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Interview<br />
Jean-Bernard<br />
Derly<br />
Le Bon Air : Comment se situe Bologne<br />
dans le monde du rhum ?<br />
J.-B. Derly : Le monde du rhum en<br />
général est un marché énorme sur tous<br />
les continents. La particularité du rhum<br />
agricole, fabriqué uniquement dans<br />
les Antilles françaises, est qu’il<br />
représente seulement 5% du marché<br />
mondial. Bologne, installé sur les pentes<br />
de la Soufrière depuis plus de trois<br />
siècles, produit exclusivement du rhum<br />
agricole que l’on pourrait aussi nommer<br />
« eau de vie de canne ». Je rappelle<br />
que le rhum industriel est produit à<br />
partir du déchet de la fabrication du<br />
sucre, la mélasse, sous produit du<br />
sucre. Celui-ci est également appelé<br />
« rhum traditionnel ». C’est pour cette<br />
raison que je ne suis pas certain que<br />
l’appellation « rhum agricole » voulue<br />
par nos anciens reflète la qualité<br />
naturelle de nos produits.<br />
Le Bon Air : Pourriez-vous bénéficier de<br />
l’appellation « eau de vie de canne ? »<br />
J.-B. Derly : Certainement. Et c’est<br />
d’ailleurs très tentant. Cela permettrait<br />
de se démarquer de l’appellation<br />
générique Rhum qui englobe des<br />
produits très différents, l’eau de vie<br />
étant le résultat de la distillation d’un<br />
produit végétal.<br />
Le Bon Air : Qu’est ce qui vous en<br />
empêche ?<br />
J.-B. Derly : Rien en effet, et j’y<br />
réfléchis. Cela reste un pari pour une<br />
De la distillerie Bologne,<br />
trois siècles nous contemplent.<br />
Le Bon Air a voulu en savoir plus<br />
en rencontrant Jean-Bernard<br />
Derly, son directeur général.<br />
marque comme la nôtre dont la forte<br />
notoriété est établie car ce changement<br />
d’appellation pourrait déstabiliser le<br />
consommateur. Depuis la 1 ère guerre<br />
mondiale et sous cette appellation<br />
générique de « rhum », cet alcool n’a<br />
pas gagné ses lettres de noblesse.<br />
En comparaison avec les alcools de<br />
bouche comme le cognac, l’armagnac<br />
ou encore le whisky, une image<br />
dévalorisante demeure associée à<br />
l’évocation du rhum. Parce que le<br />
rhum agricole est plus récent et plus<br />
confidentiel en termes de parts de<br />
marché et est un produit strictement<br />
naturel et issu de la canne à sucre, il<br />
mériterait une vraie reconnaissance<br />
en raison de sa qualité. On souffre de<br />
cette terminologie dite « d’agricole »<br />
qui est difficile à comprendre et à<br />
traduire en langues étrangères.<br />
Le Bon Air : Comment vous situez-vous<br />
sur le marché français ?<br />
J.-B. Derly : Nous remportons<br />
chaque année un succès grandissant<br />
sur le marché hexagonal dû en grande<br />
partie à notre clientèle touristique<br />
qui, durant son séjour, apprécie nos<br />
produits à leur juste valeur. Le bouche<br />
à oreille fonctionne à merveille une<br />
fois cette dernière rentrée chez elle.<br />
Les nombreux évènements<br />
internationaux sur lesquels nous<br />
sommes présents pour ne citer que<br />
« la Route du Rhum » participent<br />
également à ce succès. Hélas, nous<br />
subissons la mesure administrative<br />
du contingentement qui limite nos<br />
exportations sur la métropole et nous<br />
empêche de répondre à la demande.<br />
Le Bon Air : Vous avez beaucoup investi<br />
dans le développement durable. Expliquez-nous.<br />
J.-B. Derly : Nous ne cessons de<br />
nous améliorer dans ce domaine.<br />
Nous nous sommes inscrits dans<br />
une démarche environnementale<br />
unique en Guadeloupe qui se traduit<br />
par une politique de traitement des<br />
déchets incluant non seulement leur<br />
élimination mais également leur<br />
valorisation. Et à ce jour, je suis fier<br />
de dire que la distillerie Bologne est<br />
la première de la Caraïbe à intégrer<br />
totalement ce processus. En clair,<br />
au final, c’est zéro déchet.<br />
Le Bon Air :Vous avez fait également de<br />
ce haut lieu patrimonial un site touristique ?<br />
J.-B. Derly : Oui. Et il est en effet<br />
devenu incontournable pour tous<br />
ceux qui s’intéressent de près ou de<br />
loin à l’histoire du rhum. Le site de<br />
Bologne fait partie de notre patrimoine.<br />
Des milliers de visiteurs se pressent<br />
durant la période de production, de<br />
février à juillet, pour visiter sous la<br />
houlette d’un guide ce lieu qui fait<br />
partie intégrante de l’histoire de la<br />
ville de Basse-Terre. De même, toute<br />
l’année, une boutique accueille le<br />
public et offre une dégustation à<br />
l’issue de chaque visite. Je ne manque<br />
pas de les inviter à participer aux<br />
nombreuses manifestations ludiques<br />
et culturelles que nous organisons<br />
avec des associations locales entre<br />
musique, danse, artisanat…<br />
Le Bon Air : Le rhum vieux de Bologne<br />
s’est récemment distingué par une médaille<br />
d'argent au Concours Général Agricole…<br />
J.-B. Derly : Et pour sa première<br />
participation, dans la catégorie ‘’rhum<br />
vieux de 3 à 4 ans’’ ! Un must qui<br />
s’ajoute au fait qu’il avait déjà franchi<br />
les portes du club des spiritueux de<br />
prestige. Si le rhum blanc reste le cœur<br />
de cible de notre production,<br />
j’encourage également les amateurs<br />
à goûter la cuvée spéciale<br />
« Chevalier de Saint-Georges » en<br />
apéritif ou en digestif, à consommer<br />
bien entendu avec modération !<br />
31 Le Bon Air. Mai/Juin 2011