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Mépris de la Zurich-Vie pour les locataires excentrés<br />
Nouveau: le<br />
congé pour<br />
risque d’explosion<br />
Neuchâtel<br />
L’affaire des locataires<br />
de Fleurier privés de<br />
chauffage,<br />
largement médiatisée<br />
en octobre 2004, est<br />
en train de connaître<br />
son épilogue<br />
judiciaire. Ou<br />
comment se battre<br />
pour avoir chaud en<br />
plein hiver jurassien.<br />
13<br />
Droit au logement n° <strong>176</strong><br />
Septembre 2006<br />
Rappel des faits: l’immeuble<br />
Sassel 2 était propriété de la<br />
Zurich-Vie, qui souhaitait s’en<br />
débarrasser. Il s’est avéré que<br />
les chauffages individuels à<br />
gaz existants présentaient pour<br />
les locataires un réel danger,<br />
si bien que les services du gaz<br />
ont exigé le changement des<br />
installations. Après plusieurs<br />
injonctions rappelant le risque<br />
important encouru par les locataires,<br />
la bailleresse s’est résignée<br />
à demander un devis, qui<br />
se montait à près de 100’000<br />
francs pour un immeuble de 4<br />
appartements!<br />
Solution retenue: tous les<br />
locataires ont reçu leur congé.<br />
Après une première procédure,<br />
les locataires ont obtenu une<br />
prolongation de bail de 3 ans,<br />
juridiquement insatisfaisante,<br />
mais qu’ils ont décidé d’admettre.<br />
Ils espéraient que l’immeuble<br />
soit vendu à un acquéreur<br />
disposé à les garder et à changer<br />
le chauffage, comme cela<br />
avait été le cas pour un immeuble<br />
voisin ayant vécu la même<br />
mésaventure.<br />
Factures<br />
d’électricité<br />
exorbitantes<br />
Tout cela ne réglait cependant<br />
pas la question du risque lié<br />
au chauffage. Après une ultime<br />
injonction des services du gaz<br />
et la consignation des loyers<br />
par les locataires, la bailleresse<br />
s’est résolue à enlever l’installation<br />
et à fournir aux locataires<br />
des radiateurs à bain d’huile...<br />
Quant aux chauffe-eau électriques,<br />
ils ont été remplacés<br />
par des boilers électriques fonctionnant<br />
jour et nuit. Résultat:<br />
surcharge de l’installation électrique,<br />
factures explosives et<br />
grave inconfort dû au froid, à<br />
l’encombrement et à l’instabilité<br />
du système. Sans compter<br />
que les locataires, de condition<br />
modeste, n’avaient plus de quoi<br />
payer leurs factures d’électricité.<br />
Réaction de la gérance:<br />
- aucune intention de modifier<br />
l’état actuel des installations,<br />
qui selon elle n’entravent nullement<br />
l’utilisation de la chose<br />
louée;<br />
- refus de la demande de diminution<br />
de loyer, la chose louée<br />
ne subissant «en aucun cas une<br />
diminution de sa valeur»;<br />
- refus de la prise en charge<br />
des surcoûts d’énergie, car la<br />
société propriétaire «n’a pas à<br />
supporter ces frais liés à la consommation<br />
de chauffage».<br />
Saisie de la question, l’autorité<br />
de conciliation a accordé<br />
aux locataires une diminution<br />
de loyer de 30% pour les mois<br />
d’hiver et le remboursement<br />
des frais d’électricité. C’en<br />
était trop pour la bailleresse,<br />
qui a décidé de porter l’affaire<br />
devant le tribunal de district.<br />
Question de principe, paraîtil,<br />
comme si elle s’apprêtait à<br />
réitérer son coup ailleurs. Par<br />
chance, son avocat, plus compréhensif,<br />
a au moins admis de<br />
libérer sans reconnaissance de<br />
responsabilité une partie des<br />
loyers consignés, afin que les<br />
locataires ne se fassent pas couper<br />
l’électricité en plein hiver.<br />
Gâchis financier<br />
(Interphoto)<br />
Entre-temps, l’immeuble s’est<br />
vendu, un nouveau chauffage<br />
général a été installé pour environ<br />
50’000 francs, les boilers<br />
électriques qui avaient coûté<br />
plus de 11’000 francs à la<br />
Zurich-Vie envoyés à la casse.<br />
Finalement, le tribunal a rendu<br />
une décision à peu près semblable<br />
à celle de l’autorité de conciliation.<br />
Conclusion: un gâchis<br />
financier pour la bailleresse, et<br />
l’occasion pour elle de montrer<br />
son mépris envers les habitants<br />
de vallées trop éloignées de<br />
Zurich.<br />
Marie-Claire<br />
Jeanprêtre Pittet