Bulletin <strong>de</strong> la Recherche Agronomique du Bénin Numéro 69 – Juin 2011Keywords: Vegetables, Alternative control methods, Logit, Pests, Diseases, Benin, GhanaINTRODUCTIONL’accroissement <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> alimentaire en Afrique sub-saharienne dû à la croissancedémographique entraîne le développement <strong>de</strong> l’agriculture urbaine et périurbaine (M<strong>ou</strong>stier, 2004). Lemaraîchage constitue la principale activité <strong>de</strong> cette agriculture. Les productions maraîchères sontsensibles aux maladies cryptogamiques, telluriques, et aux insectes et sont <strong>de</strong> fortes consommatrices<strong>de</strong> pestici<strong>de</strong>s chimiques en milieu subtropical (Desvals et al., 2004). Les pestici<strong>de</strong>s chimiques sontutilisés p<strong>ou</strong>r obtenir <strong>de</strong> meilleurs ren<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> production. T<strong>ou</strong>tefois, ils constituent une menacep<strong>ou</strong>r l’environnement et la santé <strong>de</strong>s populations. Des effets cancérigènes, neurotoxiques <strong>ou</strong> <strong>de</strong>stypes <strong>de</strong> perturbateurs endocriniens sont mis en évi<strong>de</strong>nce chez l'animal (INRA, 2005). La question<strong>de</strong>s risques p<strong>ou</strong>r l'homme (applicateurs <strong>de</strong> pestici<strong>de</strong>s et leurs familles, ruraux non agricoles exposés,consommateurs) reste posée. Même si elle continue <strong>de</strong> faire l'objet <strong>de</strong> vives controverses, elle resteinscrite comme une priorité dans t<strong>ou</strong>s les rapports et plans Santé-Environnement, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>sétu<strong>de</strong>s épidémiologiques sur ce point. Les pestici<strong>de</strong>s sont fréquemment mis en cause dans lacontamination <strong>de</strong>s eaux superficielles et s<strong>ou</strong>terraines, dans la réduction <strong>de</strong> la biodiversité terrestreconstatée dans les zones agricoles et dans les milieux "naturels" contaminés <strong>ou</strong> bien encore dans <strong>de</strong>scas <strong>de</strong> surmortalité <strong>de</strong>s abeilles et <strong>de</strong> baisse <strong>de</strong> production <strong>de</strong>s ruches (INRA, 2005).Ces différents impacts négatifs <strong>de</strong>s pestici<strong>de</strong>s chimiques sur la santé et sur l’environnement sont lesrésultats directs <strong>de</strong> leur utilisation non contrôlée. Certaines étu<strong>de</strong>s ayant examiné ce comportement(Huan et al., 2000; Dung et Dung, 1999; Dung et al., 1999) ont montré que les abus dans l’utilisation<strong>de</strong>s pestici<strong>de</strong>s sont s<strong>ou</strong>vent dus au mauvais étiquetage <strong>de</strong>s produits et à un manque d’information(Dasgupta et al., 2005) et <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s producteurs sur les métho<strong>de</strong>s alternatives que sont lesextraits botaniques et les biopestici<strong>de</strong>s. Les risques sur la santé et l’environnement <strong>de</strong>s pestici<strong>de</strong>schimiques en production maraîchère peuvent être réduits par la sensibilisation, l’information etl’augmentation du niveau <strong>de</strong> connaissance <strong>de</strong>s maraîchers sur les bonnes pratiques <strong>de</strong> protectionphytosanitaire. Une meilleure compréhension <strong>de</strong> la perception <strong>de</strong>s maraîchers sur les risques liés auxpestici<strong>de</strong>s chimiques et les alternatives disponibles s’avère nécessaire p<strong>ou</strong>r un changement <strong>de</strong>comportement. Le but <strong>de</strong> la présente étu<strong>de</strong> est d’analyser les perceptions <strong>de</strong>s maraîchers du Bénin etdu Ghana en Afrique <strong>de</strong> l’<strong>ou</strong>est sur les métho<strong>de</strong>s alternatives <strong>de</strong> protection phytosanitaire ainsi queles déterminants <strong>de</strong> la diffusion et <strong>de</strong> l’adoption <strong>de</strong> ces métho<strong>de</strong>s.METHODOLOGIEZone d’étu<strong>de</strong>Les enquêtes se sont dér<strong>ou</strong>lés au Bénin dans la zone <strong>de</strong>s bas-fonds à Grand Popo, dans la zonepéri-urbaine à Coton<strong>ou</strong> et à Porto-Novo, et dans la zone du Cordon littoral à Sèmè et à Grand Popo.Au Ghana la région <strong>de</strong> Kumassi est prise en compte. Les raisons suivantes ont motivé le choix <strong>de</strong> ceszones :Ces zones sont les zones d’intervention du projet « Vegetable » financé par l’Agence <strong>de</strong>Développement Autrichienne « ADA » et dans lequel s’inscrivait la présente étu<strong>de</strong>.Ces zones offrent <strong>de</strong>s conditions climatiques favorables au maraîchage. En effet, le climat estsubéquatorial avec un régime assez tempéré. Dans ces zones existent différentes saisonspluvieuses qui déterminent les pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> fortes productions maraîchères et la disponibilité <strong>de</strong>l’eau.La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> en produits maraîchers en raison <strong>de</strong> la croissance démographique crée <strong>de</strong>smarchés potentiels. Cette situation fait du Bénin et du Ghana, <strong>de</strong> grands producteurs <strong>de</strong>légumes. Grâce au Projet ADA (Agence Autrichienne <strong>de</strong> Développement), ces zones ontbénéficié <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong>s n<strong>ou</strong>velles technologies <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>s cultures maraîchères.Par conséquent, t<strong>ou</strong>tes ces raisons justifiaient la nécessité et l’importance d’appréhen<strong>de</strong>r lesperceptions <strong>de</strong>s maraîchers sur les n<strong>ou</strong>velles technologies, notamment les métho<strong>de</strong>s alternatives <strong>de</strong>lutte contre les insectes et les maladies <strong>de</strong>s cultures maraîchères.Collecte <strong>de</strong>s données et échantillonnageLes données sont collectées entre juillet et août 2007 par <strong>de</strong>s interviews structurées à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>questionnaires. Un échantillon <strong>de</strong> 136 maraîchers au Bénin et 139 au Ghana constitué <strong>de</strong> femmes et2
Bulletin <strong>de</strong> la Recherche Agronomique du Bénin Numéro 69 – Juin 2011<strong>de</strong> jeunes est interviewé. Les maraîchers interviewés sont retenus <strong>de</strong> façon raisonnée et aléatoire. Lepremier choix est raisonné sur la base d’une liste <strong>de</strong> maraîchers choisis dans le projet ADA et lesecond choix tiré à partir du premier est aléatoire.Métho<strong>de</strong> d’analyseLes données sont traitées à l’ai<strong>de</strong> du tableur Excel et du logiciel Stata. Le tableur Excel a permis <strong>de</strong>faire les statistiques <strong>de</strong>scriptives basées sur le calcul <strong>de</strong>s paramètres statistiques tels que lesmoyennes, les fréquences, les écarts-types et la construction <strong>de</strong>s graphes, <strong>de</strong>s histogrammes ettableaux. La régression logistique, précisément le modèle Logit multinomial, est utilisée p<strong>ou</strong>rdéterminer les facteurs affectant le choix <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s alternatives par les maraîchers. Le logicielStata a permis <strong>de</strong> t<strong>ou</strong>rner le modèle Logit multinomial.Modèle empiriqueDans le modèle Logit multinomial, on suppose que les exploitants agricoles prennent <strong>de</strong>s décisionsd’adoption basées sur un objectif <strong>de</strong> maximisation <strong>de</strong> leur utilité. La fonction Logit introduite parBerkson (1944), appliquée par Maddala (1983) et par CIMMYT (1993), s’écrit comme suit :∑( ) = P( Y )( eα+ βXi)( 1+eα+ βX)Y =(1)iiiLe modèle Logit est utilisé p<strong>ou</strong>r estimer les déterminants <strong>de</strong> l’adoption <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s alternatives <strong>de</strong>traitement phytosanitaire. Ainsi, p<strong>ou</strong>r un maraîcher "i", la probabilité <strong>de</strong> l'adoption d'une technologieselon le modèle Logit est donnée par la formule suivante :P(adoption)exp(βΖi)1+exp(βΖi)= (2) etP(non - adoption)=1- P(adoption)1=1+exp(βΖi)(3), où :β est un vecteur <strong>de</strong> coefficients inconnus. Z i est un vecteur <strong>de</strong>s variables explicatives permettant <strong>de</strong>prédire le comportement d’adoption du 1 er au i ième maraîcher.Le modèle Logit suppose que, p<strong>ou</strong>r lutter contre les ravageurs et maladies, le maraîcher doit faire faceà plusieurs alternatives disjointes et exhaustives représentées par la variable dépendante Yi qui est lechoix <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> protection <strong>de</strong>s plantes. Ainsi ici quatre alternatives disjointes et exhaustivess’offrant à un maraîcher, Yi prend les valeurs i = 1, 2, 3 et 4 tels que :Y = 1 si le maraîcher choisit d’utiliser exclusivement les métho<strong>de</strong>s alternatives à based’extraits botaniques ;Y = 2 si le maraîcher choisit d’utiliser exclusivement les métho<strong>de</strong>s alternatives à base <strong>de</strong>microorganismes ;Y = 3 si le maraîcher choisit d’utiliser simultanément les métho<strong>de</strong>s alternatives à based’extraits botaniques et les pestici<strong>de</strong>s chimiques <strong>de</strong> synthèse. L’utilisation simultanée <strong>de</strong>sextraits aqueux <strong>de</strong> neem et <strong>de</strong>s pestici<strong>de</strong>s chimiques se fait non pas en mélangeant ces <strong>de</strong>uxtypes <strong>de</strong> produits, mais plutôt par l’application successive (pestici<strong>de</strong>s chimiques commetraitement <strong>de</strong> choc p<strong>ou</strong>r diminuer le taux d’infestation et suivi <strong>de</strong>s extraits <strong>de</strong> neem).Y = 4 si le maraîcher utilise exclusivement les pestici<strong>de</strong>s chimiques <strong>de</strong> synthèse.Les variables explicatives introduites dans le modèle Logit ont été les suivantes :SEXE : C’est le sexe du chef d’exploitation <strong>ou</strong> <strong>de</strong> l’exploitant agricole. Cette variable prend lavaleur 0 si le chef d’exploitation est une femme et 1 s’il est un homme. Les hommes ont plusaccès à l’information et aux intrants que les femmes (Dey, 1981). Les hommes ayant une plusgran<strong>de</strong> probabilité d’utiliser les pestici<strong>de</strong>s que les femmes, le signe positif est attendu p<strong>ou</strong>r lecoefficient <strong>de</strong> la variable SEXE sur les différentes métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> lutte contre les ravageurs.EXPERIM : Cette variable désigne le nombre d’années d’expérience dans le maraîchage etest une variable continue. Les producteurs agricoles ayant plusieurs années d’expériencesont eu le temps <strong>de</strong> se rendre compte <strong>de</strong> l’apport positif <strong>de</strong>s traitements phytosanitaires sur lesren<strong>de</strong>ments. Le signe positif est attendu <strong>de</strong> la variable EXPERIM.3