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SommaireTribunesPar<strong>le</strong>mentairesE u r o p é e n n e sSommaireUn accompagnement adapte tout au long de la vie• Le dispositif français d’accompagnement tout au long de la vieD’importants retards à comb<strong>le</strong>r ............................................................................................................................................................................... P 22• Construire l’avenir d’un enfant différent ................................................................................................................................................ P 25Par Christel Prado, Présidente de l’UnapeiL’autisme, Grande Cause Nationa<strong>le</strong> 2012Editoriaux• Un rassemb<strong>le</strong>ment large pour renverser <strong>le</strong>s préjugés ..................................................................................................... P 6Par Marie-Anne Montchamp, Secrétaire d’Etat aux Solidaritéset à la Cohésion Socia<strong>le</strong>• L’autisme, une Grande Cause Nationa<strong>le</strong> ........................................................................................................................................................ P 7Par Daniel Fasquel<strong>le</strong>, Député du Pas-de-Calais,Président du Groupe d’études par<strong>le</strong>mentaire sur l’<strong>Autisme</strong>• La <strong>France</strong> doit donner aux personnes, enfants et adultes,atteintes d’autisme un réel accès aux droits fondamentaux ......................................................................... P26Par Jean Claude Ameisen, Président du comité d’éthique et du comité scientifiquede la Fondation internationa<strong>le</strong> de la Recherche appliquée sur <strong>le</strong> Handicap• L’implication de la CNSA dans <strong>le</strong> plan <strong>Autisme</strong> 2008-2010 ................................................................................. P27Par Luc Allaire, Directeur de la Caisse Nationa<strong>le</strong> de Solidarité pour l’Autonomie• Pourquoi investir dans l’accompagnement des personnes autistes ? ......................................... P28Un entretien avec Philippe Calmette, Directeur Général de la FEGAPEI(Fédération nationa<strong>le</strong> des associations gestionnaires au service des personnes handicapées)• L’autisme : de nouveaux champs de progrès grâce aux famil<strong>le</strong>s ............................................................. P29Par Louis-Georges Barret, Avocat• « Un Club, Un Autiste », <strong>le</strong> rugby citoyen ..................................................................................................................................................... P30Par Julien Schramm, père de Baptiste, fondateur de « Un Club, Un Autiste »Un enjeu de societe et de sante publique• La Fondation Orange, plus de vingt ans d’engagement en faveur de l’autisme ................... P31Un entretien avec Pasca<strong>le</strong> Patur<strong>le</strong>, Fondation Orange• <strong>Autisme</strong>, entre méconnaissances et préjugés ................................................................................................................................... P 9• Les personnes autistes sont des citoyens comme <strong>le</strong>s autres .......................................................................... P 12Un entretien avec Vincent Gerhards, Président d’Autistes sans Frontièreet du Col<strong>le</strong>ctif <strong>Autisme</strong>• Plus de moyens pour accompagner <strong>le</strong> plan autisme ....................................................................................................... P 13Par Marcel Hérault, Président de la Fédération Française Sésame <strong>Autisme</strong>• La <strong>France</strong> condamnée par <strong>le</strong> Conseil de l’Europe : quels résultats ? ............................................... P 14Par Evelyne Friedel, Vice-Présidente d’<strong>Autisme</strong> Europe• L’Europe sera l’avenir de l’autisme français… .............................................................................................................................. P 16Par Xavier Grosclaude, Vice-Président de Fenêtre sur l’Europe© JB MariouPour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme• Le plan autisme 2008-2010 Et demain ? .................................................................................................................................................... P32• L’évaluation du plan autisme, quels enseignements ? .................................................................................................. P36Par Valérie Létard, Sénatrice du Nord• Les départements et la prise en charge de l’autisme ..................................................................................................... P 37Par André Montané, Vice-Président du Conseil Général de l’Ariège,Membre de la Commission « politiques socia<strong>le</strong>s et familia<strong>le</strong>s »de l’Assemblée des Départements de <strong>France</strong> (ADF)• Les attentes des famil<strong>le</strong>s ............................................................................................................................................................................................................ P 38Par Daniè<strong>le</strong> Langloys, Présidente d’<strong>Autisme</strong> <strong>France</strong>Les perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la recherche• Progresser dans la compréhension des mécanismes de l’autismeMieux cerner <strong>le</strong>s causes et améliorer l’accompagnement................................................................................... P 17• Etat des connaissances dans l’autisme ........................................................................................................................................................ P 20Par <strong>le</strong> Docteur Nadia Chabane, Pédopsychiatre à l’Hôpital Robert Debré• Des voies innovantes pour préparer l’avenir .................................................................................................................................. P 40Par Bertrand Jacques, Administrateur de la Fondation <strong>Autisme</strong>Agir et Vivre l’<strong>Autisme</strong> Sous l’égide de la Fondation de <strong>France</strong>• Notre pays doit être au rendez-vous de la dignité humaine .......................................................................... P 42Un entretien avec Gwendal Rouillard, Député du Morbihan,Membre du Groupe d’études par<strong>le</strong>mentaire sur l’autisme• De grandes injustices dans la non prise en compte des personnes autistes ................ P 21Un entretien avec Michel Favre, Président de l’Association Pro Aid <strong>Autisme</strong>,Directeur de Recherches INSERM à l’Institut Pasteur© JB MariouTribunes Par<strong>le</strong>mentaires Européennes© • 3, rue Catul<strong>le</strong> Mendès - 75 017 Paris • Tél. : (33)1 42 12 02 03Fax : (33)1 42 12 07 90 • SARL au capital de 6 000 euros • RCS Paris 523 225 514 • Directeurs de laPublication : Gérald Martinez, Hervé F<strong>le</strong>ureau • Directeur de la Rédaction, Rédacteur en Chef : Marie MarcelinConception, Infographie : Christophe Le Nours • Imprimé en <strong>France</strong> • ISSN 2116-2611 • Prix au numéro : 12€La reproduction des textes, dessins et photographies publiés dans ce numéro est strictement interdite. Ils sont lapropriété de Tribunes Par<strong>le</strong>mentaires Européennes qui se réserve tous droits de reproduction dans tous <strong>le</strong>s pays dumonde. Les documents reçus ne sont pas rendus (sauf demande) et <strong>le</strong>ur envoi implique l’accord de <strong>le</strong>ur auteur pour<strong>le</strong>ur libre publication.


10 Un enjeu de societe et de sante publique Un enjeu de societe et de sante publique 11et incapab<strong>le</strong>s d’apprentissages. A l’annoncedu diagnostic d’autisme de <strong>le</strong>urenfant, <strong>le</strong>s parents s’entendaient dire :« il n’y a pas grand-chose à faire ». AuXIXème sièc<strong>le</strong>, <strong>le</strong> même préjugé frappait<strong>le</strong>s sourds, considérés comme arriérésmentaux et placés dans <strong>le</strong>s asi<strong>le</strong>s.Aujourd’hui encore, la <strong>France</strong> connaît,par rapport à de nombreux pays, en particulieranglo-saxons et d’Europe du Nord,un retard majeur. L’autisme évoque à tortune « maladie menta<strong>le</strong> », un « troub<strong>le</strong>psychiatrique » et par conséquent des« soins en priorité » dans des institutionssanitaires (hôpital psychiatrique). Ce sont<strong>le</strong>s médecins psychiatres qui continuentà être <strong>le</strong>s maîtres d’œuvre de la prise encharge où l’accès à l’éducation et à la scolarisationest souvent considéré commeaccessoire. Ainsi beaucoup d’enfants autistessont dirigés vers l’hôpital plutôtque vers l’éco<strong>le</strong> et <strong>le</strong>urs besoinsspécifiques d’apprentissage sontpeu reconnus. Les conflits théoriquesqui ont opposé, pendant plusde vingt ans, ceux qui voyaient dansl’autisme un dysfonctionnementdans la relation entre la mère et sonenfant, et ceux qui pointaient plutôtdes facteurs génétiques, ont stérilisé<strong>le</strong>s enjeux réels de l’autisme.Malgré une succession de rapports,de recommandations, de circulaireset de lois depuis plus de 10 ans,l’errance diagnostique et <strong>le</strong> défaut deprise en charge demeurent considérab<strong>le</strong>s,et la situation de la plupart des famil<strong>le</strong>sreste dramatique.Pourtant, une certitude fait aujourd’huil’unanimité : une personne avec autismepeut progresser et apprendre toute sa vie ;l’autisme n’est pas un handicap figé ouune sentence à vie. Les symptômes <strong>le</strong>splus invalidants peuvent considérab<strong>le</strong>ments’atténuer, voire presque disparaîtredans certains cas. Une interventionéducative ciblée et précoce augmenteconsidérab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s chances de progressiond’un enfant autiste ; la scolarisationen milieu ordinaire, en <strong>le</strong> socialisant et en<strong>le</strong> stimulant, renforce ses chances.C’est pourquoi, éducation et scolarisationdes enfants autistes doivent êtreprioritaires.Une Directive européenne rappel<strong>le</strong> <strong>le</strong>droit des personnes atteintes d’autisme àaccéder à une prise en charge adaptée, àune éducation appropriée, à une assistancequi respecte <strong>le</strong>ur dignité, sans discrimination,à l’intégration socia<strong>le</strong>, à la protectionde <strong>le</strong>urs droits fondamentaux, à une informationhonnête concernant <strong>le</strong>s traitementsdans <strong>le</strong>ur diversité, et à un accès à ces© JB Marioutraitements. La <strong>France</strong> a été condamnéepar <strong>le</strong> Conseil de l’Europe en 2004, 2007et 2008 pour <strong>le</strong> non respect de ses obligationsd’accès à l’éducation à l’égard desenfants souffrant d’autisme, mais cela n’apas encore entraîné de changement significatifdans la prise en charge éducative deces enfants.La loi du 11 février 2005 pour l’égalitédes droits et des chances, la participationet la citoyenneté des personnes handicapées,réaffirme <strong>le</strong> caractère obligatoirede l’inscription à l’éco<strong>le</strong> des enfantssouffrant de handicap. Mais, malgré lacréation de Classes d’inclusion scolaire(CLIS) dans l’enseignement primaire,d’Unités localisées d’inclusion scolaire(ULIS) dans l’enseignement secondaire,et la création de postes d’Auxiliaires devie scolaire (AVS), cette inscription àl’éco<strong>le</strong> demeure encore trop souvent,en raison d’un manque d’enseignants etd’auxiliaires de vie scolaire formés, laseu<strong>le</strong> manifestation d’une scolarisationfictive, traduisant une tendance dansnotre pays à penser que la reconnaissancesymbolique d’un droit peut tenir lieu desubstitut à un accès réel à ce droit. Dansdes pays européens tels que la Suède etl’Italie, ce droit à l’éducation des enfantssouffrant de handicap s’est ancrédans la réalité. En Italie, lorsqu’un enfantsouffrant de handicap intel<strong>le</strong>ctuel oude communication est inscrit et accueillidans une classe, l’effectif de la classe estautomatiquement divisé par deux, et l’enseignantse voit adjoindre un deuxièmeenseignant spécialisé.L’émergence, dans <strong>le</strong>s années 1970, d’unenouvel<strong>le</strong> conception organique, neurobiologiquede l’autisme, considéré comme un« troub<strong>le</strong> envahissant du développement »a conduit, en particulier dans <strong>le</strong>s paysanglo-saxons et <strong>le</strong>s pays d’Europe duNord, au développement de programmesradica<strong>le</strong>ment nouveaux d’accompagnement,d’insertion socia<strong>le</strong>, et de prise encharge précoce, éducative, psychologiqueet thérapeutique des enfants dans <strong>le</strong> cadred’une participation active des parents etdes famil<strong>le</strong>s. El<strong>le</strong>s ont aussi conduit àune attention particulière à la souffrancedes famil<strong>le</strong>s et à <strong>le</strong>ur accompagnement,contribuant ainsi à atténuer <strong>le</strong>ur détresse.Depuis <strong>le</strong>s années 1980, la classificationinternationa<strong>le</strong> des syndromes autistiquescomme « troub<strong>le</strong>s envahissants du développement» a éga<strong>le</strong>ment conduit àl’abandon de la théorie psychodynamiquede l’autisme et de la notion de« psychose autistique » dans la quasi-totalitédes pays, à l’exception de la <strong>France</strong>et de certains pays d’Amérique latine, oùla culture psychanalytique exerce une influenceparticulièrement importante dansla pratique psychiatrique.D’une manière généra<strong>le</strong>, la <strong>France</strong> estconfrontée à un problème culturel et socialmajeur : la très grande difficulté,voire la réticence à accompagner,à donner accès à l’éducation, et àpermettre l’insertion socia<strong>le</strong> desenfants et des adultes souffrant demaladies et handicaps altérant <strong>le</strong>scapacités de communication, etd’une manière plus généra<strong>le</strong>, auxenfants et aux personnes <strong>le</strong>s plusvulnérab<strong>le</strong>s.Mais <strong>le</strong>s choses commencent àchanger. Pour preuve, de nouvel<strong>le</strong>srecommandations de bonnes pratiquesde la Haute Autorité deSanté (HAS) en matière d’accompagnementdes enfants et ado<strong>le</strong>scentsautistes ont été rendues publiques <strong>le</strong> 8mars dernier. La HAS donne enfin raisonaux parents, qui revendiquent depuisde nombreuses années la possibilité derecourir à des stratégies éducatives oucomportementa<strong>le</strong>s.Cependant, contrairement aux attentes desassociations, la HAS ne fait que reconnaîtreque la « pertinence » des approchespsychanalytiques n’est pas démontrée. Enconséquence, el<strong>le</strong> ne <strong>le</strong>s range pas parmi<strong>le</strong>s méthodes non recommandées maisdans <strong>le</strong>s « interventions globa<strong>le</strong>s nonconsensuel<strong>le</strong>s ». La HAS se déclare éga<strong>le</strong>mentformel<strong>le</strong>ment opposée au packing,technique d’enveloppements humidescontre laquel<strong>le</strong> la plupart des associationsde parents s’élèvent vio<strong>le</strong>mment depuisplusieurs années.Ces recommandations sont une étape depremier ordre pour tous ceux qui luttenten faveur de la généralisation des méthodeséducatives et comportementa<strong>le</strong>s,augurant sans doute une ère nouvel<strong>le</strong> dansl’accompagnement de l’autisme.Sources : Inserm, Institut Pasteur, ComitéConsultatif National d’EthiqueQuelques textes relatifs à l’autisme et aux troub<strong>le</strong>s envahissants du développementu Lois, circulaire, décrets- Circulaire interministériel<strong>le</strong> N°DGS/DGCS/DGOS/CNSA/2011 validée <strong>le</strong> 8avril 2011, relative à la diffusion régiona<strong>le</strong>du corpus commun de connaissances surl’autisme et <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s envahissants dudéveloppement publié par la Haute Autoritéde Santé en 2010, par la mise en œuvrede la formation de formateurs prévue à lamesure 5 du plan autisme 2008-2010.- Circulaire n°DGAS/3C/2010/05 du 5janvier 2010 relative à la mise en œuvrede la mesure 29 du plan autisme 2008-2010 « Promouvoir une expérimentationencadrée et évaluée de nouveaux modè<strong>le</strong>sd’accompagnement ». La créationde structures expérimenta<strong>le</strong>s concourt, àla demande des famil<strong>le</strong>s, à la diversificationet à la spécificité de l’offre d’accuei<strong>le</strong>t d’accompagnement pour <strong>le</strong>s enfants etado<strong>le</strong>scents avec autisme ou autre TED etdoit notamment permettre l’introductionde méthodes d’interventions encore peuprésentes en <strong>France</strong> bien que plus largementdéveloppées à l’étranger.- Circulaire DGAS, DGS, DHOS, 3C,2005-124 du 08 mars 2005 relative à lapolitique de prise en charge des personnesatteintes d’autisme et de TED.Le texte constitue <strong>le</strong> point de départd’une relance qualitative et quantitativede la politique en direction des personneset de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>. Il établit unétat des lieux réactualisé de la questionet des réponses qui peuvent y être apportées.Il intervient par ail<strong>le</strong>urs dans uncontexte de grands changements institutionnelset administratifs : mise en œuvredes dispositions de la loi de rénovationde l’action socia<strong>le</strong> et médico-socia<strong>le</strong>, loirelative à l’égalité des droits et deschances, la participation et la citoyennetédes personnes handicapées, création de lacaisse nationa<strong>le</strong> de solidarité pour l’autonomie,rô<strong>le</strong> croissant des départements,© JB Marioumise en place des maisons départementa<strong>le</strong>sdes personnes handicapées, etc. Lesobjectifs de la relance de cette politiquesont articulés autour de trois axes : conforterdurab<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> pilotage et l’animationde la politique de l’autisme et des TED,promouvoir la mise en œuvre de réponsesadaptées aux besoins des personnes et de<strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s, promouvoir <strong>le</strong> développementdes centres de ressources autismesur l’ensemb<strong>le</strong> du territoire.- Loi n° 96-1076 du 11 décembre 1996modifiant la loi n° 75-535 du 30 juin1975 relative aux institutions socia<strong>le</strong>s etmédico-socia<strong>le</strong>s et tendant à assurer uneprise en charge adaptée de l’autisme.- Circulaire AS/EN n°95-12 du 27 avril1995 relative à la prise en charge thérapeutique,pédagogique, éducative et àl’insertion socia<strong>le</strong> des enfants, ado<strong>le</strong>scentset adultes atteints d’un syndromeautistique.© JB Mariouu Plans autisme- Plan 2008-2010La période 2005-2007 a constitué untemps de débats intenses dans <strong>le</strong>s milieuxassociatifs autant que dans <strong>le</strong>s milieuxprofessionnels et scientifiques, témoignantde la force des attentes pour quesoit mise à la disposition des personnesautistes et de <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s toute la diversitédes réponses aux problématiquescomp<strong>le</strong>xes de l’autisme et des troub<strong>le</strong>senvahissants du développement. La loidu 11 février 2005 a donné un nouveaufondement à ces perspectives, en permettantl’émergence de questions de fond :comment donner toutes <strong>le</strong>urs chances auxpersonnes autistes, dès <strong>le</strong> plus jeune âgeet tout au long de <strong>le</strong>ur vie ? Commentapporter <strong>le</strong>s moyens de compensationde ce handicap pour donner aux personnesla possibilité de trouver <strong>le</strong>ur placetout en reconnaissant <strong>le</strong>ur singularité ?Comment aménager l’environnement humainet social, <strong>le</strong>s milieux de vie pour uneprogression optima<strong>le</strong> vers l’autonomie ?El<strong>le</strong> a tracé de nouvel<strong>le</strong>s voies par la scolarisationdes enfants handicapés, tout enimposant, de fait, de nouvel<strong>le</strong>s exigencespour que cel<strong>le</strong>-ci ait du sens et de la qualité.Le plan 2008-2010 répond à des enjeuxqualitatifs et quantitatifs forts, articulantrésolument <strong>le</strong>s champs éducatifs, pédagogiqueset sanitaires. Parmi <strong>le</strong>s 30 présentées,ce plan comporte 5 mesures phares :élaborer un corpus de connaissances etdévelopper la recherche, actualiser <strong>le</strong>scontenus de la formation des professionnels,qu’ils soient des champs sanitaires,médico-sociaux ou éducatifs, diversifier<strong>le</strong>s méthodes de prise en charge innovantes,mettre en place un dispositif d’annoncedu diagnostic qui permet l’orientationet l’accompagnement des famil<strong>le</strong>s,renforcer l’offre d’accueil.- Plan 2005-2006L’objectif du gouvernement est d’accélérerla montée en puissance des mesures dediagnostic, de prise en charge et d’accompagnementdes personnes atteintes d’autisme.Le vo<strong>le</strong>t médical de ces mesuresprévoit la mise en réseau de l’ensemb<strong>le</strong>des acteurs afin d’assurer une meil<strong>le</strong>ureprise en charge des enfants et adultesautistes.u Les rapports fondateurs- Rapports de la Haute Autorité de SantéPublique de 2010 et 2012 qui établissentun corpus de connaissances commun surl’autisme et autres TED.- Rapport de l’Agence nationa<strong>le</strong> de l’évaluationet de la qualité des établissementset services sociaux et médicosociaux(ANESM) paru en janvier 2010 qui élaboredes « critères de qualité des interventionsen direction des personnes autistespour assurer la dignité des personnes etlutter contre <strong>le</strong>s dérives et <strong>le</strong>s pratiquesdangereuses ».- Avis du Comité Consultatif Nationald’Ethique pour <strong>le</strong>s Sciences de la Vie et dela Santé de 2007 sur la situation en <strong>France</strong>des personnes, enfants et adultes, atteintesd’autisme.- Rapport par<strong>le</strong>mentaire de Jean-FrançoisChossy de 2003 sur la situation despersonnes autistes en <strong>France</strong>. Il proposeun panorama de propositions concrètes,visant à apporter des éléments de réponseet de réf<strong>le</strong>xion aux difficultés des famil<strong>le</strong>set des personnes touchées par <strong>le</strong> syndromeautistique. Sur la base de témoignage despersonnes directement concernées, <strong>le</strong>rapport aborde de nombreux domaines,du diagnostic souvent trop tardif à la recherchesur <strong>le</strong> syndrome en passant par lavie quotidienne familia<strong>le</strong>, l’intégration desautistes ou encore la maltraitance.


’’12 Un enjeu de societe et de sante publique Un enjeu de societe et de sante publique 13Un entretien avec Vincent Gerhards, Président d’Autistes sans Frontière et du Col<strong>le</strong>ctif <strong>Autisme</strong>Les personnes autistes sont des citoyenscomme <strong>le</strong>s autresEn cette année de Grande Cause Nationa<strong>le</strong>,on se rend compte que l’autismefait peur. Pourquoi une tel<strong>le</strong> appréhensionvis-à-vis de ce « troub<strong>le</strong> envahissantdu développement » qui touche près de600 000 personnes dans notre pays ?D’une manière généra<strong>le</strong>, toutes <strong>le</strong>s pathologiesqui s’apparentent à un handicapmental – bien que l’autisme ne rentre pasdans ce champ, c’est un handicap spécifique– font peur. Peur parce que <strong>le</strong>s causes,dans <strong>le</strong> cas de l’autisme, ne sont toujourspas connues, parce que <strong>le</strong>s personnes autistesont parfois des comportements anormaux,parce que l’autisme est un handicaprécent, découvert et décrit pour la premièrefois en 1943. Cette peur que vous évoquezest donc liée à la nature même du handicapet à son extrême comp<strong>le</strong>xité qui <strong>le</strong> rendimpressionnant pour une grande majoritéde nos concitoyens. Cette appréhension estéga<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> fruit de la diffusion d’imagestrès spectaculaires de la personne autistequi se balance, se tape la tête contre <strong>le</strong>smurs, s’automuti<strong>le</strong>. D’où d’importantspréjugés et des idées reçues qui subsistentet contre <strong>le</strong>squels nous agissons à traversl’information et la pédagogie.Les progrès de la recherche autour del’autisme ne seraient-ils pas de nature àchanger cette représentation socia<strong>le</strong> del’autisme ?Il faut en effet allouer davantage demoyens en faveur de la recherche afinde découvrir <strong>le</strong>s causes de la survenancede l’autisme, ou plutôt devrait-on diredes autismes. A l’heure actuel<strong>le</strong>, la seu<strong>le</strong>certitude est que l’autisme est d’origineneuro-développementa<strong>le</strong> et non psychologiqueou psychique comme cela a été affirmépendant 30 ans. Par contre, la combinaisondes facteurs qui aboutissent àl’autisme demeure encore inconnue.Ceci étant, si, en <strong>France</strong>, <strong>le</strong>s parentsavaient eu <strong>le</strong> choix dans <strong>le</strong>s stratégiesd’accompagnement de <strong>le</strong>ur enfant, au lieude la réponse psychanalytique obligatoire,la situation et la perception de l’autismeseraient probab<strong>le</strong>ment différentes. Carnous savons que des stratégies éducativeset comportementa<strong>le</strong>s adaptées existent etpermettent à toutes <strong>le</strong>s personnes autistesde progresser jusqu’à, pour certaines,mener une existence quasi ordinaire.Vous avez créé l’association Autistessans Frontière pour une intégration desenfants autistes en milieu ordinaire, envous basant notamment sur la loi Handicapdu 11 février 2005 qui reconnaît àtout enfant porteur de handicap <strong>le</strong> droitd’être inscrit dans l’éco<strong>le</strong> la plus prochede son domici<strong>le</strong>. Où en sommes-nousaujourd’hui dans ce domaine ?La scolarisation en milieu ordinaire doitêtre une priorité à chaque fois que cela estpossib<strong>le</strong>. Quand vous mettez un enfantautiste âgé de 3 ou 4 ans dans une éco<strong>le</strong>ordinaire, entouré d’enfants ordinaires,moyennant bien évidemment un accompagnementspécifique indispensab<strong>le</strong>, vousparticipez de la construction d’un citoyenautonome. Car l’éco<strong>le</strong> confronte l’enfantautiste, dont <strong>le</strong> contact avec <strong>le</strong>s autres estdiffici<strong>le</strong>, à des situations de vie concrètes,qui lui permettent d’acquérir une cultureet des comportements aussi proches quepossib<strong>le</strong> de la « norma<strong>le</strong> ».Cette inclusion en milieu ordinaire estprévue par la loi et nécessite de donneraux enseignants <strong>le</strong>s moyens d’un accompagnementindividuel spécialisé.Nous plaidons éga<strong>le</strong>ment en faveur d’unegénéralisation de la formation des professionnelsaux stratégies éducatives etcomportementa<strong>le</strong>s qui ont fait la preuvede <strong>le</strong>ur efficacité auprès des enfants autistes,comme <strong>le</strong>s programmes TEACCHou ABA par exemp<strong>le</strong>.En cette année de Grande Cause Nationa<strong>le</strong>,on par<strong>le</strong> beaucoup des enfants.Mais qu’en est-il des personnes autistesadultes, et a fortiori âgées ?Notre première grande campagne nationa<strong>le</strong>a été lancée, il y a deux ans, sur<strong>le</strong> thème du dépistage et de la prise encharge précoces de l’autisme pour, dansun premier temps, tenter de comb<strong>le</strong>r <strong>le</strong>dramatique retard français en la matièreet accroître <strong>le</strong> niveau d’information surl’autisme auprès du grand public. Cettecampagne a été suivie, l’an dernier,d’une mobilisation autour de la scolarisation.Aujourd’hui, l’accent doit en effetêtre mis sur la situation des personnesautistes adultes qui, s’ils ne peuvent pasêtre pris en charge par <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>, sontà l’abandon dans <strong>le</strong>s hôpitaux psychiatriques,au lieu d’intégrer des structuresadaptées tel<strong>le</strong>s qu’el<strong>le</strong>s se sont généraliséeschez certains de nos voisins européens.Cette situation est, pour unegrande part, <strong>le</strong> résultat du rattachement(abusif) de l’autisme à la psychiatrie en<strong>France</strong>, qui a recours quasi systématiquementdans la prise en charge des personnesautistes à l’approche psychanalytique.Une approche qui vient d’ail<strong>le</strong>ursd’être classée dans <strong>le</strong>s « interventionsgloba<strong>le</strong>s non consensuel<strong>le</strong>s » par laHaute Autorité de Santé. Cette décisiontrès attendue par l’ensemb<strong>le</strong> des associationspermet encore une fois de rappe<strong>le</strong>rque l’autisme est un handicap spécifiquequi n’a rien à voir avec la maladie menta<strong>le</strong>.Le combat risque d’être encore longpour véritab<strong>le</strong>ment changer <strong>le</strong> regard quenos concitoyens portent sur l’autisme.Mais la situation évolue semb<strong>le</strong>-t-il enfindans la bonne direction.L’année 2012 sera peut-être une datefondatrice pour toutes <strong>le</strong>s personnesautistes et <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> ?Si nous poursuivons efficacement notretravail d’information et de sensibilisationen cette année de Grande Cause Nationa<strong>le</strong>,nous en recueil<strong>le</strong>rons certainement<strong>le</strong>s fruits dans <strong>le</strong>s années qui viennent.Quel<strong>le</strong> que soit la majorité qui sortirades é<strong>le</strong>ctions des prochains mois, il nousfaudra continuer à informer et sensibiliserpour faire progresser <strong>le</strong>s connaissancesautour de l’autisme et faire tomber despréjugés encore trop nombreux.’’Par Marcel Hérault, Président de la Fédération Française Sésame <strong>Autisme</strong>Plus de moyens pour accompagner<strong>le</strong> plan autismeIl ne faudrait pas que <strong>le</strong>s débats (certes,très importants) autour de la recommandationdes bonnes pratiques professionnel<strong>le</strong>sconcernant <strong>le</strong>s interventions proposéesà l’enfant ou à l’ado<strong>le</strong>scent, occultentl’autre problématique des plans autismesuccessifs, cel<strong>le</strong> des moyens financiersindispensab<strong>le</strong>s à la mise en œuvre satisfaisantede toute politique. Il ne faudraitpas non plus que <strong>le</strong> gouvernement – celui-ciou celui à venir – se satisfasse degrandes orientations généra<strong>le</strong>s (nécessitéde la scolarisation, réf<strong>le</strong>xion sur la formationdes professionnels, projets innovants,etc.) en négligeant la partie financementde sa politique.Que constatons-nous ? Depuis six ans,une recommandation sur <strong>le</strong> diagnosticprécoce est parue, or el<strong>le</strong> est restée <strong>le</strong>ttremorte, faute d’un accompagnement financierpour informer <strong>le</strong>s médecins et former<strong>le</strong>s équipes pluridisciplinaires.La situation des enfants est dramatique.L’éducation nationa<strong>le</strong> est aujourd’hui partieprenante, puisque la scolarisation estobligatoire ; mais peu de CLIS (classesd’inclusion scolaire) ont été ouvertes et,<strong>le</strong> plus souvent, <strong>le</strong>s enfants autistes nesont accueillis (au mieux) que quelquesheures par semaine. En effet, l’éducationnationa<strong>le</strong> n’a pas conduit d’étude pourdéterminer <strong>le</strong> coût pour el<strong>le</strong> des changementsissus de la loi du 11 février 2005 ;et concernant <strong>le</strong>s besoins plus spécifiquesdes enfants présentant de l’autisme, onest plus dans l’improvisation que dansune logique de programmation et deplanification.Le nombre de SESSAD (service d’éducationspécia<strong>le</strong> et de soins à domici<strong>le</strong>) etd’IME (Institut médico-éducatif), qui impacte<strong>le</strong> financement médico-social, estdramatiquement insuffisant. Beaucoupd’enfants sont à la maison, obligeant dumême coup l’un des parents à cesser sonactivité professionnel<strong>le</strong>.La situation à l’âge adulte est encoreplus dramatique, aggravée par <strong>le</strong>s difficultésfinancières des conseils générauxqui sont concernés par l’hébergementdes personnes handicapées. La C.N.S.A.(Caisse Nationa<strong>le</strong> de Solidarité pourl’Autonomie, qui gère <strong>le</strong>s fonds votés par<strong>le</strong> Par<strong>le</strong>ment) n’a pas modifié sa politique.El<strong>le</strong> limite <strong>le</strong>s places de MAS (Maisonsd’Accueil Spécialisées, financéespar l’assurance maladie) et maintient<strong>le</strong> montant du forfait soins des FAM(Foyers d’Accueil Médicalisés). Laconséquence est que la plupart desconseils généraux se refusent à financer<strong>le</strong>s projets pour adultes. Nous avonsdénoncé cette situation depuis trois ans,l’hypocrisie qui consiste à se fermer<strong>le</strong>s yeux, avec pour conséquence despersonnes de plus de vingt ans maintenuesdans <strong>le</strong>s établissements pourenfants. Aujourd’hui, à nouveau, <strong>le</strong>sparents n’ont plus d’autres solutions qued’orienter <strong>le</strong>urs adultes vers la Belgique.Notre Fédération qui a refusé depuis sonorigine, en 1963, de n’être qu’une associationrevendicative mais s’est attelée àla création et à la gestion des établissements,pour bien connaître la réalité desproblèmes réels (à la fois pédagogiqueset matériels), est aujourd’hui bien placéepour faire <strong>le</strong> diagnostic de la politiquefinancière du plan autisme.En effet, nous gérons des établissementspour enfants (SESSAD, IME sans ou avechébergement) et d’autres pour adultesavec des niveaux d’autonomie différents(des ESAT pour <strong>le</strong>s personnes qui ont descapacités de travail, des foyers de vie,des foyers d’accueil médicalisés et desfoyers d’hébergement, des maisons d’accueilspécialisées, ainsi que des formu<strong>le</strong>sinnovantes de logement accompagné).Notre expérience nous conduit éga<strong>le</strong>mentà demander des montants suffisantspour <strong>le</strong>s coûts de fonctionnement, il yva de la sécurité des personnes qui sontaccompagnées.En effet, de grandes disparités existententre établissements équiva<strong>le</strong>nts.Un exemp<strong>le</strong> suffit : à quelques kilomètres,on trouve deux structures d’hébergementidentiques à tout point de vue(projet architectural et degré de dépendancedes jeunes adultes accueillis), etl’un a un ratio d’encadrement doub<strong>le</strong> del’autre…© JB MariouOn voit <strong>le</strong> chemin qui reste à parcouriret la nécessité d’une vraie réf<strong>le</strong>xion sur<strong>le</strong> financement du plan autisme. Notreanalyse est qu’il faudrait multiplier partrois ou quatre <strong>le</strong>s enveloppes actuel<strong>le</strong>sdédiées à l’autisme, si on veut sincèrementfaire une politique de rattrapage.Le taux de préva<strong>le</strong>nce de l’autisme a étémultiplié par dix depuis <strong>le</strong> premier planautisme de Madame Simone Veil en 1995 ;or <strong>le</strong>s moyens sont restés <strong>le</strong>s mêmes.Pour d’autres problèmes de santé publique(au sens large du mot santé, car laquestion concerne l’Education nationa<strong>le</strong>et <strong>le</strong> médico-social pour l’essentiel), on asu trouver des financements (plan cancer,plan alzheimer…). La question du financementde l’autisme, par contre, est restéeà la traîne. Nous affirmons au contraireque la meil<strong>le</strong>ure politique restera <strong>le</strong>ttremorte si on ne mobilise pas <strong>le</strong>s moyensfinanciers à la hauteur nécessaire.


’’16 Un enjeu de societe et de sante publique Les perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la recherche 17Par Xavier Grosclaude, Vice-Président de Fenêtre sur l’EuropeL’Europesera l’avenir de l’autisme français…D’un point de vue européen, la condamnationde la <strong>France</strong> en 2004 par <strong>le</strong> ComitéEuropéen des droits sociaux du Conseil del’Europe restera une date importante dansl’histoire de l’autisme français.En soulignant la défaillance de l’Etatfrançais dans la prise en charge des personnesautistes, <strong>le</strong> Conseil de l’Europe aopportunément rappelé, il y a maintenanthuit ans, que l’application de la Charte desdroits fondamentaux, imposait l’obligationpour <strong>le</strong>s Etats signataires « de prendre nonseu<strong>le</strong>ment des initiatives juridiques maisencore des initiatives concrètes propresà permettre <strong>le</strong> p<strong>le</strong>in exercice des droitsreconnus par la Charte ».Cette obligation réaffirmée par <strong>le</strong> Conseilde l’Europe, fin 2008, date à laquel<strong>le</strong> la<strong>France</strong> ignorait toujours la Charte socia<strong>le</strong>européenne sur l’égalité d’accès à l’enseignementdes personnes autistes, esttoujours d’actualité même si <strong>le</strong>s lignescommencent à bouger…D’une manière généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong> retard pris parla <strong>France</strong> dans l’accompagnement despersonnes autistes, tout au long de <strong>le</strong>urvie, porte atteinte aux va<strong>le</strong>urs humanistesportées par l’Union européenne.En <strong>France</strong>, <strong>le</strong> principal argument pourexpliquer ce retard met en avant l’indifférencedes pouvoirs publics. C’est en partievrai, mais en partie seu<strong>le</strong>ment car personnene peut nier qu’en 2005, la Haute Autoritéde Santé (HAS) ait publié des recommandationspour <strong>le</strong> dépistage de l’autismeécartant explicitement <strong>le</strong> rattachementde l’autisme aux psychoses infanti<strong>le</strong>s etqu’un an avant, en 2004, l’Institut Nationalde la Santé et de la Recherche Médica<strong>le</strong>(INSERM) avait souligné, dansun rapport remis à la Direction Généra<strong>le</strong>de la Santé, l’utilité majeure des thérapiescognitivo-comportementa<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>traitement de l’autisme au détriment desthérapies psychanalytiques.En réalité, l’autisme en <strong>France</strong> s’est toujoursheurté à un mélange d’incompréhension,en premier lieu, cel<strong>le</strong> du monde médicalattaché culturel<strong>le</strong>ment à l’approchepsychogénétique, et d’inertie favorisée parl’étanchéité des circuits de financemententre <strong>le</strong> secteur sanitaire, médico-social etéducatif.Le constat dressé par <strong>le</strong> rapport remisen janvier dernier, par Valérie Létard, auMinistre des Solidarités et de la CohésionSocia<strong>le</strong> est à lui seul éloquent : « Lespersonnes, enfants et adultes, atteintes desyndromes autistiques et <strong>le</strong>urs prochesont longtemps été victimes, en <strong>France</strong>,d’une errance diagnostique conduisant àun diagnostic souvent tardif, de grandesdifficultés d’accès à un accompagnementéducatif précoce et adapté, du manquede places dans des structures d’accueiladaptées, de l’impossibilité pour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>sde choisir <strong>le</strong>s modalités de priseen charge de <strong>le</strong>ur enfant, de la carence desoutien aux famil<strong>le</strong>s, et de l’insuffisanced’accompagnement, de soins, et d’insertionsocia<strong>le</strong> des personnes adultes etâgées atteintes de ce handicap ».Cette réalité est tout autre dans despays comme la Belgique, la Suède, <strong>le</strong>Royaume-Uni, l’Italie ou encore l’Espagne,pays dans <strong>le</strong>quel 97 % des enfantshandicapés sont scolarisés. L’existenced’un dépistage précoce, la généralisationd’approches pluridisciplinaires intégrantdes stratégies éducatives et l’existence destructures d’accueils adaptées à l’âge et auprofil des personnes autistes ont permis deréels progrès dans la compréhension et <strong>le</strong>traitement de l’autisme.Dans tous ces pays, outre une relationpositive à l’altérité, <strong>le</strong> repérage destroub<strong>le</strong>s autistiques dès <strong>le</strong> plus jeune âges’est imposé pour la Recherche commeune priorité.Par ail<strong>le</strong>urs, tout est fait pour faciliter lascolarisation des enfants autistes. En Italie,la plupart des enfants autistes sont accueillisdans des classes ordinaires. A titrede comparaison, <strong>le</strong> chiffre est inférieurà 20 % pour la <strong>France</strong> avec une doub<strong>le</strong>restriction liée à la présence obligatoired’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) etd’un emploi du temps allégé.De son côté, la Suède, après avoir interdit<strong>le</strong>s institutions spécialisées en 1995, a misen place des classes adaptées au sein deses établissements scolaires. Ce mode descolarisation existe aussi au Royaume-Uni même si <strong>le</strong> choix laissé aux parentsest plus large. Ils peuvent, en effet, choisirentre éco<strong>le</strong>s spécialisées, classes spécialiséesou classes ordinaires avec soutienspécifique.En Espagne, <strong>le</strong> choix des parents, en matièrede scolarisation, varie selon <strong>le</strong> typed’autisme diagnostiqué. L’alternative estsoit une scolarisation classique, <strong>le</strong> caséchéant renforcée par un soutien personnalisé,soit une scolarisation dans uncentre spécialisé pour <strong>le</strong>s enfants autistes.Au global, force est de reconnaitre que<strong>le</strong>s pays européens <strong>le</strong>s plus vertueux enmatière d’autisme ont fait du respect despersonnes autistes l’axe centra<strong>le</strong> de <strong>le</strong>urpolitique d’intégration socia<strong>le</strong>.C’est vrai pour <strong>le</strong>s enfants mais aussi pour<strong>le</strong>s adultes avec, par exemp<strong>le</strong>, l’existenceen Suède de maisons permettant à desadultes autistes de vivre en colocation touten bénéficiant, <strong>le</strong> cas échéant, d’un suivipersonnalisé.Aujourd’hui, <strong>le</strong> défi pour la <strong>France</strong> estde s’inscrire au plus vite dans cette dynamiqueen rompant avec <strong>le</strong>s conservatismeshérités du passé. Même si tout n’estpas parfait, plusieurs pays européens ontsu mobiliser <strong>le</strong>ur intelligence col<strong>le</strong>ctivepour trouver des solutions humainement,socia<strong>le</strong>ment et financièrement satisfaisantes.Il serait pour <strong>le</strong> moins consternantque <strong>le</strong> pays des Droits de l’Homme ne soitpas en capacité de faire de même…www. fenetreeurope.comProgresser dans la compréhensiondes mécanismes de l’autismeMieux cerner <strong>le</strong>s causeset améliorer l’accompagnementQuand on par<strong>le</strong> de troub<strong>le</strong>s envahissants du développement (TED), ou de façon plus spécifiqued’autisme, <strong>le</strong>s hypothèses avancées quant aux causes sont pluriel<strong>le</strong>s. Pendant longtemps,la <strong>le</strong>cture psychanalytique a culpabilisé <strong>le</strong>s mères, décrites comme des « mères frigidaires »ou des « mères mortifères ». Considérer la mère comme coupab<strong>le</strong> du handicap de son enfant,couper <strong>le</strong>s liens de l’enfant avec sa mère, attendre que l’enfant exprime un désir de contactavec <strong>le</strong> thérapeute, alors qu’il a besoin d’aide pour comprendre son environnement social,font mesurer la vio<strong>le</strong>nce qu’a pu avoir une tel<strong>le</strong> attitude, <strong>le</strong>s souffrances qu’el<strong>le</strong> a pu causer,et l’impasse à laquel<strong>le</strong> cette théorie a pu conduire en matière d’accompagnement, de traitementet d’insertion socia<strong>le</strong>.Plusieurs études attestent que l’origine de l’autisme, et des TED en général, est, au moinspartiel<strong>le</strong>ment, génétique et biologique. Pour ce qui est du diagnostic, il n’est pas toujours faci<strong>le</strong> àfaire, parce que <strong>le</strong>s symptômes des troub<strong>le</strong>s envahissants du développement ressemb<strong>le</strong>nt à certainesdéficiences intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>s ou retards sévères de développement.Par ail<strong>le</strong>urs, <strong>le</strong> corps médical n’est pas toujours suffisamment formé pour en faire <strong>le</strong> dépistage defaçon indubitab<strong>le</strong>. Un repérage de signes d’autisme existe dans <strong>le</strong> carnet de santé mais sans moded’emploi pour que <strong>le</strong> médecin puisse l’utiliser.Malgré tout, <strong>le</strong>s recherches entreprises ces 20 dernières années ont permis de dresser un tab<strong>le</strong>aude plus en plus précis de la pathologie autistique et de mieux comprendre comment<strong>le</strong>s accompagner.La progression des connaissancesscientifiquesEn 1965, l’arrivée de l’é<strong>le</strong>ctroencéphalogrammepermet de réfuterla théorie de la relation mère enfant pourmettre en lumière d’autres causes possib<strong>le</strong>sà l’autisme. Par exemp<strong>le</strong>, une des théoriesavancées à cette époque établit l’incapacitédes autistes à décoder <strong>le</strong>ur environnement,avec pour corollaire des difficultésde communication. Cette hypothèse apermis l’avènement de modè<strong>le</strong>s éducatifstels que TEACCH ou ABA, outils donnésaux personnes autistes pour mieux intégrer<strong>le</strong>ur milieu. Par la suite, différentes étudesont répertorié des causes cérébra<strong>le</strong>s et neurologiquespossib<strong>le</strong>ment responsab<strong>le</strong>s del’autisme. Certaines permettent d’avancerque l’autisme décou<strong>le</strong>rait de l’interaction


18 Les perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la rechercheLes perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la recherche 19de diverses prédispositions génétiques(héritées) et d’autres facteurs biologiquesou environnementaux intervenant à unstade précoce du développement.A partir de la fin des années 1970, <strong>le</strong>s recherchesen neurobiologie permettent derévé<strong>le</strong>r l’hypothèse de l’existence de particularitésdans la sécrétion de certains neuromédiateurset de modalités particulièresde connexions entre différentes régionscérébra<strong>le</strong>s. Ces hypothèses ont fortementcontribué à développer la notion selon laquel<strong>le</strong><strong>le</strong>s syndromes autistiques seraientdus à des troub<strong>le</strong>s précoces du développement,et en particulier du développementcérébral, qui débutent probab<strong>le</strong>ment avantla naissance.Les recherches dans <strong>le</strong> domaine des neurosciencesont connu un progrès importantdurant <strong>le</strong>s 10 dernières années, notammenten matière d’imagerie cérébra<strong>le</strong>, etde nombreuses caractéristiques neurobiologiquesont été corrélées aux syndromesautistiques : problèmes de synchronisationentre différentes régions cérébra<strong>le</strong>s, problèmesde fonctionnement dans certainesrégions particulières du cerveau, atteintede la « théorie de l’esprit et du fonctionnementde certains systèmes de neuronesmiroirs ». Si l’ensemb<strong>le</strong> de ces résultatsindique l’existence de problèmes de développementneurobiologique très précoceschez <strong>le</strong>s enfants atteints de syndromesautistiques, il est néanmoins diffici<strong>le</strong> dedéterminer si <strong>le</strong>s anomalies observéesfont partie des véritab<strong>le</strong>s causes neurobiologiquesdu handicap ou sont des conséquencesdes problèmes d’interactionssocia<strong>le</strong>s dont l’origine biologique, aucours du développement du cerveau, seraitplus précoce et de nature encore inconnue.Parallè<strong>le</strong>ment, trois grandes catégoriesd’arguments (corrélation é<strong>le</strong>vée chez <strong>le</strong>sjumeaux vrais, incidence accrue dans desfamil<strong>le</strong>s où un enfant est atteint, associationà des maladies génétiques connues)suggèrent fortement l’existence de facteursd’origine génétique favorisant <strong>le</strong> développementdes syndromes autistiques. Depuisquelques années, la présence de séquencesgénétiques particulières concernant prèsd’une vingtaine de gènes différents, a étécorrélée à l’existence de syndromes autistiques.Cependant, la plupart des travaux, ycompris <strong>le</strong>s plus récents, indiquent l’existencede facteurs génétiques favorisant <strong>le</strong>développement des syndromes autistiques,facteurs qui apparaissent multip<strong>le</strong>s, et nesemb<strong>le</strong>nt pas suffire à eux seuls, dans l’immensemajorité des cas, à provoquer <strong>le</strong>handicap. L’hypothèse la plus probab<strong>le</strong> estque ces facteurs génétiques multip<strong>le</strong>s favoriseraientla mise en place, au cours dudéveloppement, de réseaux de connexionsnerveuses plus fragi<strong>le</strong>s en réponse à certainesmodifications de l’environnement.En juin 2010, 177 scientifiques, issus deplus de 60 institutions de 11 pays différents,ont présenté, dans la revue Nature,<strong>le</strong>s résultats de la phase 2 du consortiuminternational de recherche génétique surl’autisme, Autism Genome Project. Cegroupe de chercheurs, parmi <strong>le</strong>squels desscientifiques français, a découvert des mutationsgénétiques et de nouveaux gènesimpliqués dans l’autisme. Le groupe aanalysé <strong>le</strong> génome entier de 1 000 personnesprésentant des troub<strong>le</strong>s liés à l’autismeet 1 300 individus témoins à l’aidedes micropuces ADN à haute résolution.Les scientifiques ont ainsi pu mettre enévidence des insertions et des suppressionsde séquences génétiques, invisib<strong>le</strong>sau microscope. Ces remaniements,appelés « variations du nombre de copies »ont permis d’identifier de nouveaux gènesimpliqués dans l’autisme. Certains d’entreeux agissent au niveau des contacts entre<strong>le</strong>s neurones (<strong>le</strong>s synapses), tandis qued’autres sont impliqués dans la proliférationcellulaire ou encore la transmission designaux intracellulaires. L’identificationde ces voies biologiques offre de nouvel<strong>le</strong>spistes de recherche, ainsi que des cib<strong>le</strong>spotentiel<strong>le</strong>s pour <strong>le</strong> développement de traitementsoriginaux.La nouvel<strong>le</strong> étude de l’Autism GenomeProject a éga<strong>le</strong>ment démontré que <strong>le</strong>s sujetsatteints d’autisme tendent à avoir plusde « variations du nombre de copies » rares(détectées dans moins d’1 % de la population)touchant des gènes que <strong>le</strong>s individustémoins. Certaines de ces mutations sonthéritées, d’autres sont considérées comme« de novo » car el<strong>le</strong>s apparaissent chez <strong>le</strong>spatients et sont absentes chez <strong>le</strong>urs parents.Les chercheurs ont remarqué que chez<strong>le</strong>s personnes autistes, un grand nombrede ces mutations tendent à perturber desgènes déjà associés à l’autisme ou aux déficiencesintel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>s. Ces découvertesviennent appuyer un consensus émergentau sein de la communauté scientifique, selon<strong>le</strong>quel l’autisme serait provoqué en partiepar de nombreuses « variations rares »ou des modifications génétiques détectéeschez quelques sujets atteints.Une étude, publiée <strong>le</strong> 9 février 2012 dansPublic Library of Science - Genetics, démontreque des mutations génétiquesperturbant la communication entre <strong>le</strong>sneurones seraient directement impliquéesdans la maladie. Ces nouveaux résultatsconfirment l’origine neurobiologique destroub<strong>le</strong>s du spectre autistique. Ils sont <strong>le</strong>fruit d’une collaboration entre des chercheursde l’Institut Pasteur, du CNRS, del’Inserm, et de l’AP-HP, avec l’universitéParis Diderot, l’hôpital Robert Debré(AP-HP), <strong>le</strong> Centre Gillberg de Neuropsychiatrie(Suède), l’université d’Ulm (Al<strong>le</strong>magne),<strong>le</strong> Centre National de Génotypagedu CEA, et la Fondation FondaMental.A ce stade, plutôt que de contribuer à unedémarche diagnostique, dont rien n’indiqueencore qu’el<strong>le</strong> puisse êtresignificativement améliorée parun test génétique, l’apport <strong>le</strong> plusimportant de ces recherches estde contribuer à la compréhensiondes mécanismes impliquésdans <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s envahissants dudéveloppement, compréhensionqui pourrait permettre, à terme, <strong>le</strong>développement de nouvel<strong>le</strong>s approchesthérapeutiques. La combinaisonde différentes approchescliniques, de neuro-imagerie et degénétique moléculaire pourraitaussi permettre de mieux comprendre <strong>le</strong>spériodes critiques du développement cérébra<strong>le</strong>t <strong>le</strong>s mécanismes en cause, pour unmeil<strong>le</strong>ur espoir de prise en charge.La problématique du dépistageBien que tous <strong>le</strong>s acteurs - chercheurs, cliniciens,parents - s’entendent pour reconnaîtrela nécessité d’un dépistage précocede manière à favoriser un meil<strong>le</strong>ur pronostic,la détection de l’autisme peut être retardéepar l’inexistence de test biologiquecapab<strong>le</strong> de diagnostiquer <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s envahissantsdu développement.Selon <strong>le</strong> professeur Catherine Barthélémy,chef du service de pédopsychiatrie au CHUde Tours, « l’autisme est une pathologiede l’émotion partagée », qui se répercuteinvariab<strong>le</strong>ment dans la vie socia<strong>le</strong>. Unegrande hétérogénéité existe entre <strong>le</strong>s personnesqualifiées d’autistes. En effet, certainssont en mesure de « développer desîlots de compétences extraordinaires pourla musique ou <strong>le</strong>s mathématiques », alorsque d’autres n’arrivent même pas à dénombrerdes ensemb<strong>le</strong>s de cinq éléments.Par ail<strong>le</strong>urs, l’acquisition du langage sefait à des degrés variés. « Mais tous onten commun des troub<strong>le</strong>s sévères intervenantavant l’âge de 36 mois et touchantaux domaines de la socialisation, de lacommunication et de l’adaptation ».Actuel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> diagnostic repose exclusivementsur une analyse précise ducomportement et des capacités de communicationvers l’âge de 3 ans. Il n’y apas aujourd’hui de traitement curatif, maisune série de données indiquent depuisplus de quarante ans qu’un accompagnementet une prise en charge individualisés,précoces et adaptés, à la fois sur <strong>le</strong>s planséducatif, comportemental et psychologique,augmentent significativement <strong>le</strong>spossibilités relationnel<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s capacitésd’interaction socia<strong>le</strong>, <strong>le</strong> degré d’autonomie,et <strong>le</strong>s possibilités d’acquisition delangage et de moyens de communicationnon verba<strong>le</strong> par <strong>le</strong>s enfants atteints detroub<strong>le</strong>s autistiques.Un manque de formationau dépistage des professionnelsMédecins généralistes et pédiatres nebénéficient que de 2 heures de formationdans <strong>le</strong>ur cursus, et ne sont certainementpas formés à la détectiondes signes permettant de repérer <strong>le</strong>stroub<strong>le</strong>s autistiques. 1 médecin sur 3ne sait pas ce qu’est l’autisme, 30 %pensent encore que <strong>le</strong>s autistes sontdes malades mentaux, psychotiquesou skyzophrènes. (Sondage OpinionWay / Col<strong>le</strong>ctif autisme, avril 2010)Un consensus internationalpour un accompagnement adaptéAujourd’hui, on ne guérit pas l’autisme,mais un accompagnement précoce conditionne,en partie, l’évolution de l’enfantautiste et ses chances de progression.En <strong>France</strong>, <strong>le</strong>s controverses entre associationsde parents et autorités sanitairesne concernent pas tant la nature possib<strong>le</strong>de la cause neurobiologique que <strong>le</strong> débatpersistant entre cause neurobiologiqueet cause psychologique. Ce débat a pourenjeu la reconnaissance de l’importanced’un diagnostic précoce de l’autisme, lanécessité d’un accès rapide de l’enfant àune éducation adaptée, lui donnant toutes<strong>le</strong>s chances d’une meil<strong>le</strong>ure insertion socia<strong>le</strong>,et la participation active des famil<strong>le</strong>sà l’accompagnement des enfants.Une prise en charge adaptée nécessite,outre un diagnostic fiab<strong>le</strong> et précoce, unaccompagnement éducatif, développementa<strong>le</strong>t psychologique individualisé, impliquant<strong>le</strong> plus possib<strong>le</strong> la famil<strong>le</strong>, et centrésur l’apprentissage de capacités relationnel<strong>le</strong>s,de communication, de l’autonomie,et d’une appropriation de l’environnement.Parmi <strong>le</strong>s méthodes d’apprentissage,la plus ancienne, la plus répandue et laplus évaluée est <strong>le</strong> programme TEACCH(Treatment and Education of Autistic andrelated Communication Handicapped Children).D’autres méthodes répandues ontfait, ou font l’objet d’évaluations, comme<strong>le</strong> programme ABA (Applied BehaviorAnalysis) ou, souvent utilisé en complémentde TEACCH ou ABA, <strong>le</strong> programmePECS (Picture Exchange CommunicationSystem).D’une manière généra<strong>le</strong>, <strong>le</strong>s différentesméthodes éducatives et <strong>le</strong>s traitementsdoivent faire l’objet d’une évaluation pardes recherches. Si l’éducation est indéniab<strong>le</strong>mentune priorité, <strong>le</strong> libre choix desméthodes éducatives et des traitementséventuel<strong>le</strong>ment associés doit être donnéaux famil<strong>le</strong>s conformément à la loi. Maisces méthodes doivent pouvoir faire l’objetde recherches et être évaluées afin que <strong>le</strong>choix des famil<strong>le</strong>s puisse reposer sur <strong>le</strong>sinformations <strong>le</strong>s plus fiab<strong>le</strong>s possib<strong>le</strong>s. Accepterqu’une analyse du comportementet des éventuel<strong>le</strong>s maladies associées soitsuffisamment précise pour que l’efficacitéde tel<strong>le</strong> ou tel<strong>le</strong> approche puisse être l’objetd’un minimum de consensus devrait devenirune exigence. De la même façon, laplace des psychotropes, prescrits dans environ20 % des cas pour atténuer des comportementsagressifs ou d’automutilation,ne devrait être ni stigmatisée ni encensée,mais avoir pour objectif, dans des circonstancestrès précises, l’aide réel<strong>le</strong> qu’ils peuventapporter à la souffrance de l’enfant.En conclusion, il apparait essentiel de renforcer<strong>le</strong> soutien au développement desrecherches dans des domaines tels que lagénétique, l’épigénétique (branche de labiologie qui étudie <strong>le</strong>s relations de causeà effet entre <strong>le</strong>s gènes et <strong>le</strong>urs produits)et <strong>le</strong>s neurosciences, si l’on veut espérerpouvoir comprendre <strong>le</strong>s mécanismes encause dans <strong>le</strong>s syndromes autistiques, essayerde découvrir des stratégies thérapeutiquesnouvel<strong>le</strong>s, et explorer la possibilitéque certains signes biologiques permettentd’orienter ou de confirmer <strong>le</strong> diagnostic demanière précoce et fiab<strong>le</strong>.En <strong>France</strong>, une focalisation exclusive desrecherches sur <strong>le</strong>s mécanismes physiopathologiquesrisque de faire perdurer <strong>le</strong>défaut d’accompagnement et de prise encharge précoces et adaptés qui constitueactuel<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> problèmeéthique <strong>le</strong> plus graveconcernant ce handicap.Pour cette raison, il apparaîtessentiel de développerune politique derecherches permettantd’évaluer, dans notrepays et par rapport aucontexte international,<strong>le</strong>s modalités d’accompagnementéducatif, psychologique, deprise en charge thérapeutique, et d’insertionsocia<strong>le</strong> des enfants et des adultes atteintsde ce handicap ; et de développer desrecherches visant à <strong>le</strong>s améliorer.Il est aussi essentiel de développer des recherchesen sciences socia<strong>le</strong>s et humaines,permettant d’évaluer l’accompagnementdes famil<strong>le</strong>s et l’attitude des professionnelsde santé, de l’éducation, et plus largementde la société, pour pouvoir mettre en place<strong>le</strong>s mesures permettant d’améliorer la situationactuel<strong>le</strong>. En d’autres termes, si unerecherche de qualité doit être soutenue etrenforcée, et se développer de la manièrela plus libre, <strong>le</strong>s applications possib<strong>le</strong>s deces recherches pour <strong>le</strong>s personnes atteintesde syndromes autistiques doivent êtrepensées, à chaque fois, dans <strong>le</strong> contexted’une réf<strong>le</strong>xion scientifique, médica<strong>le</strong>, etéthique qui place l’individu au cœur despréoccupations.Sources : Inserm, Comité consultatif nationald’EthiqueLa préva<strong>le</strong>nce des syndromesautistiques en questionLes études épidémiologiques européennes,américaines et japonaises révè<strong>le</strong>nt uneaugmentation de la préva<strong>le</strong>nce dessyndromes autistiques, dont la cause estdiscutée. Les données <strong>le</strong>s plus récentesrecueillies indiquent une préva<strong>le</strong>nceentre 0,6 % et 1 %, dont un tiers environde formes typiques d’autisme. Il y a, àcette augmentation de la préva<strong>le</strong>nce,plusieurs explications possib<strong>le</strong>s, et uneinconnue : y a-t-il ou non augmentationde l’incidence ? En d’autres termes, cetteaugmentation est-el<strong>le</strong> due à une augmentationdu nombre de cas, au changementdes critères diagnostiques et/ou à uneamélioration du diagnostic due à unemeil<strong>le</strong>ure formation des médecins et uneplus grande attention des parents à ceproblème ?Pour répondre à cette interrogation desrecherches sont en cours sur <strong>le</strong>s facteursde risque liés à l’environnement, parmi<strong>le</strong>squels certains, comme <strong>le</strong>s facteurs liésà la vaccination, ont eu un grand retentissementmédiatique, avant de se révé<strong>le</strong>rdénués de validité scientifique.


’’20 Les perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la rechercheLes perspectives et <strong>le</strong>s espoirs de la recherche 21Par <strong>le</strong> Docteur Nadia Chabane, Pédopsychiatre à l’Hôpital Robert DebréEtat des connaissances dans l’autismeLa définition cliniqueLes troub<strong>le</strong>s du spectre autistique (TSA)sont des troub<strong>le</strong>s neuro-développementauxdont <strong>le</strong>s mécanismes physiopathologiquesrestent encore imparfaitementconnus et dont l’origine est aujourd’huimodélisée comme multifactoriel<strong>le</strong>. Classésparmi <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s envahissants du développement,ils sont caractérisés par desdéficits quantitatifs et qualitatifs des interactionssocia<strong>le</strong>s et de la communication,auxquels sont associés un répertoire decomportements restreints, répétitifs et stéréotypés.Ces troub<strong>le</strong>s apparaissent avantl’âge de 3 ans. Ces différents syndromessont décrits aujourd’hui dans <strong>le</strong>s classificationsdiagnostiques internationa<strong>le</strong>s :CIM-10 et DSM-IV.Le concept de TSA regroupe des présentationscliniques très hétérogènes pouvantinclure des particularités cognitives (déficience,compétences hors norme), sensoriel<strong>le</strong>s(perceptions distinctes des stimulationsvisuel<strong>le</strong>s, auditives, tacti<strong>le</strong>s…),motrices et émotionnel<strong>le</strong>s, mais tous partagentun handicap plus ou moins sévèrede la compréhension et des compétencessocia<strong>le</strong>s. L’expression des TSA varie toutau long de la vie d’une personne atteinteen fonction de l’âge de développement, dela sévérité des symptômes, de la qualité etde l’intensité de son accompagnement etdes expériences de vie qu’el<strong>le</strong> aura.On estime aujourd’hui qu’un enfant sur150 est atteint de TSA, et on observeun sexe ratio de quatre à cinq garçonsatteints pour une fil<strong>le</strong>. On a pu mettreen évidence une association avec despathologies génétiques, neurologiqueset métaboliques évoquant de possib<strong>le</strong>smécanismes causaux communs. Les facteursenvironnementaux, pour <strong>le</strong>ur part,interviennent probab<strong>le</strong>ment dans <strong>le</strong>smécanismes causaux de ces syndromesmais <strong>le</strong>ur implication reste encore à démontrerplus clairement (influence desmécanismes de souffrance fœta<strong>le</strong>, grandeprématurité, infections, exposition à dessubstances toxiques…).Un enjeu crucial : <strong>le</strong> diagnostic précocepour une prise en charge précoceActuel<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> diagnostic d’autisme estétabli <strong>le</strong> plus couramment entre 3 et 4 ans,en moyenne. Cependant, <strong>le</strong>s cliniciensexpérimentés peuvent déce<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s signesde l’autisme beaucoup plus précocement :à 18 mois en moyenne. Il existe doncun décalage important entre <strong>le</strong>s connaissancesactuel<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong>s manifestationsprécoces de l’autisme et <strong>le</strong>ur mise enapplication au niveau du diagnostic. Cedécalage n’est pas sans conséquencecar <strong>le</strong> repérage précoce des troub<strong>le</strong>s représenteun enjeu de tail<strong>le</strong> : il ouvre desperspectives de prise en charge à un âgeoù certains processus de développementpeuvent encore être modifiés, du fait desmécanismes de plasticité cérébra<strong>le</strong>. Lespossibilités importantes d’organisationneurona<strong>le</strong> autorisent durant cette périodeun enrichissement considérab<strong>le</strong> des acquisitionset des savoir-faire. Les stimulationsexternes vont constituer des expériencesqui permettent à l’enfant d’agir enretour sur la constitution et la consolidationde circuits neuronaux favorisant <strong>le</strong>sapprentissages sur <strong>le</strong>s fonctions motrices,cognitives et socia<strong>le</strong>s.Il est éga<strong>le</strong>ment nécessaire de développerplus avant des outils de détection etde diagnostic spécifiques aux très jeunesenfants afin de valider au mieux <strong>le</strong> diagnostic.Le diagnostic des TSA resteessentiel<strong>le</strong>ment clinique. Il repose surl’expertise des professionnels, ce quiimplique une formation solide dans cedomaine et plus particulièrement sur <strong>le</strong>sformes d’expression très précoces de cessyndromes.Des équipes de recherche centrent aujourd’hui<strong>le</strong>ur attention sur l’identificationd’un marqueur biologique, ou marqueurde validité externe, permettant deconfirmer ou non un TSA à un très jeuneâge, c’est-à-dire qui soit suffisammentsensib<strong>le</strong> (pourcentage suffisant d’enfantsidentifiés), spécifique (faib<strong>le</strong> taux de fauxpositifs) et ayant une bonne va<strong>le</strong>ur prédictive(diagnostic confirmé et validé parla suite). Il faut de surcroît qu’il soit utilisab<strong>le</strong>par tous <strong>le</strong>s professionnels. Ainsi,des techniques comme cel<strong>le</strong> de l’Eyetracking (mesurant la direction du regardet <strong>le</strong>s temps de fixation) constituent despistes prometteuses.Il convient aujourd’hui de renforcer laformation des professionnels de santéimpliqués dans <strong>le</strong>s bilans desanté sur <strong>le</strong> développementnormal et pathologique del’enfant et de <strong>le</strong>s sensibiliseraux premières manifestationscliniques de l’autisme afinqu’ils puissent orienter cesenfant précocement vers descentres experts dans <strong>le</strong>s TSA.Le diagnostic précoce peutpermettre, par la mise enplace de programmes de stimulationintensive, de modifierla trajectoire développementa<strong>le</strong>de ces enfants,de limiter la survenue detroub<strong>le</strong>s du comportementsévères, de limiter <strong>le</strong> handicapsocial. Les parents, informés trèstôt sur la nature des troub<strong>le</strong>s de <strong>le</strong>ur enfant,peuvent aussi plus faci<strong>le</strong>ment semobiliser et participer activement auxinterventions précocesUn lien nécessaire entre la clinique et larechercheLa dynamique actuel<strong>le</strong> dans la recherchevise à développer des travaux ciblant larecherche de corrélations, de liens, entresignes cliniques, neurobiologiques et neurocognitifs,en choisissant une conceptionplus intégrative de ces différents champsd’explorations. Cette approche semb<strong>le</strong>mieux correspondre au caractère multifactorieldes mécanismes causaux desTSA. Il est ainsi nécessaire que des interactionspermanentes existent entre <strong>le</strong>scliniciens et <strong>le</strong>s chercheurs afin de tirerde <strong>le</strong>urs expertises communes des pistesde recherche s’appuyant sur une solideconnaissance des caractéristiques et variationsde ces syndromes et sur <strong>le</strong>s champsdivers d’exploration en sciences fondamenta<strong>le</strong>s,sciences cognitives, sciences del’éducation.’’Un entretien avec Michel Favre, Président de l’Association Pro Aid <strong>Autisme</strong>, Directeur de RecherchesINSERM à l’Institut PasteurDe grandes injustices dans la non priseen compte des personnes autistesC’est seu<strong>le</strong>ment depuis 2010 que la HauteAutorité de Santé reconnaît l’autismecomme un troub<strong>le</strong> envahissant du développement,non plus comme une psychoseinfanti<strong>le</strong>. Pourquoi un tel retard françaisalors que la mutation s’est opérée dans <strong>le</strong>sannées 80 dans la quasi-totalité des pays ?Sous prétexte que l’autisme est rattaché àla psychiatrie, qu’une majorité des psychiatressont psychanalystes, ces derniersappliquent <strong>le</strong>urs connaissances et <strong>le</strong>urs pratiquesdans <strong>le</strong> diagnostic et l’accompagnementde l’autisme, attendant « l’émergencedu désir de l’enfant ». Pourtant, et cela aété rappelé à l’occasion des RencontresPar<strong>le</strong>mentaires sur l’<strong>Autisme</strong> du 12 janvierdernier par Daniel Fasquel<strong>le</strong>, Député et Présidentdu groupe d’études par<strong>le</strong>mentaire surl’autisme, par la Ministre des Solidarités etde la Cohésion Socia<strong>le</strong> Roselyne Bachelotou encore par Valérie Létard, Sénatricedu Nord : l’autisme n’a rien à voir avec lapsychanalyse.Ce retard français, qui a profondément perturbé<strong>le</strong> développement de programmesd’accompagnement adaptés, est <strong>le</strong> fruit decette mainmise de la psychanalyse sur l’autisme.Aujourd’hui encore, de nombreuxpsychanalystes refusent de reconnaître quel’autisme est un troub<strong>le</strong> neurologique avecune composante génétique importante, quientraîne un handicap dans la relation socia<strong>le</strong>,qu’il y a des autismes et non pas « un » autisme,qu’il faut plutôt par<strong>le</strong>r de troub<strong>le</strong>s envahissantsdu développement ou de troub<strong>le</strong>sdu spectre autistique et non pas de psychoserésultant d’une prétendue « toxicitématernel<strong>le</strong> » et re<strong>le</strong>vant de la psychiatrie.En termes de diagnostic et de programmed’accompagnement des personnesautistes, sommes-nous éga<strong>le</strong>mentà la traîne ?L’autisme exige une intervention précoce.Or, en <strong>France</strong>, <strong>le</strong> diagnostic est porté auxa<strong>le</strong>ntours de 4 ans, trop rarement avant.Comme l’a mis en évidence Valérie Létarddans son rapport sur <strong>le</strong> plan autisme 2008-2010, il faut ensuite en général patienterdeux ans avant d’accéder aux structuresspécialisées. Des délais bien trop longspuisque, à 6 ans, la plasticité cérébra<strong>le</strong>de l’enfant est bien moindre et ne permetpas une réel<strong>le</strong> optimisation des mesuresd’accompagnement pouvant être mises enœuvre par la suite.Une situation due, en partie, au manque demoyens et de structures dont souffre l’autismedans notre pays.Un manque de moyens, mais aussi unemauvaise affectation des ressourcesdisponib<strong>le</strong>s ?En effet, <strong>le</strong> prix de journée en hôpital dejour ou en institut médico-éducatif est nettementsupérieur à celui d’un établissementdédié à l’accueil et l’accompagnement desenfants autistes. Persister à placer <strong>le</strong>s enfantsautistes dans des hôpitaux de jour oudes hôpitaux psychiatriques dans <strong>le</strong>squelsils ne sont, de surcroît, pas bien pris encharge, est une défaillance supplémentairede l’organisation de notre offre de soins.Globa<strong>le</strong>ment, un dépistage et un diagnosticprécoces, relayés par une éducation adaptée,sont seuls à même de permettre l’insertionde l’enfant autiste dans la société,à commencer par l’éco<strong>le</strong>, au lieu de <strong>le</strong>faire passer par pertes et profits avec pourseu<strong>le</strong> perspective l’asi<strong>le</strong> psychiatrique. LeConseil Economique, Social et Environnementala été saisi par <strong>le</strong> Col<strong>le</strong>ctif <strong>Autisme</strong>de ce coût économique et social de l’autismeen <strong>France</strong>. Son rapport est attendupour <strong>le</strong> deuxième semestre 2012 et j’osecroire que <strong>le</strong>s pressions habituel<strong>le</strong>mentexercées par certains lobbies ne viendrontpas entraver la qualité de ces travaux.Quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s solutions aujourd’huireconnues pour une prise en compteoptima<strong>le</strong> de l’autisme ?Des programmes existent, ils se nommentTEACCH, PECS et ABA par exemp<strong>le</strong>s,qui donnent aux enfants souffrant d’autisme<strong>le</strong>s moyens de progresser. Mis enœuvre aux Etats-Unis depuis plus de 30ans, ces programmes s’appuient sur <strong>le</strong>ssciences cognitives et comportementa<strong>le</strong>s,permettant aux personnes autistes de sesentir bien dans <strong>le</strong>ur environnement. Maisils sont encore peu développés en <strong>France</strong>,essentiel<strong>le</strong>ment à cause du combat que <strong>le</strong>spsychanalystes mènent contre eux.Accompagnement et éducation sont des<strong>le</strong>viers favorisant l’inclusion socia<strong>le</strong> desjeunes autistes. Pourtant, on estime à environ20 % seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> nombre d’enfantsbénéficiant d’une scolarisation en milieuordinaire, et souvent dans des conditionsaléatoires.La <strong>France</strong> a été condamnée par <strong>le</strong> Conseilde l’Europe en 2004 pour <strong>le</strong> non respectde ses obligations d’éducation. Depuis,deux plans autisme se sont succédé – untroisième est attendu prochainement – quiont conduit à la création de places, agrandissantainsi en général <strong>le</strong>s établissementsexistants, mais sans en créer de nouveaux.Nous allons une fois encore à l’opposé dece que l’on sait fonctionner dans d’autrespays, à savoir des petites structures dédiéesoù <strong>le</strong>s personnes autistes sontpresque individuel<strong>le</strong>ment prises en chargeet accompagnées.Pour conclure, quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s conditionsd’un meil<strong>le</strong>ur avenir des personnesautistes dans notre pays ?D’une part, il faut accroître <strong>le</strong>s moyens allouésà la formation : au sein de l’éducationnationa<strong>le</strong> pour <strong>le</strong>s auxiliaires de vie scolaire,dans <strong>le</strong>s cursus de médecine afin deformer et sensibiliser <strong>le</strong>s généralistes, <strong>le</strong>spédiatres, <strong>le</strong>s psychologues, sans oublier laformation des parents et de toutes <strong>le</strong>s personnesen contact avec l’autisme dans <strong>le</strong>sdifférentes structures d’accueil existantes.D’autre part, il est impératif de développerun programme d’accompagnement médicaliséen direction des adultes autistes pour<strong>le</strong>squels, à ce jour, pratiquement rien n’estentrepris. Le gros problème sera demaincelui des adultes vieillissants, qui terminentla plupart du temps <strong>le</strong>ur existence dansdes hôpitaux psychiatriques.


’’26 Un accompagnement adapte tout au long de la vieUn accompagnement adapte tout au long de la vie 27Par Jean Claude Ameisen, Président du comité d’éthique et du comité scientifiquede la Fondation internationa<strong>le</strong> de la Recherche appliquée sur <strong>le</strong> Handicap (FIRAH)La <strong>France</strong> doit donner aux personnes,enfants et adultes, atteintes d’autismeun réel accès aux droits fondamentaux« En 1986, écrivait <strong>le</strong> neurologue OliverSacks, un livre extraordinaire, sans précédentet impensab<strong>le</strong> fut publié. Sans précédent,car il n’y avait jamais eu auparavantun récit de l’intérieur de l’autisme. Impensab<strong>le</strong>,parce que <strong>le</strong> dogme médical durant40 ans avait été qu’il n’y avait pas de vieintérieure dans l’autisme. Extraordinaireen raison de son étrange clarté. Cette voixvenait d’un lieu qui n’avait jamais eu devoix, et el<strong>le</strong> parlait non seu<strong>le</strong>ment pour el<strong>le</strong>même,mais pour des milliers d’autres. »La voix était cel<strong>le</strong> de Temp<strong>le</strong> Grandin, <strong>le</strong>livre, Ma vie d’autiste.C’était il y a plus d’un quart de sièc<strong>le</strong>…Une génération a passé…A la fin de l’année 2007, <strong>le</strong> Comité ConsultatifNational d’Ethique, dans son AvisN°102 Sur la situation en <strong>France</strong> des personnes,enfants et adultes, atteintes d’autisme,constatait <strong>le</strong> caractère dramatiquede cette situation dans notre pays, et notreretard considérab<strong>le</strong> par rapport à la plupartdes autres pays.Malgré une prise en compte croissante dece drame par notre société, malgré la loidu 11 février 2005, malgré la ratificationpar la <strong>France</strong> de la Convention internationa<strong>le</strong>de l’ONU relative aux droits des personneshandicapées, la situation concrètedans notre pays des personnes atteintes desyndromes autistiques et de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> amalheureusement peu changé.La société française ne parvient toujours pasà donner aux personnes atteintes d’autismeun accès réel à <strong>le</strong>urs droits fondamentaux.Droit à la scolarisation, et à des méthodeséducatives adaptées ; droit à un accompagnementpersonnalisé par des personnesformées ; droit au logement, à la formationprofessionnel<strong>le</strong>, et à un emploi adapté.Les soignants jouent un rô<strong>le</strong> indispensab<strong>le</strong>,mais <strong>le</strong>s lieux de soin ne sont pas des lieuxde vie. L’hôpital de jour et <strong>le</strong>s institutionsconstituent des spécificités françaisesqui, dans d’autres pays, sont considéréescomme des réponses inadaptées, conduisantà un déni d’accès au droit de vivreavec <strong>le</strong>s autres, parmi <strong>le</strong>s autres. On nepeut, par ail<strong>le</strong>urs, obliger des associationsde patients ou de famil<strong>le</strong>s à se voir imposerdes méthodes à visée thérapeutiquequ’el<strong>le</strong>s considèrent inappropriées. C’est<strong>le</strong> sens même de la notion de choix libreet informé, l’un des piliers de l’éthiquemédica<strong>le</strong> moderne.En ce qui concerne <strong>le</strong>s enfants, <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>sne sont pas aidées et s’épuisent. La scolarisationn’est pas assurée. La <strong>France</strong> avaitété condamnée par <strong>le</strong> Conseil de l’Europeen 2004 pour non respect du droit à lascolarisation des enfants atteints de syndromesautistiques. La loi du 11 février2005 a reconnu <strong>le</strong>ur droit à la scolarisation.Mais faute d’auxiliaires de vie scolaire etd’enseignants formés, ce droit est trop souventvirtuel : l’enfant est inscrit à l’éco<strong>le</strong>,mais n’est pas scolarisé. Tout enfant ensituation de handicap a droit à une éducationadaptée. Dans d’autres pays, commel’Italie et la Suède, cette éducation a lieudans <strong>le</strong>s classes des éco<strong>le</strong>s avec tous <strong>le</strong>sautres enfants. En Italie, lorsqu’un enfantatteint d’un handicap entre à l’éco<strong>le</strong>, l’effectifde la classe est divisé par deux, et unenseignant formé est adjoint à l’enseignanthabituel. En Suède, l’enfant a droit à laprésence permanente d’un accompagnantformé à ses besoins spécifiques.En ce qui concerne <strong>le</strong>s personnes adulteset âgées, il existe un manque cruel d’accèsau logement et aux soins, et des problèmesmajeurs d’abandon ou d’iso<strong>le</strong>ment dansdes institutions.Pourtant, d’autres pays, dont la Suède, ontmis en place une politique radica<strong>le</strong>mentdifférente. Au début des années 90, laSuède a considéré qu’iso<strong>le</strong>r dans des institutionsdes personnes atteintes de handicapintel<strong>le</strong>ctuel, psychologique, relationnel oucomportemental, c’était <strong>le</strong>ur dénier <strong>le</strong>ursdroits de citoyens. La loi Inclus dans la sociétéa fermé toutes ces institutions. Quel<strong>le</strong>que soit la cause de <strong>le</strong>ur handicap, autisme,trisomie 21, maladie d’Alzheimer, traumatismecrânien… ces personnes adultes viventdans <strong>le</strong>ur domici<strong>le</strong> ou dans de petitsappartements ou maisons, à 4 ou 6, dans<strong>le</strong>ur vil<strong>le</strong> ou village, près de <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>set de <strong>le</strong>urs proches. El<strong>le</strong>s sont aidées chezel<strong>le</strong>s par des accompagnants et des soignantsformés, cet accompagnement <strong>le</strong>urpermettant de se promener, de faire <strong>le</strong>urscourses, d’al<strong>le</strong>r à la piscine…Le manque d’accès à la formation professionnel<strong>le</strong>et à l’emploi des personnes en situationde handicap nécessite que la loi dejuil<strong>le</strong>t 1987 soit enfin p<strong>le</strong>inement appliquée.Enfin, il est inacceptab<strong>le</strong> que l’allocationaux adultes handicapés (AAH) soit sous <strong>le</strong>seuil de la pauvreté.Les Plans <strong>Autisme</strong> sont des initiatives indispensab<strong>le</strong>s,mais <strong>le</strong>ur caractère focalisétraduit par défaut ce qui <strong>le</strong>ur manque : uneinscription dans une approche plus larged’inclusion des personnes <strong>le</strong>s plus vulnérab<strong>le</strong>sau cœur de notre société.Ce qu’il nous faut, c’est un véritab<strong>le</strong> changementculturel : à l’éco<strong>le</strong>, dans <strong>le</strong>s entreprises,chez <strong>le</strong>s soignants, dans <strong>le</strong> mondepolitique, dans la vie de tous <strong>le</strong>s jours.Des initiatives loca<strong>le</strong>s remarquab<strong>le</strong>s ont étéaccomplies dans notre pays, mais el<strong>le</strong>s sontencore trop souvent isolées. Nous devons<strong>le</strong>s soutenir, et nous inspirer des réalisationsaccomplies dans d’autres pays. Penser quec’est impossib<strong>le</strong>, comme on l’entend souvent,est <strong>le</strong> plus grand obstac<strong>le</strong>. « La seu<strong>le</strong>chose qui puisse être fata<strong>le</strong> à l’humanité »disait <strong>le</strong> philosophe Martin Buber « c’est decroire à la fatalité ».Il nous faut construire une société ouverte,dans laquel<strong>le</strong> la différence, quel<strong>le</strong> qu’ensoit l’origine, soit considérée comme unesource de richesse et non comme un motifd’exclusion.’’Par Luc Allaire, Directeur de la Caisse Nationa<strong>le</strong> de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA)L’implication de la CNSA dans <strong>le</strong> plan<strong>Autisme</strong> 2008-2010© L-X ColasL’amélioration de la prise en compte destroub<strong>le</strong>s envahissants du développement(TED), dont l’autisme, constitue l’un des enjeuxmajeurs de la politique de santé et desdispositifs de compensation des situationsde handicap pour favoriser la participationsocia<strong>le</strong> des personnes qui en sont atteintes.Le repérage des troub<strong>le</strong>s, <strong>le</strong> diagnostic etl’évaluation, l’offre de soins et d’accompagnementet la formation des professionnelsdoivent être développés pour proposer desréponses de qualité adaptées aux besoinsdes personnes et de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> tout au longde la vie.Le plan autisme 2008-2010, lancé au printemps2008, a constitué une nouvel<strong>le</strong> étapede la politique en faveur de ces personnes. Ilrépond à des enjeux qualitatifs et quantitatifsforts, articulant résolument <strong>le</strong>s champséducatifs, pédagogiques et sanitaires ets’accompagne d’actions d’information etde communication. 2011 a été une annéetransitoire pour la poursuite des mesures quirestent à mettre en œuvre.Les mesures auxquel<strong>le</strong>s la CNSAest associéeLa CNSA contribue à la mise en œuvre deplusieurs mesures pilotées par la Directiongénéra<strong>le</strong> de la cohésion socia<strong>le</strong>, la Directiongénéra<strong>le</strong> de l’offre de soins et la Directiongénéra<strong>le</strong> de la santé.Globa<strong>le</strong>ment, la CNSA s’est impliquée dansdeux grands types de travaux qui portentsur <strong>le</strong> développement quantitatif de l’offremédico-socia<strong>le</strong> et sur <strong>le</strong>s orientations qualitativesdu plan autisme 2008-2010.mentaires financées sur cinq ans par <strong>le</strong> programmepluriannuel de créations de placespour <strong>le</strong>s personnes handicapées 2008-2012.La CNSA est chargée de la répartition deces moyens entre régions et du suivi de laréalisation effective des places nouvel<strong>le</strong>s.Le bilan des plans présenté au Conseil de laCNSA début juil<strong>le</strong>t 2011 faisait état de 2 900places nouvel<strong>le</strong>s autorisées et 1 672 placesnouvel<strong>le</strong>s installées au 31 décembre 2010,grâce aux crédits mobilisés par la CNSAentre 2008 et 2010.u L’expérimentation de nouvel<strong>le</strong>s formesd’accompagnementL’objectif de cette mesure est de promouvoirune expérimentation encadrée et évaluéede nouveaux modè<strong>le</strong>s d’accompagnement.Un cahier des charges national fixant<strong>le</strong>s conditions d’autorisation de structuresexpérimenta<strong>le</strong>s médico-socia<strong>le</strong>s a été publiédans une circulaire du 5 janvier 2010.Dans <strong>le</strong> cadre de cette mesure, 28 projets(soit 417 places) sont financés sur descrédits d’assurance maladie pour un montantglobal de plus de 21 millions d’eurosmobilisés entre 2009 et 2011.u Le renforcement des centres deressources autisme (CRA)Les CRA sont financés par <strong>le</strong>s dotationsrégiona<strong>le</strong>s médico-socia<strong>le</strong>s réparties par laCNSA et gérées par <strong>le</strong>s ARS, ce en complémentdu financement sanitaire des équipeshospitalières associées pour <strong>le</strong> diagnostic.Des crédits complémentaires ont été notifiésen 2010 par la CNSA (2 millions d’euros)pour renforcer <strong>le</strong>s moyens des centres<strong>le</strong>s moins dotés. Depuis fin 2011, <strong>le</strong>s 26régions disposent d’un CRA. En collaborationavec l’ANCRA, un suivi d’activitéhomogène et comparatif des CRA a été misen place depuis 2009 et coordonné par laCNSA.En parallè<strong>le</strong> de l’évolution de l’offre, uneffort considérab<strong>le</strong> pour <strong>le</strong> travail sur l’étatdes connaissances a été mené avec la productionde documents :u L’élaboration d’un corpus commun deconnaissances sur l’autisme et <strong>le</strong>s TEDLa Haute Autorité de Santé a élaboré et publié,en mars 2010, un corpus commun deconnaissances sur l’autisme et <strong>le</strong>s TED. Il afait l’objet d’une large diffusion aux professionnelset aux responsab<strong>le</strong>s de formation àlaquel<strong>le</strong> la CNSA a contribué puisqu’el<strong>le</strong> enu Le développement de l’offre médicosocia<strong>le</strong>dédiée aux personnes autistesLe plan prévoit de créer 4 100 places suppléaassuré la diffusion aux MDPH. Ce soc<strong>le</strong>commun de connaissances est utilisé parl’EHESP qui poursuit la formation des formateursrelais engagée en 2011.u L’élaboration de recommandationsde bonnes pratiques et la diffusion desconnaissances sur l’autisme et autresTEDLa CNSA a participé aux comités d’organisationde plusieurs recommandationsde bonnes pratiques et à <strong>le</strong>ur consultationpublique. Aussi, l’état des connaissancesest intégré au contenu des formations descadres des secteurs sanitaires et sociaux etdes professionnels intervenant auprès depersonnes avec TED.u L’amélioration de la qualitédes évaluations réalisées par <strong>le</strong>s MDPHCette mesure menée en collaboration avecl’ANCRA et l’ANCREAI se traduit parl’animation d’échanges de pratiques pourdévelopper <strong>le</strong>s coopérations entre MDPHet CRA, ainsi que par la formation deséquipes pluridisciplinaires des MDPH. Lapremière rencontre nationa<strong>le</strong>, organiséeconjointement par la DGAS, devenue depuisDGCS, la Direction de l’hospitalisationet de l’organisation des soins, devenuedepuis DGOS et la CNSA s’est déroulée<strong>le</strong> 8 décembre 2009 et a réuni 185 participants.Les actes sont disponib<strong>le</strong>s dans larubrique Publications du site de la CNSA.u L’amélioration de l’accompagnementdes personnes avec autisme et autres TEDCes mesures visent une meil<strong>le</strong>ure connaissancedes pratiques et la réalisation derecommandations de bonnes pratiquesprofessionnel<strong>le</strong>s, afin d’améliorer la qualitédes réponses aux besoins des personnesatteintes de TED. La première recommandationa été publiée par l’Agence nationa<strong>le</strong>de l’évaluation et de la qualité des établissementset services sociaux et médico-sociauxen janvier 2010. Par ail<strong>le</strong>urs, l’Associationnationa<strong>le</strong> des centres de ressources autisme(ANCRA) en collaboration avec l’Associationnationa<strong>le</strong> des CREAI a réalisé une étudesur <strong>le</strong>s pratiques dans <strong>le</strong>s établissements sanitaires,médico-sociaux et scolaires en I<strong>le</strong>de-<strong>France</strong>,dans <strong>le</strong> Nord Pas-de-Calais et enFranche Comté. El<strong>le</strong> fait suite à une étudepilote effectuée en Languedoc-Roussillon.Le rapport final est consultab<strong>le</strong> sur <strong>le</strong> site duministère (DGS) et de la CNSA.


’’28 Un accompagnement adapte tout au long de la vieUn accompagnement adapte tout au long de la vie 29Un entretien avec Philippe Calmette, Directeur Général de la FEGAPEI(Fédération nationa<strong>le</strong> des associations gestionnaires au service des personnes handicapées)Pourquoi investir dans l’accompagnementdes personnes autistes ?Pour la FEGAPEI, la question de l’accompagnementdes personnes autistesse pose en termes d’investissements ensanté. Pouvez-vous nous en dire davantagesur cette approche ?Nos politiques publiques sont élaboréessur la base d’objectifs annuels comptab<strong>le</strong>set budgétaires, donc sur des perspectivesde court terme. Pourtant, tout <strong>le</strong> mondes’accorde à dire que la santé des populationsest un investissement d’avenir pourla société dans son ensemb<strong>le</strong>. Appliquéeaux personnes handicapées, et plus précisémentaux personnes autistes, cette approcheprend tout son sens. El<strong>le</strong> signifieinvestir au début de la vie, dans <strong>le</strong> dépistage,<strong>le</strong> diagnostic et l’accompagnementprécoces. Nous sommes aujourd’hui capab<strong>le</strong>sde diagnostiquer un troub<strong>le</strong> envahissantdu développement et un syndromeautistique dès 18 mois. Malheureusement,en moyenne, <strong>le</strong> diagnostic est posé à 6 ou 7ans ! Avec des conséquences socia<strong>le</strong>s multip<strong>le</strong>s: d’une part, <strong>le</strong>s parents n’ont pas deréponse aux troub<strong>le</strong>s constatés chez <strong>le</strong>urenfant. D’autre part, 80 % des mères sontobligées de cesser <strong>le</strong>ur activité professionnel<strong>le</strong>dans <strong>le</strong>s trois ans suivant la survenancedu handicap. Enfin, un handicap nonexpliqué, non compris et non accompagnéde manière précoce entraine trop souventl’éclatement des coup<strong>le</strong>s et des famil<strong>le</strong>s.Un diagnostic tardif est à l’origine de cetab<strong>le</strong>au sanitaire et social catastrophique.Qu’en est-il de l’impact sur <strong>le</strong> devenir dela personne autiste el<strong>le</strong>-même ?Les découvertes récentes sur la plasticitécérébra<strong>le</strong> montrent que l’on peut intervenirsur la structure cérébra<strong>le</strong> par l’utilisationde techniques appropriées, comme<strong>le</strong>s méthodes comportementalistes detype Teacch, Aba ou Pecs. Et cette plasticitéest d’autant plus importante que<strong>le</strong> sujet est jeune. D’où l’intérêt cruciald’un diagnostic précoce pour l’enfantqui bénéficiera ainsi d’un accompagnementadapté dont on mesure désormaisl’efficacité dans la réduction des troub<strong>le</strong>set des déficiences cérébra<strong>le</strong>s. Par une interventiontrop tardive, nous créons, aucontraire, du sur-handicap.Vous al<strong>le</strong>z plus loin puisque, selon vous,investir dans <strong>le</strong> diagnostic et l’accompagnementprécoces représente un gainpour la société. Quels sont <strong>le</strong>s élémentsqui fondent cette analyse ?Un enfant diagnostiqué suffisamment tôtaura davantage de chance d’intégrer unparcours de scolarisation, d’acquisitiondes apprentissages et de travail en milieuordinaire. Il pourra, à condition d’êtreaccompagné dans la durée, accéder à unemploi et ainsi acquérir une autonomieréel<strong>le</strong>. Un parcours de vie radica<strong>le</strong>mentdifférent de l’enfant diagnostiqué tardivementqui, lui, sera condamné à un parcoursmoins autonome et plus dépendant.On s’aperçoit alors que <strong>le</strong>s sommes investiesdans <strong>le</strong>s dispositifs de dépistageet d’accompagnement précoces sont largementcompensées par la contributionéconomique et socia<strong>le</strong> de la personneautiste p<strong>le</strong>inement intégrée à la sociétéet qui va donc consommer, qui va payerdes impôts et des cotisations. C’est pourquoi,face aux conséquences socia<strong>le</strong>set économiques d’un accompagnementdéfaillant et inadapté, nous considérons<strong>le</strong>s dépenses de prévention, de dépistageet d’accompagnements précoces commedes investissements d’avenir.Cette approche novatrice fait-el<strong>le</strong> aujourd’huiconsensus ?C’est cette perception de la santé quenous souhaitons faire partager aux responsab<strong>le</strong>spolitiques et aux candidats àl’é<strong>le</strong>ction présidentiel<strong>le</strong>. Les dépensesd’accompagnement des personnes handicapéesne sont pas seu<strong>le</strong>ment des dépensesd’un compte d’exploitation courantde la sécurité socia<strong>le</strong>. Lorsqu’on seplace dans une perspective d’investissementsd’avenir, il devient évident de faireporter <strong>le</strong>s priorités de santé publique sur<strong>le</strong> dépistage, l’accompagnement précoces,la recherche appliquée sur <strong>le</strong>stechniques d’accompagnement et <strong>le</strong>urpromotion. Il faut placer <strong>le</strong>s Français aucœur des politiques de santé, et non plusseu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s objectifs comptab<strong>le</strong>s etbudgétaires.Une tel<strong>le</strong> approche est <strong>le</strong> gage d’unemeil<strong>le</strong>ure santé de la population et donc,à terme, d’une réduction des dépenses.Nous espérons que cette vision s’imposeraà l’occasion de l’élaboration desfuturs plans de santé publique.Pourquoi constate-t-on un retard spécifiquementfrançais dans l’accompagnementde l’autisme ?Les découvertes neurologiques sur l’originede l’autisme sont récentes. Pendanttrès longtemps, et c’est malheureusementencore parfois <strong>le</strong> cas, l’autisme a été traitécomme une psychose. Aujourd’hui,combien y a-t-il de personnes autistes àl’hôpital psychiatrique parce diagnostiquéespsychotiques ? On ne <strong>le</strong> sait pas,faute de diagnostic et d’accompagnementadaptés. Il est certain que cette situationconcerne un grand nombre d’adultes.Mais <strong>le</strong>s choses changent grâce à l’avancéedes connaissances et aux progrèsréalisés en matière de diagnostic qui ontd’ail<strong>le</strong>urs fait passer, en 10 ans, la préva<strong>le</strong>ncede l’autisme de 1 personne sur1 000 à 1 personne sur 150.Nous avons désormais à notre disposition<strong>le</strong>s outils nécessaires à un dépistageet un diagnostic précoces et <strong>le</strong>s réponsesà apporter en termes d’accompagnementsont connues et reconnues, notammentpar la HAS dans <strong>le</strong> cadre de ses recommandationsémises <strong>le</strong> 8 mars dernier.L’heure est non seu<strong>le</strong>ment à la prise deconscience des lacunes du système français,mais aussi à la nécessité d’agir pourcomb<strong>le</strong>r nos retards.’’Par Louis-Georges Barret, Avocat*L’autisme : de nouveaux champsde progrès grâce aux famil<strong>le</strong>sUn enfant sur 150 nait chaque année, en<strong>France</strong>, avec un troub<strong>le</strong> envahissant dudéveloppement. Ce handicap d’originegénétique et neurologique se traduit parun déficit des interactions socia<strong>le</strong>s, descomportements répétitifs et une altérationde la communication.Pendant de nombreuses années, des représentationserronées de l’autisme ontconduit l’autorité publique à la considérercomme une psychose.Les famil<strong>le</strong>s de ces enfants ont mené <strong>le</strong>scombats nécessaires pour démontrer qu’ilne s’agit pas d’une psychose incurab<strong>le</strong>mais de troub<strong>le</strong>s qui trouvent <strong>le</strong>ur originedans une cause biologique.C’est ainsi que sont nés des traitements baséssur « des interventions personnaliséesgloba<strong>le</strong>s et coordonnées, fondées sur uneapproche éducative, comportementa<strong>le</strong> etdéveloppementa<strong>le</strong> ».Ces méthodes, longtemps stigmatiséescomme inefficaces ont, au contraire, montrépar <strong>le</strong>s résultats obtenus, à la fois <strong>le</strong>scompétences exceptionnel<strong>le</strong>s de ces enfants,mais aussi la nécessité de <strong>le</strong>s mettreen œuvre.Le 08 mars 2012, la Haute Autorité deSanté a rendu un avis parfaitement favorab<strong>le</strong>à ces méthodes et p<strong>le</strong>in d’espérancepour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s. Mieux, l’avis decette autorité recommande de commencerl’application de ces méthodes avant <strong>le</strong>s4 ans de l’enfant.Pour la première fois, il est reconnu qu’ilfaut privilégier la scolarisation des enfantsautistes dans <strong>le</strong>s classes ordinaires.Enfin, la Haute Autorité affirme qu’il fautdonner une vraie place aux famil<strong>le</strong>s quidoivent être associées au projet et mêmeparticiper aux interventions. Ces affirmationssont essentiel<strong>le</strong>s pour tous <strong>le</strong>s parentsqui, depuis de nombreuses années,sont trop souvent confrontés à des proposculpabilisants hérités de conceptionspsychanalytiques.Il est en effet insupportab<strong>le</strong> pour des parentsde s’entendre reprocher de n’avoirpeut être pas désiré <strong>le</strong>ur enfant…Pourtant, et malgré <strong>le</strong>s termes de l’avisrendu <strong>le</strong> 08 mars, il faut savoir que cesméthodes ne sont toujours pas prisesen charge financièrement par l’autoritépublique et qu’el<strong>le</strong>s impliquent desdépenses considérab<strong>le</strong>s.En effet, pour aider <strong>le</strong>s enfants, il fautmettre en place autour d’eux une équipecapab<strong>le</strong> d’adapter à la fois l’apprentissagedu savoir et de la communication.Il me parait ici important de prendre pourexemp<strong>le</strong> <strong>le</strong> jeune Enguerrand. Commepour des centaines d’autres famil<strong>le</strong>s,<strong>le</strong>s pédopsychiatres avaient prédit à sesparents que ce petit garçon ne « sauraitrien faire dans la vie » et avaient donnécomme conseil de <strong>le</strong> « placer en hôpitalpsychiatrique ».Ses parents, isolés et souvent montrésdu doigt, ont choisi de déménager et defaire plus de 1 000 kilomètres pour permettreà <strong>le</strong>ur petit bonhomme d’avoir accèsà une méthode d’analyse appliquée ducomportement.Aujourd’hui, Enguerrand, 10 ans, apprendà lire et à écrire, il est très doué enmathématique et en géométrie, il par<strong>le</strong>de mieux en mieux et démontre un grandsens de l’humour. Il a des amis avec <strong>le</strong>squelsil joue tota<strong>le</strong>ment norma<strong>le</strong>ment.Il est à lui seul, et avec ses parents, <strong>le</strong>symbo<strong>le</strong> de l’extraordinaire capacitéde ces enfants différents. Il doit être lapreuve absolue de ce que cette pathologie,comme tant d’autres, se soigne.L’autorité publique se mobilise enfin,mais il faut que <strong>le</strong>s par<strong>le</strong>mentaires sachentporter la réforme nécessaire pourque <strong>le</strong>s moyens de soins de ces pathologiessoient mis en œuvre, afin que desmilliers d’autres Enguerrand soient enfinaidés, soignés et grandissent avec <strong>le</strong>sautres enfants.Les parents de ce merveil<strong>le</strong>ux petit bonhommese sont battus et se battent encorepour que <strong>le</strong> regard change et que l’Etatdécide d’intervenir différemment enconsidérant enfin que <strong>le</strong>s techniques desoins sont efficaces.L’avis du 08 mars est un premier pas,mais il faut al<strong>le</strong>r beaucoup plus loin.Aujourd’hui <strong>le</strong> coût annuel pour unefamil<strong>le</strong> qui décide seu<strong>le</strong> de mettre enplace ces méthodes de suivi est de plus de30 000 euros. De nombreux parents ontdès lors constitué des associations avecpour objet de promouvoir <strong>le</strong>s méthodescomportementalistes et de pallier <strong>le</strong> manquementde l’Etat, en sollicitant <strong>le</strong>s fondsprivés nécessaires.Faut-il rappe<strong>le</strong>r que la loi de 2005, quifixe comme principe l’exigence de mixité,rend l’Etat responsab<strong>le</strong> de sa mise enœuvre ?Il suffit, en outre, de donner à ces méthodes<strong>le</strong>s moyens d’une véritab<strong>le</strong> miseen œuvre sur l’ensemb<strong>le</strong> du territoirenational en associant <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s. L’extensionde la mise en œuvre permettrade mutualiser <strong>le</strong> cout individuel et, enconséquence, de <strong>le</strong> réduire. Il permettraau surplus d’assurer une égalité d’accèsau traitement quel que soit <strong>le</strong> lieu d’habitationde la famil<strong>le</strong>.Pour que <strong>le</strong> label « Grande Cause Nationa<strong>le</strong>» ne soit pas oublié, il faut qu’il permettela mise en place du dispositif législatifet rég<strong>le</strong>mentaire nécessaire. Il s’agitde notre responsabilité col<strong>le</strong>ctive pourqu’Enguerrand et ses milliers de copainstrouvent toute <strong>le</strong>ur place dans une sociétéqui a bien besoin de <strong>le</strong>ur humanité !!!Association EnguerrandCaroline Dufort-Pajot11, allée du Bosquet - 59650 Vil<strong>le</strong>neuve d’Ascqasso.enguerrand@free.fr* Louis-Georges Barret est Père d’un enfant« extraordinaire » et ancien Président del’association « la maison des poupies » à Nantes


’’30 Un accompagnement adapte tout au long de la vieUn accompagnement adapte tout au long de la vie 31Par Julien Schramm, père de Baptiste, fondateur de « Un Club, Un Autiste »« Un Club, Un Autiste », <strong>le</strong> rugby citoyenIntégrer de jeunes autistes dans deséco<strong>le</strong>s de rugby : né il y a dix ans, <strong>le</strong> projetprend une nouvel<strong>le</strong> dimension grâceà l’action de la Fédération Française duSport Adapté.En 2002, lorsque Baptiste effectue despremiers pas à l’éco<strong>le</strong> de rugby de Nice,au milieu d’une douzaine d’enfants enp<strong>le</strong>ine santé, <strong>le</strong> défi est immense. A lahauteur de sa différence. Car Baptisteest autiste. Il a 7 ans. Il n’est plus scolarisédepuis quelques mois. L’éco<strong>le</strong>de la performance n’est pas préparéeà ce type de handicap. L’éco<strong>le</strong> où l’oninculque la connaissance, mais pas <strong>le</strong>savoir être. Baptiste a donc quitté sescopains de l’éco<strong>le</strong> primaire et il est partien institution rejoindre d’autres enfantsautistes.Il reste alors <strong>le</strong> mercredi après-midi et unespace de liberté où Baptiste peut retrouverce qu’il vivait chaque jour à l’éco<strong>le</strong>,à son rythme... une forme de sociabilitéessentiel<strong>le</strong> dans son développement.Grâce à la volonté d’un éducateur, voilàdonc Baptiste intégré aux poussins duclub de Nice. Pas pour se donner bonneconscience, mais parce que nous sommespersuadés de l’intérêt d’une tel<strong>le</strong> expérience.El<strong>le</strong> est menée avec intelligenceavec un éducateur supplémentaire sur laséance pour encadrer Baptiste. « Un agentd’intégration » dit-on comme cela se faiten milieu scolaire. Indispensab<strong>le</strong>... car <strong>le</strong>risque c’est aussi <strong>le</strong> rejet. C’est un étudianten éducation physique qui s’y col<strong>le</strong><strong>le</strong> premier. Venant de la filière ActivitésPhysiques Adaptées (APA), il trouve làun champ d’expérimentation idéal pourson mémoire de maîtrise... Le documentconstituera <strong>le</strong> point de départ du projetpédagogique. Un guide pour tous ceuxqui vont se lancer dans l’aventure.Les premiers pas sont diffici<strong>le</strong>s, car Baptistepart de très loin. Mais cela dépasserapidement la simp<strong>le</strong> expérience, c’estbientôt un magnifique succès. Baptistene sera jamais un joueur de rugby, maisses progrès sont incroyab<strong>le</strong>s.Son regard se fixe, il peut attraper unballon, <strong>le</strong> renvoyer, suivre un parcours...partager la vie du groupe.Ses jeunes partenaires ne seront probab<strong>le</strong>mentpas tous des champions, mais ilsauront appris une va<strong>le</strong>ur essentiel<strong>le</strong> : ladifférence. A un âge où <strong>le</strong>s enfants sontcapab<strong>le</strong>s d’une grande vio<strong>le</strong>nce entreeux, <strong>le</strong>s voilà confrontés au partage et àla tolérance. Une <strong>le</strong>çon de vie dans cepays qui entretient une relation si comp<strong>le</strong>xeavec <strong>le</strong> handicap.Aider l’enfant autiste à s’épanouir socia<strong>le</strong>mentet lui permettre d’évoluer sur<strong>le</strong> plan de ses capacités cognitives etpsychomotrices ; apprendre aux autresenfants à accepter la différence et à seresponsabiliser par rapport au handicap :« Un Club, Un Autiste » est né.L’expérience est rapidement devenue unvéritab<strong>le</strong> projet sur <strong>le</strong> plan national. Uneintégration, puis cinq, puis vingt et bientôtsoixante un peu partout en <strong>France</strong> aubout de deux ans. Grâce à la FédérationFrançaise de Rugby d’abord qui a toutde suite cru à cette dynamique. Grâceà quelques parrains de poids commeFabien Galthié, l’ancien capitaine duQuinze de <strong>France</strong>. Grâce enfin au relaisdéterminant de l’UNAPEI (Union Nationa<strong>le</strong>des Associations de Parents, de personneshandicapées menta<strong>le</strong>s et de <strong>le</strong>ursamis) et de la FFSA (Fédération Françaisedu Sport Adapté) qui ont su, par<strong>le</strong>urs moyens, faire prendre une amp<strong>le</strong>urnationa<strong>le</strong> à l’opération. En trouvant <strong>le</strong>sfinancements indispensab<strong>le</strong>s qui permettentla présence d’un éducateur supplémentairesur chaque intégration. Sachantque <strong>le</strong> budget annuel d’une intégrationest d’environ 2 000 euros, soit <strong>le</strong> financementde l’éducateur principa<strong>le</strong>ment.Dix ans ont passé et <strong>le</strong> projet reste d’unegrande actualité en cette année 2012où l’autisme est déclaré grande causenationa<strong>le</strong>. La Fédération Française duSport Adapté, qui porte désormais <strong>le</strong>projet, ne s’y est pas trompée en remobilisant<strong>le</strong>s énergies autour de cette bel<strong>le</strong>action. El<strong>le</strong> veut faire de l’opération« Un Club, Un Autiste » un projet phare,un projet durab<strong>le</strong>, un modè<strong>le</strong> dès lors quel’on par<strong>le</strong> d’intégration des personnes autistesà travers <strong>le</strong>s activités physiques etsportives.Aujourd’hui, une quarantaine de jeunesautistes sont intégrés avec bonheur etsuccès dans des éco<strong>le</strong>s de rugby. LaFFSA a re<strong>le</strong>vé <strong>le</strong> défi pour atteindre 200intégrations en 2014.Cela passe par desmoyens beaucoup plusimportants. Plus demoyens financiers évidemment; plus de communicationpour mieuxfaire connaitre <strong>le</strong> projetauprès des famil<strong>le</strong>s, desclubs, des institutions etdes UFR STAPS ; plusde formation certainementpour mieux préparer<strong>le</strong>s éducateurs.Quand <strong>le</strong> rugby devientun projet citoyen où i<strong>le</strong>st d’abord question d’éducation et desocialisation avant de par<strong>le</strong>r de compétition.Ce sont des va<strong>le</strong>urs essentiel<strong>le</strong>spour toute société qui se veut être exemplaireen matière de handicap.Accepter la différence d’un autistedès <strong>le</strong> plus jeune âge, que ce soit dansun club sportif ou en milieu scolaire,c’est apprendre une règ<strong>le</strong> de base essentiel<strong>le</strong>dans une société qui a tendanceà rejeter ce qu’el<strong>le</strong> ne connaitpas. Permettre à toute une générationd’acquérir ces va<strong>le</strong>urs, c’est transformer<strong>le</strong> regard de toute une société sur <strong>le</strong>shandicapés dans <strong>le</strong>s années à venir.Contacts :Loïc AGARD(FFSA, responsab<strong>le</strong> du projet, 01 42 73 90 08loic.agard@ffsa.asso.org)Mouhamed GUEYE(FFSA, responsab<strong>le</strong> despartenariats,01 42 73 90 03mouhamed.gueye@ffsa.asso.org)’’Un entretien avec Pasca<strong>le</strong> Patur<strong>le</strong>, Fondation OrangeLa Fondation Orange, plus de vingt ansd’engagement en faveur de l’autismeEn cette année 2012, l’<strong>Autisme</strong> a été déclaré« Grande Cause nationa<strong>le</strong> » par <strong>le</strong>Premier Ministre François Fillon. Cettereconnaissance des pouvoirs publicsarrive-t-el<strong>le</strong> après un long parcoursd’engagement de la Fondation Orangepour cette cause ?En effet, la Fondation Orange est engagéedepuis plus de 20 ans pour la cause del’<strong>Autisme</strong>. C’est en 1991, quatre ans aprèssa création, que la Fondation, qui s’appelaitalors Fondation <strong>France</strong> Télécom, adécidé d’un mécénat de soutien aux associationsde parents d’enfants autistes afind’amener <strong>le</strong>s pouvoirs publics à reconnaîtrece handicap qui, il faut bien <strong>le</strong> dire,n’intéressait pas grand monde à l’époque.Il s’agissait d’un sujet diffici<strong>le</strong>, mais entant qu’entreprise de télécommunication,<strong>France</strong> Télécom a voulu se tourner versceux qui paraissaient <strong>le</strong>s plus éloignés dela communication, avec une réel<strong>le</strong> volontéde soutenir <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s associations.Comment <strong>le</strong>s salariés du groupe Orange-<strong>France</strong> télécom ont-ils été impliquésdans cet engagement ?Ils ont été impliqués, dès <strong>le</strong> début, avec lacréation d’une association, VA « Volontairespour <strong>le</strong>s personnes avec autisme »,qui a permis d’associer <strong>le</strong>s salariés à cettedémarche solidaire. L’association VAexiste, el<strong>le</strong> aussi, depuis 20 ans. Des salariésbénévo<strong>le</strong>s donnent de <strong>le</strong>ur temps librepour partager des activités de loisir avec despersonnes autistes. L’association apporteaussi une aide financière à la famil<strong>le</strong> pour<strong>le</strong>ur permettre d’envoyer <strong>le</strong>ur enfant enséjour vacances dans une structure adaptée.Les salariés ont aussi la possibilité deparrainer des associations dans <strong>le</strong> cadredes appels à projets.Comment s’organise <strong>le</strong> soutien de laFondation Orange, de façon concrète ?Chaque année, la Fondation Orange lancedes appels à projets thématiques, en lienavec <strong>le</strong>s attentes des famil<strong>le</strong>s et des associations,la Recherche scientifique,l’équipement des structures d’accueil, laformation des professionnels et l’accèsaux loisirs et à la culture. Nous soutenonsaussi <strong>le</strong>s grands colloques nationauxqui permettent la diffusion des dernièresconnaissances sur l’autisme.Tous <strong>le</strong>s ans, nous étudions entre 200 et250 projets. En 20 ans, nous en avonssoutenus plus de 1 800.La sé<strong>le</strong>ction est réalisée par un comitéd’experts composé de professionnels del’<strong>Autisme</strong> et de représentants d’associationsde parents. Le principal critère est depermettre aux personnes autistes de toujoursmieux s’intégrer dans la société etl’amélioration de <strong>le</strong>ur qualité de vie.Les projets sont très variés, du financementd’un mur d’escalade qui sert de supportpour des activités psychomotrices, àl’attribution de bourses de Recherche, enpassant par l’achat d’une serre pour unétablissement d’adultes avec autisme pourdévelopper <strong>le</strong>ur activité de maraîchage.Qu’en est-il du soutien à la Recherche ?Le soutien de la Fondation Orange a permisdes découvertes importantes dans <strong>le</strong>domaine de la génétique et a permis àdes laboratoires comme celui de ThomasBourgeron, à l’Institut Pasteur, d’identifier<strong>le</strong>s premières mutations génétiquesassociées à l’autisme. Différentes équipesde l’INSERM ont pu avancer dans <strong>le</strong>urtravaux et participer à des groupes derecherches internationaux.Au niveau de l’imagerie médica<strong>le</strong>, laFondation a permis des avancées dans laconnaissance de la perception visuel<strong>le</strong> etauditive des personnes avec autisme.Quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s actions menées auniveau international ?En Belgique, la filia<strong>le</strong> du Groupe a financéun site internet, « Participate ! »,qui donne aux parents toutes <strong>le</strong>s ressourcesnécessaires dès lors qu’ils sontconfrontés au diagnostic de l’autisme.En Espagne, la Fondation soutient <strong>le</strong> développementd’outils numériques pourfaciliter la communication.Nous soutenons des projets dans 14 pays.Au delà de l’aide financière, la FondationOrange a-t-el<strong>le</strong> pu apporter d’autressoutiens déterminants ?Le soutien de la Fondation Orange aété décisif dans la reconnaissance de cehandicap, par la sensibilisation des professionnelsde santé et du grand public.L’Etat a reconnu l’<strong>Autisme</strong> comme handicapen 1995.De plus, la validation de la FondationOrange est aujourd’hui un gage de qualitépour certains projets.De 2001 à 2005, la Fondation Orangea permis l’organisation des JournéesNationa<strong>le</strong>s de l’<strong>Autisme</strong> qui réunissaientdes associations comme Sésame <strong>Autisme</strong>et <strong>Autisme</strong> <strong>France</strong>. Ces journées, dontl’objectif était la médiatisation de cehandicap ainsi que la <strong>le</strong>vée de fonds, ontmobilisé toutes <strong>le</strong>s Directions Régiona<strong>le</strong>sde l’Entreprise.En 2004, l’opération a reçu <strong>le</strong> label« Cause d’Intérêt Général » par décisionde Jean-Pierre Raffarin, Premier Ministreà l’époque.En 2005, la Fondation Orange a contribuéau financement et à la diffusion de recommandationspour la pratique professionnel<strong>le</strong>du diagnostic de l’autisme auprèsdes acteurs de Santé.L’attribution du label Grande Cause Nationa<strong>le</strong>est un évènement important maispas un aboutissement. Il reste toujoursbeaucoup à faire et nous poursuivons cetengagement.


34 Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme 35contestab<strong>le</strong>s, <strong>le</strong>s tensions familia<strong>le</strong>s etl’épuisement physique : voilà <strong>le</strong> tab<strong>le</strong>audressé par Valérie Létard de ce que viventaujourd’hui encore trop de famil<strong>le</strong>s en<strong>France</strong>.C’est pourquoi el<strong>le</strong> propose une relancedynamique du plan autisme qui repose surcinquante propositions déclinées en neufgrandes priorités :u sensibiliser <strong>le</strong> grand public,u favoriser la recherche,u actualiser <strong>le</strong> soc<strong>le</strong> de connaissances,u conforter l’action des centres deressources pour l’autisme (CRA),u améliorer <strong>le</strong> dépistage et <strong>le</strong> diagnosticprécoces,u assurer l’accompagnement après <strong>le</strong>diagnostic,u rénover la gouvernance du plan avecun rô<strong>le</strong> plus important donné auxagences régiona<strong>le</strong>s de santé,u former <strong>le</strong>s personnels de l’Educationnationa<strong>le</strong> et de l’enfance,u accompagner <strong>le</strong>s adultes autistes.Première priorité, rassurer <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s,qu’el<strong>le</strong>s puissent entrer avec <strong>le</strong>ur enfantdans un parcours de vie où el<strong>le</strong>s se sentirontaccompagnées, soutenues et comprises.Cela passe en priorité par l’améliorationdu dépistage et du diagnosticprécoces. Tous <strong>le</strong>s enfants, partout en<strong>France</strong>, doivent pouvoir être diagnostiquésde manière précoce. Le rapport a dresséla liste des préconisations qui, ensemb<strong>le</strong>,pourront faire de ce souhait une réalité.Parmi el<strong>le</strong>s : s’appuyer effectivementsur l’état des connaissances établi par laHaute Autorité de Santé, former <strong>le</strong>s médecinset <strong>le</strong>s personnels de la petite enfanceau dépistage de l’autisme et des troub<strong>le</strong>senvahissants du développement (TED),labelliser dans chaque zone de proximitéun centre de diagnostic de premièreintention dont l’équipe spécialisée serachargée des évaluations diagnostiques àpartir d’un cahier des charges respectant<strong>le</strong>s recommandations de la HAS, repositionner<strong>le</strong>s Centres ressources autisme en<strong>le</strong>ur rendant <strong>le</strong>ur autonomie par rapport àl’hôpital et <strong>le</strong>ur fonction recours pour tous<strong>le</strong>s cas comp<strong>le</strong>xes.Diagnostiquer précocement, c’est unepremière étape. Mais cette précocité a unobjectif précis : permettre de mettre enplace <strong>le</strong>s soutiens adaptés pour assurer <strong>le</strong>développement de l’enfant et prévenir,autant que faire se peut, <strong>le</strong>s retards liésau handicap. ABA, TEACCH, PECS…L’expérience que la Belgique et <strong>le</strong>s paysanglo-saxons ont acquise dans l’utilisationde ces programmes est là pour montrer<strong>le</strong> bénéfice à tirer de la mise en placeprécoce d’accompagnements éducatifs etcomportementaux.A ce stade, il est impératif de coordonner<strong>le</strong>s interventions entre <strong>le</strong>s acteurs sanitaires,médicosociaux et sociaux qui ontbesoin de travail<strong>le</strong>r ensemb<strong>le</strong> au servicedes personnes autistes et de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>.Il faut en finir avec <strong>le</strong>s organisations en« tuyaux d’orgue » où seu<strong>le</strong> la bonnevolonté ou <strong>le</strong> dynamisme d’acteurs singulierspermettent la communication etl’échange d’informations.La problématique est similaire avec lascolarisation des élèves autistes. El<strong>le</strong> restetrop dépendante, suivant <strong>le</strong>s académies,d’un correspondant du rectorat motivé,des relations instaurées avec <strong>le</strong>s autres acteurs,du recrutement d’auxiliaires de viescolaire disposant d’une formation suffisanteet de qualité, de la formation des enseignantsà ce type de handicap. Cela doitse conjuguer avec une offre suffisante etadaptée de places.© JB MariouLe plan 2008-2010 aura permis l’ouverturede 4 100 places supplémentaires et28 structures expérimenta<strong>le</strong>s. Un effortnécessaire mais insuffisant pour faireface à l’amp<strong>le</strong>ur des besoins. En effet,un meil<strong>le</strong>ur dépistage va mécaniquementaugmenter la demande, tandis qu’un véritab<strong>le</strong>dépistage des adultes autistes appel<strong>le</strong>raéga<strong>le</strong>ment des évolutions dans<strong>le</strong>ur prise en charge, donc des besoins enplaces.Mais, dans <strong>le</strong> même temps, on peut espérerqu’une prise en charge plus précocepermettra pour bon nombre de jeunesautistes une meil<strong>le</strong>ure insertion en milieuordinaire, avec à la clé une réorientationd’une partie de l’offre vers des structuresd’accompagnement plus légères.Dans <strong>le</strong>s arbitrages des prochaines années,l’effort de création de nouvel<strong>le</strong>splaces en faveur des personnes autistesdevra donc rester un des axes forts de lapolitique du handicap. Il faudra encoredes places nouvel<strong>le</strong>s, tout en explorantd’autres pistes comme la reconversion destructures sanitaires ou <strong>le</strong> redéploiementau sein de structures médico-socia<strong>le</strong>sexistantes, afin de créer des unités spécifiquespour accompagner <strong>le</strong>s personnesautistes avec un personnel formé et desmoyens dédiés.Autre sujet de préoccupation : <strong>le</strong>s rupturesde prise en charge tout au long de la vie.La fin de l’obligation scolaire à 16 ansmarque un palier et il devient diffici<strong>le</strong> parfoisde poursuivre <strong>le</strong> projet de vie. Pour <strong>le</strong>sado<strong>le</strong>scents autistes et <strong>le</strong>s jeunes adultes,il manque une transition vers l’âge adulte.Le rapport présenté par Valérie Létardpropose donc d’expérimenter des modè<strong>le</strong>sd’accueil et d’accompagnement pour <strong>le</strong>s18-25 ans qui pourraient assurer cettecontinuité et permettre de travail<strong>le</strong>r aussil’accompagnement dans <strong>le</strong> logement etl’emploi.Cela ne résoudra pas la situation desadultes autistes non diagnostiqués vivantdans <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> ou en institution, notammentdans <strong>le</strong>s hôpitaux psychiatriques, etpour <strong>le</strong>squels l’adoption de recommandationsde pratiques professionnel<strong>le</strong>s reste àfaire.Il convient aussi d’anticiper <strong>le</strong>s besoinsdes personnes autistes vieillissantes, àdomici<strong>le</strong> comme en établissement, entravaillant dans deux directions complémentaires: faire évoluer <strong>le</strong>s structuresd’accueil pour <strong>le</strong>s adapter aux besoins depersonnes vieillissantes, avancer de manièrebeaucoup plus volontariste sur l’accèsaux soins somatiques.Autre zone d’ombre sur laquel<strong>le</strong> des progrèsrestent à accomplir : la fiabilité desdonnées épidémiologiques, afin de disposerd’une connaissance précise des populationsconcernées et de mieux cerner <strong>le</strong>urscaractéristiques. Comment en effet élaborerune politique, nationa<strong>le</strong> puis territoria<strong>le</strong>en l’absence de ces données ? Dans ce domaine,certaines mesures du plan sont restées« en panne ». L’un des acquis majeursdu plan autisme 2008-2010 a toutefois étéde <strong>le</strong>ver <strong>le</strong>s tabous sur ces différentes méthodesd’accompagnement. L’autorisationde structures expérimenta<strong>le</strong>s allait dans cesens. Encore fallait-il s’assurer de l’efficacitéet de la pertinence de ces méthodes.Tel<strong>le</strong> était l’objet de la mesure en faveurde la recherche sur l’autisme. Il est en effetindispensab<strong>le</strong> de consolider <strong>le</strong>s outils diagnostiquesémergents, <strong>le</strong>s stratégies thérapeutiquesinnovantes ainsi que <strong>le</strong>s essaiscliniques.Globa<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> plan autisme 2008-2010 aeu <strong>le</strong> mérite d’aborder clairement, dans uncontexte encore passionné, la nécessité derég<strong>le</strong>r <strong>le</strong> « conflit franco-français » portantsur la définition de l’autisme, l’état desconnaissances et <strong>le</strong>s méthodes d’accompagnement.Le plan a été construit sur labase d’une logique globa<strong>le</strong> et systémique :toutes <strong>le</strong>s dimensions de l’autisme ont étéappréhendées (définition, diagnostic, procédureset structures de prise en charge,scolarisation, emploi, santé, logement…).Et demain ?Si la conception du plan semb<strong>le</strong>, auxyeux des observateurs, garder toute sapertinence, il faut cependant <strong>le</strong> relancer,s’assurer de la mise en œuvre effectivedes mesures, <strong>le</strong> prolonger et conforter <strong>le</strong>sacquis.L’importance du diagnosticUne des difficultés majeures vécues par <strong>le</strong>sparents d’enfants autistes concerne encoreaujourd’hui l’établissement du diagnostic,dès lors qu’ils se sont inquiétés de signesd’anomalie du comportement de <strong>le</strong>ur enfantet ont consulté. De l’attention portéeaux premiers signes de dysfonctionnementdépend la précocité du diagnosticet de la prise en charge. Il est considéréqu’une prise en charge éducative et thérapeutiqueadaptée, mise en œuvre précocement,permet d’apporter à l’enfant <strong>le</strong>smeil<strong>le</strong>ures chances pour limiter ou réduire<strong>le</strong> handicap résultant des troub<strong>le</strong>s autistiques.Il convient aussi de souligner l’importancede la formulation du diagnostic,car el<strong>le</strong> répond au besoin des parents de serepérer et de comprendre. El<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur permetde s’informer et de trouver de l’aide auprèsd’associations. Le diagnostic est parail<strong>le</strong>urs nécessaire à l’observation épidémiologiqueet à la recherche.Améliorer <strong>le</strong> diagnostic, <strong>le</strong> rendre aussiprécoce que possib<strong>le</strong>, et porter une attentionparticulière aux modalités de son annonceaux parents constituent donc un axemajeur de la politique qui devra être miseen œuvre demain.Développer, diversifier et articu<strong>le</strong>r l’offred’éducation et d’accompagnement en directiondes personnes et de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong>Pour répondre aux besoins de chaque personne,un projet personnalisé adapté etassociant la famil<strong>le</strong> doit être élaboré, favorisantprioritairement une éducation etun accompagnement en milieu ordinaire.Un tel projet requiert des équipes forméesaux problématiques de l’autisme. Il doitêtre conçu et mis en œuvre, sans rupture,tout au long de la vie. Il convient notammentde porter une grande attention aumaintien d’une action d’accompagnementdes apprentissages et de la conquête del’autonomie des personnes lors du passageà l’âge adulte et à la réalisation d’un cadrede vie conçu pour favoriser <strong>le</strong>ur insertionsocia<strong>le</strong>.L’objectif à terme d’une insertion socia<strong>le</strong>et/ou professionnel<strong>le</strong>, compatib<strong>le</strong> avec <strong>le</strong>scompétences acquises et <strong>le</strong>s possibilitésde développement, doit éclairer <strong>le</strong>s choixen matière d’éducation.Lorsqu’un enfant ou un ado<strong>le</strong>scent doitêtre pris en charge dans un établissementmédico-social ou sanitaire, il importe deveil<strong>le</strong>r à ce que <strong>le</strong> vo<strong>le</strong>t scolaire du projetpersonnalisé soit bien assuré, et ce afin delui permettre d’effectuer tous <strong>le</strong>s apprentissagesnécessaires au développement deses capacités d’autonomie.Améliorer la qualité des prises en chargeAu-delà de l’intensification et de la diversificationdes prises en charge, la questionde <strong>le</strong>ur qualité est essentiel<strong>le</strong>. Il convientnotamment d’accorder une vigilance particulièreau nombre de personnels, à <strong>le</strong>ursqualifications ainsi qu’à <strong>le</strong>ur formation auxaspects spécifiques de l’accompagnementdes personnes atteintes d’autisme ou detroub<strong>le</strong>s envahissants du développement.• Mettre en place un personnel en nombresuffisant dans <strong>le</strong> secteur médico-social.Les personnels à prévoir pour la prise encharge des personnes souffrant d’autismeou autre TED sont fonction des besoinsd’accompagnement des enfants, ado<strong>le</strong>scentset adultes, qui peuvent être variab<strong>le</strong>s.Il est cependant important de veil<strong>le</strong>r à nepas <strong>le</strong>s sous-estimer. La présence d’unprofessionnel pour accompagner une personneautiste est souvent nécessaire, et<strong>le</strong>s ratios de personnel doivent donc êtreadaptés en conséquence.• Soutenir <strong>le</strong>s professionnels.• Promouvoir des formes innovantes d’organisationpour <strong>le</strong>s établissements ou unitésd’accueil tenant compte des besoinsdes personnes, de <strong>le</strong>ur rythme, et apportantaux professionnels un étayage dans<strong>le</strong>ur action.• Promouvoir la formation continue. Ils’agit d’un aspect essentiel pour tous <strong>le</strong>sprofessionnels intervenant dans <strong>le</strong> champde l’autisme et des TED. En effet, au-delàdes apprentissages nécessaires pour l’évolutionpermanente des connaissances etdes techniques, la formation des professionnelsapparaît aujourd’hui et plus quejamais comme une garantie d’ouverturesur l’extérieur, d’aide à l’innovation et àl’évaluation des pratiques et des actions.Dans l’accompagnement des personnesautistes et atteintes de TED, cette démarcheest vita<strong>le</strong>. L’absence de connaissancesspécifiques et d’expérience peutreprésenter, même pour des professionnelsdiplômés, une vraie carence. La comp<strong>le</strong>xitéde ces troub<strong>le</strong>s et <strong>le</strong>s avancées progressivesréalisées dans la diversificationdes réponses à apporter aux personnesjustifient que <strong>le</strong>s personnels demeurentinformés des évolutions.Pour conclure, <strong>le</strong> deuxième plan <strong>Autisme</strong>2008-2011 a permis des avancées concrètesavec la création de 4 100 places d’accueiladaptées et l’utilisationde 20 millions d’eurosdestinés à l’expérimentationde nouveaux modè<strong>le</strong>sd’accompagnement.Mais quand on saitqu’il y a 28 structures expérimenta<strong>le</strong>sen <strong>France</strong>© JB Marioupermettant d’accueillir700 enfants, alors que8 000 enfants avec autismenaissent chaqueannée, on voit bien quenous ne sommes mêmepas au milieu du gué. Ilfaut al<strong>le</strong>r plus loin et plus vite dans tous <strong>le</strong>sdomaines : dépistage et diagnostic précoces,méthodes éducatives et comportementa<strong>le</strong>s.Il faut ajouter la scolarisation : 80 000 enfantsavec autisme ne sont pas scolarisésaujourd’hui. En Grande-Bretagne, 70 %des enfants rejoignent <strong>le</strong> cursus scolaireordinaire, et il y a 17 fois plus de personnesavec autisme en université. La <strong>France</strong>manque d’établissements spécialisés, etde professionnels formés pour prendre encharge <strong>le</strong>s enfants que l’on peut intégrer enmilieu scolaire ordinaire.Le problème demeure entier éga<strong>le</strong>ment enmatière de formation. Les pédiatres, <strong>le</strong>spersonnels de crèche, de halte-garderie,<strong>le</strong>s enseignants qui sont pris au dépourvuface aux enfants autistes, ne sont pas formés.Les auxiliaires de vie scolaire (AVS)n’ont pas tous une formation spécifiqueà l’autisme et <strong>le</strong>ur statut <strong>le</strong>s empêche desuivre <strong>le</strong>s enfants de manière continue.Aujourd’hui, seu<strong>le</strong>s deux universités proposentune formation sur l’autisme. Il n’ya quasiment pas de diplômes spécialisés.Autre parent pauvre, la recherche, dont <strong>le</strong>sfonds sont insuffisants.En résumé, il faut mettre <strong>le</strong>s bouchéesdoub<strong>le</strong>s et la venue d’un troisième plan nepeut être que de bon augure.Sources : Ministère des Solidarités et de laCohésion socia<strong>le</strong>, Rapport de Valérie Létardsur <strong>le</strong> plan autisme 2008-2010


’’36 Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme 37Par Valérie Létard, Sénatrice du NordL’évaluation du plan autisme,quels enseignements ?En avril 2011, Roselyne Bachelot, Ministredes Solidarités et de la cohésion socia<strong>le</strong>,m’a demandé d’évaluer <strong>le</strong> plan autisme2008-2011, que j’avais lancé avec el<strong>le</strong>lorsque j’étais Secrétaire d’Etat à la Solidarité.J’ai accepté cette mission sanshésiter car quiconque a, un jour, travailléavec <strong>le</strong>s associations de famil<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong>champ du handicap reste toujours concernépar l’avenir de nos politiques publiquesà <strong>le</strong>ur encontre.L’autisme est un sujet grave : 5 à 8 000enfants naissent chaque année atteints d’autismeou de troub<strong>le</strong>s envahissants du développement,600 000 personnes dans notrepays vivent avec ce handicap. La détressedes parents confrontés à ce handicap chezun de <strong>le</strong>urs enfants est immense et, malheureusement,notre pays accuse encore untrop grand retard dans l’accompagnementdes personnes autistes.Le plan lancé en 2008 a permis certainesavancées : une définition partagée del’autisme, la création de structures expérimenta<strong>le</strong>squi ont diffusé l’intérêt d’unaccompagnement par des méthodes éducativeset comportementa<strong>le</strong>s. En chiffres,cela a représenté 187 millions d’euros, lacréation de 4 100 nouvel<strong>le</strong>s places et de28 structures expérimenta<strong>le</strong>s.Mais l’effort entrepris s’est révélé insuffisant.Le plan a enregistré de nombreuxretards dans sa mise en œuvre alors mêmeque <strong>le</strong>s besoins restent criants. Il n’a pasmis fin au parcours du combattant des famil<strong>le</strong>sdont l’enfant naît « différent ». Onne peut pas oublier qu’aujourd’hui il faut,en moyenne, en <strong>France</strong>, dix mois à unefamil<strong>le</strong> pour obtenir un rendez-vous auprèsd’un centre de diagnostic spécialisé.On ne peut pas oublier aussi qu’une fois <strong>le</strong>diagnostic posé, un enfant attend ensuite,en moyenne, deux ans pour accéder à unestructure spécialisée. Pour de trop nombreuxenfants, tous ces délais, c’est uneréel<strong>le</strong> perte de chance… L’accès précoceau dépistage, une place dans une structurespécialisée, un plan d’aides adapté restentencore trop inéga<strong>le</strong>ment accordés, nonseu<strong>le</strong>ment en fonction des régions, maisaussi du fait de l’existence des bons relaiset de personnes bien formées.Plusieurs mesures listées par <strong>le</strong> plan n’ontpas été suivies d’effet : la formation, laprise en charge des adultes, l’accompagnementdans l’emploi et <strong>le</strong> logement,l’accès aux soins somatiques.En 5 priorités et 50 préconisations, monrapport propose donc de relancer fortementla dynamique de ce plan.Il s’agit tout d’abord de relancer la gouvernancedu plan en réactivant un comiténational où soient présents tous <strong>le</strong>s acteurs,associations et institutionnels. Jesuggère de lui adjoindre deux groupes :un comité scientifique et un groupe detravail sur la formation et <strong>le</strong>s métiers del’autisme.Mon rapport met aussi en avant <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> essentieldu niveau régional, car c’est là quel’on peut <strong>le</strong> plus finement connaître <strong>le</strong>sbesoins et, par des appels à projets spécifiques,orienter efficacement <strong>le</strong>s moyens.L’Agence régiona<strong>le</strong> de santé doit, danschaque région, promouvoir <strong>le</strong>s projets <strong>le</strong>splus innovants et assurer la mutualisationdes expérimentations <strong>le</strong>s plus intéressantes.C’est particulièrement vrai pouraccompagner <strong>le</strong>s adultes autistes encoretrès mal dépistés et pris en charge souventde manière inadaptée.Ensuite, il faut s’appuyer sur l’état desconnaissances partagé et la définition del’autisme validée par la HAS, et sa déclinaisonà travers toutes <strong>le</strong>s recommandationssur <strong>le</strong> dépistage et <strong>le</strong>s bonnespratiques pour relancer <strong>le</strong>s études épidémiologiques,la recherche fondamenta<strong>le</strong>et appliquée. La recherche doit aussis’étendre à l’évaluation des stratégies etdes méthodes d’accompagnement.Troisième axe essentiel, la formation.L’évolution de l’état des connaissancesdoit trouver sa traduction très concrètedans l’adaptation de l’offre de formation,initia<strong>le</strong> et continue, de tous <strong>le</strong>s professionnels,mais aussi des famil<strong>le</strong>s. L’objectifest de multiplier l’offre de formationpour disposer de personnel qualifié etformé aux méthodes éducatives.Quatrième axe, offrir des parcours de viecohérents. Du dépistage à l’âge adulte,nous devons être capab<strong>le</strong>s d’offrir unparcours adapté en réduisant <strong>le</strong>s ruptures.La recommandation HAS/ANESM du8 mars 2012 va tout à fait dans ce senspuisqu’el<strong>le</strong> recommande « un projet personnaliséd’interventions précoces, globa<strong>le</strong>set coordonnées pour chaque enfant »qui donne une « vraie place à l’enfant età sa famil<strong>le</strong> ». Ce parcours de vie démarreau moment du dépistage et du diagnostic<strong>le</strong> plus précoce possib<strong>le</strong>, il doit ouvrir àdes prises en charge adaptées en structuresi nécessaire mais aussi un accès à l’éco<strong>le</strong>ordinaire chaque fois que possib<strong>le</strong>. Il doitse poursuivre à l’âge adulte, en innovantnotamment sur <strong>le</strong>s formes d’accompagnementvers l’emploi et <strong>le</strong> logement et sur<strong>le</strong>s modes d’accueil des jeunes adultes,puis des adultes vieillissants.Enfin, il faut diversifier <strong>le</strong>s approches àproposer aux personnes atteintes d’autismeou de TED et offrir une pa<strong>le</strong>tte desolutions, que ce soit en termes d’accueilou de méthodes d’accompagnementparce que ces troub<strong>le</strong>s sont divers et différentspour chaque personne. Il n’y apas de réponse unique, mais un spectrede réponses utilisant toute la pa<strong>le</strong>tte,des méthodes éducatives et comportementalistesà la prise en charge médica<strong>le</strong>quand nécessaire. Il faut sortir deslogiques monogames.Ce rapport, je l’ai voulu comme unaiguillon pour dire aux pouvoirs publics :il est grand temps de remettre l’ouvragesur <strong>le</strong> métier. La grande cause nationa<strong>le</strong>sur l’autisme en 2012 va nous y aider carel<strong>le</strong> est un formidab<strong>le</strong> moyen de sensibiliserl’opinion et de la mobiliser autourd’un handicap qui reste une grande souffrancepour la personne atteinte et poursa famil<strong>le</strong>.’’Par André Montané, Vice-Président du Conseil Général de l’Ariège, Membre de la Commission« politiques socia<strong>le</strong>s et familia<strong>le</strong>s » de l’Assemblée des Départements de <strong>France</strong> (ADF)Les départements et la prise en chargede l’autismeLes départements n’interviennent pas dans<strong>le</strong> champ des enfants, des ado<strong>le</strong>scents et desjeunes majeurs de 18 à 20 ans en situationde handicaps, dont <strong>le</strong>s personnes atteintesd’autisme. Ces classes d’âges relèventde dispositifs aujourd’hui pilotés par <strong>le</strong>sAgences Régiona<strong>le</strong>s de Santé avec un financementexclusif de l’assurance maladie.C’est à partir de 20 ans que <strong>le</strong>s départementsont la responsabilité, depuis l’acteI de la décentralisation de 1984, de mettreen œuvre une offre diversifiée de réponsesen matière d’hébergement et d’accompagnementà la vie socia<strong>le</strong>. Ils ont intérêt àdévelopper cette offre pour répondre auxbesoins, puisque <strong>le</strong> dispositif dit « amendementcreton » <strong>le</strong>ur fait financer <strong>le</strong>s maintiensen établissements pour ado<strong>le</strong>scents,et ce à des coûts beaucoup plus é<strong>le</strong>vés queceux constatés dans <strong>le</strong>s établissements pouradultes re<strong>le</strong>vant de <strong>le</strong>ur compétence…Les départements ont assumécette compétence et ont accru l’offreEn 1985, il y avait 39 009 places et, en1998, 75 946 places, soit une augmentationde 94 %. Le nombre de places est ensuitepassé de 91 824 en 2001 à 117 801 en 2009,soit une augmentation de 28,29 %.Au niveau des financements, <strong>le</strong>s dépensesnettes d’aide socia<strong>le</strong> à l’hébergement desadultes handicapés sont passées de 609,8millions d’euros en 1984 à 1 906 millionsd’euros en 2000, soit un trip<strong>le</strong>ment de ladépense. Puis, de 2 150 millions d’euros en2001 à 3 660 millions en 2009, soit 70,23 %d’augmentation. Parallè<strong>le</strong>ment, <strong>le</strong> coût dela place augmentait de 33 %, tandis que,sur cette même période, l’inflation a étéde 17 %.Le partage des responsabilités entre<strong>le</strong>s départements et l’assurance maladieLes soins restent à la charge de l’assurancemaladie. Si la conception initia<strong>le</strong> des soinsdans <strong>le</strong>s établissements et services pouradultes handicapés, et en particulier <strong>le</strong>sautistes, était plus large que dans <strong>le</strong> secteurdes personnes âgées, puisqu’ils englobaient<strong>le</strong> « cure » : soigner, et <strong>le</strong> « care » :prendre soins… Les tendances lourdesactuel<strong>le</strong>s consistent à réduire ce que nostechnocrates appel<strong>le</strong>nt « <strong>le</strong> panier de soins »au seul « cure »…Afin de limiter <strong>le</strong>s créations de places deMaison d’Accueil Spécialisé (MAS) pouradultes handicapés financées à 100 % parl’assurance maladie, l’Etat a impulsé, àpartir de 1991, la création expérimenta<strong>le</strong>des Foyers à Doub<strong>le</strong> Tarification (FDT)légalisés par la loi du 2 janvier 2001 sousl’appellation de Foyers d’Accueil médicalisé(FAM), qui sont financés par l’aidesocia<strong>le</strong> départementa<strong>le</strong> et <strong>le</strong> solde parun forfait global « soins » à la charge del’assurance maladie.Les MAS sont financés à 100 % par l’assurancemaladie alors que <strong>le</strong>s FAM sontfinancés par l’assurance maladie de façonforfaitaire et ces forfaits soins ne couvrentque 30 % des charges. Aussi, l’aidesocia<strong>le</strong> à l’hébergement des personneshandicapées finance 70 % des FAM sousla forme d’un prix de journée afférent àl’hébergement et à l’accompagnement à lavie socia<strong>le</strong>.Les programmes nationaux de créationsde places nouvel<strong>le</strong>s ont vu <strong>le</strong>s quotespartsrespectives entre <strong>le</strong>s places MAS et<strong>le</strong>s places de FAM - qui accueil<strong>le</strong>nt despublics très similaires selon différentesétudes - passer de 80 % de places de MASet 20 % de places de FAM, à 50-50 %.Cette situation, si el<strong>le</strong> perdure, va entraînerdes blocages de la part des départementsdont la situation financière est particulièrementdégradée.Les appels à projetsAvec la loi « HPST » (Hôpital, Patients,Santé, Territoires), <strong>le</strong>s transformationsd’établissements et services existants avecdes requalifications de places sont subordonnéesau résultat positif d’un appel àprojet pour qu’un nouvel agrément puissese substituer au précédent devenu obsolète,ce qui est très regrettab<strong>le</strong>. Aussi, pour menerà bien des transformations d’agrémentd’établissements existants dont tout unchacun s’accorderait, là encore, p<strong>le</strong>inementsur <strong>le</strong> bien-fondé, il faut prendre <strong>le</strong> risqued’observer des appels à projets de pureforme que <strong>le</strong> juge censurera.Aussi, la requalification des places dansdes structures pour jeunes handicapés accueillantdes ado<strong>le</strong>scents de plus de 16 anset des jeunes majeurs re<strong>le</strong>vant de l’amendement« Creton », en place de MAS ou deFAM, n’est pas permise puisque <strong>le</strong>s établissementspour jeunes handicapés relève du2° de l’artic<strong>le</strong> L.312-1 tandis que <strong>le</strong>s MAS et<strong>le</strong>s FAM relèvent du 7° de ce même artic<strong>le</strong>.Pourtant, ces établissements peuvent accueillirà partir de 16 ans, et il y a de jeunesmajeurs en « amendement Creton » en attentede places. Il en va de même pour latransformation d’IMpro en ESAT…Il est pourtant tout aussi pertinent et légitimede procéder à des transformations etdes requalifications de places d’IME pourado<strong>le</strong>scents autistes en MAS, ce qui est impossib<strong>le</strong>parce n’étant pas dans la même catégorie,que des places d’IME en ITEP ouCMPP re<strong>le</strong>vant juridiquement de la mêmecatégorie.Par contre, <strong>le</strong>s centres de ressources re<strong>le</strong>vanttous du 11° de cet artic<strong>le</strong> L.312-1pourraient se transformer sans appels àprojets, alors que <strong>le</strong>urs modes de fonctionnementet <strong>le</strong>urs missions sont très différents.En effet, par exemp<strong>le</strong>, il n’y a rien decommun entre une CLIC pour personnesâgées et un UEROS pour traumatisés crâniensà la suite d’accidents de la route…Le législateur, suite aux é<strong>le</strong>ctions de juinprochain, devrait réexaminer ces questionsqui ont fait l’objet d’un amendement proposépour l’ADF par <strong>le</strong> Sénateur Yves Daudigny,président du Conseil général de l’Aisneet président de la commission « politiquessocia<strong>le</strong>s et familia<strong>le</strong>s » de l’ADF.


’’38 Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme 39Par Daniè<strong>le</strong> Langloys, Présidente d’<strong>Autisme</strong> <strong>France</strong>Les attentes des famil<strong>le</strong>sCe sont <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s qui, depuis longtemps,militent pour que <strong>le</strong> diagnostic et l’accompagnementadapté de <strong>le</strong>urs enfantsfassent des progrès significatifs. Au seind’<strong>Autisme</strong> <strong>France</strong>, c’est depuis 1989 que<strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s de l’association demandent <strong>le</strong>droit à l’éducation de <strong>le</strong>ur enfant, <strong>le</strong> droit àla vie en milieu ordinaire avec l’accompagnementnécessaire, <strong>le</strong> droit d’accéder auxsoins somatiques, etc…Dans <strong>le</strong> domaine de l’autisme, la <strong>France</strong>est sortie de la Préhistoire en 1995 avec lacirculaire Veil. L’entrée de l’autisme dans<strong>le</strong> champ du handicap date de 1996 grâceà Jean-François Chossy, mais il a fallu quela <strong>France</strong> se fasse condamner trois fois en2004, 2007, 2008, par <strong>le</strong> Conseil de l’Europe,à l’initiative d’<strong>Autisme</strong> Europe qui arelayé une plainte d’<strong>Autisme</strong> <strong>France</strong>, pourdiscrimination à l’égard des personnes autistes,pour que quelques progrès voient <strong>le</strong>jour : recommandations diagnostiques surl’autisme en 2005, plans autisme de 2005-2007, puis de 2008-2010, naissance desCentres de Ressources <strong>Autisme</strong> en 2006.Une des mesures-phare du plan autisme2008-2010 a été la publication d’un étatdes connaissances sur l’autisme en janvier2010. Soyons clairs : <strong>le</strong> peu qui a étéobtenu pour <strong>le</strong>s personnes autistes l’a étépar <strong>le</strong>s luttes incessantes des famil<strong>le</strong>s.Les attentes restent donc immenses aubout de 30 ans de retard dans <strong>le</strong> champ del’autisme, de méconnaissance du problèmede santé publique, de laisser faire face àla mainmise de la psychanalyse sur l’autisme,mainmise qui, en maintenant unevision erronée et obsolète de l’autisme,a empêché, pour des générations de personnesautistes, l’accès aux formes d’autonomiedigne qui étaient pourtant possib<strong>le</strong>s.Les attentes dans <strong>le</strong> domainedu diagnosticLes recommandations diagnostiques d’octobre2005 de la Fédération Française dePsychiatrie et de la Haute Autorité deSanté, <strong>le</strong>s deux plans autisme successifs,ont permis des progrès dans <strong>le</strong> domainedu dépistage et du diagnostic des enfants.Mais il reste beaucoup à faire. Beaucoupde médecins ne sont pas formés à l’autisme,y compris en pédopsychiatrie, etun certain nombre refusent de diagnostiquerde manière juste. La première demandedes famil<strong>le</strong>s et donc un diagnosticconforme à la CIM10, comme partoutdans <strong>le</strong> monde ; or, en <strong>France</strong> <strong>le</strong>s diagnosticserronés de psychose infanti<strong>le</strong>, troub<strong>le</strong>de la personnalité, dysharmonie évolutive,troub<strong>le</strong> relationnel, troub<strong>le</strong> psychoaffectif,retard global de développement,troub<strong>le</strong> de l’attachement, etc… sont trèsfréquents.Le diagnostic de troub<strong>le</strong>s du comportementest redoutab<strong>le</strong> : <strong>le</strong> mot ne convientpas, car ce ne sont pas des troub<strong>le</strong>s innés,mais acquis, engendrés par <strong>le</strong>s difficultésdes personnes autistes à comprendre <strong>le</strong>urenvironnement. Il est confondu avec <strong>le</strong>diagnostic de troub<strong>le</strong>s des conduites etvaut souvent à nos enfants l’orientationen ITEP (Institut thérapeutique, éducatifet pédagogique), où ils sont en danger.Le diagnostic est pourtant un droit, reconnupar la loi.Une majorité d’enfants et l’immense majoritédes adultes n’ont jamais eu de diagnosticposé correctement. Ce défaut dediagnostic obère gravement <strong>le</strong>s chancesd’éducation adaptée qui peuvent donneraux enfants concernés <strong>le</strong>s outils de communicationet de socialisation nécessairesà une meil<strong>le</strong>ure qualité de vie et d’autonomiepour eux. Il a laissé à l’abandon desgénérations d’adultes dont la conditionest hélas maintenant souvent tragique.Il faut donc se donner <strong>le</strong>s moyens dediagnostiquer à tous <strong>le</strong>s âges : formationdes personnels, création d’équipesmobi<strong>le</strong>s pour diagnostiquer dans <strong>le</strong>s établissementslà où sont, de fait, beaucoupde personnes sans diagnostic, créationd’équipes de proximité pour éviter lasaturation des Centres de Ressources<strong>Autisme</strong>, et diminuer <strong>le</strong>s délais d’attentepour un diagnostic qui peuvent al<strong>le</strong>rjusqu’à 18 mois.La sensibilisation à l’autismeCette mesure, prévue dans <strong>le</strong> plan autisme,n’a jamais vu <strong>le</strong> jour. C’est pourtantune urgence. Le grand public ignorece qu’est l’autisme, et ne manifeste doncpas sa générosité pour ce handicap,comme il <strong>le</strong> fait pour d’autres causes.L’autisme reste un tabou, un handicapqui fait peur, comme <strong>le</strong> dit Jean-FrançoisChossy dans son travail à propos duregard sur <strong>le</strong> handicap (décembre 2011).Il faut donc donner des clés de compréhensionde ce handicap, l’expliquer simp<strong>le</strong>ment,donner aussi des outils d’aménagementde l’environnement apaisantspour la personne autiste, apprendre cequ’il faut dire ou faire, ce qu’il ne fautsurtout pas faire, et rendre chacun ensomme un peu compétent. C’est ainsiqu’une personne autiste peut devenirun citoyen, certes un peu différent desautres, mais un citoyen dans la cité.© JB MariouIl faut regretter que <strong>le</strong> travail de sensibilisationrepose entièrement pour <strong>le</strong> momentsur <strong>le</strong>s initiatives des associations :brochure dépistage, brochure scolarisation,carte d’accompagnement, enattendant d’autres productions, ont étéconçues, produites et diffusées par <strong>Autisme</strong><strong>France</strong>, Autistes sans Frontières et<strong>le</strong> Col<strong>le</strong>ctif <strong>Autisme</strong>.Il faut aussi cib<strong>le</strong>r tous <strong>le</strong>s publics potentiels: enseignants, personnels de la petiteenfance, magistrats, policiers, pô<strong>le</strong>semplois, etc…La formationC’est une attente majeure des famil<strong>le</strong>s.Souvent <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s deviennent trèscompétentes en autisme, pour ne pas diredes experts : cette expertise profane avaitd’ail<strong>le</strong>urs été reconnue dans un rapportde l’ANCREAI (Association nationa<strong>le</strong>des centres régionaux pour l’enfance etl’ado<strong>le</strong>scence inadaptée). El<strong>le</strong>s sont parfoisplus compétentes que beaucoup deprofessionnels, ce qui crée une situationdiffici<strong>le</strong>.© JB MariouLes recommandations de bonnes pratiquesen autisme qui viennent de sortir <strong>le</strong> disentclairement : ce sont <strong>le</strong>s interventions globa<strong>le</strong>s,coordonnées qui sont efficaces, et ilfaut qu’el<strong>le</strong>s soient cohérentes, donc relayéesdans tous <strong>le</strong>s lieux où vit l’enfantou la personne autiste. Il faut donc queprofessionnels et famil<strong>le</strong>s soient formésà l’autisme, pas forcément de la mêmemanière, mais suffisamment pour que lapersonne autiste se sente soutenue de manièreefficace dans ses capacités d’adaptationà notre environnement ou dans <strong>le</strong>saménagements de l’environnement à sesdifficultés.Toutes <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s ne développent pas<strong>le</strong>s mêmes compétences pour accompagner<strong>le</strong>urs enfants : il faut donc en aidercertaines plus que d’autres et y mettre <strong>le</strong>smoyens suffisants ; avoir un enfant autistepeut représenter un défi à la parentalité,l’aide est donc souvent nécessaire.La formation initia<strong>le</strong> et continue de tous<strong>le</strong>s professionnels susceptib<strong>le</strong>s d’accueillirnos enfants devrait être une prioritédu prochain plan autisme : on en esttrès loin et c’est une difficulté majeurepour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s, qui doivent souventchercher et financer par el<strong>le</strong>s-mêmes <strong>le</strong>sprofessionnels compétents nécessaires :psychologues, auxiliaires de vie scolaire,entre autres.La vie en milieu ordinaireUne personne autiste doit vivre <strong>le</strong> pluspossib<strong>le</strong> en milieu ordinaire : c’est aussiune attente très forte des famil<strong>le</strong>s.El<strong>le</strong> doit être déjà scolarisée, ce qui estencore peu <strong>le</strong> cas. L’orientation est souventlargement proposée vers un InstitutMédico-Educatif (IME), y compris pourdes enfants de bon niveau, car <strong>le</strong>s éco<strong>le</strong>set <strong>le</strong>urs enseignants restent encore massivementréticents à l’inclusion scolaire.Trouver et garder une éco<strong>le</strong> accueillantepeut être un exercice diffici<strong>le</strong>. Les partenariatsde ces IME avec <strong>le</strong>s établissementsscolaires sont pourtant rares etla scolarisation en interne plus que rudimentaire.Il y a là un véritab<strong>le</strong> gâchisalors qu’avec <strong>le</strong>s moyens humains d’AVS(auxiliaire de vie scolaire) etde SESSAD (Service d’éducationspécialisée et de soinsà domici<strong>le</strong>), un nombre trèsimportant d’enfants pourraitêtre scolarisé. Mais <strong>le</strong>s AVSsont mal formés à l’autisme(un modu<strong>le</strong> de 3 heures <strong>le</strong>plus souvent), <strong>le</strong>s enseignantsne <strong>le</strong> sont que sur <strong>le</strong> mode duvolontariat, <strong>le</strong>s rares SESSADde bon niveau sont pris d’assautet ont des listes d’attenteimpressionnantes. La formationprofessionnel<strong>le</strong> adaptéeest quasi inexistante, <strong>le</strong>s rares ULIS dédiéesne prévoient en effet pas la suite del’insertion professionnel<strong>le</strong>.L’insertion professionnel<strong>le</strong> en milieu ordinaireserait tout à fait possib<strong>le</strong>, mais trèsrare, car il faut souvent une aide humaine,un aménagement du poste de travail, etune sensibilisation à l’autisme des lieuxde travail. Habiter dans la cité pose <strong>le</strong>smêmes problèmes.La création de lieux d’accueil ennombre et en qualité suffisantsL’offre est pauvre et inadaptée.Faute de diagnostic, beaucoup d’enfantset d’adultes sont dans des lieux dédiésaux personnes handicapées menta<strong>le</strong>salors que 70 % des personnes autistesn’ont pas de déficience intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong>.Trouver un lieu d’accueil est un véritab<strong>le</strong>parcours du combattant pour <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>set un nombre significatif exi<strong>le</strong> <strong>le</strong>ur enfanten Belgique. Beaucoup de structures proposentdes activités occupationnel<strong>le</strong>s oubeaucoup de temps vides, alors que <strong>le</strong>senfants et adultes ont besoin de planningset d’activités structurés dans l’espace et <strong>le</strong>temps. La psychanalyse exerce une empreinteencore forte sur <strong>le</strong>s personnels :pour un psychanalyste, l’enfant autistea choisi d’être autiste, et il est diffici<strong>le</strong>de faire valoir que la personne autistea besoin de stimulation et d’outils decommunication et de socialisation pourprogresser.Les difficultés de comportement, souventévitab<strong>le</strong>s si l’environnement était structuréet adapté, va<strong>le</strong>nt aux enfants commeaux adultes l’exclusion de ces structures,en violation par ail<strong>le</strong>urs de la loi de 2005.Les famil<strong>le</strong>s vivent ainsi dans la peurpermanente.La peur est d’autant plus grande que<strong>le</strong>s difficultés de comportement, fauted’avoir été anticipées, se terminent souventpar des hospitalisations parfoisd’office, et des neuro<strong>le</strong>ptiques parfois àdoses é<strong>le</strong>vées, qui font des ravages surdes personnes vulnérab<strong>le</strong>s dont on saitmaintenant que <strong>le</strong>s problèmes viennentsouvent de fonctionnements sensoriels etcognitifs altérés. Un rapport de l’IGAS demai 2011 fait valoir dans une annexe que56 % des adultes à l’iso<strong>le</strong>ment en psychiatriedepuis plus de 30 jours sontautistes : la situation est dramatique.Les attentes des famil<strong>le</strong>s reposent doncd’abord sur <strong>le</strong> respect de droits essentiels,largement bafoués quand ils’agit de citoyens autistes : droit audiagnostic, droit d’accéder au dossiermédical, droit à l’éducation et à la scolarisation,droit d’accès aux soins somatiques(qui doivent être adaptés), droit defaire valoir <strong>le</strong>s deux piliers de la loi de2005 : l’accessibilité et la compensation(par des aides humaines et techniques),droit de vivre dans la cité avec l’aidehumaine nécessaire, si el<strong>le</strong> est nécessaire,droit à une vie privée, droit aulibre choix des prestations, alors quec’est rarement <strong>le</strong> cas, l’offre étant trèsmajoritairement occupationnel<strong>le</strong> et/oupsychanalytique, droit de faire valoirl’artic<strong>le</strong> 67 de la loi de 2005 qui faitobligation à l’Etat d’ouvrir en nombresuffisant <strong>le</strong>s lieux d’accueil pour <strong>le</strong>sadultes, sans limitation de moyens, droità la bientraitance.Les recommandations de bonnes pratiquesqui viennent de sortir mettent l’accentsur l’éducation précoce et intensive,sur l’évaluation des compétences et difficultés,l’existence de projets personnalisés,<strong>le</strong> rô<strong>le</strong> des personnes concernées etde <strong>le</strong>urs famil<strong>le</strong>s.C’est un chantier qui attend <strong>le</strong>s autorités detutel<strong>le</strong> pour mettre la <strong>France</strong> aux normeséducatives en matière d’autisme.


’’40 Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autisme 41Par Bertrand Jacques, Administrateur de la Fondation <strong>Autisme</strong> - Agir et Vivre l’<strong>Autisme</strong>Sous l’égide de la Fondation de <strong>France</strong>Des voies innovantes pour préparer l’avenirMieux comprendre pour mieux agirLa somme des connaissances scientifiquesest considérab<strong>le</strong> au niveau mondial et permetde caractériser de manière de plus enplus fine ce troub<strong>le</strong> neurodéveloppementalqu’est l’autisme. Pourtant, et malgré<strong>le</strong>ur nombre, <strong>le</strong>s papiers de recherche sontrarement conclusifs. Dans ce dossier, c’estce que souligne <strong>le</strong> Dr Nadia Chabane autravers de son panorama des connaissancessur l’autisme.C’est d’ail<strong>le</strong>urs aussi la raison principa<strong>le</strong>pour laquel<strong>le</strong> on évoque souvent <strong>le</strong>manque de certitudes scientifiques en matièred’autisme. Une tel<strong>le</strong> affirmation estjuste mais el<strong>le</strong> empêche de capitaliser surl’énorme somme de connaissances accumuléespar la communauté scientifiquemondia<strong>le</strong> depuis une trentaine d’années.Une mosaïque de causesrait notamment <strong>le</strong> cas des infections chroniques,comme <strong>le</strong> suggèrent <strong>le</strong>s travaux deGarth Nicolson.Les quelques lignes qui précèdent permettentde comprendre que derrière <strong>le</strong> handicapqu’est l’autisme se cache une véritab<strong>le</strong>mosaïque de causes, avec de multip<strong>le</strong>spathologies qui sont el<strong>le</strong>s-mêmes souventmultifactoriel<strong>le</strong>s.Prouver scientifiquementce que l’on sait déjàFace à une réalité aussi fragmentée etfractionnée, tenter une démonstration univoquepar une étude en doub<strong>le</strong> aveug<strong>le</strong> seheurte nécessairement à de grandes difficultés.Cette difficulté ne peut être surmontéeque si certaines des conclusionsscientifiques existantes sont acceptéescomme hypothèses de travail, malgré <strong>le</strong>urcaractère préliminaire, notamment pourcirconscrire <strong>le</strong>s thèmes de recherche. Travail<strong>le</strong>rsur de tel<strong>le</strong>s bases permettra effectivementde réaliser des études en doub<strong>le</strong>aveug<strong>le</strong>, cette fois sur des cohortes homogèneset sur des sujets très précis.Les zones cartographiées en blanc sont <strong>le</strong>s dernières à êtremyélinisées, norma<strong>le</strong>ment entre la naissance et l’âge de2 ans… sauf accident…Il s’agit d’un changement d’attitude assezfondamental en matière de rechercheoù, <strong>le</strong> plus souvent, une étude n’est engagéedans une direction donnée que surla base de faits entièrement avérés. C’estpour cela qu’il nous paraît nécessaire depréciser ce changement de paradigmecar il nous paraît essentiel en matière derecherche sur l’autisme.Il sera alors possib<strong>le</strong> de prouver par unedémarche strictement scientifique ce quela communauté scientifique internationa<strong>le</strong>sait déjà de manière empirique etsans toujours disposer de preuves formel<strong>le</strong>s.La mosaïque de causalités pourraêtre abordée de manière systématique,avec des études très circonscrites, unchamp d’investigation assez étroit, maisL’autisme n’est pas une pathologie en tantque tel<strong>le</strong> mais une manifestation communeà un certain nombre de pathologies sousjacentes.On pourrait aussi dire qu’il nes’agit pas d’une maladie mais d’un symptômecommun à plusieurs maladies.Les pathologies sous-jacentes semb<strong>le</strong>nt secaractériser par la rencontre d’un terraingénétique vulnérab<strong>le</strong> avec un facteur environnementalpré ou post natal. Parfois,la pathologie est entièrement génétique (Xfragi<strong>le</strong>, syndrome de Rett, etc.). Parfois,des facteurs entièrement environnementauxsemb<strong>le</strong>nt responsab<strong>le</strong>s de symptômesautistiques : intoxication au mercure (voir,entre autres, <strong>le</strong>s travaux de Sally Bernard),maladie de Lyme (voir <strong>le</strong>s publications deRobert Bransfield, etc.).En outre, certaines étiologies se révè<strong>le</strong>ntel<strong>le</strong>s-mêmes être multifactoriel<strong>le</strong>s. Ce sedesconclusions beaucoup plus fortes.Les programmes de recherche pourrontêtre plus courts et moins coûteux, car ilsseront plus ciblés.L’idée sous-jacente est donc de prouverde manière scientifique ce que l’on saitdéjà de manière empirique, pathologie parpathologie, facteur par facteur. Il s’agitd’une démarche minutieuse de rechercheappliquée qui permettra de récolter ce quela communauté scientifique internationa<strong>le</strong>a déjà semé.Causes ou conséquences ?L’une des difficultés en matière de syndromepluri-étiologiques est de distinguer<strong>le</strong>s causes des conséquences, <strong>le</strong>s causespremières des causes secondes, etc. Uneexcel<strong>le</strong>nte illustration concerne <strong>le</strong> débatsur l’efficacité des régimes alimentairesexcluant gluten et caséine préconisés àla suite des travaux du scientifique norvégienKal<strong>le</strong> Reichelt. Les protagonistesdu débat semb<strong>le</strong>nt se situer au niveau descauses de l’autisme alors que des notionsde gastroentérologie et d’immunologiemontrent que <strong>le</strong> sujet sesitue au contraire bien en avald’autres facteurs. Cette situationrend inopérante une approcheclassique en doub<strong>le</strong> aveug<strong>le</strong> quin’aurait pas au préalab<strong>le</strong> traité<strong>le</strong>s sujets d’amont. En ce quiconcerne <strong>le</strong>s régimes d’exclusions,la précision surprenantedes pré-diagnostics posés parKal<strong>le</strong> Reichelt par analyse depeptides urinaires devrait intrigueret motiver à poursuivre la recherchedans cette voie.La piste infectieuseParmi <strong>le</strong>s pistes prometteuses, il faut mentionnercel<strong>le</strong> des infections bactériennesintracellulaires dont semb<strong>le</strong>nt souffrirde nombreuses personnes atteintes d’autisme.Ayant au préalab<strong>le</strong> prouvé l’infection(chlamydia, borrelia ou mycoplasme),des médecins français ont traité des patientspar anti-infectieux. A l’occasion del’élimination de l’infection, ces médecinsont constaté une amélioration des symptômesautistiques. Dans 50 % des cas,l’amélioration semb<strong>le</strong> rapide et spectaculaire(70 % chez <strong>le</strong>s enfants de moinsde 7 ans), avec 30 % de progrès plus <strong>le</strong>ntsmais néanmoins significatifs. Pour <strong>le</strong> moment,ces résultats issus de la pratique médica<strong>le</strong>n’ont pas été évalués dans <strong>le</strong> cadred’un protoco<strong>le</strong> de recherche formalisé.Toutefois, la piste ouverte milite fortementen faveur d’études scientifiques sur <strong>le</strong> sujet.Un projet est ainsi prévu sous la directiondu Pr Luc Montagnier (Nobel 2008).Dessin de cheval lors de l’admission dansl’une de nos « éco<strong>le</strong>s »La deuxième ressource génétiquemondia<strong>le</strong> à la disposition de la rechercheEnfin, il ne faudrait pas conclure cesquelques lignes sur la recherche scientifiquesans mentionner la banque dedonnées génétiques constituée par l’associationAgir et Vivre l’<strong>Autisme</strong>. Il s’agitd’échantillons sanguins conservés auGénéthon et concernant <strong>le</strong>s famil<strong>le</strong>s depersonnes atteintes d’autisme. A notreconnaissance, la tail<strong>le</strong> de cette banque dedonnées en fait la deuxième ressource mondia<strong>le</strong>.El<strong>le</strong> est à la disposition des équipesde recherche. El<strong>le</strong> a notamment permisde prouver des anomalies génétiquescommunes entre autisme et schizophrénie.Informer et former pour donner<strong>le</strong>s moyens de répondre au défiLa mutation de la réponse de la <strong>France</strong> enmatière d’autisme est en cours. El<strong>le</strong> nécessitedes moyens importants et prendradu temps. Malgré <strong>le</strong>s efforts importantsconsentis par <strong>le</strong>s pouvoirs publics et soulignéspar Mme Valérie Létard dans sonévaluation du Plan <strong>Autisme</strong> 2008-2010,<strong>le</strong>s ressources sont encore insuffisantes parrapport aux besoins. Or, il est mora<strong>le</strong>mentdiffici<strong>le</strong> de ne pas soutenir des milliers defamil<strong>le</strong>s pendant cette période de mutation.Pour faciliter la transition, la Fondation<strong>Autisme</strong> préconise la diffusion à un largepublic des informations et outils permettantune prise en charge adaptée des personnesatteintes d’autisme.Outre l’évolution progressive des pratiquesmédico-socia<strong>le</strong>s, la diffusion d’informationspermettra la mobilisation du tissusocial et associatif local, avec <strong>le</strong> concoursdes col<strong>le</strong>ctivités loca<strong>le</strong>s. Pour autant, cesacteurs ont besoin de pouvoir se référerà des recommandations scientifiquementfondées et dont l’application permettraune prise en charge sinon excel<strong>le</strong>nte, dumoins améliorée par rapport à la situationactuel<strong>le</strong>.A cet effet, la Fondation <strong>Autisme</strong> soutientdes conférences et des formations ouvertesau public ou destinées aux professionnelsde la Petite Enfance ou du mondemédical (médecins et infirmiers).Dépister <strong>le</strong> plus tôt possib<strong>le</strong>pour améliorer <strong>le</strong> pronosticIl est possib<strong>le</strong> de dépister <strong>le</strong>s troub<strong>le</strong>s autistiquesdès <strong>le</strong>s premiers mois de la vie,notamment avec des tests de poursuiteoculaire ou de contact visuel. Des outils depré-diagnostic sont utilisés chez la plupartde nos voisins européens, avec une efficacitéavérée, parfois depuis des dizainesd’années. La Fondation <strong>Autisme</strong> se faitl’avocate du pragmatisme et recommandel’adoption et la généralisation en <strong>France</strong>de ces outils, notamment du questionnairedu C.H.A.T. (« Check-list for Autism inTodd<strong>le</strong>rs »).Pour une prise en chargepluridisciplinaireIl est aujourd’hui avéré que <strong>le</strong>s prises encharge développementa<strong>le</strong>s et comportementa<strong>le</strong>ssont <strong>le</strong>s plus efficaces en matièrede prise en charge d’enfants autistes. Ainsi,dans <strong>le</strong>s établissements pilotes de l’associationAgir et Vivre l’<strong>Autisme</strong>, <strong>le</strong>s enfantsbénéficient d’une prise en charge A.B.A.(« Applied Behavioral Analysis » ou« Analyse appliquée du comportement »).Nous souhaitons néanmoins insister sur <strong>le</strong>fait que ces outils puissants doivent êtremis en œuvre dans <strong>le</strong> cadre d’approchespluridisciplinaires. Ils en sont <strong>le</strong> cœur et <strong>le</strong>fondement mais ils doivent être complétéspar d’autres approches et perspectives :utilisation transitoire du langage dessignes ou du PECS (communication parpictogrammes), intégration sensoriel<strong>le</strong>,enseignement Montessori, etc. Il est possib<strong>le</strong>de comparer cette approche pluridisciplinaireà un tronc d’arbre (l’A.B.A.)autour duquel on ferait courir du lierre (<strong>le</strong>sautres outils).Respect, échange et relationUne prise en charge intensive ne peut porterdu fruit que si el<strong>le</strong> dépasse la simp<strong>le</strong>acquisition de compétences et vise aup<strong>le</strong>in épanouissement de la personne. I<strong>le</strong>st essentiel que l’A.B.A. soit pratiquédans un esprit de respect et d’acceptationinconditionnel<strong>le</strong> des enfants. Leur personnalitéet <strong>le</strong>urs compétences ne pourrontse développer et s’épanouir que dansla relation et la confiance. Par ail<strong>le</strong>urs,l’enfant doit se sentir aimé, apprécié etrécompensé pour pouvoir fournir <strong>le</strong>sAprès 14 mois... (mêmes conditions de dessinque lors de l’admission)efforts nécessaires à ses progrès. Dans <strong>le</strong>s« éco<strong>le</strong>s » de l’association, l’ambiance estjoyeuse. Les p<strong>le</strong>urs sont rares et <strong>le</strong>s riresfréquents… chez <strong>le</strong>s adultes comme chez<strong>le</strong>s enfants.Déjà des résultats !30 mois après l’ouverture officiel<strong>le</strong> dupremier établissement pilote, deux enfantssont prêts à quitter cet environnementprivilégié pour une intégration àtemps comp<strong>le</strong>t à l’éco<strong>le</strong> ordinaire où ilsvont déjà pour 80 % de <strong>le</strong>ur temps, accompagnéschacun par un de nos collaborateurs.La transition devra se faire endouceur et sans doute sur plusieurs années,mais ces prémices sont extrêmementencourageantes.Mettre en œuvre une politiquede prévention : c’est déjà possib<strong>le</strong>Si la dimension génétique de l’autisme faitaujourd’hui l’objet d’un consensus, el<strong>le</strong> nesaurait expliquer l’actuel<strong>le</strong> explosion destroub<strong>le</strong>s envahissants du développement.L’actuel<strong>le</strong> « épidémie » semb<strong>le</strong> donc dueà des facteurs environnementaux dont certainsont été évoqués au début de ce texte.C’est une mauvaise nouvel<strong>le</strong> car cela signifieque notre société et notre mode devie sont à l’origine des troub<strong>le</strong>s envahissantsdu développement. Dans <strong>le</strong> mêmetemps, c’est aussi une bonne nouvel<strong>le</strong>car, si des facteurs environnementaux expliquentl’actuel<strong>le</strong> explosion des troub<strong>le</strong>sautistiques, cela signifie aussi que nouspouvons réduire la préva<strong>le</strong>nce en agissantsur ces facteurs environnementaux…Au bout de 21 mois... et ce n’est pas fini :nous en sommes aux dictées.Nous sommes aujourd’hui à un tournantdans la réponse de la <strong>France</strong> au problèmede l’autisme et des troub<strong>le</strong>s envahissantsdu développement. La Fondation <strong>Autisme</strong>souhaite proposer des solutionspour aujourd’hui ainsi que pour demain,afin que notre pays puisse répondre à cedéfi avec toute son énergie, ses connaissanceset sa créativité.www.fondation-autisme.orgcontact@fondation-autisme.org


’’42 Pour une politique globa<strong>le</strong> en faveur de l’autismeUn entretien avec Gwendal Rouillard, Député du Morbihan,Membre du Groupe d’études par<strong>le</strong>mentaire sur l’autismeNotre pays doit être au rendez-vousde la dignité humaine2012 marque une nouvel<strong>le</strong> étape dansl’appréhension de l’autisme en <strong>France</strong>.Label Grande Cause Nationa<strong>le</strong>, journéespar<strong>le</strong>mentaires, tout semb<strong>le</strong> réuni pourune prise de conscience attendue depuissi longtemps. Quel<strong>le</strong> traduction concrèteattendez-vous d’une tel<strong>le</strong> exposition ?D’une part, un débat démocratique digne,argumenté, contradictoire et si possib<strong>le</strong>serein, a contrario de l’omerta, de l’intimidation,parfois des menaces que nousconnaissons depuis trop longtemps.D’autre part, à travers ce débat, nous souhaitonsfavoriser la prise de conscience sur<strong>le</strong>s réalités quotidiennes des 600 000 personnesautistes en <strong>France</strong> sur 67 millionsdans <strong>le</strong> monde, mais aussi de <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> etdes acteurs concernés.Enfin, nous attendons <strong>le</strong> lancement d’untroisième plan autisme, qui tire à la fois <strong>le</strong>senseignements de ce débat et du rapportobjectif présenté par la sénatrice ValérieLétard, pour proposer une stratégie globa<strong>le</strong>,assortie d’actions concrètes.L’omerta qui a trop longtemps caractériséla question de l’autisme a, notamment, empêchéla col<strong>le</strong>cte de données précises etconsensuel<strong>le</strong>s sur <strong>le</strong> nombre de personnesautistes ou encore sur <strong>le</strong> coût pour la Sécuritésocia<strong>le</strong> des traitements psychanalytiquesdont l’efficacité est clairementremise en question par la HAS. Cette annéede Grande Cause Nationa<strong>le</strong> nous permettrad’obtenir, je l’espère vraiment, toute latransparence dont l’autisme a besoin.La <strong>France</strong> est en retard dans l’accompagnementdes personnes autistes, que cesoit en termes de diagnostic, de politiqueéducative, de formation, de financementde la recherche. Comment accélérer <strong>le</strong>schoses et s’assurer d’une prise en comptede l’autisme dans toute sa comp<strong>le</strong>xité ?Nous menons un combat dont l’enjeu estde permettre à la <strong>France</strong> de considérer, enfin,que l’autisme est un troub<strong>le</strong> neuro-développementa<strong>le</strong>t non une psychose. Et <strong>le</strong>srésistances sont nombreuses. Ce combatne vise en aucune manière <strong>le</strong>s personnes,mais <strong>le</strong>s pratiques qui n’ont pas tenucompte, au moins ces dix dernières années,des résultats scientifiques recueillisaux Etats-Unis et dans <strong>le</strong>s principaux paysdéveloppés. Il est invraisemblab<strong>le</strong> que la<strong>France</strong> ait été condamnée en 2004 par laCour Européenne des Droits de l’Hommepour absence de politique éducative, voiremaltraitance, et que certains prétendentencore aujourd’hui que <strong>le</strong>s traitementspsychanalytiques représentent l’alpha etl’oméga du suivi des personnes autistesen <strong>France</strong>.J’ai d’ail<strong>le</strong>urs salué, lors des Journées Par<strong>le</strong>mentairesdu 12 janvier dernier, <strong>le</strong>s proposde Roselyne Bachelot, Ministre desSolidarités et de la Cohésion Socia<strong>le</strong>, qui aclairement indiqué <strong>le</strong> souhait de la <strong>France</strong>de ne plus prendre en compte, y comprisen termes de remboursement, ces traitementsqui n’ont jamais fait <strong>le</strong>ur preuve.Le moment semb<strong>le</strong> enfin venu de tournerla page et d’ouvrir une nouvel<strong>le</strong> étape surla compréhension de l’autisme et de sesréalités dans notre pays.Depuis cette condamnation de la <strong>France</strong>,<strong>le</strong>s choses n’ont pas vraiment changé…A défaut de vrai changement, une prise deconscience est perceptib<strong>le</strong>. Il convient àcet égard de saluer <strong>le</strong>s efforts des responsab<strong>le</strong>spolitiques sincèrement impliquéssur ce sujet, et qui ont courageusement acceptéde se confronter à un mur. Car pourbeaucoup de ceux qui considèrent encorel’autisme comme une psychose, <strong>le</strong>s effortset <strong>le</strong>s propositions en faveur d’un diagnosticprécoce, d’une politique éducativegloba<strong>le</strong>, d’une meil<strong>le</strong>ure formation desprofessionnels, d’une recherche massive,sont inuti<strong>le</strong>s. C’est ainsi que <strong>le</strong>s personnesadultes autistes qui sont aujourd’hui dans<strong>le</strong>s hôpitaux psychiatriques ne progressentpas puisque l’autisme nécessite des stimu-lations permanentes dont ils ne bénéficientpas. Il nous faut donc un changement deconception, d’approche et de pratiquesà travers une politique globa<strong>le</strong> intégrantdiagnostic précoce, éducation, formation,recherche et clarification du rô<strong>le</strong> des acteurs.Un tel changement doit d’ail<strong>le</strong>ursprendre appui sur des corrélations entreétudes scientifiques et pratiques cliniquesqui, me semb<strong>le</strong>-t-il, représentent l’avenirde la cause des autistes dans notre pays.Dans ce que vous qualifiez de combatpour l’autisme, quel<strong>le</strong> est la place dupolitique ?Face à notre engagement politique et noscritiques objectives vis-à-vis de certainespratiques professionnel<strong>le</strong>s, quelques psychiatreset/ou psychanalystes mettent enavant notre incompétence et <strong>le</strong> risque demettre en difficulté la psychiatrie française.Pourtant, <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> du politique est de rappe<strong>le</strong>rque la dignité humaine prime sur tout,que la <strong>France</strong> est signataire des textes de laConvention des Droits de l’Homme et dela Convention Internationa<strong>le</strong> des Droits del’Enfant. Qu’il est aussi nécessaire de faireadopter des politiques publiques et despratiques en conformité avec ces textes.Face au niveau de souffrance socia<strong>le</strong> queje rencontre, notamment dans ma circonscription,j’estime qu’il est de notre responsabilitéde faire en sorte que notre pays soitau rendez-vous de la dignité humaine.En définitive, quel<strong>le</strong>s sont <strong>le</strong>s pistes prioritairespour une vraie politique globa<strong>le</strong>et sereine en faveur de l’autisme ?En cette période é<strong>le</strong>ctora<strong>le</strong>, notre responsabilitéde par<strong>le</strong>mentaire est d’interpel<strong>le</strong>rl’ensemb<strong>le</strong> des candidats sur cette réalitéde l’autisme pour que des décisions seprennent rapidement, une fois <strong>le</strong>s é<strong>le</strong>ctionsprésidentiel<strong>le</strong>s et législatives passées. Legroupe d’études par<strong>le</strong>mentaire sur l’autismeà l’Assemblée nationa<strong>le</strong> doit, pourcela, jouer p<strong>le</strong>inement son rô<strong>le</strong> et œuvrernotamment en faveur d’un troisième planautisme engagé et offensif. Car, au-delàde toute considération politique, <strong>le</strong>s personnesautistes et <strong>le</strong>ur famil<strong>le</strong> ont avanttout besoin de reconnaissance, de soutienactif et de solutions.Dépenser moinssans al<strong>le</strong>r loin33, rue du Commandant René Mouchotte75014 PARISTél. : 01 43 20 45 40Ouverture : Du lundi au samedi de 9h00 à 21h00 et <strong>le</strong> dimanche à partir de 9h00


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