nouveaux outils <strong>de</strong> savoirs : FAQ, serious game, tutoriel, podcast etautres TICEu.La documentation révolutionnéeForce est <strong>de</strong> constater qu’il y a loin <strong>de</strong>s effets d’annonce aux réalisationsconcrètes. Certes, beaucoup d’universités, d’établissement <strong>de</strong> formationcontinue, <strong>de</strong> sociétés <strong>de</strong> soutien scolaire se sont lancées dans l’e-learning.Mais le bilan actuel est loin d’être éclatant : le nombre <strong>de</strong> formation nedécolle pas, le taux d’abandon est très élevé. <strong>Le</strong>s supportsd’enseignement restent très classiques (souvent <strong>de</strong>s cours écrits mis enligne). Et les nouveaux outils - podcast <strong>de</strong> cours, conférence en ligne -sont loin <strong>de</strong> tenir leurs promesses. <strong>Le</strong> modèle idéal <strong>de</strong> la classe virtuellereste ultraminoritaire. L’immense majorité <strong>de</strong>s enseignements en lignesont adossés à <strong>de</strong>s enseignements traditionnels. Quant à la créationd’établissement d’enseignement virtuel ou <strong>de</strong> chaire numérique, ils sontinexistants. <strong>Le</strong> « cyberprof » ne semble pas près <strong>de</strong> remplacer le courstraditionnel. C’est dans le domaine <strong>de</strong> la documentation que les effets duWeb sont les plus révolutionnaires. On sait combien le travail <strong>de</strong>sétudiants, journalistes, documentalistes et autres travailleurs du savoir aété révolutionné. Un chercheur peut mobiliser, consulter, explorer enquelques minutes <strong>de</strong>s ressources documentaires qui supposaient naguère<strong>de</strong>s heures d’attente et <strong>de</strong> déplacement. Des milliers <strong>de</strong> bibliothèquesd’Alexandrie se trouvent désormais à portée <strong>de</strong> clic. <strong>Le</strong> rêve <strong>de</strong> Paul Otlet,père <strong>de</strong> la documentation mo<strong>de</strong>rne, qui avait imaginé Internet il y a unsiècle déjà - tous les savoirs du mon<strong>de</strong> à portée d’un écran personnel -,est <strong>de</strong>venu réalité. <strong>Le</strong> développement <strong>de</strong>s agents intelligents (<strong>de</strong>s logicielsconçus pour remplir une mission <strong>de</strong> façon autonome) sur un même réseaune permet-il pas d’envisager la formation d’une intelligence collective, quirassemble en un cerveau global <strong>de</strong>s millions <strong>de</strong> programmes intelligents etindividuels (7) ? Même si il associe <strong>de</strong>s milliers <strong>de</strong> contributeurs et cumule<strong>de</strong>s millions d’entrées, le Web ne forme pas à proprement parler unecommunauté intelligente organisée. <strong>Le</strong>s contributeurs <strong>de</strong> Wikipediaécrivent une encyclopédie, ils ne résolvent pas ensemble <strong>de</strong>s problèmesscientifiques, théoriques ou philosophiques, sur le mo<strong>de</strong> imaginé parFrancis Bacon (8). En 1627, le philosophe promoteur <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>expérimentale avait rédigé un projet utopique <strong>de</strong> communauté savante.Dans son petit opuscule, il décrivait un voyage imaginaire dans une île <strong>de</strong>smers du Sud, Nova Atlantis. Là était établie une institution scientifiqued’un nouveau genre : la Maison <strong>de</strong> Salomon. <strong>Le</strong>s savants y travaillaient auprogrès <strong>de</strong>s sciences : on les voyait rédiger <strong>de</strong>s comptes-rendusbibliographiques, organiser <strong>de</strong>s colloques et voyages d’étu<strong>de</strong>s, planifier<strong>de</strong>s expériences, vérifier ensemble leurs hypothèses ; ils se préoccupaientaussi <strong>de</strong>s applications pratiques <strong>de</strong> leur science et <strong>de</strong> la diffusion <strong>de</strong> leursconnaissances. Internet sera-t-il <strong>de</strong>main le support <strong>de</strong> communauté <strong>de</strong>savoir <strong>de</strong> ce type ? Nous en sommes loin. La constitution <strong>de</strong> communautésintelligentes suppose l’émergence <strong>de</strong> projets d’étu<strong>de</strong>s collectifs.32
<strong>Le</strong> continent numérique va-t-il voir surgir <strong>de</strong> telles formes d’organisation ?C’est un projet que Pierre Lévy, le prophète <strong>de</strong> l’intelligence collective,appelle <strong>de</strong> ses vœux - tout en reconnaissant qu’il s’agit encore d’uneutopie (9). Il n’est pas interdit <strong>de</strong> rêver.NOTES(1) Clarisse Herrenschmidt, <strong>Le</strong>s Trois Écritures. Langue, nombre, co<strong>de</strong>,Gallimard, <strong>2007</strong>.(2) Jack Goody, Pouvoir et savoirs <strong>de</strong> l’écrit, La Dispute, <strong>2007</strong>.(3) Joël <strong>de</strong> Rosnay et Carlo Revelli, La Révolte du pronétariat. Des massmédias aux médias <strong>de</strong>s masses, Fayard, 2006.(4) Andrew Keen, The Cult of the Amateur : How today’s Internet is killingour culture, Doubleday, <strong>2007</strong>.(5) Marc Tessier, La Presse au défi du numérique, ministère <strong>fr</strong>ançais <strong>de</strong> laCulture et <strong>de</strong> la Communication, février <strong>2007</strong>.(6) Gloria Origgi, « Pour une science humaine <strong>de</strong> l’Internet », 2003,www.interdisciplines.org/<strong>de</strong>fispublicationweb/papers/1/version/<strong>fr</strong>(7) Dossier « Des fourmis à Internet, l’intelligence collective, mythe etréalité », Sciences Humaines, n° 169, 2006 ; J.-F. Dortier, « Vers uneintelligence collective ? », Sciences Humaines, hors-série n° 32, marsavril-mai2001.(8) Sylvain Firer-Blaess, « Wikipedia : entre communauté et réseau »,<strong>2007</strong>, www.homo-numericus.net/spip.php ?article274(9) Pierre Lévy, « Nouvelle responsabilité <strong>de</strong>s intellectuels », <strong>Le</strong> Mon<strong>de</strong>diplomatique, août <strong>2007</strong>.12- Etre cultivé ai<strong>de</strong> à diriger une entreprise(Enjeux-<strong>Le</strong>s Echos, 9 novembre <strong>2007</strong>)La culture générale <strong>de</strong>s dirigeants et <strong>de</strong>s salariés joue un rôlecrucial en entreprise dans le renforcement du lien entre action etréflexion.La culture générale intervient peu dans le pilotage direct et quotidiend’une entreprise. Elle ne constitue pas non plus un critère d’évaluation <strong>de</strong>ssalariés et, à une échelle individuelle, son absence ne compromet pas etne <strong>fr</strong>eine pas une carrière. Pour autant, elle ne saurait déserterl’entreprise. Car, à un <strong>de</strong>gré plus ou moins fort, la culture générale joueun rôle crucial dans le renforcement du lien entre action et réflexion.Grâce à elle, dirigeants, managers et employés parviennent à raisonnerpar analogie, à placer <strong>de</strong>s problématiques en perspective et à lescon<strong>fr</strong>onter aux grands débats d’idées.Confucius et Lao-tseu ont beau faire un tabac auprès <strong>de</strong>s dirigeantsd’entreprise, beaucoup limitent encore la culture générale à un vecteur <strong>de</strong>valorisation sociale, bien plus utile pour briller dans les dîners en ville que33