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Olivier Twist II<br />
Chapitre XXXIII<br />
En prononçant ces paroles incohérentes, l’homme se tordait les poings<br />
et grinçait des dents ; il s’avança vers Olivier comme pour lui assener un<br />
coup violent, mais il tomba lourdement à terre, en proie à des convulsions<br />
et écumant de rage. Olivier contempla un instant les affreuses contorsions<br />
de ce fou (car il le supposait tel), et s’élança dans la maison pour<br />
demander du secours. and il l’eut vu transporter dans l’auberge, il reprit<br />
le chemin de la maison, courant de toute sa force pour raraper le<br />
temps perdu, et songeant avec un mélange d’étonnement et de crainte, à<br />
l’étrange physionomie de l’individu qu’il venait de quier.<br />
Cet incident n’occupa pourtant pas longtemps son esprit. and il<br />
arriva au coage, il y trouva de quoi absorber entièrement ses pensées, et<br />
chasser loin de son souvenir toute préoccupation personnelle.<br />
L’état de Rose Maylie s’était promptement aggravé, et avant minuit<br />
elle eut le délire ; un médecin de l’endroit ne la quiait pas. À la première<br />
inspection de la malade, il avait pris Mᵐᵉ Maylie à part, pour lui déclarer<br />
que la maladie était d’une nature très grave. Il faudrait presque un miracle,<br />
avait-il ajouté, pour qu’elle guérît.<br />
e de fois, pendant cee nuit, Olivier se leva de son lit pour se glisser<br />
sur la pointe des pieds jusqu’à l’escalier, et prêter l’oreille au moindre<br />
bruit qui partait de la chambre de la malade ! e de fois il trembla de<br />
tous ses membres, et sentit une sueur froide couler sur son front, quand<br />
un soudain bruit de pas venait lui faire craindre qu’il ne fût arrivé un<br />
malheur trop affreux pour qu’il eût le courage d’y réfléchir ! La ferveur<br />
de toutes les prières qu’il avait jamais faites n’était rien en comparaison<br />
des vœux suppliants qu’il adressait au ciel pour obtenir la vie et la santé<br />
de l’aimable jeune fille prête à s’abîmer dans la mort.<br />
L’aente, la cruelle et terrible aente où nous sommes, quand, immobiles<br />
près d’un lit, nous voyons la vie d’une personne que nous aimons<br />
tendrement, compromise et prête à s’éteindre ; les désolantes pensées qui<br />
assiègent alors notre esprit, qui font bare violemment notre cœur, et<br />
arrêtent notre respiration, tant elles évoquent devant nous de terribles<br />
images ; le désir fiévreux de faire quelque chose pour soulager des souffrances,<br />
pour écarter un danger contre lequel tous nos efforts sont impuissants<br />
; l’abaement, la prostration que produit en nous le triste sentiment<br />
de cee impuissance : il n’y a pas de pareilles tortures ! Et quelles<br />
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