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Les Cinémas Pathé Gaumont - Le mag - Février 2019

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ÉVÉNEMENT<br />

ÉVÈNEMENT<br />

LE PARI FOU<br />

D’ANTONIN<br />

BAUDRY<br />

I N T E R V I E W<br />

IL Y A CINQ ANS, ANTONIN BAUDRY AVAIT SCÉNARISÉ LE FILM DE BERTRAND TAVERNIER,<br />

QUAI D’ORSAY, ADAPTÉ DE SA PROPRE BD. ET DEPUIS, SILENCE RADIO. IL REVIENT AVEC LE CHANT<br />

DU LOUP, UN FILM DE SOUS-MARIN HALETANT QUI TIENT AUTANT DU JEU D’ÉCHECS QUE DU THRILLER.<br />

PROPOS RECUEILLIS PAR PIERRE LUNN<br />

<strong>Le</strong> Chant du loup ne ressemble à rien<br />

de ce qu’on a l’habitude de voir dans le<br />

paysage cinématographique français…<br />

C’est vrai que c’est une aventure un peu<br />

folle qui m’a pris trois ans de travail,<br />

jour et nuit, sans repos et sans relâche.<br />

Comment, quand on vient comme vous<br />

de la diplomatie, en arrive-t-on à faire<br />

un premier film de sous-marin ?<br />

Vous avez un peu de temps ? (Rires.)<br />

Sérieusement, cela fait longtemps<br />

que je veux réaliser un long-métrage.<br />

J’ai fait des études de cinéma – entre<br />

autres. Et j’ai étudié les films d’action<br />

de Hong Kong. Wong Kar Wai, Tsui<br />

Hark, John Woo, sont mes cinéastes<br />

de chevet. <strong>Le</strong>urs films m’ont nourri<br />

et m’ont très vite donné envie d’en<br />

réaliser, bien avant de m’engager dans<br />

la voie de la diplomatie… Concrètement,<br />

je me suis lancé sur <strong>Le</strong> Chant<br />

du loup après le tournage de Quai<br />

d’Orsay [adapté de sa propre BD].<br />

Sur le tournage, je questionnais tout<br />

le temps Bertrand [Tavernier] sur ses<br />

choix. Et puis un jour, j’ai eu un flash :<br />

j’ai vu un sous-marin émerger et tout<br />

s’est enchaîné. L’idée de « l’oreille<br />

d’or » a été centrale.<br />

C’est quoi, cette oreille d’or ?<br />

Dans le milieu des sous-mariniers,<br />

ce sont les spécialistes de l’analyse<br />

acoustique, recrutés pour leur mémoire<br />

auditive hyper développée. Ils sont<br />

formés à la reconnaissance des bruits<br />

sous-marins. J’ai découvert ce métier<br />

pendant mes recherches ; et c’est<br />

l’un des rares domaines où l’humain<br />

est encore supérieur à la machine.<br />

Un commandant de sous-marin se fie<br />

davantage à son « oreille d’or » pour<br />

prendre des décisions qu’à ses sonars.<br />

Tout se fonde sur de l’humain. Et c’est<br />

une idée de cinéma géniale. Pour un<br />

personnage, avoir ce genre d’antenne<br />

vous rend très fragile. Ça m’a permis<br />

de construire le personnage joué par<br />

François Civil.<br />

On a le sentiment que vos comédiens<br />

forment un véritable équipage. Comment<br />

avez-vous réussi ça ?<br />

C’était l’un de mes objectifs. Trouver<br />

une certaine authenticité de jeu<br />

collectif et tenir cette note. D’abord, je<br />

voulais que les acteurs sachent à quoi<br />

ressemble la vie dans ces engins ; on a<br />

donc plongé dans un vrai sous-marin.<br />

Et puis, il fallait travailler le réalisme<br />

dans cet espace. Une amie chorégraphe<br />

les a aidés à bouger, à prendre<br />

conscience des corps des autres. Dans<br />

un sous-marin, les membres d’équipage<br />

se connaissent intimement à<br />

force d’être les uns sur les autres. On<br />

se bouscule, on se dérange : il y a une<br />

connaissance tactile et « mentale » des<br />

corps. Je voulais qu’ils l’intègrent. C’est<br />

aussi un milieu où on ne peut pas mentir.<br />

Quand on est enfermés soixante-dix<br />

jours dans un submersible, on ne peut<br />

pas jouer un rôle, on est obligé d’être<br />

soi-même. C’est la raison pour laquelle<br />

j’ai choisi quatre acteurs principaux<br />

très différents. Il fallait faire ressortir<br />

ces individualités dans le collectif.<br />

<strong>Le</strong> film de sous-marin est un genre à<br />

part entière. Vous aviez des références<br />

précises en tête ?<br />

Il y a une centaine de films de sousmarins<br />

et je crois que je les ai tous<br />

vus. À peu près. (Rires.) Mon préféré<br />

reste Das Boot de Wolfgang Petersen,<br />

mais je voulais m’inspirer du réel<br />

et de mes propres expériences dans<br />

un sous-marin plutôt que de la réinterprétation<br />

du réel par des grands<br />

cinéastes. Si on approche le film à<br />

travers un genre, on risque de reproduire<br />

des clichés. Pendant toute la<br />

période créative, je me suis interdit de<br />

voir un seul film de sous-marin. Je les<br />

adore, et notamment USS Alabama ou<br />

À la poursuite d’Octobre rouge mais<br />

pour moi <strong>Le</strong> Chant du Loup n’est pas un<br />

film militaire. Il n’y a pas d’armée, en<br />

fait. Et ça n’a rien d’un film américain.<br />

C’est effectivement un film à part…<br />

LES CINÉMAS PATHÉ ET GAUMONT 7

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