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Olivier Twist II<br />
Chapitre XLIII<br />
dans bien d’autres endroits, si on ne l’a pas vu ici. Pour moi, je le connais<br />
bien, allez, monsieur le président.<br />
— Ah ! vous me connaissez, vous ? s’écria le Matois prenant note de<br />
la parole du geôlier. C’est bon ! C’est de la calomnie, rien que ça. »<br />
Et l’auditoire de rire et le geôlier de crier toujours : « Silence donc,<br />
là ! »<br />
« Eh bien ! maintenant, où sont les témoins ? demanda le greffier.<br />
— Ah ! c’est juste ! où sont-ils donc les témoins, que je les voie ? »<br />
Sa curiosité fut bientôt satisfaite : en ce moment s’avança un policeman<br />
qui avait vu le prisonnier mere sa main dans la poche d’un individu<br />
au milieu de la foule et en retirer un mouchoir ; l’ayant trouvé trop vieux,<br />
il l’avait remis dans la poche du légitime possesseur, après s’en être servi<br />
pour son usage. En conséquence de ce fait, il avait arrêté le Matois aussitôt<br />
qu’il s’était trouvé près de lui. En le fouillant, on le trouva nanti d’une<br />
tabatière en argent portant sur le couvercle le nom de son propriétaire ;<br />
celui-ci, découvert grâce à l’Almanach des vingt-cinq mille adresses, jura<br />
à l’audience que la tabatière lui appartenait et qu’il l’avait perdue la veille,<br />
dans la foule. Il avait remarqué un jeune homme qui cherchait à s’échapper,<br />
et ce jeune homme était le prisonnier qu’il avait devant lui.<br />
« Prévenu, avez-vous quelques questions à adresser au témoin ? demanda<br />
le président.<br />
— Plus souvent que je m’abaisserai à engager une conversation avec<br />
lui ! répondit le fin Matois.<br />
— Avez-vous quelque chose à dire pour votre défense ?<br />
— Le président vous demande si vous avez quelque chose à dire pour<br />
votre défense, dit le geôlier en poussant du coude le Matois, qui gardait<br />
le silence.<br />
— Ah ! pardon ! dit le Matois semblant se réveiller ; c’est-il à moi que<br />
vous parlez, mon garçon ?<br />
— Je n’ai jamais vu un vagabond pareil, monsieur le président, dit le<br />
geôlier en ricanant. N’avez-vous rien à dire, encore une fois, blanc-bec ?<br />
— Non, je n’ai rien à dire ici, car nous ne sommes pas dans la boutique<br />
à la justice ; sans compter que mon avocat est en train de déjeuner avec<br />
le vice-président de la Chambre des communes ; mais autre part, c’est<br />
différent ! j’aurai quelque chose à dire, et lui aussi, et nous aurons là nos<br />
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