Parce que je suis une fille - Droits des filles

Avant-propos
La situation des filles dans le monde est
un rapport particulièrement bienvenu. Il
vient à point nommé offrir un éclairage
important et critique sur les difficultés
souvent méconnues que rencontrent les
filles dans les pays qui sortent d’un conflit.
Dans ces circonstances, les menaces pour
la survie et le potentiel des filles sont
multiples. Il est urgent d’intervenir afin que
les filles aient une chance de mener des
vies normales incluant l’éducation et l’accès
aux soins médicaux. Les environnements
nés des conflits offrent des opportunités de
changement mais comportent également
toutes les variables qui alimentent le cycle
de l’extrême pauvreté. Le Liberia est un
pays sorti de la guerre où 50 pour cent de
la population a moins de 18 ans; les filles
représentant près de la moitié de ce groupe.
Les filles libériennes subissent chaque jour le
harcèlement sexuel et la violence sexiste des
hommes plus âgés de leur voisinage et de
leurs enseignants. Le résultat en est un taux
élevé de grossesses chez les adolescentes,
une forte proportion d’abandons scolaires
ainsi qu’une recrudescence de la prostitution
qui les fait vivre avec leurs enfants et/
ou leurs frères et sœurs plus jeunes. Cette
violence, actuellement omniprésente dans
notre société, aboutit à une augmentation
du risque d’infection par le VIH et le SIDA au
sein de ce groupe vulnérable, laissé sans, ou
presque sans accès aux soins de santé ou à
d’autres services sociaux.
Lorsque j’ai été investie dans mes
fonctions en janvier 2006, j’ai promis aux
jeunes du Liberia que mon gouvernement
ferait son possible pour répondre à leurs
besoins. Nous avons porté notre attention
sur les besoins spécifiques des filles en
instituant des lois contre le viol et en
réglementant les héritages conformément
à leurs besoins. La législation anti-viol,
adoptée en 2007, prévoit des sanctions plus
lourdes pour les auteurs de viol ou d’autres
délits sexuels à l’encontre des filles. Les
dispositions légales régissant les héritages
stipulent que forcer une fille de moins de
16 ans à se marier est un crime et autorise
une fille majeure à faire un choix dans une
décision de mariage la concernant. Grâce à
la Politique d’Éducation Nationale qui assure
l’enseignement primaire gratuit et obligatoire
à tous les enfants, toutes les filles libériennes
ont à présent accès à l’éducation. De plus à
mon initiative personnelle, le Trust Libérien
de l’Éducation a été créé et a rapporté plus
de 2 millions de dollars US sur des apports
privés pour financer la construction d’écoles,
l’attribution directe de bourses à des milliers
de filles et des cours d’alphabétisation pour
les femmes sur les marchés.
Toutefois, nos filles doivent encore
affronter de nombreux défis. L’éducation est
au centre de ces défis. Selon des statistiques
élaborées par l’UNICEF, 58% seulement
des enfants libériens en âge officiel d’entrer
à l’école et effectivement inscrits dans
le primaire sont des filles, par rapport à
74% des enfants qui sont des garçons. Il
convient de combler cet écart en améliorant
l’environnement d’apprentissage des filles
en formant et en recrutant un plus grand
nombre d’institutrices et en prévoyant
après la classe des programmes éducatifs
indispensables pour les filles.
Mon investiture comme première femme
élue à la présidence en Afrique a apporté
l’espoir aux filles du Libéria et de l’ensemble
de l’Afrique. Je trouve du réconfort et des
encouragements dans l’histoire que m’a
racontée un représentant de l’UNESCO
en visite dans l’école d’un village reculé du
Libéria. Il avait observé une fille qui courait
dans la cour en jouant au milieu des garçons.
Horrifié, le principal de l’école, un homme, la
réprimanda pour sa conduite turbulente en
disant: “Tu es une petite fille, tu devrais te
tenir tranquille et ne pas faire tant de bruit“.
La petite fille réfléchit un instant et répliqua
calmement: “Monsieur, faites attention à la
façon dont vous me parlez. N’oubliez pas
que notre président est une femme.“
Il est bien établi que les femmes ont
une très large part dans le développement
national mais qu’elles connaissent
également des malheurs indicibles dans les
situations de conflit qui les font tomber dans
le piège de la pauvreté.
Je pense qu’afin de réaliser notre
développement national, il est essentiel
d’assurer un avenir à nos filles. Le dicton
populaire veut que “quand on éduque un
garçon, on nourrit sa famille, mais quand
on éduque une fille, c’est une nation que
l’on éduque“. Ce dicton ne manque pas
de profondeur. Apporter un changement
positif à la situation des filles dans le monde
au moyen d’opportunités d’ordre éducatif
et économique aboutira à un recul de la
pauvreté dans le monde.
Il faut agir MAINTENANT pour faire une
différence dans la vie de millions de filles de
par le monde.
Ellen Johnson Sirleaf
Présidente du Liberia
1 État des Enfants du Monde (2007)
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