richness of polychrome wooden<br />
masks.<br />
126 Art d’Asie du Sud Est, Art Amérindien