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des<br />
POUTINE<br />
INE,<br />
LA GUERRE<br />
ET NOUS<br />
Le conflit entre la Russie et l’Ukraine<br />
implique forcément l’Afrique.<br />
Par ses immenses conséquences politiques<br />
et économiques. Mais aussi par ce que<br />
cela implique sur notre conception<br />
du monde, de la multipolarité,<br />
des nouveaux impérialismes.<br />
REPORTAGE<br />
L’EXCEPTION MAURITANIE<br />
ARCHITECTURE<br />
DIÉBÉDO FRANCIS KÉRÉ<br />
OU LE FORMIDABLE TALENT DURABLE<br />
ÉMANCIPATION<br />
PAP NDIAYE<br />
ET LA LONGUE LUTTE<br />
DES NOIRS <strong>AM</strong>ÉRICAINS<br />
INTERVIEW<br />
FELWINE SARR<br />
« LA FICTION N’EST PAS<br />
UN REPORTAGE »<br />
FASHION<br />
NADIA DHOUIB, L’AUTRE FIGURE<br />
DE LA MODE PARISIENNE<br />
France 4,90 € – Afrique du Sud 49,95 rands (taxes incl.) – Algérie 320 DA – Allemagne 6,90 € – Autriche 6,90 € – Belgique 6,90 € – Canada 9,99 $C<br />
DOM 6,90 € – Espagne 6,90 € – États-Unis 8,99 $ – Grèce 6,90 € – Italie 6,90 € – Luxembourg 6,90 € – Maroc 39 DH – Pays-Bas 6,90 € – Portugal cont. 6,90 €<br />
Royaume-Uni 5,50 £ – Suisse 8,90 FS – TOM 990 F CFP – Tunisie 7,50 DT – Zone CFA 3 000 FCFA ISSN 0998-9307X0<br />
N°<strong>427</strong> - AVRIL 2022<br />
L 13888 - <strong>427</strong> S - F: 4,90 € - RD
©Photograph: Laurent Ballesta/Gombessa Project<br />
COLLECTION<br />
Fifty Fathoms
édito<br />
LE POUVOIR PAR LA FORCE<br />
PAR ZYAD LIM<strong>AM</strong><br />
Tout début avril 2022. C’est la guerre en Europe.<br />
L’Ukraine combat héroïquement. La « technoguérilla<br />
» de ses combattants est redoutable, face<br />
à la rigidité toute soviétique des bataillons russes. Le<br />
pays a survécu plus d’un mois, et, en soi, c’est déjà<br />
comme une première victoire. Mais la terre d’Ukraine<br />
est dévastée par les bombes. Des villes sont sous siège,<br />
rayées de la carte, comme Marioupol devenue cité<br />
martyre. Des millions de réfugiés. Des hommes et des<br />
femmes, des civils, abattus dans la rue. Un carnage<br />
et une tragédie humaine sans nom. On évoque des<br />
crimes de guerre.<br />
Vladimir Poutine et son état-major politicomilitaire<br />
ont décidé de régler la « question ukrainienne<br />
» de la pire des manières, par l’invasion et<br />
la « découpe ». Pourtant, ce qui ne devait durer que<br />
quelques jours tourne à la guerre d’attrition. L’armée<br />
russe prend des coups, perd beaucoup d’hommes,<br />
elle piétine, elle enrage. L’« opération militaire spéciale<br />
» vire au semi-fiasco. Elle provoque une réaction<br />
quasi unanime de l’Occident, de l’OTAN, de ces pays<br />
« décadents et irrésolus ». Avec un régime de sanctions<br />
comme rarement vu dans l’histoire. La répression<br />
s’abat sur la Russie, les journaux indépendants<br />
ferment, seule la vérité officielle doit s’imposer.<br />
On essaie de comprendre les motivations<br />
réelles, profondes d’une telle stratégie… Le renforcement<br />
du poutinisme (le chef et ses alliés) ? Couper<br />
court à l’expérience démocratique aux frontières du<br />
Kremlin (comme en Biélorussie) ? Certainement, et<br />
repousser l’OTAN, faire une démonstration de force<br />
vis-à-vis de l’« Ouest ». Surtout réintégrer dans la mère<br />
patrie l’Ukraine, « État illégitime », cette « fiction » issue du<br />
démembrement de l’URSS. Une décision, une guerre<br />
donc fondamentalement impérialiste et coloniale.<br />
Le monde occidental regarde, effaré, à juste<br />
titre, ces images moyenâgeuses de violence et<br />
de destruction, de massacre de civils. Le monde<br />
occidental a la mémoire courte aussi. La déstabilisation<br />
de l’ordre global, la « dérégulation de la force »<br />
pour reprendre l’expression de Ghassan Salamé, est<br />
venue par la guerre d’Irak, en 1991 – une invasion<br />
américaine, construite sur un mensonge immense,<br />
avec un coût humain et politique stupéfiant.<br />
Ce n’est pas une nouvelle guerre froide qui<br />
commence, avec un alignement des blocs, mais<br />
comme un éclatement du monde. Avec, aux portes<br />
de l’Europe, une Russie isolée, instable, explosive. Pour<br />
Moscou, « ne pas gagner », c’est déjà « perdre ». Et la<br />
Russie ne peut pas « perdre ». Ce serait l’effondrement<br />
possible, l’affaire deviendrait existentielle… Les États-<br />
Unis, qu’on le veuille ou non, resteront la plus grande<br />
puissance (financière, militaire, politique, culturelle)<br />
de la planète. Et l’Europe, le continent le plus riche.<br />
La Chine jouera son jeu, à la fois prudente et audacieuse,<br />
utilisant au mieux ce conflit pour contester la<br />
prédominance de l’Occident. Cet Occident qui ne<br />
sera plus l’alpha et l’oméga de la construction internationale.<br />
Des puissances moyennes ou régionales<br />
ont déjà pris de l’autonomie. Elles privilégient leurs intérêts<br />
propres. Tout en ménageant les vrais centres de<br />
décision. Pour les plus habiles, y compris en Afrique, il<br />
y aura des espaces de liberté, une sorte de nouveau<br />
non-alignement, plus prosaïque, moins idéologique.<br />
Et puis, en toile de fond de ces fracas, il y a<br />
aura le choix. La question essentielle de la démocratie<br />
contre l’autoritarisme. La guerre en Ukraine,<br />
c’est aussi l’influence d’un seul homme, un « strong<br />
man », Vladimir Poutine, sur son pays. La Chine aussi<br />
est aux mains d’un « homme fort », Xi Jinping, qui a<br />
pris tout le pouvoir. En Inde, Narendra Modi s’appuie<br />
sur le populisme et l’islamophobie pour asseoir sa<br />
puissance. Cela aurait pu être le cas aux États-Unis,<br />
situation absolument stupéfiante, si les manœuvres<br />
postélectorales de Donald Trump avaient abouti… Les<br />
démocraties dites illibérales prospèrent (en Turquie, en<br />
Hongrie, en Afrique aussi), et c’est aussi le retour des<br />
militaires et des coups d’État.<br />
Ce pouvoir par la force, qui chaque jour s’accentue<br />
un peu plus aux quatre coins du monde,<br />
qui s’alimente du populisme, des identités, du nationalisme,<br />
est au cœur des conflits et des guerres à venir.<br />
Ce pouvoir par la force, toxique, n’apporte rien pour<br />
résoudre les complexités du monde. ■<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 3
Royaume-Uni 5,50 £ – Suisse 8,90 FS – TOM 990 F CFP – Tunisie 7,50 DT – Zone CFA 3 000 FCFA ISSN 0998-9307X0<br />
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N°<strong>427</strong> AVRIL 2022<br />
3 ÉDITO<br />
Le pouvoir par la force<br />
par Zyad Limam<br />
6 ON EN PARLE<br />
C’EST DE L’ART, DE LA CULTURE,<br />
DE LA MODE ET DU DESIGN<br />
Abd el-Kader,<br />
l’homme aux mille vies<br />
26 PARCOURS<br />
Omar Mahfoudi<br />
par Fouzia Marouf<br />
29 C’EST COMMENT ?<br />
Bas les masques !<br />
par Emmanuelle Pontié<br />
46 PORTFOLIO<br />
World Press Photo 2022 :<br />
Dans l’œil des cyclones<br />
par Zyad Limam<br />
90 VINGT QUESTIONS À…<br />
Maïmouna Coulibaly<br />
par Astrid Krivian<br />
P.40<br />
TEMPS FORTS<br />
30 Poutine, la guerre<br />
et nous<br />
par Cédric Gouverneur<br />
et Hussein Ba<br />
40 La méthode<br />
Nouakchott<br />
par Pierre Coudurier<br />
52 Felwine Sarr :<br />
« La fiction n’est<br />
pas un reportage »<br />
par Astrid Krivian<br />
58 Pap Ndiaye,<br />
le récit puissant<br />
de l’émancipation<br />
par Astrid Krivian<br />
64 Nadia Dhouib,<br />
une autre<br />
idée du style<br />
par Frida Dahmani<br />
70 Diébédo Francis Kéré,<br />
le talent durable<br />
par Luisa Nannipieri<br />
P.06<br />
POUTINE,<br />
LA GUERRE<br />
ET NOUS<br />
Le conflit entre la Russie et l’Ukraine<br />
implique forcément l’Afrique.<br />
Par ses immenses conséquences politiques<br />
et économiques. Mais aussi par ce que<br />
cela implique sur notre conception<br />
du monde, de la multipolarité,<br />
des<br />
des nouveaux impérialismes.<br />
REPORTAGE<br />
L’EXCEPTION MAURITANIE<br />
ARCHITECTURE<br />
DIÉBÉDO FRANCIS KÉRÉ<br />
OU LE FORMIDABLE TALENT DURABLE<br />
ÉMANCIPATION<br />
PAP NDIAYE<br />
ET LA LONGUE LUTTE<br />
DES NOIRS <strong>AM</strong>ÉRICAINS<br />
INTERVIEW<br />
FELWINE SARR<br />
« LA FICTION N’EST PAS<br />
UN REPORTAGE »<br />
FASHION<br />
NADIA DHOUIB, L’AUTRE FIGURE<br />
DE LA MODE PARISIENNE<br />
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N°<strong>427</strong> - AVRIL 2022<br />
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Afrique Magazine est interdit de diffusion en Algérie depuis mai 2018. Une décision sans aucune justification. Cette grande<br />
nation africaine est la seule du continent (et de toute notre zone de lecture) à exercer une mesure de censure d’un autre temps.<br />
Le maintien de cette interdiction pénalise nos lecteurs algériens avant tout, au moment où le pays s’engage dans un grand mouvement<br />
de renouvellement. Nos amis algériens peuvent nous retrouver sur notre site Internet : www.afriquemagazine.com<br />
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4 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
FONDÉ EN 1983 (38 e ANNÉE)<br />
31, RUE POUSSIN – 75016 PARIS – FRANCE<br />
Tél. : (33) 1 53 84 41 81 – Fax : (33) 1 53 84 41 93<br />
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Zyad Limam<br />
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION<br />
DIRECTEUR DE LA RÉDACTION<br />
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Assisté de Laurence Limousin<br />
llimousin@afriquemagazine.com<br />
RÉDACTION<br />
Emmanuelle Pontié<br />
DIRECTRICE ADJOINTE<br />
DE LA RÉDACTION<br />
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Isabella Meomartini<br />
DIRECTRICE ARTISTIQUE<br />
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Jessica Binois<br />
PREMIÈRE SECRÉTAIRE<br />
DE RÉDACTION<br />
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Amanda Rougier PHOTO<br />
arougier@afriquemagazine.com<br />
ONT COLLABORÉ À CE NUMÉRO<br />
Hussein Ba, Jean-Marie Chazeau, Pierre<br />
Coudurier, Frida Dahmani, Catherine<br />
Faye, Cédric Gouverneur, Dominique<br />
Jouenne, Astrid Krivian, Fouzia Marouf,<br />
Luisa Nannipieri, Sophie Rosemont.<br />
VIVRE MIEUX<br />
Danielle Ben Yahmed<br />
RÉDACTRICE EN CHEF<br />
avec Annick Beaucousin, Julie Gilles.<br />
VENTES<br />
EXPORT Laurent Boin<br />
TÉL. : (33) 6 87 31 88 65<br />
FRANCE Destination Media<br />
66, rue des Cévennes - 75015 Paris<br />
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ABONNEMENTS<br />
Com&Com/Afrique Magazine<br />
18-20, av. Édouard-Herriot -<br />
92350 Le Plessis-Robinson<br />
Tél. : (33) 1 40 94 22 22<br />
Fax : (33) 1 40 94 22 32<br />
afriquemagazine@cometcom.fr<br />
P.52<br />
P.46<br />
FAIZ ABUBAKER MOH<strong>AM</strong>ED - BASSO CANNARSA/OPALE.PHOTO - LÉA CRESPI/PASCO - IWAN BAAN<br />
BUSINESS<br />
78 Le blé, une urgence<br />
africaine<br />
82 Diane Mordacq :<br />
« Nous allons assister<br />
à un retour du<br />
protectionnisme »<br />
84 La hausse des métaux<br />
bouleverse la donne<br />
85 Le conflit en Europe<br />
nuit au tourisme<br />
par Cédric Gouverneur<br />
VIVRE MIEUX<br />
86 Mal de dos : Bouger est<br />
le meilleur traitement !<br />
87 Bien hydrater<br />
son visage<br />
88 Un appareil dentaire<br />
n’est pas qu’esthétique !<br />
89 Douleurs : Quand<br />
la chaleur ou le froid<br />
fait du bien<br />
par Annick Beaucousin<br />
et Julie Gilles<br />
P.64<br />
P.70<br />
COMMUNICATION ET PUBLICITÉ<br />
regie@afriquemagazine.com<br />
<strong>AM</strong> International<br />
31, rue Poussin - 75016 Paris<br />
Tél. : (33) 1 53 84 41 81<br />
Fax : (33) 1 53 84 41 93<br />
AFRIQUE MAGAZINE<br />
EST UN MENSUEL ÉDITÉ PAR<br />
31, rue Poussin - 75016 Paris.<br />
SAS au capital de 768 200 euros.<br />
PRÉSIDENT : Zyad Limam.<br />
Compogravure : Open Graphic<br />
Média, Bagnolet.<br />
Imprimeur : Léonce Deprez, ZI,<br />
Secteur du Moulin, 62620 Ruitz.<br />
Commission paritaire : 0224 D 85602.<br />
Dépôt légal : avril 2022.<br />
La rédaction n’est pas responsable des textes et des photos<br />
reçus. Les indications de marque et les adresses figurant<br />
dans les pages rédactionnelles sont données à titre<br />
d’information, sans aucun but publicitaire. La reproduction,<br />
même partielle, des articles et illustrations pris dans Afrique<br />
Magazine est strictement interdite, sauf accord de la rédaction.<br />
© Afrique Magazine 2022.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 5
ON EN PARLE<br />
C’est maintenant, et c’est de l’art, de la culture, de la mode, du design et du voyage<br />
HOMMAGE<br />
ABD EL-KADER,<br />
Embarquement<br />
d’Abd el-Kader à Bordeaux,<br />
Stanislas Gorin, 1850.<br />
l’homme aux mille vies<br />
D’une richesse exceptionnelle, le parcours de l’ÉMIR COMBATTANT,<br />
fondateur de la nation algérienne, est mis à l’honneur au Mucem de Marseille.<br />
CHEF DE GUERRE ARABE, leader spirituel soufi,<br />
père de la nation algérienne, cet émir combattant<br />
(1808-1883) est considéré comme l’une des icônes les plus<br />
marquantes de l’histoire du pays. Si le chef nationaliste,<br />
proclamé « sultan des Arabes » par les tribus de l’Oranie<br />
en 1832, défie les armées françaises de 1832 à 1847,<br />
avant de créer les bases d’un premier État national, il<br />
est aussi un homme d’une grande tolérance religieuse,<br />
qui sauve des milliers de chrétiens d’Orient d’un massacre<br />
certain. Sa personnalité se démarque dans le monde<br />
musulman du XIX e siècle et lui vaut un très grand prestige<br />
en France, où il est autant redouté qu’admiré, inspirant<br />
d’illustres auteurs, tels que Victor Hugo, Arthur Rimbaud<br />
ou encore Gustave Flaubert. C’est l’un des grands esprits<br />
de son temps, que l’on découvre à travers 250 œuvres<br />
et documents issus de collections prestigieuses, publiques<br />
et privées. Et un homme aux multiples facettes, sans cesse<br />
en mouvement, qui, spirituellement et dans son érudition,<br />
n’a jamais cessé d’apprendre ni d’évoluer. ■ Catherine Faye<br />
« ABD EL-KADER », Musée des civilisations<br />
de l’Europe et de la Méditerranée, Marseille (France),<br />
jusqu’au 22 août 2022. mucem.org<br />
RMN-GRAND PALAIS/A. DANVERS<br />
6 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
RMN-GRAND PALAIS (CHÂTEAU DE VERSAILLES)/HERVÉ LEWANDOWSKI<br />
Abd el-Kader, en pied,<br />
Jean-Baptiste-Ange<br />
Tissier, 1853.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 7
ON EN PARLE<br />
FOLK<br />
MÉLISSA LAVEAUX<br />
Contes féministes<br />
Dans son quatrième album,<br />
L’ARTISTE ENGAGÉE revisite<br />
ses racines haïtiennes avec un bagage<br />
musical occidental. Brillant !<br />
NOUS L’AVIONS QUITTÉE sur la poésie folk anglo-créole de Radyo<br />
Siwèl, en 2018. On la retrouve aujourd’hui avec un quatrième album<br />
studio tout aussi exigeant : Mama Forgot Her Name Was Miracle. Et<br />
confectionné dans sa ville d’adoption, Paris, choisie après des années<br />
passées au Canada, où ses parents haïtiens avaient trouvé refuge. C’est<br />
une affirmation musicale qu’elle signe ici, en<br />
tant que femme, noire, humaine perdue dans<br />
un monde toujours patriarcal et violent.<br />
En guide d’antidotes, des berceuses,<br />
des contes, mais aussi des mythologies<br />
ancestrales – en témoigne « Lilith ». Sont<br />
convoquées Audre Lorde, Jackie Shane,<br />
Ana Mendieta, Alice Walker ou encore<br />
Faith Ringgold. Difficile<br />
de ne pas se laisser porter<br />
par le groove et la spiritualité<br />
de « Papessa », la sensibilité<br />
vaporeuse de « Tears » ou<br />
la pop percussive de « Faith<br />
Meets Ana ». Toujours<br />
nourrie de son énergie<br />
punk, la musicienne<br />
s’est en outre entourée<br />
de la crème des<br />
réalisateurs, invitant<br />
au micro November<br />
Ultra, Dope Saint Jude<br />
et Oxmo Puccino. Gloire à<br />
Mélissa ! ■ Sophie Rosemont<br />
MÉLISSA LAVEAUX,<br />
Mama Forgot Her Name<br />
Was Miracle,<br />
Twanet/ADA.<br />
❶Corneille<br />
SOUNDS<br />
À écouter maintenant !<br />
Encre rose, Wlab<br />
Déjà le neuvième album<br />
pour Cornelius Nyungura,<br />
né en Allemagne et<br />
miraculeux rescapé du génocide des Tutsis,<br />
découvert avec « Parce qu’on vient de loin »<br />
au début des années 2000. Aujourd’hui,<br />
Corneille a 44 ans et a eu envie de<br />
retourner aux sources de la musique<br />
entraînante et groovy qu’il écoutait<br />
enfant, la pop et le R’n’B des années<br />
1980. Dont cet Encre rose qui porte<br />
bien son nom, en ces temps moroses.<br />
❷Ibibio Sound<br />
Machine<br />
Electrocity,<br />
Merge Records<br />
Depuis le milieu des<br />
années 2010, on suit avec<br />
beaucoup d’intérêt ce formidable groupe<br />
londonien, doté d’une chanteuse en or,<br />
l’Anglo-Nigériane Eno Williams. Pour ce<br />
nouvel album qui profite de la production<br />
d’une référence de la scène électro-brit, Hot<br />
Chip, l’afrofuturisme est toujours de mise, se<br />
nourrissant de jazz comme de disco. Funky,<br />
onirique, nourri de synthés comme de<br />
korego. Électrique, oui, et très bien troussé !<br />
❸Ÿuma<br />
Hannet Lekloub,<br />
Ada/Warner<br />
Après les déjà très réussis<br />
Chura et Poussières<br />
d’étoiles, Hannet Lekloub<br />
réussit le virage crucial du troisième<br />
album. Et devrait confirmer pour de bon<br />
l’alchimie qui règne entre la chanteuse<br />
Sabrine Jenhani et le guitariste Ramy<br />
Zoghlami. Deux esprits libres de Tunis,<br />
passés par l’électro ou le rock, et qui ont<br />
décidé de chanter toutes les possibilités<br />
créatives de leur terre natale, quelque<br />
part entre folk et électro. Superbe. ■ S.R.<br />
DR - ADELINE RAPON - DR (3)<br />
8 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
De gauche<br />
à droite, l’actrice<br />
Khanyi Mbau<br />
et la rappeuse<br />
Nadia Nakai,<br />
toutes deux<br />
sud-africaines.<br />
TÊTES À CLASHES<br />
SÉRIE<br />
La première TÉLÉ-RÉALITÉ AFRICAINE DE NETFLIX se vautre<br />
dans le luxe au cœur de Johannesbourg. Des stars des réseaux sociaux<br />
rivalisent d’extravagances sur fond de querelles bien artificielles…<br />
MOSA HLOPHE/NETFLIX - DR<br />
KIM KARDASHIAN n’a qu’à bien se tenir ! Netflix a fait<br />
appel à des people panafricains particulièrement bling-bling,<br />
aux tenues délirantes, pour sa première télé-réalité tournée<br />
sur le continent ! Dans un déluge de champagne, entre<br />
deux jets privés, se recevant pour des soirées thématiques<br />
sur les rooftops de Johannesbourg, ce petit groupe apprend à<br />
se connaître en sept épisodes, entre amitiés, flirts et disputes<br />
futiles. Le spectacle est surtout assuré par les femmes, car les<br />
hommes, qui jonglent avec épouses et enfants et ne savent pas<br />
toujours quelle grosse cylindrée choisir, semblent bien éteints<br />
face à des businesswomen sûres d’elles, riches et autonomes.<br />
En tête d’affiche : la rappeuse sud-africaine Nadia<br />
Nakai, l’entrepreneuse ougandaise Zari Hassan, l’actrice<br />
nigériane (les sous-titres français parlent systématiquement<br />
de « nigérienne »…) Annie Macaulay-Idibia. Sans oublier<br />
l’impériale Khanyi Mbau, actrice sud-africaine aux<br />
décolletés échancrés d’où manque à chaque instant de<br />
s’échapper un sein refait, et dont les cils sont aussi longs<br />
que ses faux ongles. Côtés messieurs : le présentateur<br />
télé sud-africain Andile Ncube, tiré à quatre épingles<br />
et très peu monogame, le rappeur tanzanien Diamond<br />
Platnumz (qui ose la coiffure à double chignon), le chanteur<br />
nigérian 2Baba, ainsi que le styliste haut en couleur<br />
Swanky Jerry, nigérian lui aussi, qui habille avec beaucoup<br />
d’inventivité chanteuses et premières dames, sans omettre<br />
de soigner ses propres looks. La parité règne car, comme<br />
le dit Khanyi Mbau, « nos comptes en banque ont le même<br />
niveau ». « Je suis milliardaire, je n’ai pas besoin d’un<br />
homme », renchérit Zari Hassan, dite The Boss Lady…<br />
La promesse du titre, Young, Famous & African,<br />
est presque tenue : plus vraiment jeunes (les principaux<br />
personnages ont entre 30 et 46 ans), mais célèbres car suivis<br />
par des millions de followers sur Instagram. Une Afrique<br />
d’hôtels de luxe et d’appartements immenses, que l’on<br />
quitte pour une escapade à Soweto expédiée en trois<br />
plans, ou un safari nocturne au plus près des lions qui<br />
effraient l’une des participantes : « Je n’aime pas ces trucs<br />
de Blancs ! » L’argent n’est définitivement pas un problème,<br />
la pauvreté non plus car le propos se veut radical : « Il<br />
est temps pour nous, jeunes Africains noirs, de s’unir et<br />
de dire au monde : on n’est pas le tiers-monde que vous<br />
imaginez. » De là à copier sans recul les pires travers<br />
de la société de consommation… ■ Jean-Marie Chazeau<br />
YOUNG, F<strong>AM</strong>OUS & AFRICAN (Afrique du Sud),<br />
de Martin Asare Amankwa et Peace Hyde. Avec Khanyi<br />
Mbau, Nadia Nakai, Diamond Platnumz. Sur Netflix.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 9
ON EN PARLE<br />
Ci-contre, le batteur américain Marque Gilmore.<br />
Ci-dessous, le claviériste malien Cheick Tidiane Seck.<br />
RYTHMES<br />
BLACK LIVES<br />
POWER TO<br />
THE PEOPLE<br />
Au service d’un message antiraciste,<br />
ce COLLECTIF DE MUSICIENS<br />
de haut vol propose des compositions<br />
aussi mélodiques que poétiques.<br />
Le slameur américain<br />
Sharrif Simmons.<br />
CHEICK TIDIANE SECK AU MICRO et aux claviers, David et<br />
Marque Gilmore à la guitare et à la batterie, Immanuel Wilkins<br />
et Jacques Schwarz-Bart au saxo, Grégory Privat au piano,<br />
Reggie Washington à la basse, Yul aux percussions, mais aussi<br />
la mezzo-soprano Alicia Hall Moran au chant… Au total, ce sont<br />
25 artistes qui se fédèrent autour de 20 morceaux autant réussis<br />
les uns que les autres pour lutter contre le racisme. Et quoi de<br />
mieux que la musique, dans ce qu’elle a de plus riche et hybride ?<br />
Entre mélopées traditionnelles africaines, jazz, blues et spoken<br />
word, ces artistes racontent la diaspora africaine en remontant<br />
jusqu’à la déportation de celles et ceux qui devinrent esclaves<br />
loin de chez eux. Parmi les influences, James Brown, Fela Kuti ou<br />
encore Abbey Lincoln et Max Roach. Si le rythme prend aux tripes,<br />
les paroles aussi, l’émotion se faufile ici et là et renforce d’autant<br />
plus le message de ce disque, qui reste crucial aujourd’hui. ■ S.R.<br />
BLACK LIVES, FROM GENERATION TO GENERATION,<br />
Jammin’colorS/L’Autre Distribution.<br />
DAREM BOUCHENTOUF - DR (3)<br />
10 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
LITTÉRATURE<br />
ORHAN P<strong>AM</strong>UK<br />
Le magicien des mots<br />
Le PRIX NOBEL TURC signe une fresque<br />
onirique où s’amorce la chute de l’empire<br />
ottoman, confronté aux ravages d’une épidémie.<br />
LEA CRESPI/PASCO - DR<br />
AU CŒUR DE CE ROMAN, il y a une île imaginaire,<br />
Mingher, « perle de la Méditerranée orientale ».<br />
Nous sommes en 1901, et la peste s’y est déclarée.<br />
Sur cette île multiculturelle, où musulmans<br />
et orthodoxes tentent de cohabiter, la maladie<br />
agit comme un accélérateur des tensions. Dès lors,<br />
ce microcosme, situé au large de Rhodes, sur la<br />
route d’Alexandrie, devient le théâtre d’une crise<br />
sanitaire et communautaire sans précédent. Si ce<br />
texte romanesque, où se mêlent fiction et réalité,<br />
semble coller à l’actualité, le démarrage de son<br />
écriture remonte pourtant à 2016, bien avant que<br />
ne débute la pandémie. Ce n’est qu’au moment où<br />
l’auteur, connu pour son engagement intellectuel<br />
et politique, terminait de rédiger les dernières pages,<br />
que le Covid-19 a fait son apparition. Le sentiment<br />
de peur éprouvé lui faisant ainsi clore son récit dans<br />
l’émotion et l’urgence. En réalité, cela fait quarante ans que<br />
l’auteur turc le plus lu au monde s’intéresse aux épidémies.<br />
Des personnages spécialistes de la peste étaient déjà au centre<br />
de deux de ses livres, La Maison du silence et Le Château blanc.<br />
Pour l’élaboration de ce roman d’amour, policier et historique,<br />
l’éthique existentialiste et notamment La Peste, d’Albert Camus,<br />
ont été ses premières inspirations. Ainsi que les théories<br />
du Palestino-Américain Edward Saïd, pionnier<br />
du post-colonialisme, l’orientalisme et la lecture<br />
erronée que l’Ouest a de l’Est lorsqu’il lui attribue<br />
un fatalisme inné. Si Pamuk pensait au départ faire<br />
de Mingher une Turquie miniature, son envie de<br />
réalisme est venue l’amender. Il s’est donc inspiré<br />
de la Crète et de l’île de Kastellórizo, le point le plus<br />
oriental de la Grèce actuelle. Dans un subtil mélange<br />
de références, chaque détail, chaque personnage,<br />
chaque mouvement a été pensé, travaillé, examiné.<br />
Ce récit nous entraînant ainsi dans un tourbillon.<br />
Celui du sort hasardeux de l’humanité. ■ C.F.<br />
ORHAN P<strong>AM</strong>UK,<br />
Les Nuits de la peste,<br />
Gallimard,<br />
688 pages, 25 €.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 11
ON EN PARLE<br />
LA FEMME<br />
DU FOSSOYEUR<br />
(Finlande-Allemagne-<br />
France), de Khadar<br />
Ayderus Ahmed.<br />
Avec Omar Abdi,<br />
Yasmin Warsame,<br />
Kadar Abdoul-Aziz<br />
Ibrahim. En salles.<br />
DR<strong>AM</strong>E<br />
CREUSER SA TOMBE<br />
ÉTALON D’OR DE YENNENGA au Fespaco 2021, ce film somalien, tourné<br />
à Djibouti, raconte une émouvante histoire d’amour entre cimetière et désert…<br />
GULED EST FOSSOYEUR, il attend pelle à la main,<br />
aux portes de l’hôpital, que soient livrés des cadavres.<br />
Nasra, son épouse, atteinte d’une maladie mortelle, cuisine,<br />
allongée près de leur jeune fils, Mahad. Pour soigner sa<br />
femme, Guled doit trouver l’équivalent d’un an de salaire…<br />
Les sacrifices seront douloureux pour y arriver. Il lui faudra<br />
revenir dans son village natal et vendre un troupeau qui<br />
lui appartient, mais jalousement gardé par sa famille<br />
qui voulait le marier à une autre et refuse de le revoir.<br />
Cette course contre la montre dans le désert est sobrement<br />
racontée, baignée de mélancolie mais aussi parfois de joie<br />
et de couleurs, comme lorsque le couple, avant la maladie,<br />
s’invite dans un riche mariage grâce à… une chèvre.<br />
Toute l’énergie du film est portée par cet amour pour<br />
une femme forte mais diminuée et par l’urgence à pouvoir<br />
la guérir. Jusqu’où aller pour y parvenir ? Dans le rôle de la<br />
souffrante magnifique, la top-modèle canadienne d’origine<br />
somalienne, Yasmin Warsame, que le réalisateur finlandais,<br />
lui-même d’origine somalienne, avait remarqué dans une<br />
campagne publicitaire pour H&M sur les murs d’Helsinki.<br />
Même si le récit illustre l’absence d’accès aux soins de bien<br />
des Africains, on n’est pas dans un documentaire sur le Djibouti<br />
d’aujourd’hui. D’ailleurs, les chansons de la bande originale sont<br />
sénégalaises, et aucun aspect moderne de ce pays n’apparaît<br />
à l’écran. Comme pour mieux rendre intemporel ce conte<br />
pourtant ancré dans une terrible réalité sociale… ■ J.-M.C.<br />
PATRIMOINE<br />
L’art du divin Un parcours conçu comme une plongée<br />
au cœur de la société bamiléké, au quai Branly.<br />
CALEBASSE PERLÉE MULTICOLORE, trône royal décoré de cauris, masques, ou encore sculptures<br />
sur bois, les 300 œuvres présentées – dont 260 trésors précieusement conservés par des chefs<br />
traditionnels – célèbrent l’art des communautés des hauts plateaux des Grassfields, à l’ouest du<br />
Cameroun. Ponctuées d’œuvres d’artistes contemporains camerounais qui ont puisé dans leurs<br />
techniques traditionnelles, elles illustrent l’influence culturelle des chefferies, piliers sociaux,<br />
économiques et politiques dès le XVI e siècle, et leur dimension vivante. Considérées comme des<br />
contre-pouvoirs et investies de pouvoirs quasi divins, ces congrégations assurent encore aujourd’hui<br />
le lien entre le monde des vivants et celui des ancêtres, et veillent au respect des traditions et de la<br />
culture bamiléké. Plus encore, elles invitent à un dialogue de l’humain avec tout ce qui l’entoure, au sein<br />
d’un système dans lequel politique, religion et organisation sociale sont intrinsèquement liées. ■ C.F.<br />
« SUR LA ROUTE DES CHEFFERIES DU C<strong>AM</strong>EROUN : DU VISIBLE À L’INVISIBLE »,<br />
Musée du quai Branly, Paris (France), jusqu’au 17 juillet 2022. quaibranly.fr<br />
ARTTU PELTOMAA - DR (2)<br />
12 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
Ci-contre, Mémoriel Sétif Guelma Kherrata,<br />
Kamel Yahiaoui, 1995. Œuvre réalisée en hommage<br />
aux victimes des massacres du 8 mai 1945.<br />
Ci-dessus, La Kahena, Jean Atlan, 1958.<br />
Ci-dessous, Cité des Sablons (composée<br />
de 620 appartements), Patrick Zachmann, 1989.<br />
DR - CNAC/MN<strong>AM</strong> DIST. RMN-AD<strong>AM</strong> RZEPKA - PATRICK ZACHMANN/MAGNUM PHOTOS<br />
EXPO <strong>AM</strong>OURS ET DÉS<strong>AM</strong>OURS<br />
Voyage dans les méandres de l’histoire des relations<br />
entre JUIFS ET MUSULMANS DE FRANCE.<br />
C’EST UNE RÉFLEXION et une présentation passionnantes<br />
que proposent les historiens Mathias Dreyfuss, Karima<br />
Dirèche et Benjamin Stora, également commissaire<br />
général de l’exposition, à travers plus de 100 œuvres d’art<br />
historiques et contemporaines et de nombreux documents<br />
et archives. Un regard neuf sur les unions et les désunions<br />
des juifs et des musulmans dans l’Hexagone, ainsi que sur<br />
le rôle essentiel du pays et de l’État dans la transformation<br />
de ces rapports, tant en Afrique du Nord qu’en France<br />
métropolitaine. Elle est aujourd’hui le pays d’Europe<br />
qui compte les populations juive et musulmane les plus<br />
importantes du continent. Si leurs relations apparaissent<br />
aujourd’hui plus distendues et dégradées que jamais, il n’en<br />
a pas toujours été ainsi. Des deux côtés de la Méditerranée,<br />
une histoire commune relie ces deux communautés,<br />
qui tirent leur force de traditions et de savoirs partagés.<br />
Comment alors réinventer cette relation historique malgré<br />
les mémoires douloureuses et les chaos de l’actualité ? ■ C.F.<br />
« JUIFS ET MUSULMANS DE LA FRANCE<br />
COLONIALE À NOS JOURS », Musée national<br />
de l’histoire de l’immigration, Paris (France),<br />
jusqu’au 17 juillet 2022. histoire-immigration.fr<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 13
ON EN PARLE<br />
Son film,<br />
Les rêves n’ont<br />
pas de titre, sera<br />
exposé jusqu’au<br />
27 novembre.<br />
ARTZINEB SEDIRA,<br />
LA FRANCE À VENISE<br />
L’artiste visuelle franco-algérienne<br />
proposera une expérience humaniste<br />
immersive à la 59 E BIENNALE.<br />
L’ARTISTE INVESTIRA le pavillon français à la 59 e Biennale<br />
internationale d’art contemporain de Venise, qui ouvre ses<br />
portes le 23 avril. Née en France de parents algériens, Zineb<br />
Sedira travaille entre Paris, Londres et Alger, où elle soutient<br />
le développement de la scène contemporaine. Son installation<br />
cinématographique pour le pavillon français, Les rêves n’ont<br />
pas de titre, est une expérience humaniste immersive qui<br />
brouille les frontières entre fiction et réalité : elle y mêle<br />
éléments biographiques et scènes de films emblématiques<br />
qui rappellent l’élan militant, culturel et politique des cinémas<br />
français, italien et algérien des années 1960 et 1970.<br />
Un hommage à l’influence du septième art sur le désir<br />
d’émancipation post-colonial. On y retrouve tous les thèmes<br />
chers à l’artiste, comme la lutte contre le racisme, la liberté,<br />
la solidarité, l’identité ou encore la famille. ■ Luisa Nannipieri<br />
labiennale.org<br />
DR - THIERRY BAL ET ZINEB SEDIRA (2)<br />
14 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
MUSIQUE<br />
PONGO<br />
La nouvelle<br />
diva du<br />
kuduro<br />
Avec son premier album<br />
qui convoque les sonorités<br />
d’aujourd’hui mais aussi<br />
ses origines, la CHANTEUSE<br />
ANGOLAISE fait monter<br />
la température.<br />
AXEL JOSEPH - DR<br />
CETTE ANNÉE, Pongo fête ses 30 ans avec<br />
un premier album qui synthétise son passé<br />
et ses désirs avec une rare énergie. Née<br />
en Angola, exilée à Lisbonne, cette danseuse<br />
et chanteuse a été bercée par une diversité<br />
de musiques assez épatante, se ressentant<br />
aujourd’hui dans sa musique, et qu’elle<br />
a distillé au gré de plusieurs singles et EP,<br />
dont le remarqué UWA. Entre rythmiques<br />
brésiliennes, zouk antillais et mélopées<br />
ancestrales angolaises, elle a trouvé un<br />
ton qui n’appartient qu’à elle. Ayant fait<br />
ses armes au sein du groupe Denon Squad,<br />
où, non contente de danser, elle s’empare<br />
du micro, Pongo découvre l’ivresse de la<br />
scène aux côtés du groupe Buraka Som<br />
Sistema. Une décennie plus tard, elle est<br />
devenue une référence du kuduro portugais<br />
et n’hésite pas à clamer haut et fort ses<br />
convictions antiracistes et universalistes.<br />
Lesquelles se ressentent tout au long de<br />
Sakidila, où sa passion pour l’afrobeat et le<br />
funk se laisse également sentir. Polyglotte,<br />
optimiste mais lucide, Pongo fait entendre sa<br />
voix affirmée et son sens viscéral du groove,<br />
sans manières ni postures. Irrésistible. ■ S.R.<br />
PONGO, Sakidila,<br />
Virgin/Universal.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 15
ON EN PARLE<br />
IBN<br />
EL FAROUK<br />
Juste une<br />
illusion<br />
EXPOSITION<br />
Le photographe franco-marocain<br />
donne une DIMENSION<br />
ABSTRAITE à ses œuvres.<br />
VÉRITABLE PASSEUR D’ART, Ibn El Farouk incarne<br />
un entre-deux, à la croisée de la France et du royaume<br />
chérifien. Né en 1964, cet artiste qui a étudié la philosophie<br />
est considéré comme le fer de lance de la photographie<br />
expérimentale au Maroc. Avec son exposition « Informe »,<br />
il allie esthétique et amplitude de la matière à travers<br />
l’expression de la couleur. Au cours de sa déambulation,<br />
le visiteur s’interroge tant l’art d’Ibn El Farouk oscille<br />
entre l’éclat de la photographie et la tonalité de la peinture,<br />
imprimant une autre dimension à ses œuvres. Lancée en<br />
premier lieu à Bois-Colombes (en région parisienne) depuis<br />
le 29 mars, l’exposition s’inscrit à la lisière de l’Europe<br />
et de l’Afrique pour un dialogue fécond, fédérateur et<br />
novateur. Ce solo show fera ensuite halte à Casablanca à<br />
partir du 26 mai et sera présenté au sein de l’emblématique<br />
galerie Shart, sous la houlette du directeur Hassan<br />
Sefrioui, indéniable défricheur de talents. Le huitième art<br />
permet à l’artiste de développer une plastique abstraite<br />
tout en parlant au plus grand nombre. ■ Fouzia Marouf<br />
«INFORME», Salle Jean Renoir, Bois-Colombes (France),<br />
jusqu’au 8 mai. Puis à la galerie Shart, Casablanca<br />
(Maroc), du 26 mai au 26 juin. galerie-shart.ma<br />
ESSAI<br />
EXPLORATION<br />
DE LA LANGUE<br />
La question de la traduction,<br />
de l’universel et du pluriel<br />
par le philosophe<br />
Souleymane Bachir Diagne.<br />
« POUR COMPRENDRE l’autre,<br />
il ne faut pas se l’annexer<br />
mais devenir son hôte. »<br />
En mettant en exergue une<br />
citation de Louis Massignon,<br />
l’un des plus grands savants<br />
du XX e siècle, pionnier du<br />
dialogue islamo-chrétien, le<br />
non moins brillant philosophe<br />
et professeur à l’université<br />
Columbia, à New York, où<br />
il dirige également l’Institut<br />
d’études africaines, s’inscrit<br />
dans le sillage engagé de<br />
ce passeur. Son sujet ici :<br />
explorer la langue et ses<br />
voyages ; les langues,<br />
dominantes et dominées,<br />
TÉMOIGNAGE<br />
LEÇON DE VIE<br />
L’acteur et réalisateur béninois<br />
Jean Odoutan se souvient de<br />
la création de son premier film.<br />
IL A LES DENTS du bonheur.<br />
Ces fameuses incisives du<br />
haut écartées, qualifiées<br />
ainsi au temps des guerres<br />
napoléoniennes chez les soldats<br />
qui étaient dans l’incapacité<br />
de les utiliser pour recharger<br />
leur arme, si lourde qu’il fallait<br />
la tenir à deux mains : un<br />
sésame pour échapper au pire.<br />
Et une chance. Comme celle<br />
que le réalisateur de Barbecue-<br />
Pejo (1999), l’histoire d’un<br />
cultivateur de maïs qui use de<br />
mille et un stratagèmes pour<br />
sortir de la misère, a su saisir<br />
malgré un parcours jonché de<br />
galères. Il nous narre dans<br />
SOULEYMANE<br />
BACHIR DIAGNE,<br />
De langue à langue :<br />
L’Hospitalité<br />
de la traduction,<br />
Albin Michel,<br />
180 pages, 19,90 €.<br />
et leur interprétation, leur<br />
transposition. Fort de sa triple<br />
culture – africaine, française<br />
et américaine –, il se fait<br />
le chantre de la traduction,<br />
comme décentrage et source<br />
de dialogue. Un espace<br />
de rencontre et d’éthique,<br />
où l’interprète, de simple<br />
auxiliaire, devient un<br />
médiateur culturel. Et où, en<br />
faisant que de langue à langue<br />
l’on se parle et se comprenne,<br />
la traduction puisse assumer<br />
un rôle humaniste, en créant<br />
une relation d’équivalence<br />
et de réciprocité entre<br />
les identités. ■ C.F.<br />
JEAN<br />
ODOUTAN,<br />
Le Réalisateur<br />
nègre, 45rdlc,<br />
268 pages,<br />
19,90 €.<br />
ce témoignage plein de dérision<br />
l’accouchement difficile de<br />
ce premier film et ses débuts<br />
d’autodidacte dans le septième<br />
art. Presque un making-of,<br />
ourdi de rebondissements<br />
et de poésie. Le récit d’un<br />
tournant de vie décisif, à la fois<br />
majeur et burlesque, pour<br />
celui dont plusieurs films ont<br />
été primés dans des festivals<br />
internationaux, et dont le<br />
prochain s’intitule Grand Frère<br />
Tambour-Tam-Tam. Un créateur<br />
polyvalent, à la joie de vivre<br />
communicative. ■ C.F.<br />
DR (3)<br />
16 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
DR (3)<br />
CINÉMA<br />
UN VILLAGE ARABE<br />
Des comédiens palestiniens sont dirigés<br />
par un réalisateur israélien dans un film<br />
mélangeant ABSURDE ET POLITIQUE.<br />
ERAN KOLIRIN avait raconté avec succès la<br />
tournée en Israël d’un orchestre égyptien (La<br />
Visite de la fanfare, 2007). Ici, tous ses comédiens<br />
sont des Palestiniens qui incarnent les habitants<br />
d’un village arabe soudainement encerclé<br />
par l’armée israélienne, sans aucune raison<br />
officielle. Problème : un couple et leur fils, venus<br />
de Jérusalem pour un mariage, se retrouvent<br />
prisonniers et ne peuvent plus rentrer ni prévenir<br />
personne, coincés dans la vaste maison familiale<br />
en construction. Checkpoint, scellés… même<br />
les téléphones portables ne passent plus. Cet<br />
enfermement dans une habitation en chantier<br />
et un bourg aux abois va créer bien des tensions.<br />
C’est également l’occasion de scènes cocasses<br />
ou absurdes, qui font penser au cinéma du<br />
Palestinien Elia Suleiman (Intervention divine,<br />
2002). Voulant embrasser plusieurs thèmes dans<br />
ce quasi-huis clos, le film peine parfois à décoller,<br />
tels ces colombes qui refusent de s’envoler lors<br />
du mariage. Mais porté par des comédiens<br />
impeccables, il illustre parfaitement une situation<br />
politique plus que jamais au point mort. ■ J.-M.C.<br />
Les habitants d’un petit<br />
bourg se retrouvent encerclés<br />
par l’armée israélienne.<br />
ET IL Y EUT<br />
UN MATIN<br />
(France-Israël),<br />
d’Eran Kolirin.<br />
Avec Alex Bachri,<br />
Juna Suleiman,<br />
Salim Daw.<br />
En salles.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 17
ON EN PARLE<br />
MODE<br />
MOSSI<br />
De la douceur<br />
avec du caractère<br />
Détails et volumes originaux<br />
donnent vie à une collection<br />
sculpturale qui associe<br />
ÉLÉGANCE ET CONFORT.<br />
CELA FAIT DÉJÀ QUELQUES ANNÉES que le nom de Mossi<br />
Traoré a intégré le calendrier officiel de la Fashion Week<br />
parisienne, la créativité de ses collections séduisant un<br />
public toujours plus large. Adepte d’une mode architecturale,<br />
épurée et linéaire, le designer d’origine malienne, élevé<br />
en banlieue parisienne, dans une cité de Villiers-sur-Marne,<br />
enchaîne les collaborations artistiques pour donner vie<br />
à des lignes exclusives. Depuis le lancement de son label<br />
éponyme, en 2018, il a travaillé avec la sculptrice sur textile<br />
française Simone Pheulpin, le calligraphe irakien Hassan<br />
Massoudy, l’artiste sud-coréen Lee Bae ou encore le peintre<br />
malien Ibrahim Ballo. Des artistes qu’il expose à côté de ses<br />
créations au cœur du Carrousel du Louvre, où il a installé<br />
sa galerie. Pour sa collection automne-hiver 2022-2023,<br />
il s’est associé à la sculptrice française Angélique Lefèvre,<br />
dont les œuvres deviennent alors des motifs imprimés sur<br />
des vêtements fonctionnels et adaptables. Pour l’occasion,<br />
Le styliste Mossi Traoré.<br />
elle a peint des aquarelles, qui ont ensuite été scannées<br />
puis fixées aux tissus. Avec leurs nuances de bleu, comme<br />
le bleu nuit, elles enrichissent la palette de couleurs du<br />
styliste, qui travaille d’habitude le noir et le blanc. La coupe<br />
évasée des jupes en biais, déjà esquissée dans des collections<br />
précédentes, s’associe à un élément nouveau dans le catalogue<br />
de la marque : la doudoune. Travaillée en matelassage, elle<br />
apporte du relief et de la douceur à des créations qui jouent<br />
avec les volumes. À côté de ces survêtements sculpturaux,<br />
Mossi propose également des hauts tout en délicatesse : des<br />
chemises et des robes réalisées en coton, laine tissée et fibre<br />
de lait (une matière durable et innovante), avec des pans<br />
de tissus, que l’on peut adapter à son style ou son humeur.<br />
Pouvoir exprimer sa personnalité à travers ses vêtements,<br />
sans renoncer au confort, est l’un des principes créatifs du<br />
trentenaire, qui invite à superposer les éléments pour habiller<br />
des silhouettes floues et volumineuses. ■ L.N. mossi.fr<br />
DR (4)<br />
18 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
DESIGN<br />
OHIRI, BIJOUX MYSTIQUES<br />
Des ACCESSOIRES CONTEMPORAINS ivoiriens inspirés<br />
par l’esthétique et l’art du peuple akan.<br />
POUR LA CRÉATRICE franco-ivoirienne Akébéhi Kpolo,<br />
les bijoux ne sont pas de simples ornements mais de<br />
véritables objets d’art. En créant Ohiri en 2012, elle a réussi<br />
à donner corps à une passion d’enfance tout en célébrant<br />
le savoir-faire et la culture du peuple akan à travers<br />
des pièces uniques, voire avant-gardistes. Ses trois<br />
dernières collections explorent et réinterprètent<br />
dans un style contemporain l’esthétique<br />
et le symbolisme des bijoux en pays akan<br />
(notamment au Ghana et en Côte d’Ivoire).<br />
Après avoir évoqué les techniques et les<br />
formes utilisées par les orfèvres dans « Lines »<br />
et avoir mis en avant la matière la plus utilisée<br />
par le passé avec la ligne « Sika » (qui signifie<br />
« or »), elle aborde désormais la symbolique<br />
des ornements dans le dernier volet de cette<br />
trilogie, « Outlines ». Du collier d’épaule comme<br />
des bracelets – réalisés artisanalement en Côte d’Ivoire et<br />
au Kenya – se dégage la silhouette, majestueuse, à moitié<br />
submergée du crocodile. Un animal qui, dans la culture<br />
animiste akan, a une signification complexe et mystérieuse.<br />
La collection est aussi un hommage à la capitale<br />
ivoirienne Yamoussoukro, où le président Félix<br />
Houphouët-Boigny avait créé un lac pour<br />
accueillir ces grands reptiles au<br />
charme envoûtant. ■ L.N.<br />
ohiristudio.com<br />
MATTOS BERGER<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 19
ON EN PARLE<br />
Au mur sont accrochées des images<br />
du Sénégal, dans un décor d’inspiration wax.<br />
Chez Tantie, on propose du Sodabi<br />
arrangé, une liqueur de palmier,<br />
disponible au shot ou au mètre.<br />
SPOTS<br />
DES NOUVELLES<br />
TABLES À COTONOU<br />
Si vous êtes de passage au Bénin, voici DEUX ADRESSES à tester sans délai.<br />
OUVERT À L’AUTOMNE dernier par le Béninois<br />
d’origine ivoirienne Assad Alao dans le quartier<br />
sénégalais Scoa Gbeto, Chez Tantie est<br />
une cantine de qualité à des tarifs abordables,<br />
au cadre chaleureux et confortable. Assis sur<br />
la terrasse en bois ou dans la salle à la déco<br />
d’inspiration wax, en regardant les images<br />
du Sénégal accrochées au mur et bercés par<br />
du bon jazz, on y goûte des classiques comme<br />
le thiéboudiène (rouge, blanc ou diaga),<br />
le mafé ou le yassa. Mention spéciale pour<br />
le foutou de Tantie, à la sauce graine<br />
au bœuf, et le poulet kédjénou. Et<br />
pour le Sodabi arrangé, une liqueur<br />
béninoise de palmier, disponible<br />
au shot ou au mètre.<br />
UNE AUTRE ADRESSE de<br />
la ville fait, elle, la part belle au<br />
poisson. Mi-restaurant, mi-poissonnier,<br />
La Pirogue sert depuis juin 2021 des produits de la mer frais<br />
et responsables en plein cœur de Cotonou. Les clients peuvent<br />
choisir parmi les arrivages du jour, rigoureusement pêchés<br />
avec des méthodes artisanales le long des côtes du Bénin,<br />
en respectant les périodes de reproduction. Ici, on ne trouve<br />
La Pirogue est à la fois un restaurant et un poissonnier.<br />
par exemple pas de moules sénégalaises, mais à la bonne<br />
période, on goûte aux huîtres locales. Une fois son poisson<br />
choisi, on peut l’emporter ou le déguster sur place avec sauce<br />
et accompagnement : poêlé, frit, en papillote ou au barbecue,<br />
entier ou en filet, à vous de choisir ! La carte propose aussi des<br />
salades et des sandwiches fast good, un simple fish and chips<br />
ou des snacks savoureux. À tester, selon les jours, les plats<br />
Mama Africa : du monyo (une spécialité du sud du Bénin) au<br />
thiéb sénégalais, en passant par l’attiéké ivoirien à base de<br />
poisson. ■ L.N. restaurant-la-pirogue.com<br />
DR (4)<br />
20 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
ARCHI<br />
Célébrer la grande<br />
pyramide de Gizeh<br />
DR<br />
Avec l’Observatoire<br />
de Khéops,<br />
le STUDIO MALKA<br />
a construit une<br />
résidence d’artistes<br />
au pied de la<br />
première merveille<br />
du monde.<br />
L’OBSERVATOIRE DE KHÉOPS est une résidence d’artistes nichée dans le village<br />
préservé de Nazlet El-Samman, un site égyptien fondé au VII e siècle par des tribus<br />
du désert fascinées par les pyramides de Gizeh. Construit dans l’axe de la seule<br />
merveille du monde à avoir survécu depuis l’Antiquité, le bâtiment est orienté<br />
est-ouest, ce qui permet de contempler les phénomènes célestes dans toute leur<br />
ampleur. Le jardin, la piscine, les chambres, et même le mobilier sont disposés de<br />
façon à offrir une vue optimale sur la pyramide de Khéops. La salle du temps, un<br />
lieu d’observation méditative, est recouverte par un toit textile qui se plie et se déplie<br />
très rapidement, en prise directe avec son environnement. Et la charpente à forme<br />
pyramidale, conçue sans poinçon central, crée presque un portail tridimensionnel,<br />
qui cadre la grande pyramide et lui fait écho au sein de l’habitat. Dans un souci<br />
d’engagement socio-environnemental, le projet intègre les techniques de construction<br />
locales, le savoir-faire ancestral ainsi que l’artisanat des villageois. La philosophie<br />
de l’architecte et ancien graffeur Stéphane Malka, connu pour ses recherches sur le<br />
renouveau urbain, se retrouve jusque dans les façades, composées d’une accumulation<br />
de briques de terre crue, de fenêtres et de volets traditionnels recyclés, strictement issus<br />
de l’économie circulaire du village. Un hommage à l’architecture informelle, qui ajoute<br />
une touche onirique et décalée à ce belvédère habité. ■ L.N. stephanemalka.com<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 21
ON EN PARLE<br />
GALAAfrica is the future<br />
AU NOM DES FEMMES<br />
ET DES ENFANTS<br />
La 8 e édition de la soirée<br />
de bienfaisance de la FONDATION<br />
CHILDREN OF AFRICA s’est<br />
tenue le 11 mars à Abidjan. Près<br />
de 900 invités et généreux donateurs<br />
ont répondu présent à l’invitation<br />
de sa fondatrice, la Première dame<br />
ivoirienne Dominique Ouattara.<br />
par Emmanuelle Pontié<br />
Ce 8 e dîner de gala de la fondation<br />
Children of Africa (COA), plusieurs<br />
fois repoussé pour cause de pandémie,<br />
était très attendu. Près de 900 convives<br />
étaient au rendez-vous de la Première<br />
dame Dominique Ouattara, ce vendredi<br />
11 mars au Palais des congrès du Sofitel Abidjan Hôtel<br />
Ivoire. À l’image des éditions précédentes, autour du<br />
couple présidentiel de Côte d’Ivoire, de nombreuses<br />
stars internationales et locales avaient répondu présent,<br />
comme les comédiennes Emmanuelle Béart ou Aure Atika,<br />
la top-model Adriana Karembeu, les acteurs Samuel<br />
DR<br />
22 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
Accueil au groupe scolaire COA d’Abobo,<br />
avec, au centre, Madame Dominique<br />
Ouattara et la princesse Ira de Fürstenberg,<br />
marraine de la fondation.<br />
DR<br />
Le Bihan, Tomer Sisley, Gary Dourdan ou Isaach de Bankolé,<br />
la réalisatrice Yamina Benguigui, et les artistes Alpha Blondy,<br />
Youssou N’Dour, Singuila, Magic System, Michel Gohou,<br />
Vegedream, Kaaris, Toumani et Sidiki Diabaté, Charlotte<br />
Dipanda, MC Solaar, Kamel Ouali ou encore Fally Ipupa.<br />
Côté sport, on peut citer Didier Drogba, Murielle Ahouré,<br />
Cheikh Cissé… Et bien d’autres, dont le président français<br />
Nicolas Sarkozy en invité surprise ou encore le professeur<br />
Marc Gentilini, soutien de la première heure de la fondation.<br />
Le but du gala de charité cette année : récolter 6 millions<br />
d’euros pour financer, entre autres, la construction d’un<br />
centre d’accueil pour femmes victimes de violences dans<br />
la ville d’Adiaké en bordure de lagune, à 94 kilomètres<br />
d’Abidjan. « Il sera bâti sur une superficie de 1,6 hectare,<br />
et sa capacité d’accueil sera de 80 places. Ce centre offrira<br />
à des pensionnaires et leurs enfants toutes les commodités<br />
nécessaires à leur prise en charge holistique et à leur<br />
bien-être », a annoncé Madame Dominique Ouattara sur<br />
scène. Une partie de la somme permettra aussi de rénover<br />
et d’agrandir la Case des enfants, le foyer d’accueil de la<br />
fondation qui a recueilli des milliers de petits en difficulté<br />
Ci-contre, la jeune<br />
présidente des élèves,<br />
qui a fait un discours<br />
de remerciements.<br />
depuis sa création il y a vingt-quatre ans. Grâce aux généreux<br />
donateurs et amis du monde du business, dont Pierre<br />
Fakhoury, Cyrille Bolloré ou Martin Bouygues, la somme<br />
a pu être réunie dans sa totalité. En partie grâce à la vente<br />
traditionnelle, où des objets luxueux sont mis aux enchères.<br />
Comme cette parure bracelet et boucles d’oreilles en or<br />
et diamants d’une valeur de 53 000 euros offerte par le<br />
maître joaillier Edouard Nahum ou encore une œuvre de<br />
l’artiste Aboudia, emportée pour 280 millions de francs CFA<br />
(426 000 euros). Une soirée haute en couleur, avec un menu<br />
savoureux concocté par les chefs Yannick Alléno et Prisca<br />
Gilbert et un spectacle de qualité, des tableaux créés par<br />
le chorégraphe Georges Momboye aux prestations de Magic<br />
System ou d’Alpha Blondy. Le thème de la soirée : Africa is<br />
the future. Le matin, l’ensemble des invités de la Première<br />
dame s’était rendu au groupe scolaire d’excellence Children of<br />
Africa d’Abobo, financé grâce aux recettes du gala précédent,<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 23
ON EN PARLE<br />
qui s’était tenu en 2018. Située dans l’une des communes<br />
les plus peuplées du district d’Abidjan, l’école accueille<br />
700 élèves, dont 100 à la maternelle et 600 au primaire.<br />
Elle est dotée d’équipements modernes, d’une cantine,<br />
d’une bibliothèque, d’une aire de jeu pour les plus<br />
petits et d’un grand terrain de sport. Ce groupe scolaire<br />
est entièrement gratuit pour les élèves, y compris les<br />
tenues, les fournitures et la cantine. La Première dame, le<br />
ministre-gouverneur du district autonome d’Abidjan Robert<br />
Beugré Mambé et plusieurs membres du gouvernement<br />
de Côte d’Ivoire, dont la ministre de l’Éducation nationale<br />
et de l’Alphabétisation Mariatou Koné, ont été accueillis<br />
par les danses et les chants des élèves. Depuis sa création<br />
en 1998, la fondation Children of Africa a construit<br />
l’Hopital mère-enfant Dominique Ouattara de Bingerville,<br />
et a fait de l’éducation des enfants son premier cheval de<br />
bataille. Elle distribue à chaque rentrée des classes des kits<br />
scolaires aux enfants défavorisés, équipe les écoles et les<br />
cantines à travers tout le pays et a, entre autres, construit<br />
un lycée dans la ville de Kong, dans le nord du pays. ■<br />
Une soirée<br />
haute en couleur.<br />
La table présidentielle<br />
du dîner de gala,<br />
au Palais des congrès<br />
du Sofitel Abidjan<br />
Hôtel Ivoire.<br />
Le président<br />
de Côte d’Ivoire<br />
Alassane<br />
Ouattara et<br />
son épouse,<br />
Dominique.<br />
Nicolas Sarkozy<br />
et Dominique<br />
Besnehard,<br />
avec Dominique<br />
Ouattara.<br />
Loïc Folloroux<br />
et Claire<br />
Guena.<br />
Le couple présidentiel entouré, de gauche à droite,<br />
par Mamadou Diagna Ndiaye, Martin Bouygues,<br />
Mireille Fakhoury, Nathalie Delapalme et Pierre Fakhoury.<br />
Alpha Blondy<br />
sur scène.<br />
Le professeur<br />
Marc Gentilini.<br />
DR<br />
24 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
Marc<br />
Socquet<br />
et son<br />
épouse,<br />
Nathalie<br />
Folloroux.<br />
Youssou N’Dour et<br />
Nadine Sangaré.<br />
Selfie de Fally Ipupa<br />
avec Dominique Ouattara.<br />
Le Premier ministre Patrick<br />
Achi et son épouse,<br />
Florence.<br />
Elisabeth Gandon<br />
et Yannick Alléno.<br />
MC Solaar.<br />
Didier<br />
Drogda<br />
et Gabrielle<br />
Lemaire.<br />
Danielle<br />
Ben Yahmed,<br />
Cyrille Bolloré<br />
et Aure Atika.<br />
La Première<br />
dame entourée<br />
de Masséré Touré<br />
et de Bruno Koné.<br />
Le couple présidentiel entouré, de gauche à droite, par Amira Cazar, Emmanuelle Béart,<br />
Yamina Benguigui, Samuel Le Bihan, Aure Atika, Tomer Sisley et Sandra Zeitoun.<br />
DR<br />
Martin Bouygues<br />
et Adriana Karembeu.<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 25
PARCOURS<br />
Omar Mahfoudi<br />
COLORISTE, CET ENFANT DE TANGER<br />
ravive la nature dans son œuvre poétique. Il participe en avril à la foire<br />
d’art contemporain africain 1-54, à Paris, pour la galerie Afikaris,<br />
qui promeut les artistes émergents du continent. par Fouzia Marouf<br />
Sourire en bannière, il se promène entre les colonnes ivoire de la galerie parisienne<br />
Afikaris. Omar Mahfoudi allie la singularité du dessin à l’effusion de la couleur : ses silhouettes<br />
singulières, auréolées de doré, ses reliefs pastel sont autant de signes qui constellent ses<br />
toiles monumentales de la série Golden Painting et le connectent à sa mémoire ancestrale et<br />
à sa ville natale, Tanger, terre de brassage, d’errance et d’exil. Né en 1981 dans la mythique<br />
cité du détroit, il grandit entouré du souvenir vivace de la Beat Generation : « La maison<br />
de mes parents se trouvait en face de celle de Barbara Hutton, près de celle de Paul Bowles.<br />
Et comme nombre de Marocains, j’ai été profondément marqué par Mohamed Choukri,<br />
avec lequel je discutais souvent, adolescent. Tanger était une ville internationale qui nous<br />
fascinait tous. J’y ai fait d’incroyables rencontres artistiques, ne connaissant pas l’Europe », se souvient-il.<br />
Enfant touche-à-tout, habile de ses mains, il transforme tous les objets en jouets. « J’ai grandi dans<br />
la kasbah, en passant mon temps à dessiner, à faire le portrait de mes amis. À l’époque, nous avions<br />
une chaîne de télé espagnole en plus de la chaîne marocaine nationale. Influencé par la culture<br />
manga, je reproduisais mes héros de dessins animés sur du carton que je peignais. » Son destin semble<br />
tout tracé. Passionné, curieux, il incarne la nouvelle école et participe activement à l’efflorescence<br />
de la jeune scène du Nord marocain, où nombre de plasticiens se sont succédé, en quête de la bonne<br />
lumière à Asilah ou à Tétouan, qui abrite l’emblématique Institut national des beaux-arts.<br />
Omar Mahfoudi se consacre définitivement à son art : « J’avais conscience d’être au cœur d’un lieu<br />
emblématique, où avaient vécu Matisse, Bacon. Je passais d’atelier en atelier, avant le boom économique,<br />
nourri par une mixité et un héritage culturels très présents. Je peignais au contact d’une vitalité et d’une<br />
émulation constantes », indique-t-il. Rebelle, revêche, la région est ainsi aux prises avec les mouvements<br />
de contestation depuis 2011. En 2015, il participe au group show Désordre, présenté à la galerie Delacroix,<br />
à l’Institut français de Tanger. Dans sa série de grands formats consacrés à des figures militaires, il dépeint la<br />
chute de dictateurs vieillissants : « Je me suis inspiré de Moubarak et de Kadhafi afin de dénoncer la symbolique<br />
de la répression. C’était aussi un prétexte pour aborder l’abstrait, qui traverse encore mon œuvre aujourd’hui. »<br />
En quête d’un ailleurs, l’âme voyageuse, en 2012, il passe par les États-Unis : « Cela m’a mené au<br />
septième art. New York me fascinait pour le Nouvel Hollywood, mais la ville était trop froide et urbaine,<br />
j’étais heureux de retourner au Maroc », confie-t-il. Arrivé à Paris en 2016, il intègre la galerie Afikaris en y<br />
exposant en 2020 un travail renvoyant à l’après-confinement, « Quitter la ville »: « J’ai découvert cet espace<br />
à 1-54 Marrakech, en 2019. Nous grandissons ensemble, entre écoute et observation. » Depuis, il a présenté<br />
en 2021, à la foire 1-54 London, des œuvres de son exposition « El Dorado », inspirée par la peinture<br />
italienne du Moyen-Âge. Et en 2023, il exposera à la galerie L’Atelier 21, à Casablanca, dans un solo show.<br />
Ses nouveaux travaux, qui font écho à la poésie de la nature, et leurs variations et explosions de couleurs<br />
seront exposés du 7 au 10 avril à 1-54 Paris, avec la galerie Afikaris. ■ 1-54.com / afikaris.com<br />
26 AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022
<strong>AM</strong>MAR ABD RABBO<br />
« J’ai grandi<br />
dans la kasbah,<br />
en passant mon temps<br />
à dessiner, à faire<br />
le portrait de<br />
mes amis. »
Contemporain,<br />
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qui change,<br />
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d’aujourd’hui,<br />
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Date et signature obligatoire<br />
Tél. : Fax :
C’EST COMMENT ?<br />
PAR EMMANUELLE PONTIÉ<br />
BAS LES MASQUES !<br />
DOM<br />
Le 26 mars dernier, un événement – car c’en est un – est un peu passé inaperçu.<br />
Un masque en bois du peuple Fang, spécimen rarissime de la société secrète des justiciers<br />
du Ngil, s’est envolé à 5,25 millions d’euros lors d’une vente aux enchères à Montpellier, dans<br />
le sud de la France. Un record qui talonne de peu celui de 2006 pour un autre masque de<br />
la même ethnie, qui avait été adjugé à 5,9 millions d’euros, à Paris.<br />
À Montpellier, dans la salle, un membre de la communauté gabonaise locale<br />
s’est exclamé : « Le voleur doit être pris avec l’objet volé. Ne vous inquiétez pas, on va porter<br />
plainte. On va récupérer cet objet, c’est un bien mal acquis colonial. » Dans ce cas précis,<br />
et selon le commissaire-priseur, ce masque a été collecté vers 1917 par un gouverneur<br />
français en poste à Dakar, et a dormi dans un grenier durant plus de cent ans. Alors oui,<br />
c’est probablement un vol. Mais la vente s’est faite en<br />
toute légalité. À l’heure où certains pays d’Afrique de<br />
l’Ouest, comme le Bénin ou le Nigeria, demandent (et<br />
ont commencé à obtenir) la restitution de leurs œuvres<br />
d’art pillées, la réaction de l’agitateur gabonais est bien<br />
entendu légitime.<br />
Pour autant, ce fait divers ouvre un débat<br />
assez compliqué. Sur le plan du droit, d’abord. Comment<br />
prouver que ces pièces aient été offertes ou<br />
pillées ? La plupart du temps, plus aucun témoin n’est<br />
là pour en attester. Comment changer le droit à la<br />
propriété ?<br />
Par ailleurs, dans le cas de l’Afrique centrale,<br />
il semble qu’aucune nation n’ait à ce jour montré une<br />
velléité très prononcée pour récupérer son patrimoine.<br />
Elle n’a pas construit de musée d’envergure, sécurisé,<br />
capable d’accueillir des pièces aussi exceptionnelles.<br />
Alors, certes, la plupart de ces œuvres ont été volées<br />
et devraient être restituées à leur propriétaire ou à leur<br />
pays. Et le mouvement ayant été lancé, on peut supposer qu’il va se poursuivre. On le<br />
souhaite en tout cas.<br />
Mais ce que l’on souhaite aussi, c’est que l’Afrique en général montre un peu<br />
plus de passion pour son art ancien. Que les milliardaires du continent s’y intéressent<br />
davantage, par exemple. À ce jour, les vrais collectionneurs africains se comptent sur les<br />
doigts d’une main, et souvent, ils sont plutôt séduits par l’art contemporain. Quant aux<br />
peuples, l’art ancien n’est pas non plus une priorité pour eux. Loin de là. C’est dommage,<br />
car il faudrait peut-être commencer par là. Afin de faire pression et de favoriser des retours,<br />
privés ou publics, plus massifs. Un peu plus passionnés, quoi ! ■<br />
AFRIQUE MAGAZINE I <strong>427</strong> – AVRIL 2022 29
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