M U S É E D E S B E AU X - A RT S D U C A N A D A – R A P P O R T A N N U E L 1 9 9 8 – 1 9 9 9David MilneDavid Milne (<strong>Canada</strong>, 1882–1953) Arbres et bâtiments noirs et blancs 1915–1916 Huile sur toile. Don de M. F. Feheley, Toronto, 1998© Succession de David Milne, 1999Né près de Burgoyne (Ontario), David Milne part étudier l’art à New York en 1903, puis il y gagne savie comme artiste commercial pendant plusieurs années. Vers 1912, ses scènes de rues new-yorkaiseslui valent une certaine notoriété puis en 1913 il présente cinq œuvres à l’Armory Show, uneexposition prestigieuse. En 1916, il s’installe à Boston Corners, village de l’État de New Yo r k .Ainsi que l’atteste Panneaux d’aff i c h a g ede 1912 (MBAC), Milne compose ses huiles et aquarelles réalisées àNew York selon <strong>des</strong> lignes horizontales, faisant presque abstraction du recul spatial et utilisant les arbres pourdélimiter les principales verticales. Les couleurs vives liées à cette époque – blancs, rouges, jaunes et bleus –contrastent avec la palette plus re s t reinte <strong>des</strong> tableaux de 1915 du Bronx, comme l’illustre Gris, brun et noir(MBAC) où les maisons s’amoncellent en une composition verticale, frontale, et les lignes verticales se juxtaposentau feuillage en courbe <strong>des</strong> arbres peints de noirs, à la crête légèrement plus claire. Milne re p rendra cette méthodedans ses <strong>des</strong>sins clairsemés de 1915 présentant <strong>des</strong> arbres à noyau sombre et faîtes verts, harm o n i e u s e m e n tdisposés sur papier blanc.Arbres et bâtiments noirs et blancs présente deux maisons et un garage au pied d’une colline auxquelss’adossent trois arbres figurant au premier plan. À l’instar <strong>des</strong> <strong>des</strong>sins de 1915, la palette est réduite à un blancet à un vert presque noir, avec <strong>des</strong> touches de brun et un vert légèrement plus clair pour les bâtiments. Dans cetableau tout en contrastes, Milne met en opposition le blanc de la partie inférieure et les teintes vert/noir de lap a rtie supérieure, et le blanc et les tonalités vert/noir <strong>des</strong> arbres. Il souligne le contour de l’arbre de gauche dev e rt/noir et emplit l’arbre lui-même de blanc, laissant apparaître la toile à la limite <strong>des</strong> couleurs. Il re p rend lev e rt/noir pour l’arbre de droite, et le blanc pour définir librement les branches. Au-<strong>des</strong>sus de l’ensemble se pro f i l eun petit arbre divisé en deux dont la moitié inférieure blanche est soulignée de vert/noir et la partie supérieurede vert/noir souligné de blanc. Les lignes blanches accentuent l’inclinaison <strong>des</strong> branches <strong>des</strong> grands pins et <strong>des</strong>collines de la section supérieure, ne définissant que sommairement <strong>des</strong> formes quelque peu ambiguës.L’utilisation du blanc au premier plan ainsi que dans les courbes <strong>des</strong> branches évoque la neige et suggère unedate du début de 1916. Toutefois, Milne ne sert pas de la couleur à <strong>des</strong> fins d’imitation; il y a plutôt recours dem a n i è re abstraite, comme en témoigne le titre de plusieurs tableaux de cette période, tel Bronze et noir o uVert-bleu, vert-noir. Ici pourtant le titre ne correspond pas au choix l’artiste : il a été attribué à l’œuvre dansle récent catalogue raisonné préparé par David Milne fils et David Silcox, et publié par l’University <strong>of</strong> To ronto Pre s s .Les années 1915 et 1916 marquent une transition dans la carr i è re de Milne qui creuse plusieurs idées antérieure set établit de nouvelles orientations. Dans ses huiles de 1916 peintes à Boston Corners, il récupère le thème <strong>des</strong>a r b res sur fond de colline et appr<strong>of</strong>ondit le travail de l’image scindée en deux en utilisant les lignes horizontaleset verticales. Plus tard, l’artiste exprimera <strong>des</strong> réserves sur les œuvres de cette période; il les critiquera commeétant « maniérées, lour<strong>des</strong>, pleines de taches, et manquant totalement de sensibilité et de subtilité », et mettraleurs faiblesses au compte d’une confusion entre son travail d’illustrateur commercial et la peinture. Onc o m p rend difficilement comment de tels commentaires pourraient s’appliquer à cette toile entièrement maîtriséeet toute en subtilité, exécutée par l’un <strong>des</strong> principaux artistes canadiens de la pre m i è re moitié du XX e s i è c l e .2 6
A C Q U I S I T I O N SV E D E T T E SCe Hibou avec un poisson dans le bec, sculpté à partir d’une pierre dure vert foncé, allie à uneobservation rigoureuse de la nature plusieurs qualités devenues l’image de marque d’OsuitokIpeelee – sculpture délicate, souci du détail et remarquable sens de l’équilibre. Avec ses yeuxproéminents, ses plumes délicatement gravées et ses pattes tordues, cette créature à première vuedéséquilibrée semble le résultat d’une stylisation plutôt curieuse. Et pourtant, en accentuant certains traits,dont les yeux regardant fixement vers l’avant, le bec énorme et les serres fermement en prise, l’artistedemeure fidèle aux caractéristiques du harfang <strong>des</strong> neiges. Conçue pour être vue de tous les côtés, cetteœuvre dynamique atteste le genre de complexité créatrice et de composition audacieuse où le sculpteur amaintes fois atteint l’excellence. L’un <strong>des</strong> artistes les plus célèbres de Cape Dorset, Osuitok Ipeelee n’ajamais cessé de créer, explorant à fond plusieurs thèmes et approches stylistiques, les quittant pour mieuxy revenir tout au long de sa carrière. Hibou avec un poisson dans le bec enrichit le fond du Musée d’uneœuvre de jeunesse de l’artiste et illustre à merveille son talent à voir autrement le quotidien et à tirerl’impossible d’un bloc de pierre.OsuitokIpeeleeOsuitok Ipeelee (<strong>Canada</strong>, né en 1922) Hibou avec un poisson dans le bec 1965 Pierre vert foncé2 7