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Communiquer pour résister (1940-1945) - Le Musée de la ...

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charge <strong>de</strong> l’appareil technique, constituée <strong>de</strong>jeunes étudiants à l’origine, se forme auprèsd’imprimeurs professionnels. Elle est enmesure <strong>de</strong> faire paraître un journal d’unegran<strong>de</strong> qualité formelle, qui commence àrivaliser avec celle <strong>de</strong> <strong>la</strong> presse légale.<strong>Le</strong>s contraintes restent très fortes. Un mêmejournal peut subitement revenir à un mo<strong>de</strong>d’impression peu é<strong>la</strong>boré <strong>pour</strong> un mêmenuméro ou d’un numéro à l’autre. La premièreexplication tient à <strong>la</strong> précarité <strong>de</strong>sfilières d’approvisionnement en matérielqui peine à répondre à <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s croissantes.La secon<strong>de</strong> est qu’un même numéropeut être imprimé simultanément dansplusieurs endroits, avec du matériel différent: ici, il est composé et tiré sur une presseprofessionnelle ; là, il est tapé à <strong>la</strong> machine,voire recopié à <strong>la</strong> main, et tiré à <strong>la</strong> ronéo.L’Humanité et La Vie ouvrière c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stinessont confrontées à ce genre <strong>de</strong> difficulté. Latroisième explication est l’efficacité <strong>de</strong> <strong>la</strong>surveil<strong>la</strong>nce policière. La chute d’une imprimeriepeut priver, temporairement ou définitivement,un journal <strong>de</strong> sa capacité d’impression.Au mieux, elle retar<strong>de</strong> sa parution,si le tirage peut être assuré en reconstituantune nouvelle imprimerie c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stine ou enpassant un accord avec l’équipe d’un autrejournal. Au pire, le journal disparaît et ce quireste <strong>de</strong> l’équipe s’intègre à une autre encoreen mesure d’agir. En juillet 1943, Défense <strong>de</strong><strong>la</strong> France doit surmonter l’arrestation <strong>de</strong>nombreux membres du mouvement, maisle journal reparaît en septembre. En 1944,Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France et Combat mutualisentleurs moyens d’impression, ce qui permetd’assurer <strong>la</strong> diffusion <strong>de</strong>s journaux en zonenord comme en zone sud, puis <strong>de</strong> compenser<strong>la</strong> chute <strong>de</strong> plusieurs imprimeries <strong>de</strong> Défense<strong>de</strong> <strong>la</strong> France au printemps.Imprimer un journal est une première étape.Il faut ensuite le diffuser. La tâche n’est pasévi<strong>de</strong>nte quand il s’agit d’écouler quelquescentaines ou quelques milliers d’exemp<strong>la</strong>iresen tentant <strong>de</strong> passer au travers <strong>de</strong> <strong>la</strong>surveil<strong>la</strong>nce policière, elle <strong>de</strong>vient beaucoupplus compliquée quand il s’agit <strong>de</strong> dizainesou <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> milliers <strong>de</strong> journaux.C’est en partie <strong>pour</strong> cette raison que <strong>de</strong>smouvements <strong>de</strong> résistance se structurentautour <strong>de</strong> journaux dont ils reprennent lenom. En zone nord, Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France doittrouver <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>pour</strong> diffuser un journaldont le nombre d’exemp<strong>la</strong>ires tirés augmenterapi<strong>de</strong>ment. En 1943, une partie <strong>de</strong>sVolontaires <strong>de</strong> <strong>la</strong> Liberté intègre le mouvementet participe dorénavant à <strong>la</strong> distribution<strong>de</strong> sa publication. Libération, Combat et <strong>Le</strong>Franc-Tireur en zone sud donnent naissanceà <strong>de</strong>s mouvements qui finissent par se rassemblerau sein <strong>de</strong>s Mouvements unis <strong>de</strong> <strong>la</strong>Résistance et diffusent les trois titres.La distribution <strong>de</strong>s journaux présente <strong>de</strong>ssimilitu<strong>de</strong>s avec celle <strong>de</strong>s tracts, et exposeaux mêmes risques. Par défi, le n° 36 <strong>de</strong>Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France est distribué au grandjour dans le métro à Paris le 14 juillet 1943.Une action spectacu<strong>la</strong>ire n’assure cependantpas une diffusion <strong>de</strong> masse. C’est <strong>pour</strong>quoile mouvement Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France se metà fabriquer <strong>de</strong>s faux timbres afin <strong>de</strong> pouvoirexpédier ses journaux par voie postale, sansmettre en danger ni ses diffuseurs ni sescapacités financières. Libération-Nord bénéficie<strong>de</strong> l’imp<strong>la</strong>ntation du mouvement à <strong>la</strong>SNCF, aux PTT ou dans l’administration <strong>pour</strong>faire parvenir son journal à ses responsablesrégionaux. <strong>Le</strong> Parti communiste peut, quantà lui, compter sur son réseau <strong>de</strong> militantsmalgré les coups portés par l’occupant alleman<strong>de</strong>t l’État français : près <strong>de</strong> 260 numérosparaissent <strong>de</strong> juillet <strong>1940</strong> à août 1944 enzone nord, près <strong>de</strong> 200 en zone sud, avec <strong>de</strong>svariantes régionales.Et ainsi <strong>la</strong> véritécircu<strong>la</strong>it <strong>de</strong> mainsen mainsLa presse c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stine en France se caractérisepar une gran<strong>de</strong> diversité. <strong>Le</strong>s titres, et leséquipes <strong>de</strong> résistants qui les animent, ont <strong>de</strong>spositionnements variés. Dans les mois quisuivent <strong>la</strong> défaite <strong>de</strong> <strong>la</strong> France, l’incertitu<strong>de</strong>domine. L’Humanité dénonce l’État françaiset sa politique c<strong>la</strong>irement anticommuniste.Pantagruel, en octobre <strong>1940</strong>, déc<strong>la</strong>re vouloirune victoire britannique mais conclut sonpremier éditorial par : « Pantagruel n’écrirajamais rien qui puisse être dicté par <strong>la</strong> haine<strong>de</strong> l’Allemagne ou <strong>la</strong> servilité envers l’Angleterre». Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France, comme Combat,montre d’abord une certaine indulgenceenvers le régime <strong>de</strong> Vichy et adopte une posture<strong>de</strong> neutralité. En juillet 1942, le journalfait encore figurer en première page : « NiAllemand, ni Russe, ni Ang<strong>la</strong>is. Ni nazisme,ni communisme. Français ». <strong>Le</strong>s ralliementsau général <strong>de</strong> Gaulle sont également progressifs.La plupart <strong>de</strong>s journaux ignorentTract « Résistez », début1943 (coll. Musée <strong>de</strong> <strong>la</strong>Résistance nationale/Champigny). Ce tractdiffusé par les services <strong>de</strong>propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Francecombattante associe lestrois organes<strong>de</strong> presse <strong>de</strong>s futursMouvements unis <strong>de</strong> <strong>la</strong>Résistance (<strong>Le</strong> Franc-Tireur,Combat, Libération).le chef <strong>de</strong>s Français libre jusqu’en avril 1942et sa déc<strong>la</strong>ration aux mouvements. À partir<strong>de</strong> ce moment, l’homme du 18 juin <strong>1940</strong> estconstamment cité dans toute <strong>la</strong> presse c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stinemais les journaux gar<strong>de</strong>nt leurs particu<strong>la</strong>ritéspar-<strong>de</strong>là les buts communs.La presse communiste défend <strong>la</strong> position duParti au niveau national et local, au regard<strong>de</strong> l’évolution <strong>de</strong> <strong>la</strong> situation internationale.<strong>Le</strong> Front national (sans lien avec le partipolitique actuel) est à l’origine d’une multitu<strong>de</strong>d’organes, souvent catégoriels (paysans,ouvriers, intellectuels, avocats, policiers,etc.), qui envisagent ce que sera l’aprèsguerre.Cette question préoccupe égalementLibération (nord) et Libération (sud). Certaineséquipes s’efforcent <strong>de</strong> prendre un peu <strong>de</strong>hauteur et <strong>de</strong> ne pas limiter leur réflexionà l’analyse factuelle. Défense <strong>de</strong> <strong>la</strong> France etUne répression précoce et tenace<strong>Le</strong>s polices alleman<strong>de</strong> et française se préoccupentdès les <strong>de</strong>rniers mois <strong>de</strong> <strong>1940</strong> à l’écritc<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stin : les saisies, <strong>la</strong> découverte <strong>de</strong> centresd’impression, les arrestations sont relevéesavec soin dans les rapports <strong>de</strong> police. Parmi lespremières victimes <strong>de</strong> <strong>la</strong> répression se trouventceux qui ont assuré les premières publicationsc<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stines : André Burgard (qui réalise lepremier Valmy), décapité à Cologne en 1944 ;Gaston Charpentier (qui réalise <strong>Le</strong> Gaulliste),fusillé en octobre 1942 ; Jean <strong>Le</strong>bas (qui <strong>la</strong>nceL’Homme Libre), mort en déportation ; PaulPetit (qui édite La France continue), fusillé en1944 ; Raymond Deiss (Pantagruel) décapité àCologne en 1944 ; Boris Vildé, Anatole <strong>Le</strong>vitsky,Léon Marie Nordmann (responsables du Musée<strong>de</strong> l’Homme qui <strong>la</strong>nce Résistance), fusillés en1942.La presse communiste, particulièrement traquée,perd dès 1941 <strong>de</strong>s journalistes éminents– Gabriel Péri, Lucien Sampaix – et <strong>de</strong>s responsables<strong>de</strong> l’édition c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stine – Jean Cate<strong>la</strong>s,André Bréchet – les <strong>de</strong>ux premiers fusillés parles Allemands en décembre 1941, les secondscondamnés par les Sections spéciales <strong>de</strong> l’Étatfrançais, guillotinés en août 1941.Il est difficile <strong>de</strong> chiffrer le nombre <strong>de</strong> victimesparmi ceux qui ont fait vivre <strong>la</strong> presse c<strong>la</strong>n<strong>de</strong>stinependant 4 ans : dactylos, <strong>de</strong> « tireurs » à<strong>la</strong> ronéo, <strong>de</strong> transporteurs, <strong>de</strong> distributeurs,etc. <strong>Le</strong>s pertes <strong>de</strong>s travailleurs <strong>de</strong> l’imprimerie(maîtres imprimeurs et ouvriers) sont mieuxconnues : sur 1 200 travailleurs du livre résistants,400 sont tués.13RÉSISTANCE 12/13

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