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Dans les taudis d’Afrique, les expulsions sont<br />
courantes, mais elles ne font pas reculer la pauvreté<br />
Le dossier de DAL<br />
En 2005, les<br />
autorités du<br />
Zimbabwe ont balayé<br />
les habitants hors des<br />
bidonvilles. Gaz<br />
lacrymogènes et<br />
bulldozers sont entrés<br />
en action. Elles<br />
voulaient «nettoyer»<br />
des zones convoitées<br />
par les promoteurs<br />
pour construire des<br />
résidences plus<br />
rentables.<br />
6<br />
Droit au logement n° <strong>176</strong><br />
Septembre 2006<br />
Traiter les<br />
habitants comme<br />
des déchets<br />
Lorsqu’en mai de l’an dernier,<br />
les autorités d’Harare, capitale<br />
du Zimbabwe, ont lancé leur<br />
campagne «Balayer les ordures<br />
ailleurs», elles n’ont pas précisé<br />
qu’il s’agissait d’êtres humains.<br />
La férocité et la rapidité de<br />
l’opération lui a valu le surnom<br />
d’opération tsunami.<br />
Sans préavis ou presque,<br />
alors qu’on était là-bas en<br />
hiver, 1,5 million d’individus<br />
(sur une population nationale<br />
de 12 millions d’habitants) se<br />
sont retrouvés sans abri. 42’000<br />
récalcitrants ont été incarcérés:<br />
ils ne faisaient que s’opposer<br />
aux expulsions.<br />
Les lacrymogènes<br />
tuent des<br />
innocents<br />
Des dizaines de morts ont été<br />
comptés, dont des enfants écrasés<br />
pendant les démolitions.<br />
Auparavant, le 2 septembre<br />
2004, des policiers et des membres<br />
d’une milice ont commencé<br />
à déloger quelque 10’000<br />
personnes vivant à Porta Farm,<br />
un campement de fortune situé<br />
dans la banlieue d’Harare.<br />
Comme le souligne Amnesty<br />
international (AI), «l’opération<br />
a été menée au mépris d’une<br />
décision de justice». Selon des<br />
témoins, la police a tiré des<br />
gaz lacrymogènes à l’intérieur<br />
même de certaines habitations.<br />
Au moins dix personnes ont<br />
perdu la vie au cours des trois<br />
semaines qui ont suivi l’assaut.<br />
Cinq étaient des bébés de moins<br />
d’un an.<br />
Une pétition internationale<br />
circule pour rétablir le droit au<br />
logement au Zimbabwe*. Elle<br />
demande des dédommagements<br />
pour toutes les victimes des<br />
expulsions. Le secrétaire général<br />
de l’ONU, M. Kofi Annan<br />
a prié le gouvernement de faire<br />
cesser cette campagne dévastatrice.<br />
Curieusement, le régime zimbabwéen,<br />
qui avait fini par<br />
concrétiser le remaniement parcellaire<br />
promis de longue date<br />
aux paysans pauvres, n’a pas<br />
trouvé que les habitants des<br />
bidonvilles méritaient aussi<br />
d’obtenir le droit à habiter leur<br />
maisons, aussi modestes soientelles.<br />
Une approche qualifiée<br />
d’élitiste par le rapport d’ONU-<br />
Habitat, car en fait, les résidences<br />
ont été mises hors-la-loi.<br />
* http://fr.habitants.org/article/<br />
articleview/1469/1/382/<br />
Selon l’envoyée spéciale de<br />
l’ONU, Mme Anna Tibajuka, on<br />
a «perpétué la mentalité coloniale<br />
en défendant une minorité<br />
au dépens des intérêts de la<br />
majorité».<br />
Il faut en<br />
tirer des leçons<br />
Son analyse est sans détours:<br />
«Le gouvernement n’a pas été<br />
capable de renverser la nature<br />
inégalitaire et l’esprit d’exploitation<br />
du capitalisme colonial».<br />
Elle a suggéré de suspendre<br />
l’application de vieilles lois<br />
sur la propriété foncière et d’en<br />
réviser d’autres afin de tenir<br />
compte des besoins de la population<br />
pauvre du pays.<br />
Mieux, elle a exhorté la communauté<br />
internationale à tirer<br />
des leçons des erreurs commises<br />
au Zimbabwe afin que les politi-