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'9;.zine de l'amitié entre les peuples - Archives du MRAP

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IlDU COUPON A L'AVIONHarold est Namibien, réfugié qui a fuit l'apartheid. Il a failli être expulsé pour un ticket <strong>de</strong> busà la veille d'une soutenance <strong>de</strong> thèse. Un enchaÎnement infernal aujourd'hui réglé.Harold Ramsay Urib estétudiant, résidant enFrance, boursier <strong>du</strong>gouvernement français. Unjeudi <strong>du</strong> mois <strong>de</strong> novembre, ilprend un bus pour se rendre àla fac. Le len<strong>de</strong>main, il doitsoutenir sa maîtrise. Contrôle<strong>de</strong>s billets par un policier _accompagné <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux agents <strong>de</strong>la RATP. Le coupon n'est pastout à fait en règle. Un numéroa été barré, un autre, celui <strong>de</strong>la carte <strong>de</strong> Harold, inscrit.Litige, contrôle <strong>de</strong> police: letitre <strong>de</strong> séjour <strong>de</strong> Harold n'estpas tout à fait en règle.Quelques heures plus tard,aux environs <strong>de</strong> 19 h dans <strong>les</strong>locaux d'un commissariat <strong>de</strong> laSeine-Saint-Denis, Harold serend à l'évi<strong>de</strong>nce: il va êtreexpulsé à Johannesbourg,Militant <strong>de</strong> la SWAPO, leMouvement <strong>de</strong> libération <strong>de</strong> la ~Namibie, il risque, au choix, la ~prison ou la potence. L'étu- ..;diant explique la gravité <strong>de</strong> lasituation aux <strong>de</strong>ux inspecteursqui prennent en main son dossier.Ceux-ci sont catégoriques.La décision est sans africains. Ainsi va la vie pourpar <strong>de</strong>s militaires blancs sud­appel. Mais que s'est-il donc <strong>les</strong> 480 lycéens <strong>de</strong> Petruspassé?Kaneb Secondary School àUis. Un dimanche matin, unUn revolvergroupe d'élèves, dont Harold,reviennent d'une sortie sporpourun sandwichtive dûment accompagnés par1977 : la Namibie est, <strong>de</strong> fait, leurs maître-militaires. Le carune colonie sud-africaine. Le s'arrête ... Les enfants <strong>de</strong>scensouvenir<strong>de</strong> Soweto est là, frais <strong>de</strong>nt casser la croûte.dans <strong>les</strong> mémoires et dans la La ration est d'un sandwichvie quotidienne <strong>de</strong>s lycéens par personne, mais l'unnamibiens. En vertu <strong>de</strong> la poli- d'<strong>entre</strong> eux en prend <strong>de</strong>ux.tique <strong>de</strong> bantoustanisation, Aussitôt, le maître brandit unHarold, lycéen, 17 ans alors, revolver menaçant sur l'enfantn'a pas le droit <strong>de</strong> fréquenter trop gourmand. C'est le choc.le lycée <strong>de</strong> la ville où habite sa Les élèves jettent dans un gestefamille. Il est affecté dans la collectif spontané, leurs sandrégiondont il est originaire. wiches sur le militaire. Le len­C'est comme si, en France. on <strong>de</strong>main, c'est la grève généraleenvoyait tous <strong>les</strong> Bretons en au lycée.Bretagne et <strong>les</strong> Beaucerons à Exclusion tout aussi généraleChartres.<strong>de</strong>s 480 fauteurs <strong>de</strong> troub<strong>les</strong>.En vertu d'un autre méca- Puis, l'administration <strong>du</strong> lycéenisme <strong>de</strong> l'apartheid, <strong>les</strong> ensei- déci<strong>de</strong> la réintégration indivignantscivils ont été remplacés <strong>du</strong>elle. Objectif: repérer <strong>les</strong>Harold Ramsay Urib : Pour lui tout finira bienmeneurs. De jeunes enfantssont menacés, frappés. Dixgarçons et <strong>de</strong>ux jeunes fil<strong>les</strong>sont effectivement exclus <strong>du</strong>lycée, mais aussi <strong>de</strong> tous <strong>les</strong>lycées et éco<strong>les</strong> <strong>du</strong> pays, interdits<strong>de</strong> travailler, interdits <strong>de</strong>circuler hors <strong>du</strong> lieu <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nce<strong>de</strong> leurs parents, <strong>du</strong>rantcinq ans!Harold refuse le bannissement.n adhère à la Swapo etrejoint la capitale, Windhoeckpuis, clan<strong>de</strong>stinement, le Botswanaet la Zambie. Là, il passeun test d'admission à l'Institut<strong>de</strong>s Nations-unie pour laNamibie où il reste <strong>de</strong>ux ans.Muni d'un passeport <strong>de</strong>l'ONU assuré d'une boursefrançaise, il débarque à Vichyen 1982.1987. Paris, capitale <strong>de</strong>s droits<strong>de</strong> l'homme. Dans <strong>les</strong> locaux<strong>de</strong> la police, Harold ne comprendplus rien. On l'expulsethèse: toutes ces annéesd'efforts pour rien? Les inspecteurs,eux, comprennent,mais vous savez, lui disent-ils :.« Il y a 7 millions d'étrangersen France, et on ne peut pasaccueillir tous <strong>les</strong> malheureux<strong>du</strong> mon<strong>de</strong>! »Harold Uri ne s'attendait pasà un tel retournement <strong>de</strong> situation.Les histoires <strong>de</strong> papiers,c'est le cauchemar <strong>de</strong>puis unbon moment. Depuis 1983,date à laquelle il est venu s'installerdans la région parisienne,on ne délivre à Haroldque <strong>de</strong>s récépissés <strong>de</strong> courte<strong>du</strong>rée, à cause <strong>de</strong>s délais <strong>de</strong>transfert <strong>de</strong> son dossier administratifet parce qu'il lui fallaitattendre <strong>de</strong> passer samaîtrise (prévue pour le len<strong>de</strong>main<strong>de</strong> son arrestation) pourobtenir une inscription enDEA, condition indispensableau renouvellement <strong>de</strong> son permis<strong>de</strong> séjour. Le lundi, il seserait présenté à la préfecture,mais la loi Pasqua a frappé lejeudi.Liberté ...au nom <strong>de</strong> la solidaritéAujourd'hui, Harold est heureux.Tout d'abord, il a passésa maîtrise avec mention trèsbien (1), s'est inscrit en DEA.n a ainsi pu obtenir une carte<strong>de</strong> séjour d'un an. Sa boursea été renouvelée par le ministère<strong>de</strong>s Affaires étrangères.Un retournement <strong>de</strong> situationdû aux efforts <strong>de</strong>s militants <strong>du</strong><strong>MRAP</strong>, et notamment à sonavocat, Me Didier Seban, auxamis, professeurs, fonctionnaires,étudiants et syndicats<strong>de</strong> l'université <strong>de</strong> Villetaneusesans <strong>les</strong>quels il n'aurait étéqu'un expulsé <strong>de</strong> plus ...Et un prisonnier <strong>de</strong> plus àJohannesburg. 0CHER/FA(1) Dont le thème est: La Namibie,colonie d'apartheid perspective d'indépendance.A tout éditeur bon enten­la veille <strong>de</strong> sa soutenance <strong>de</strong> <strong>de</strong>ur, salut !I~==~~--~~--------~--~----------------------------------~TOUR D'IVOIREEtre étudiant étranger en France,c'est déjà faire partie<strong>du</strong> « bon lot »,et pourtant. ..La France est l'un <strong>de</strong>spays développés quiconsacre le plus faiblepourcentage <strong>de</strong> son PIB àl'enseignement supérieur.Dans la gran<strong>de</strong> misère <strong>de</strong>sfacs françaises, <strong>les</strong> étudiantsd'origine étrangère, et singulièrement<strong>les</strong> beurs, se sententen déstabilisation chronique.Si le nombre d'étudiantsd'origine ouvrière estévaluée à environ 6 p.100,celui <strong>de</strong>s étudiants provenant<strong>de</strong>s famil<strong>les</strong> maghrébines immigréesne dépasse pas le1 p. 100.Malik, étudiant à l'universitéd'Aix-en-Provence, prépareune thèse <strong>de</strong> doctorat sous ladirection <strong>du</strong> Pr BrunoEtienne. Non-boursier,Malik travaille comme surveillantd'internat trois jourspar semaine pour vivre etpouvoir étudier. «Pournous, explique-t-il, <strong>les</strong> conditionsd'étu<strong>de</strong>s ont toujours étédégradées. Les fil<strong>les</strong> font <strong>de</strong>sménages, l'un vend <strong>de</strong>s bonbonsl'autre <strong>de</strong>s primeurs.Nos parents n'ont aucunmoyen <strong>de</strong> nous ai<strong>de</strong>r. » Sesamis et lui animent une associationd'étudiants algérienssur Aix-Marseille (1). «Ladénomination "algérien"n'évoque pas pour nous unenationalité juridique, la plupartd'<strong>entre</strong> nous sont français,mais un lien sentimentalo-culturelavec le pays d'origine<strong>de</strong> nos parents. Cetattachement est renforcé parun racisme ordinaire, un rejetquotidien. »A l'instar <strong>de</strong> ses amis parisiensqui viennent <strong>de</strong> créer àleur tour une Association <strong>de</strong>sétudiants algériens issus <strong>de</strong>l'immigration (2), Malik entendrester lié à la communautéalgérienne vivant enFrance. « Notre communautéest menacée et quand celaDifférences - n° 74 - Janvier 1988<strong>de</strong>vient une question <strong>de</strong> vie ou<strong>de</strong> mort, nous ne pouvonsconsidérer l'université commeune tour d'ivoire qui nousprotégerait <strong>de</strong> la violence. »Aziz, étudiant parisien esttout aussi catégorique.« L'immigration, affirme-t-il,n'est pas saucisonnable. Nousne pouvons être le wagonprésentable que quelquesbons contrôleurs <strong>de</strong> cette sociétéauront sélectionné. Noussommes la continuité naturelle<strong>de</strong> nos parents. »<strong>de</strong>s · agents <strong>de</strong> service au sein<strong>du</strong> mouvement. Les étudiantsissus <strong>de</strong> l'immigration ne sontpas représentés dans <strong>les</strong>structures supérieures. »L'Association, à vocationculturelle, aura pour but l'entrai<strong>de</strong>,la solidarité, maisaussi la recherche, la publicationd'artic<strong>les</strong> et d'étu<strong>de</strong>s.«Nous désirons témoigner,précise Aziz, sur notre vécu etnotre <strong>de</strong>venir. »Hakima et Malika poursui-« L'immigration n'est passaucissonnable.Nous ne pouvons êtrele wagon présentableque quelques bonscontrôleurs <strong>de</strong> cette sociétéauront sélectionné »Par rapport à la créationd'une association d'étudiantsbeurs, Aziz s'explique:« Nous appartenons à <strong>de</strong>s milieuxpopulaires, et la sélectionpar l'argent, on la traîneà nos pieds comme un bouletmême lorsque l'enceinte <strong>de</strong>l'université nous est ouverte.Nous rencontrons, en plusd'autres difficultés liées à lasituation culturelle et intellectuelle<strong>de</strong> nos parents. Cheznous, on ne discute pas <strong>de</strong>srésultats <strong>de</strong>s contrô<strong>les</strong>, <strong>de</strong>l'orientation scolaire, il n'y apas <strong>de</strong> livres, <strong>de</strong> disques, il n'ya pas d' habitu<strong>de</strong> <strong>du</strong> débat. »Le mouvement étudiant <strong>de</strong>décembre 1986 a été déterminantpour <strong>les</strong> étudiantsétrangers. «Nous noussommes ren<strong>du</strong> compte aprèscoup que nous étions un peuvent toutes <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>sétu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> langues étrangèresappliquées. L'une fait <strong>du</strong>baby-sitting, l'autre assureune animation une fois parsemaine et donne <strong>de</strong>s coursparticuliers. El<strong>les</strong> se sententbien dans l'association. « Onest passé par <strong>les</strong> mêmes expérienceset <strong>les</strong> mêmes galères. »On comprend mieux,semble-t-il, dans un cadre <strong>de</strong>ce type, <strong>les</strong> problèmes <strong>de</strong>sfil<strong>les</strong>. Cel<strong>les</strong>, nombreuses,dont <strong>les</strong> parents n'acceptentpas qu'el<strong>les</strong> soient sortiesaprès 20 h.Ailleurs, il est sûrement plushumiliant d'avouer cette réalitédifficile, souvent douloureuseque vivent <strong>les</strong> jeunesfil<strong>les</strong> d'origine algérienne.Dans l'Association, la mixitéest geree d'une autre manière,dans une complicitéliée à la connaissancecommune et directe <strong>de</strong>s traditions.« Même si, affirmentMalika et Hakima, nous voulonséviter le repli sur soi touten ne nous coupant pas <strong>de</strong> nosorigines. »« Et puis, ajoute Hakima, onse file <strong>de</strong>s tuyaux pour <strong>les</strong>petits boulots. »Par le caractère complètementminoritaire <strong>de</strong> leurréussite scolaire, <strong>les</strong> étudiantsd'origine algériennevivent paradoxalement unesorte <strong>de</strong> complexe par rapportà leur communauté.Comme si cette réussite trahissaitune rupture avec celleci.Aussi l'Association tient àcombattre ce complexe et àinciter <strong>les</strong> jeunes à s'accrocherà leurs étu<strong>de</strong>s, notammentpar <strong>de</strong>s cours <strong>de</strong>soutien scolaire.Pour Aziz, s'intégrer signifieaussi ne pas avoir honte <strong>de</strong>prendre la nationalité française,reconnaître la réalité<strong>de</strong> la délinquance sans sesentir tout d'un coup antiarabe.« Nous n'avons pas àtomber dans le racisme inverséen nous taisant surtoutes ces questions. »Particulièrement démunis surle plan matériel, ces jeunesdésirent faire <strong>de</strong> leur différenceune donnée positive. Al'Association, on se prête <strong>de</strong>slivres, <strong>de</strong>s journaux parceque <strong>les</strong> cinq francs <strong>du</strong> quotidienfont souvent défaut àl'un ou à l'autre. On démarcheensemble pour le logementou pour un petit job.On se serre <strong>les</strong> cou<strong>de</strong>s avantle versement <strong>du</strong> premierterme <strong>de</strong> la bourse qui n'estversé qu'en janvier. On seretrouve très souvent au restaurantuniversitaire, économiesobligent. - Dans cecontexte, la dispense <strong>de</strong> paiement<strong>de</strong> frais d'inscriptionpour <strong>les</strong> enfants d'ouvriersproposé récemment parl'UNEF paraît tout à faitlégitime à ces étudiantsdécidés. DCHER/FA BENAOBESSAOOK(1) AGEAAM, cité universitaire, LesGazel<strong>les</strong>, 13100 Aix-en-Provence.(2) AEAII, 115, boulevard Saint­Michel, 75005 Paris.•

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