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Bouche cousue ou langue bien pendue ? L'école entre deux ...

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propre pratique correcte et élaborée (au besoin idéalisée) comme un modèle dont les élèves devraient se rapprocher. Onretr<strong>ou</strong>ve alors la réponse traditionnelle de l’école face à la <strong>langue</strong> des élèves : unifier et normaliser. Unifier lorsque la<strong>langue</strong> scolaire est une <strong>langue</strong> d’État qu’on ne parle pas dans les familles, normaliser p<strong>ou</strong>r que chacun prononce ets’exprime correctement, c’est à dire comme le maître. P<strong>ou</strong>r que la pratique du maître devienne la s<strong>ou</strong>rce vivante d’unepédagogie de l’oral, il faudrait qu’il sache analyser ses pratiques et ses compétences de communication C’est un desthèmes possibles de la formation des enseignants dans ce domaine.Quant à la transposition des critères traditionnels valables à l’écrit, elle favorise aussi les aspects formels de la<strong>langue</strong>. Certes, la prise en compte des “ écrits sociaux ” et l’approche pragmatique du texte p<strong>ou</strong>rrait suggérerd’intéressantes transpositions à l’oral. Mais ce n’est pas dans ce registre-là que puisent la majorité des maîtres.En bref, on p<strong>ou</strong>rrait diagnostiquer une crise des représentations et des savoirs de la majorité des maîtres sur l’oral :les compétences de communication sont, dans l’esprit de la plupart des maîtres, trop fl<strong>ou</strong>es <strong>ou</strong> schématiques p<strong>ou</strong>r guiderune pédagogie cohérente et efficace.III. Un at<strong>ou</strong>t dans les interactions quotidiennesIl importe de se demander : “ Qu’est-ce que maîtriser la <strong>langue</strong> orale ? À quoi ressemble cette compétence ? ”Le sociologue est s<strong>ou</strong>vent frappé par l’espèce de vide social dans lequel sont affirmés des objectifs comme “ savoircommuniquer ”, “ savoir s’exprimer ”. P<strong>ou</strong>r dire quoi ? À qui ? Dans quel but ? La communication peut s’inscrire dans uneinfinité de registres, puisqu’elle participe de la presque totalité des actions et des interactions humaines. L’écoleobligatoire n’a certainement ni la possibilité, ni la vocation de préparer à t<strong>ou</strong>tes les situations de communication qu’unindividu est susceptible d’affronter dans l’existence. Il faut donc choisir.Le choix devrait être dicté notamment par les limites qu’on impose à la “ modélisation des comportements et despersonnalités ” à travers l’école. L’efficacité dans la communication est s<strong>ou</strong>vent liée à des manières d’envisager la vie etles rapports humains, à des sensibilités, à des valeurs. Y a-t-il une seule façon efficace de déclarer un sentiment,d’annoncer à quelqu’un qu’on le quitte <strong>ou</strong> d’offrir des condoléances ? Y a-t-il une bonne manière de faire rire, de séduire,d’ém<strong>ou</strong>voir, de mettre à l’aise, de rassurer ?A supposer que l’école ait le temps et les moyens de développer de tels savoir-faire, en aurait-elle le droit ?Lorsqu’elle j<strong>ou</strong>e sur l’émotion, les sentiments, les affinités et les goûts, la communication efficace ne mobilise passeulement des compétences linguistiques et intellectuelles, mais aussi des dispositions cultivées, des traits depersonnalité, une forme de familiarité avec un milieu social et une culture. Plus qu’à travers la plupart des autresapprentissages, l’école, en t<strong>ou</strong>chant à l’oral, contribue à façonner une vision du monde, un rapport aux autres, uneforme d’expression des sentiments et des idées. En censurant <strong>ou</strong> en normalisant la communication, on finit par censurer<strong>ou</strong> normaliser la vie elle-même, car l’oral est inséparable de l’expérience quotidienne, de l’interaction avec autrui, du fluxdes conversations qui n<strong>ou</strong>rrissent les représentations et infléchissent les manières de faire. Il faut donc être trèsprudent !Il n’existe aucune situation de communication entièrement neutre, dans laquelle l’efficacité dépendrait d’un pursavoir-faire plus que d’un savoir-être. Mais <strong>entre</strong> le langage de l’am<strong>ou</strong>r et celui des affaires, <strong>entre</strong> celui de la prière etcelui de la gestion, <strong>entre</strong> celui de l’émotion esthétique et celui de la science, il y a des différences de degrés.Il me semble raisonnable qu’ici comme dans d’autres domaines, l’école reste du côté de l’instruction plus que del’éducation, de l’instrumentation plus que des valeurs, de la rationalité plus que des sentiments. Une institution d’État n’apas, n’a plus à façonner les modes de vie et de pensée qui prévalent dans la sphère privée. L’école est historiquementgarante de la démocratie, pas du conformisme moral <strong>ou</strong> des moeurs familiales. C’est p<strong>ou</strong>rquoi, à mon sens, si l’ontravaille l’oral à l’école, on devrait privilégier la communication publique, celle qui a c<strong>ou</strong>rs dans le monde du travail, de lapolitique, des organisations, des <strong>entre</strong>prises et des médias, par opposition au monde de la famille, de la vie privée, de laconvivialité.Bien entendu, t<strong>ou</strong>te compétence de communication utilisable dans de telles situations autorise certainestranspositions à la vie privée, notamment familiale. Mais ce ne devrait pas être l’objectif principal d’une pédagogie del’oral, parce qu’elle irait assez vite de pair avec une image normative de la communication au sein du c<strong>ou</strong>ple, <strong>ou</strong> <strong>entre</strong>parents et enfants. La distinction est certes un peu schématique : il n’y a pas d’un côté des pratiques familiales,personnelles et privées qui échapperaient à la formation, d’un autre côté des pratiques publiques, dans le travail et dansla cité, qui dépendraient strictement d’une compétence acquise à l’école. Les choses ne sont pas aussi compartimentées.Il semble cependant raisonnable qu’une pédagogie de l’oral ait d’abord en point de mire les interactions “ publiques ”.De quoi s’agit-il alors ? D’informer, d’enseigner, d’expliquer, d’argumenter, de négocier, de décider, de planifier, derégler des conflits, de coordonner des actions et des représentations, de rés<strong>ou</strong>dre des problèmes, d’échanger desdonnées. Ce type de communication est proche du raisonnement et de la stratégie, il renvoie à des compétencesrelativement définies : savoir informer, expliquer, animer, discuter, argumenter, commander. Telles p<strong>ou</strong>rraient être lesmaîtrises visées prioritairement par une pédagogie de l’oral. D’abord parce que ces maîtrises sont peut-être, dans laculture occidentale, les moins liées à la personne. Ensuite parce qu’elles paraissent des at<strong>ou</strong>ts précieux dans la vieprofessionnelle, dans la vie publique et à certains moments de la vie privée. Enseigner cet oral-là à l’école, c’est v<strong>ou</strong>loiroffrir au plus grand nombre ce que les héritiers (B<strong>ou</strong>rdieu et Passeron, 1965) tr<strong>ou</strong>vent sinon dans leur berceau, du


moins dans leur famille et leur milieu social.T<strong>ou</strong>t dépend évidemment de l’image qu’on se fait de la place des individus dans l’ordre social. Si l’on pense qu’ilsdoivent savoir avant t<strong>ou</strong>t tenir leur rôle, obéir, se résigner à leur condition, ne pas mettre en cause les valeurs et lesrègles établies, p<strong>ou</strong>rquoi v<strong>ou</strong>drait-on développer les capacités d’expression et de communication ? Si l’on pense aucontraire que les individus doivent être capables de comprendre le monde dans lequel ils vivent, de ne pas croirenaïvement t<strong>ou</strong>t ce qu’on leur raconte, de participer aux décisions, de négocier leur place, de discuter les règles du jeu,de juger les lois et les politiques, les idéologies et les p<strong>ou</strong>voirs en place, alors il importe qu’ils maîtrisent l’oral. Cela nesuffit pas : sans culture générale, sans capacité de raisonnement, sans maîtrise de la lecture et dans une certainemesure de l’expression écrite, on ne va pas très loin, même avec d’exceptionnels talents d’orateur. Mais à l’inverse,chacun côtoie des gens qui “ savent plein de choses ”, qui ont des idées et qui restent p<strong>ou</strong>rtant muets devant l’absurdité<strong>ou</strong> l’injustice, marginaux dans les débats, minoritaires dans les décisions, paralysés dans les conflits.La maîtrise de l’oral informatif, explicatif, injonctif, argumentatif, décisionnel est auj<strong>ou</strong>rd’hui encore largementl’apanage des privilégiés, <strong>ou</strong> plus généralement de ceux qui occupent des positions dominantes dans le monde dutravail, de la politique, des médias, des institutions (église, justice, école, administration). C’est justement p<strong>ou</strong>r lutter àarmes moins inégales, p<strong>ou</strong>r faire partie d’une majorité moins silencieuse que beauc<strong>ou</strong>p de gens auraient intérêt àmaîtriser mieux la communication orale.Par exemple : a. dans les relations de travail et d’embauche ; b. au moment de négocier un contrat (bail,assurances, crédit notamment) ; c. lorsqu’ils <strong>entre</strong>nt en relation avec les autorités locales, l’administration, la police, lajustice, les services sociaux ; d. dans les associations (partis, syndicats, locataires) <strong>ou</strong> les m<strong>ou</strong>vements collectifs ;e. dans le dialogue avec l’école, les enseignants mais aussi les cadres, les psychologues scolaires, les conseillersd’orientation ; f. chez le médecin et dans le monde hospitalier ; g. au moment de faire un achat important (logement,voiture, hi-fi, voyage) <strong>ou</strong> de faire fonctionner une garantie <strong>ou</strong> un service après-vente ; h. lorsque les relations devoisinage deviennent difficiles (copropriété, s<strong>ou</strong>s-location, espaces communs, partage de charges par exemple) ; i. enmatière d’actes juridiques <strong>ou</strong> financiers (régime matrimonial, succession, épargne, placements, emprunts par exemple) ;j. dans les situations de formation scolaire <strong>ou</strong> extrascolaire ; k. plus largement, dans les situations où il faut assimilerrapidement de l’information et un certain savoir p<strong>ou</strong>r prendre une décision “ en connaissance de cause ” (chez ledentiste, au garage, en présence du réparateur TV <strong>ou</strong> de l’agent d’assurances par exemple).Dans t<strong>ou</strong>tes ces situations, chacun a besoin, p<strong>ou</strong>r s’en tirer à son avantage, de savoir :- comprendre ce que disent ses interlocuteurs, c’est-à-dire non seulement décoder leurs propos mais vérifier deshypothèses, interpréter des informations partielles <strong>ou</strong> contradictoires, construire activement du sens ;- exprimer ses questions, propositions, points de vue en tenant compte du contexte, des réactions de sesinterlocuteurs, de leurs attentes et valeurs ;- gérer l’interaction, maintenir la relation en dépit d’une incertitude <strong>ou</strong> d’un désaccord, permettre à chacun de sauverla face, adopter le niveau de <strong>langue</strong> et le registre de communication adéquat ;- p<strong>ou</strong>r discuter, argumenter, convaincre, amener à une décision favorable.T<strong>ou</strong>t cela ne va pas de soi. On sait que nombre de gens restent muets lorsqu’ils tombent à l’improviste sur unrépondeur téléphonique. Certains achètent des encyclopédies <strong>ou</strong> des appareils ménagers dont ils n’ont que faire, fauted’avoir su dire non. D’autres se voient imposer des traitements, des réparations, des tâches qui leur déplaisent <strong>ou</strong> leursemblent inutiles, mais auxquels ils n’ont pas su s’opposer. D’autres encore taisent t<strong>ou</strong>t ce qu’ils ont à dire face auxmaîtres de leurs enfants, quittent le magasin sans avoir osé demander un prix <strong>ou</strong> une explication, balbutient devant leguichet de l’administration, subissent sans piper mot attentes <strong>ou</strong> brimades, ne savent pas se défendre lorsqu’on lesaccuse à tort, etc.On n’en finirait pas d’énumérer les exemples de situations quotidiennes où des gens p<strong>ou</strong>rtant adultes et relativementinstruits sont handicapés faute d’oser prendre la parole et de savoir défendre leurs intérêts <strong>ou</strong> leurs idées oralement.Bien entendu, plaie d’oral n’est pas mortelle. On survit, diminué, furieux contre soi-même, frustré <strong>ou</strong> simplementrésigné. Les gens qui ne savent pas lire survivent aussi. Mais à quel prix ?P<strong>ou</strong>r faire mieux que survivre, il faut apprendre à parler la <strong>langue</strong> de ceux qui détiennent le p<strong>ou</strong>voir, l’information,les ress<strong>ou</strong>rces. En face d’un patron, d’un magistrat, d’un policier, d’un médecin, d’un technicien, d’un chef, d’unfonctionnaire, d’un vendeur <strong>ou</strong> d’un voisin désagréable, il faut apprendre à exprimer son point de vue, à rectifier <strong>ou</strong> ànuancer, à relancer la balle, etc.Les situations dont il est question ici mettent en présence des gens qui sans être des ennemis, ne sont pas des amiset peuvent être des adversaires, des concurrents, des inégaux. L’interaction <strong>entre</strong> eux a donc s<strong>ou</strong>vent une composanteconflictuelle, av<strong>ou</strong>ée <strong>ou</strong> cachée. Dans de telles situations, par gain de paix, chacun est libre de ne pas réclamer son dû,de ne pas demander d’augmentation, de subir à contrecœur des décisions détestables, d’accepter l’injustice, de renoncerà faire valoir ses droits. À chacun d’apprécier s’il préfère céder du terrain p<strong>ou</strong>r éviter stress et affrontements. Encorefaut-il avoir le choix. Le “ pacifisme verbal ” se n<strong>ou</strong>rrit hélas trop s<strong>ou</strong>vent du sentiment d’être “ battu d’avance ”. Onpréfère se taire parce qu’on n’est pas sûr de ses moyens, qu’on pressent l’échec <strong>ou</strong> l’humiliation. Avec davantage decompétences de communication et de confiance en soi, on affronterait la situation.Une pédagogie de l’oral ne devrait pas dicter des conduites, mais les rendre possibles. P<strong>ou</strong>r avoir le choix, il faut


avoir acquis, d’une manière <strong>ou</strong> d’une autre, à l’école <strong>ou</strong> ailleurs, <strong>deux</strong> types de dispositions complémentaires :- d’une part des savoir-faire d’ordre linguistique et cognitif ; p<strong>ou</strong>r défendre un point de vue, construire uneargumentation, demander des informations précises il faut disposer de certains schèmes de pensée, d’expression etd’éc<strong>ou</strong>te. À cela s’aj<strong>ou</strong>tent des savoir-faire proprement relationnels p<strong>ou</strong>r gérer la relation et la situation decommunication ;- d’autre part un savoir-être, la constitution d’une image de soi comme interlocuteur de plein droit, comme quelqu’unqui a quelque chose à dire et le droit de le dire, qui assume les risques de l’intervention.Faut-il opposer ces <strong>deux</strong> types d’acquis ? Analytiquement, cela peut se justifier. Mais en pratique, savoir-faire etsavoir-être, compétences et attitudes sont difficilement dissociables. Il y a fort à parier que l’apprentissage progresseparallèlement selon les <strong>deux</strong> dimensions.Dans les rapports marchands, dans les relations avec l’administration, on se tr<strong>ou</strong>ve s<strong>ou</strong>vent seul. Mais dans lemonde du travail, de la politique, des associations, maîtriser l’oral c’est aussi savoir participer à l’action collective, savoiranimer, restituer, coordonner les points de vue, travailler à un consensus sur la doctrine et sur la stratégie.On le voit, j’insiste fortement sur les rapports sociaux <strong>entre</strong> des acteurs individuels <strong>ou</strong> collectifs inégaux et qui n’ontpas les mêmes intérêts. Ce n’est évidemment qu’une partie de notre expérience quotidienne de la communication orale.Chacun vit de nombreux moments d’interaction dans le consensus et la convivialité, sans qu’il y ait besoin d’affronter lesautres. Mais p<strong>ou</strong>rquoi faudrait-il que l’école prépare à tenir quelques propos anodins dans le bus <strong>ou</strong> l’ascenseur <strong>ou</strong> àparticiper à la discussion au café du commerce ?* * *J’ai fortement insisté jusqu’ici sur la maîtrise de l’oral en situation d’interaction. N’<strong>ou</strong>blions pas t<strong>ou</strong>t ce qui relève del’éc<strong>ou</strong>te et de la compréhension de disc<strong>ou</strong>rs diffusés par des s<strong>ou</strong>rces lointaines : la radio, la télévision, des orateurss’adressant à un large public. Dans cette situation, il n’y a pas de réel dialogue. On peut éventuellement poser unequestion <strong>ou</strong> donner un avis par Minitel, mais chacun est d’abord un auditeur <strong>ou</strong> un spectateur t<strong>ou</strong>ché par des images etdes sons qu’il essaie de comprendre, au d<strong>ou</strong>ble sens du terme :a. il cherche à décoder le propos, ce qui ne va pas de soi ; on sait par exemple que certaines des informationspolitiques, économiques <strong>ou</strong> scientifiques sont incompréhensibles p<strong>ou</strong>r une partie des auditeurs qui ne maîtrisent pas lelangage, la culture générale <strong>ou</strong> les éléments de contexte ;b. il cherche à comprendre le sens du message, et donc les intentions cachées <strong>ou</strong> av<strong>ou</strong>ées de son auteur ; c’est laseule façon de conserver une distance, de ne pas ép<strong>ou</strong>ser sans examen la vision du monde que véhiculent les spotspublicitaires, les jeux télévisés, les disc<strong>ou</strong>rs politiques.Ici également sont mises en jeu des compétences de communication. La part de l’éc<strong>ou</strong>te et de la compréhensionl’emporte sur l’expression, mais il reste un rapport social avec une s<strong>ou</strong>rce, fût-elle lointaine <strong>ou</strong> parfois inconnue. En<strong>ou</strong>tre, l’éc<strong>ou</strong>te des médias n’est pas nécessairement solitaire. Avec Lazarsfeld, la sociologie des communications demasse a s<strong>ou</strong>ligné l’importance des relais, du “ two step flow of communication ”. On se tr<strong>ou</strong>ve rarement seul face auxmédias. Il s’agit plutôt de participer à une conversation avec d’autres auditeurs <strong>ou</strong> spectateurs potentiels, en famille, autravail, dans les transports publics. On se tr<strong>ou</strong>ve parfois fortement influencé par des idées <strong>ou</strong> des informations qu’on n’apas personnellement entendues, mais qui sont relayées dans la conversation quotidienne. La maîtrise de l’oral est alorsinséparable d’une formation à l’autonomie et à l’esprit critique : s’entraîner à ne pas prendre t<strong>ou</strong>t ce qu’on entend p<strong>ou</strong>rargent comptant, à ne pas propager sans réfléchir les rumeurs les plus absurdes, à ne pas croire n’importe quoi s<strong>ou</strong>sprétexte que quelqu’un l’a entendu à la radio <strong>ou</strong> à la télévision, à débusquer les stéréotypes, le sexisme, le racisme, lespréjugés dans les feuilletons télévisés <strong>ou</strong> la publicité. La pédagogie de l’oral a fortement partie liée, alors, avec lacritique de l’information.Ici encore, comme dans les situations d’interaction évoquées plus haut, des compétences de communication mieuxpartagées seront garantes de plus d’égalité devant l’information et la propagande, de plus d’autonomie face aux diversp<strong>ou</strong>voirs à l’œuvre dans la société politique, les organisations et les médias.On le voit, telle qu’elle est définie ici, une pédagogie de l’oral a un sens proprement politique. Non parce qu’ellep<strong>ou</strong>sserait à adhérer à une idéologie <strong>ou</strong> à un parti. Mais au contraire parce qu’elle devrait donner aux individus et auxgr<strong>ou</strong>pes dominés davantage de moyens de défendre leur identité, leurs droits et leurs intérêts, davantage de moyensaussi de naviguer sans se perdre dans l’océan des disc<strong>ou</strong>rs et des idéologies, des lois et des institutions.P<strong>ou</strong>r aller dans ce sens, il me paraît justifié de c<strong>ou</strong>rir les risques d’une pédagogie plus active et substantielle del’oral. À condition encore une fois qu’elle soit limitée aux compétences évoquées, à l’exclusion de l’oral convivial,informel, personnel.IV. L’inégalité sociale devant l’oralOn peut schématiquement opposer <strong>deux</strong> types de savoirs :- ceux qui s’apprennent essentiellement à l’école, du moins p<strong>ou</strong>r l’immense majorité des gens ;


- ceux qui s’apprennent p<strong>ou</strong>r une large part dans la vie, l’école ne constituant qu’un appoint, une mise en forme, undépassement des apprentissages extrascolaires.La grammaire, l’algèbre, les <strong>langue</strong>s mortes tombent dans la première catégorie. La lecture, les opérationsarithmétiques, la maîtrise de l’oral appartiennent à la seconde. Entre ces extrêmes, il y a <strong>bien</strong> entendu t<strong>ou</strong>tes sortes desavoirs intermédiaires, comme la géométrie, l’histoire <strong>ou</strong> la géographie : l’école n’a pas le monopole de leurtransmission, mais les acquis extrascolaires restent en général modestes en regard des programmes de l’enseignementobligatoire contemporains.Alors que seuls certains enfants savent lire avant d’<strong>entre</strong>r à l’école obligatoire, pratiquement t<strong>ou</strong>s savent parler. Ett<strong>ou</strong>s continueront à apprendre à communiquer en dehors de l’école, comme ils le font dans une société non scolarisée.La question est de savoir si l’école doit s’en mêler et p<strong>ou</strong>rquoi. Elle se pose p<strong>ou</strong>r t<strong>ou</strong>s les savoirs dont elle n’a pas lemonopole. Et la réponse est généralement donnée en termes de compétences minimales et d’égalité des chancesd’apprendre.En dehors d’une intervention de l’école, les apprentissages ne sont pas laissés au hasard, mais obéissent pluslargement encore à la logique des classes sociales. C’est dans les classes privilégiées que les enfants apprennent à lireavant même d’aller à l’école, qu’ils sont initiés aux <strong>langue</strong>s étrangères avant qu’elles soient au programme, qu’ilss’imprègnent d’une culture linguistique, géographique, historique qui anticipe sur les plans d’études. Il n’en va pasautrement p<strong>ou</strong>r l’oral.C’est évident, lorsqu’il s’agit de maîtrise de la <strong>langue</strong> nationale <strong>ou</strong> de la <strong>langue</strong> “ cultivée ”, qui ont s<strong>ou</strong>vent partieliée. Les classes privilégiées sont sociologiquement moins enfermées dans une région, plus proche de l’État central. Ellesdéfinissent aussi la norme qui s’impose à l’école. Leurs enfants y continuent donc un apprentissage qui a débuté enfamille, alors que les enfants d’autres origines sociales doivent se détacher d’un parler régional et populaire et assimilerlaborieusement une <strong>langue</strong> n<strong>ou</strong>velle.En substituant l’efficacité communicative à la correction et à la distinction, on ne fait que déplacer le problème. Carces autres formes d’excellence sont, elles aussi, inégalement partagées. D’abord parce que l’efficacité reste en partie uneaffaire de correction et de distinction. P<strong>ou</strong>r être éc<strong>ou</strong>té et entendu, il faut s’adapter aux attentes des interlocuteurs, doncutiliser un code et un niveau de <strong>langue</strong> qu’ils comprennent et valorisent. Certes, dans la perspective d’unecommunication efficace, on peut traiter les attentes et les normes des interlocuteurs comme des contraintes objectivessans avoir à y adhérer personnellement. Cela autorise un rapport stratégique aux normes en vigueur sur tel <strong>ou</strong> telmarché linguistique. En ce sens, insister sur l’efficacité de la communication met la norme à distance et dispense del’intérioriser. Reste qu’il faut la connaître et la maîtriser.On p<strong>ou</strong>rrait évidemment se dire qu’il suffit d’enfermer chacun dans son marché linguistique d’origine p<strong>ou</strong>r qu’il soitd’emblée compétent. Outre que ce serait t<strong>ou</strong>rner le dos à t<strong>ou</strong>te mobilité sociale, on voit mal comment l’école p<strong>ou</strong>rraitrenoncer à donner une place de choix aux marchés linguistiques sur lesquels prévaut la <strong>langue</strong> des institutions et desclasses dominantes (B<strong>ou</strong>rdieu, 1981). Préparer à une communication efficace, c’est préparer notamment à affronterl’administration, le droit, la politique, la publicité, les médias, la médecine, les institutions de formation, la justice, lemarché du travail. Ce sont autant de marchés linguistiques sur lesquels on parle la <strong>langue</strong> de la gestion et du p<strong>ou</strong>voir, la<strong>langue</strong> des gr<strong>ou</strong>pes dominants et des institutions centrales de la société nationale <strong>ou</strong> régionale. Orienter l’oral vers lacommunication publique n’autorise pas à renoncer à la maîtrise des standards dominants. Si <strong>bien</strong> que les élèvesfavorisés hier par leur héritage familial le resteront partiellement demain. Parce que cet héritage marie correction etaisance, sens de la <strong>langue</strong> et sens de la communication : communiquer efficacement, ce n’est pas seulement respecterles formes et les usages en vigueur sur un marché linguistique ; c’est manifester une maîtrise des paramètreslinguistiques, psychologiques et sociaux de la communication. Il n’y a aucune raison de penser qu’en ce domaine, leshéritiers ne seront pas, une fois de plus, favorisés.Derrière des mots d’apparence neutre - expliquer, informer, argumenter - c’est en effet de p<strong>ou</strong>voir qu’il est question.P<strong>ou</strong>voir sur les choses, les événements, les idées, les organisations, les gens. Or, comment s’en étonner, ce sont lesclasses dominantes qui maîtrisent le mieux les instruments de la domination, notamment la <strong>langue</strong> orale lorsqu’ellepermet de façonner des représentations et d’infléchir les décisions, d’expliquer le monde à sa façon, de justifier le statuquo <strong>ou</strong> le changement, de négocier en position de force.En ce sens l’efficacité argumentative est, non moins que la correction langagière, une forme d’excellencesocialement marquée. Il faut donc s’attendre, ici encore, à une forte inégalité sociale devant les programmes et lesexigences scolaires.Viser “ sérieusement ” à l’école, la maîtrise de l’oral informatif, explicatif, argumentatif, décisionnel, c’est donc sansd<strong>ou</strong>te :- calquer une fois de plus l’excellence scolaire sur les pratiques des classes les plus instruites et les plus favorisées ;- élargir le champ des inégalités initiales devant les exigences scolaires.Autant dire qu’il vaudrait mieux réfléchir à <strong>deux</strong> fois avant de donner davantage de place à l’oral et d’en redéfinir lasubstance : le risque de dépossession culturelle s’aj<strong>ou</strong>te à celui d’une sélection accrue.On se tr<strong>ou</strong>ve devant l’éternel dilemme de ceux qui réfléchissent à la démocratisation de la culture : la science est-


elle b<strong>ou</strong>rgeoise <strong>ou</strong> appartient-elle à chacun ? la logique est-elle une forme de pensée propre aux élites <strong>ou</strong> un instrumentuniversel ? le langage élaboré est-il un code réservé à une classe sociale <strong>ou</strong> un instrument de communication adapté àcertains contenus <strong>ou</strong> à certains contextes ? jusqu’à quel point faut-il, au nom du respect de l’identité culturelle dechaque gr<strong>ou</strong>pe, renoncer à enseigner des savoirs qui ont c<strong>ou</strong>rs dans les classes dominantes ?La question se pose p<strong>ou</strong>r l’oral. À chacun de répondre en pesant le p<strong>ou</strong>r et le contre. Je dirais que l’accès à uninstrument indispensable dans les rapports sociaux justifie un certain risque de dépossession culturelle.Autre risque : la surenchère normative. Auj<strong>ou</strong>rd’hui, on peut avancer l’idée que la normalisation de la <strong>langue</strong> se faitmoins pesante, qu’elle passe davantage par les médias que par la répression scolaire des parlers populaires etrégionaux. On redéc<strong>ou</strong>vre les patois, on affirme le droit à la différence, on relativise les normes. Cette évolution estamorcée depuis plusieurs décennies. La rénovation de l’enseignement du français l’a accentuée en insistant sur lalibération de la parole, sur la nécessité de ne pas empêcher les élèves de s’exprimer par des corrections intempestives,sur la diversité des contextes, des actes de parole, des registres de <strong>langue</strong>s et des marchés linguistiques.Ne risque-t-on pas, en développant une véritable pédagogie rénovée de l’oral, de mettre fin à cette relativetolérance, de faire peser sur l’expression des enfants à l’école de n<strong>ou</strong>velles normes, de créer de n<strong>ou</strong>velles inégalités ?Vaut-il vraiment la peine d’aj<strong>ou</strong>ter l’oral aux objectifs prioritaires de l’école obligatoire ? La maîtrise attendue justifie-telleun surcroît d’exigences et de travail, la mise en valeur de n<strong>ou</strong>velles normes d’excellence, l’extension possible descritères de sélection, une n<strong>ou</strong>velle forme de normalisation des pratiques ? La maîtrise de l’oral est-elle dans l’existenceun at<strong>ou</strong>t assez important p<strong>ou</strong>r c<strong>ou</strong>rir autant de risques ?À ces questions, il n’y a pas de réponse “ objective ”, on s’en d<strong>ou</strong>te. Chacun est renvoyé en dernière instance à sesoptions politiques, à sa vision de la culture, de la <strong>langue</strong>, des inégalités, de la démocratisation. Quant à moi, sauf àremettre en question l’ensemble du curriculum, je dirais qu’une véritable maîtrise de l’oral vaut <strong>bien</strong> un effort accru descolarisation.À partir du moment où on décide de franchir le pas, il faut se donner les moyens de construire une pédagogieefficace. Rien ne serait pire qu’un simulacre, juste assez bon p<strong>ou</strong>r créer des hiérarchies sans engendrer d’apprentissagessignificatifs et solides. Il reste donc à concevoir une pédagogie efficace, qui ne se contente pas de signes extérieurs deréussite scolaire (Perren<strong>ou</strong>d, 1986), mais vise des compétences stables et transposables p<strong>ou</strong>r chacun. Une pédagogie del’oral délibérément égalitariste dans ses intentions ne peut qu’être différenciée dans ses modalités : à chacun selon sesbesoins !V. L’oral, c’est mardi matin,de 9 heures à 10 heures !L’oral s’apprend. S’enseigne-t-il ? Oui si l’on s’accorde à dire - ce qu’on devrait faire p<strong>ou</strong>r t<strong>ou</strong>tes les disciplines -qu’enseigner ce n’est rien d’autre qu’aménager des situations d’apprentissage. P<strong>ou</strong>r l’oral plus peut-être que p<strong>ou</strong>r t<strong>ou</strong>tautre acquis, il faut se défaire de l’idée qu’il y a des savoirs à transmettre. Les compétences sont construites par l’élève,en situation d’interaction. Encore faut-il qu’il y ait interaction !Mieux vaut le statu quo qu’une pédagogie de l’oral velléitaire et inefficace. Il ne sert à rien de prendre “ un peu ” detemps p<strong>ou</strong>r l’oral, d’en tenir “ légèrement ” compte dans l’évaluation. Cela ne peut qu’accroître les inégalités, accuser lesentiment d’échec des élèves déjà en difficulté. Au maître qui “ ne croit pas vraiment à l’oral ”, qui pense qu’il n’est pasimportant <strong>ou</strong> possible de développer à l’école des compétences de communication orale, mieux vaut dire : “ Ne faitesrien, car le peu que v<strong>ou</strong>s ferez ne servira qu’à v<strong>ou</strong>s donner bonne conscience ! ” Propos peu constructifs, dira-t-on. Maisc’est p<strong>ou</strong>r mieux s<strong>ou</strong>ligner qu’une pédagogie efficace de l’oral ne saurait être qu’une <strong>entre</strong>prise de longue haleine,continue et cohérente.S<strong>ou</strong>s quelle forme concrète ? Dans l’emploi du temps des classes, fort chargé, il n’est pas facile de dégager uneheure supplémentaire par semaine p<strong>ou</strong>r “ faire de l’oral ”. Mais avant de dire que c’est impossible, encore faut-il sedemander si c’est <strong>bien</strong> nécessaire ! N’est-ce pas ailleurs que se j<strong>ou</strong>e la partie, dans les interactions incessantes qui sen<strong>ou</strong>ent <strong>entre</strong> maîtres et élèves <strong>ou</strong> <strong>entre</strong> ces derniers ? Une pédagogie de l’oral implique nécessairement lefonctionnement du gr<strong>ou</strong>pe-classe et l’ensemble de la démarche pédagogique. Elle ne saurait se cantonner à une case dela grille horaire. Elle traverse t<strong>ou</strong>te la semaine et t<strong>ou</strong>s les moments de la vie et du travail d’une classe.La rénovation de l’enseignement du français a valorisé la maîtrise pratique de la <strong>langue</strong>, en la distinguant du savoirsur la <strong>langue</strong> ; elle a affirmé que cette maîtrise s’acquiert par une pratique langagière s<strong>ou</strong>tenue inscrite dans devéritables situations de communication. Mais sans d<strong>ou</strong>te n’a-t-elle pas dit avec assez de force à quel point il faut quecette pratique soit régulière et intensive p<strong>ou</strong>r produire des effets visibles. Beauc<strong>ou</strong>p de maîtres croient encore qu’il suffitde faire une petite place à la communication p<strong>ou</strong>r rénover leur pédagogie du français : une discussion par-ci, unspectacle par-là, et le t<strong>ou</strong>r serait j<strong>ou</strong>é ! P<strong>ou</strong>r le reste, on p<strong>ou</strong>rrait enseigner comme avant, faire des leçons degrammaire, des exercices de conjugaison et de vocabulaire, des lectures silencieuses et des lectures suivies. Sans parlerdes autres disciplines, qu’il n’est pas question de t<strong>ou</strong>cher. Autant renoncer à l’oral !Pendant la petite enfance, chacun apprend à marcher, puis à parler sans recevoir de leçons. Mais il y passe desheures, pendant des mois <strong>ou</strong> des années. Les savoir-faire ne se forgent au gré de l’expérience que si celle-ci est dense,quotidienne, redondante et diverse à la fois. Comment imaginer qu’on puisse apprendre à rédiger en composant trois <strong>ou</strong>


cinq textes par an ? Ou qu’on maîtrisera l’argumentation en l’exerçant exceptionnellement ? Acquérir une maîtrisepratique de la <strong>langue</strong> et de la communication passe par une véritable pratique, non par un simulacre t<strong>ou</strong>t juste bon àsauver les apparences.Cette analyse n’est pas propre à l’oral, elle s’étend à la lecture et à l’expression écrite, et à nombre de savoir-fairedans diverses disciplines : on ne peut apprendre à s’orienter, à raisonner, à observer qu’en ayant maintes occasionsd’exercer, de développer, d’affiner ses schèmes de pensée et d’action. Aussi fondée soit-elle du point de vue de lathéorie de l’apprentissage, cette analyse peut conduire à une impasse : l’exercice concret et intensif de certains savoirfairesuppose des conditions pratiquement impossibles à créer et à reproduire régulièrement dans le cadre scolaire p<strong>ou</strong>rl’ensemble des élèves. P<strong>ou</strong>r apprendre à s’orienter dans une ville <strong>ou</strong> une région, plusieurs heures de lecture de carteschaque semaine ne sauraient suffire. Il faudrait sortir, aller sur le terrain, choisir de véritables itinéraires, faire de vraisvoyages. Cela prendrait des demi-j<strong>ou</strong>rnées, au détriment d’autres disciplines jugées prioritaires. C’est p<strong>ou</strong>rquoi lagéographie scolaire est sans d<strong>ou</strong>te condamnée à rester p<strong>ou</strong>r l’essentiel un savoir sur le territoire plutôt qu’une maîtrisepratique des déplacements dans le terrain, du moins à l’échelle régionale et au-delà.P<strong>ou</strong>r l’oral, les choses se présentent un peu mieux : il n’y a pas besoin de sortir de l’école et de se lancer dans des<strong>entre</strong>prises extraordinaires p<strong>ou</strong>r vivre de réelles situations de communication. Le travail scolaire et la vie en classe,t<strong>ou</strong>tes disciplines confondues, se présentent comme une suite ininterrompue de situations de communication. Il reste àles rendre formatrices de compétences langagières, donc à <strong>entre</strong>tenir un climat favorable, à aménager des didactiquesplus interactives dans diverses disciplines, à créer les institutions internes (expression libre, conseil de classe) qui irontdans ce sens. Ce n’est certainement pas facile. Mais c’est possible. Certaines classes qui se réclament de l’école active,de Freinet <strong>ou</strong> de la pédagogie institutionnelle sont allées assez loin dans ce sens. L’école-caserne peut devenir un forumsans qu’on renonce à enseigner !Entendons-n<strong>ou</strong>s <strong>bien</strong> : certains enseignants arrivent régulièrement à dégager du temps p<strong>ou</strong>r organiser des débats,des jeux de rôles <strong>ou</strong> un conseil de classe. Il n’y a aucune raison de les en dissuader. Dire que l’oral doit traverser t<strong>ou</strong>t lefonctionnement et t<strong>ou</strong>te la pédagogie n’est pas dire qu’il faut le diluer au point de le rendre invisible.Il y a des momentsforts et d’autres moins, des moments où l’on fait explicitement de l’oral, au vu et au su des élèves, comme on ferait dela conjugaison <strong>ou</strong> de l’histoire, et d’autres moments où ils pratiquent l’oral sans le savoir, en croyant faire t<strong>ou</strong>t autrechose, par exemple lorsqu’ils se lancent dans une situation mathématique, une observation scientifique <strong>ou</strong> la préparationd’un repas à l’intention des parents. Pasquier et Steffen (1988) distinguent des situations-jeux, des situations-projets etdes situations-fonctionnement (voir aussi la contribution de Norbert Steffen dans ce volume). Les trois sont nécessaires.Les dernières participent de la gestion globale du gr<strong>ou</strong>pe-classe et du rapport pédagogique. Les secondes relèvent de lapédagogie du projet et de l’école active et interactive. Les premières permettent d’accéder à l’imaginaire, à la simulation,à l’exercice ludique de certains aspects de la communication (Perren<strong>ou</strong>d, 1981).Le premier réflexe des partisans d’une pédagogie plus intensive de l’oral est d’aj<strong>ou</strong>ter des activités n<strong>ou</strong>velles à unhoraire déjà chargé. Sans exclure t<strong>ou</strong>t à fait de réserver certaines plages horaires à des séquences didactiquesspécifiques, mieux vaudrait à mon sens, au prix d’un certain bricolage du curriculum, dét<strong>ou</strong>rner de leurs fins premièresdes moments et des activités existantes. Non p<strong>ou</strong>r les mettre exclusivement au service de l’oral, mais p<strong>ou</strong>r “ faire d’unepierre <strong>deux</strong> c<strong>ou</strong>ps ”.Ce qui suppose, mieux vaut le savoir, un changement global de la relation pédagogique et de la didactique dansdiverses disciplines. Dans l’équipe RAPSODIE avec laquelle j’ai travaillé pendant plusieurs années, n<strong>ou</strong>s avonsexpérimenté t<strong>ou</strong>tes sortes de situations et de jeux d’oral. Mais au total, si certains enfants ont évolué en <strong>deux</strong> ans, ils ledoivent d’abord au climat d’éc<strong>ou</strong>te, au fonctionnement fréquent en petits gr<strong>ou</strong>pes, à la possibilité constante de participerà l’organisation du travail, à la régularité des moments spontanés de conversation et de discussion, à la relationchaleureuse, détendue que les enseignantes ont su instaurer avec leurs élèves, en gr<strong>ou</strong>pe et individuellement. Jeux derôles et de communication ne formaient que la partie visible de l’iceberg. En un mot comme en cent : une pédagogie del’oral n’est rien d’autre qu’une pédagogie active et interactive dans l’ensemble des disciplines, qu’une gestion du gr<strong>ou</strong>peclasseet du plan d’études favorisant constamment la participation des élèves, le dialogue, la concertation, le travail engr<strong>ou</strong>pe.Voilà qui n’est guère enc<strong>ou</strong>rageant et p<strong>ou</strong>rrait conduire à mettre définitivement la pédagogie de l’oral, du moins àlarge échelle, au rang des utopies dont se n<strong>ou</strong>rrit le disc<strong>ou</strong>rs pédagogique depuis que l’école existe, au rang despratiques non pas impossibles, mais si improbables que cela revient au même ! Sans d<strong>ou</strong>te est-ce en partie de cela qu’ils’agit. Cependant, ne choisissons pas la politique du pire. T<strong>ou</strong>t ne se j<strong>ou</strong>e pas à quitte <strong>ou</strong> d<strong>ou</strong>ble. Le fonctionnementd’un gr<strong>ou</strong>pe-classe et la didactique qui y prévaut se situent sur un continuum qui va des pédagogies les plustraditionnelles aux plus actives, des plus répressives aux plus libérales, de celles qui réduisent l’élève au silence à cellesqui lui donnent largement la parole, des plus autoritaires aux plus démocratiques.Le long de cet axe, aucun progrès n’est négligeable. Il vaut mieux travailler à de tels progrès qu’introduire quelquesgadgets supplémentaires. Ainsi, les jeux de rôles peuvent être une façon très intéressante d’être confronté à dessituations de communication qu’on ne peut réellement vivre en classe <strong>ou</strong> comme enfant (Lehmann et Perren<strong>ou</strong>d, 1980).Ils offrent des occasions intéressantes de métacommunication et obligent chacun, adultes compris, à réfléchir sur lesévidences du sens commun. Mais pris isolément, ces jeux n’ont qu’un intérêt limité et surt<strong>ou</strong>t, ils risquent de devenir desexercices scolaires comme les autres. P<strong>ou</strong>r gagner un enseignant à une pédagogie de l’oral, il vaut mille fois mieux sesituer sur le terrain du fonctionnement quotidien de sa classe plutôt que de lui “ vendre ” quelques activités séduisantes


qui viendront comme un cheveu sur la s<strong>ou</strong>pe.Une formation à une pédagogie de l’oral passe donc par une analyse de la façon dont fonctionnent, ici etmaintenant, la relation pédagogique et le travail scolaire. Cette analyse peut conduire à dégager des espaces decommunication, réels <strong>ou</strong> virtuels et à identifier les conditions auxquelles un moment de travail <strong>ou</strong> de vie collective peutdevenir aussi une occasion d’apprendre à expliquer, à débattre, à argumenter, à animer.Même dans le meilleur des cas, avec des enseignants parfaitement acquis à cette démarche, prêts à remettre enquestion leurs pratiques, fortement engagés sur le chemin de l’école active, il ne faut pas se leurrer : on ne peut past<strong>ou</strong>j<strong>ou</strong>rs avoir “ le beurre et l’argent du beurre ” ! Certes, chaque moment de la semaine, quelle qu’en soit la logiqueinitiale, peut se transformer en un moment d’éc<strong>ou</strong>te, de débat, d’argumentation. Ce n’est pas nécessairement audétriment de l’objectif initial p<strong>ou</strong>rsuivi, par exemple travailler la géographie de l’Europe, le Moyen Age <strong>ou</strong> lesquadrilatères ; on peut faire la part de la communication sans perdre de vue les autres objectifs, ni affaiblir tropfortement le rythme de progression dans le programme. Dans d’autres cas, c’est moins facile, voire impossible. Il s’agitdonc p<strong>ou</strong>r le maître d’apprendre à identifier le seuil à partir duquel le s<strong>ou</strong>ci de créer des situations de communication<strong>entre</strong> en conflit avec d’autres objectifs <strong>ou</strong> d’autres urgences. L’oral se greffe en quelque sorte en parasite sur desactivités ordonnées à d’autres fins. Si le parasite prend trop d’énergie, il compromet son existence même. La sagessepopulaire ne recommande-t-elle pas de “ ne pas scier la branche sur laquelle on est assis ” ?Faisons ici une différence très nette <strong>entre</strong> l’affirmation a priori “ C’est impossible, on ne peut rien changer ” et larecherche patiente du juste compromis, du point d’équilibre permettant à la fois d’instaurer un climat à une pratique decommunication et d’atteindre d’autres objectifs importants. Être formé à une pédagogie de l’oral, c’est savoir assez vite,intuitivement, ce qu’on perd et ce qu’on gagne, du point de vue de la communication, lorsqu’on aménage une situationdidactique quelconque. Poser un problème <strong>ou</strong>vert, prévoir une mise en commun, faire travailler les élèves en gr<strong>ou</strong>pes,c’est avoir besoin de plus de temps, par exemple en mathématique. Mais c’est aussi susciter des interactions qui ne seproduisent pas dans une situation plus classique, par exemple un exposé magistral suivi d’une série d’exercicesindividuels. D’un côté, on avancera plus vite dans le programme (sinon dans les apprentissages durables), de l’autre onse donnera davantage de chances de construire à la fois certains savoirs mathématiques fortement solidaires del’interaction et certaines compétences de communication. À v<strong>ou</strong>loir être constamment dans la recherche, la créativité etl’interaction, on ne c<strong>ou</strong>vrira qu’un quart du programme. À l’inverse, en exerçant une pression constante p<strong>ou</strong>r avancersans perdre du temps à “ discutailler ”, on aura c<strong>ou</strong>vert le programme à Pâques, sans garantir des acquismathématiques solides et sans profit s<strong>ou</strong>s l’angle de la communication. Avec Piaget et t<strong>ou</strong>s les m<strong>ou</strong>vements d’écolen<strong>ou</strong>velle, on s<strong>ou</strong>lignera l’importance de l’activité de l’élève. Avec le CRESAS (1987), on s<strong>ou</strong>lignera qu’on n’apprend past<strong>ou</strong>t seul et que l’interaction, loin d’être requise seulement p<strong>ou</strong>r maîtriser progressivement l’oral, est au coeur de laconstruction de la plupart des connaissances (Schubauer-Leoni et Perret-Clermond, 1985 ; Schubauer-Leoni, 1986).Penser une pédagogie de l’oral, c’est refuser de l’enfermer dans l’enseignement du français. C’est surt<strong>ou</strong>t <strong>entre</strong>r dansl’analyse de la dimension communicative actuelle <strong>ou</strong> virtuelle de t<strong>ou</strong>tes les situations didactiques et de t<strong>ou</strong>s les momentsde fonctionnement d’une classe. Cela suppose notamment, du point de vue de la formation continue, des conditions dedialogue et de confiance sans lesquelles les enseignants hésiteront à raconter ce qu’ils font j<strong>ou</strong>r après j<strong>ou</strong>r. Non pasdans les catégories abstraites du plan d’études <strong>ou</strong> de l’horaire, mais en entrant dans le détail des pratiques : l’usage dutemps disponible, le stress, les prises de parole, les consignes, les interventions correctrices <strong>ou</strong> disciplinaires, la naturedes tâches coopératives données aux élèves, etc.Je ne puis ici <strong>entre</strong>r dans l’analyse fine du fonctionnement des classes et des situations didactiques, qui dépend desdegrés d’enseignement, des disciplines, des orientations pédagogiques. Une question se pose en revanche part<strong>ou</strong>t :quelle part faut-il donner, dans l’apprentissage de l’oral, à la prise de conscience, voire à la théorisation des faits etprocessus de communication ? On sait que la maîtrise pratique ne dépend qu’assez faiblement d’une maîtrise théoriquepréalable, de type grammatical par exemple. Cela ne veut pas dire que la compétence de communication est purementpratique, qu’elle s’acquiert de façon s<strong>ou</strong>terraine, à l’insu des intéressés et en l’absence de t<strong>ou</strong>te prise de conscience, det<strong>ou</strong>te réflexion. On peut s<strong>ou</strong>tenir au contraire qu’il n’y a pas de pleine compétence de communication sans compétencesde métacommunication, autrement dit, sans capacités d’analyser le contexte, les attentes, les règles du jeu et parfois deles expliciter, de les reformuler, de les renégocier avec l’interlocuteur. Apprendre à communiquer, c’est aussi apprendreà réfléchir sur ce qui se passe dans l’interaction, à anticiper les réactions de l’autre, à se mettre à sa place, à construiredes stratégies argumentatives <strong>ou</strong> explicatives, à tenir compte du contexte, des intentions et des intérêts des acteurs enprésence. Cela suppose un ensemble d’opérations cognitives complexes qui mobilisent des concepts et certainesconnaissances des processus en jeu.Pratiquer une pédagogie de l’oral, c’est donc, dans cet esprit, ne pas perdre une occasion d’entraîner à lamétacommunication, prendre le temps de revenir sur l’expérience, de comprendre p<strong>ou</strong>rquoi une explication n’a paspassé, p<strong>ou</strong>rquoi une discussion a dégénéré en conflit de personnes, p<strong>ou</strong>rquoi une réunion t<strong>ou</strong>rne c<strong>ou</strong>rt si l’animateurprend le p<strong>ou</strong>voir <strong>ou</strong> ne j<strong>ou</strong>e pas son rôle. La communication orale devient alors son propre objet. L’expérience montreque même des enfants de huit à dix ans sont très sensibles à t<strong>ou</strong>tes sortes de phénomènes psychosociaux <strong>ou</strong>linguistiques liés à la communication, sont prêts à les observer et à en discuter si le maître crée les conditions propices.Mais c’est le terrain par excellence d’une pédagogie de l’occasion. Inutile de prévoir d<strong>ou</strong>ze leçons sur les difficultés <strong>ou</strong> lesparadoxes de la communication. C’est face à l’événement qu’il faut prendre le temps de s’arrêter, de s’étonner,d’analyser à chaud, en mathématique comme en français, au c<strong>entre</strong> aussi <strong>bien</strong> qu’en marge des situations proprementdidactiques. Cela suppose chez le maître le goût et la capacité d’improviser (Perren<strong>ou</strong>d, 1983), ce qui ne va pas sans


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