You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
CRITIQUE<br />
Nietzsche-Breuer, un tête-à-tête génial<br />
« Nietzsche est dérangeant parce que sa pensée féconde<br />
ce qu’elle touche ou bien le tue ».<br />
Vienne, 1882. Nietzsche est bizarre. C'est un esprit<br />
original. Déprimé et en très mauvaise santé, il est<br />
poussé à rencontrer le docteur Breuer, l’un des fondateurs<br />
de la psychanalyse et mentor de Freud à cette<br />
époque. L'auteur, professeur en psychiatrie à l’Université<br />
de Stanford, imagine la rencontre fictive entre<br />
deux des penseurs les plus brillants de cette époque.<br />
Les dialogues, entièrement inventés, sont construits<br />
en tenant compte d’un grand nombre d’éléments<br />
biographiques et historiques. Les lettres qui figurent<br />
dans le roman ont véritablement été écrites par<br />
Nietzsche. Certaines de ses affirmations contiennent<br />
des phrases directement tirées d’ouvrages comme<br />
« Humain, trop humain » ou « Le Gai Savoir ». Une<br />
grande partie des faits insérés dans cette fiction est<br />
donc tout à fait authentique.<br />
Ce livre est une pépite, à condition d'aimer et de s’intéresser<br />
aux personnages bien-sûr. Ces figures complexes<br />
et émancipées sont loin d’être asservies à la<br />
pensée dominante. Leur cynisme, leur recherche de<br />
vérité et de réponses ainsi que leur rejet de la morale<br />
peut susciter le scepticisme de certain·e·s. Mais celles<br />
et ceux qui aiment les remises en question sincères et<br />
la démolition des pieux mensonges, trouveront, dans<br />
cet échange, un puissant stimulant.<br />
Dana Sarfatis<br />
Call Me by Your Name : Une vision de l’amour<br />
Call Me by Your Name est le troisième opus de<br />
la trilogie sur le thème du désir de Luca Guadagnino.<br />
Comme dans ses projets précédents, cette<br />
œuvre brille par son esthétisme. Le grain de l’image,<br />
les plans langoureux et sa bande-son composée à la<br />
fois de vieilles chansons pop italiennes, de quelques<br />
pièces de musique classique ainsi que de deux<br />
morceaux magnifiques de Sufjan Steven élèvent<br />
ce long-métrage au rang de chef-d’œuvre. Ces éléments<br />
lui ont valu la nomination de « meilleur film »<br />
dans plusieurs festivals.<br />
Cette adaptation du livre du même nom d’André<br />
Aciman narre l’histoire d’Elio Perlman, sublimement<br />
interprété par Timothée Chalamet, un jeune<br />
adolescent de 17 ans vivant avec sa famille dans une<br />
Boarding House Reach : l’étrange album<br />
de Mr. Jack<br />
Un artiste qui ne se renouvelle pas finit par mourir.<br />
Insatiable d’expérimentations sonores en tout<br />
genre, Jack White nous livre avec Boarding House<br />
Reach un disque dont la couleur et l’énergie n’ont<br />
aucun point commun avec les précédents. Si le géant<br />
du rock avait pour habitude d’écrire tube sur tube, il<br />
n’en est rien cette fois-ci. Pas de chanson qui porte<br />
l’album. Ce problème cumulé à l’attente de quatre<br />
ans depuis Lazaretto a suffi à faire déchanter les fans.<br />
villa en Italie et tombant amoureux du nouvel assistant<br />
de recherche temporaire à son père, Oliver, joué<br />
par Armie Hammer. Bien qu’il s’agisse d’une relation<br />
homosexuelle entre un mineur et un adulte, le<br />
thème de l’amour interdit est évité. En effet, ni Elio<br />
ni Oliver ne doivent faire face à quelconque opposition<br />
à leur relation. Au contraire, les antagonistes<br />
s’avèrent être les protagonistes eux-mêmes. N’étant<br />
jamais tombé amoureux, Elio est incapable de comprendre<br />
les mécanismes complexes de l’amour et<br />
commet quelques gaffes qui éloignent Oliver. Inversement,<br />
les expériences à Oliver le poussent à<br />
mal comprendre Elio. Call Me by Your Name excelle<br />
de par sa représentation réaliste d’une première relation<br />
avec ses échecs déprimants et ses moments<br />
chaleureux qui ne laisseront personne indifférent.<br />
Moi aussi, je m’attendais à un rendu typé White, fait<br />
de guitares lourdes et grasses comme l’huile, d’une<br />
batterie brute, d’une voix saturée ainsi que de tous<br />
les autres éléments qui ont contribué à faire le son<br />
de l’Américain. La six cordes est remplacée sur de<br />
nombreuses parties par un synthé, qui devient l’instrument<br />
le plus mis en avant sur la galette. Fini les<br />
riffs incisifs. Enregistré par plus de dix musiciens issus<br />
d’horizons différents, Boarding House Reach est<br />
profondément expérimental. Ce mélange d’artistes<br />
offre un rendu hétéroclite intéressant mais parfois<br />
trop décousu. En effet, les seuls ingrédients récurrents<br />
sont les joujous analogiques avec lesquels le<br />
natif de Détroit s’amuse comme un enfant.<br />
Pour être honnête, ce n’est pas une réussite. On n’a<br />
pas envie de remuer la tête comme sur les premiers<br />
albums des White Stripes. Rien est transcendant.<br />
A écouter par curiosité sans trop d’attentes. En espérant<br />
que ce ne soit qu’une passade et que Jack<br />
White n’ait pas définitivement tiré un trait sur son<br />
passé.<br />
Et Nietzsche a pleuré<br />
Irvin D. Yalom<br />
Livre, 499 pages<br />
Pedro Pires<br />
« Call Me by Your Name »<br />
de Luca Guadagnino<br />
Film, 2h 11min<br />
Evan Lumignon<br />
Boarding House Reach<br />
de Jack White, CD<br />
Date de sortie : 23 mars<br />
<strong>2018</strong><br />
22 05.<strong>2018</strong>