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BONS<br />
BAISERS<br />
DE<br />
BERLIN<br />
Chaque mois, notre correspondante à Berlin Annabelle Georgen<br />
nous envoie des nouvelles fraîches et acidulées de la capitale<br />
queer européenne. Sans traces de rouge à lèvres.<br />
22<br />
« Il n’y a pas de bar lesbien à Berlin. » Chaque fois que<br />
je laisse choir d’un air désolé cette réponse lapidaire<br />
à des copines de France ou d’ailleurs qui veulent en<br />
savoir plus sur les nuits folles de la communauté<br />
LGBTIQ+, c’est la consternation que je vois tordre<br />
les traits de leur visage : « Comment ? Quoi ? C’est<br />
une blague ? Non mais c’est pas possible ! Il n’y a PAS<br />
de bar à gouines à Berlin ? » Il y en a eu, pourtant,<br />
des bars lesbiens à Berlin. Dans les années 1920, la<br />
capitale allemande en comptait des dizaines. Dans<br />
les années post-chute du Mur, quand Berlin avait<br />
soudain doublé de taille, une jungle de bars, clubs,<br />
squats et autres lieux autogérés lesbiens avaient<br />
pignon sur rue. Le dernier bar lesbien en tant que<br />
tel, le Serene Bar, a fermé ses portes en 2016. Il reste<br />
bien un bar à goudous de la vieille époque à Berlin,<br />
Die Begine, qui opère sous l’étiquette pudique de<br />
« bar de femmes », mais celui-ci a si bien fidélisé<br />
son public au fil des ans qu’il est devenu une antichambre<br />
de la maison de retraite.<br />
La vie nocturne de la communauté lesbienne<br />
et queer-féministe berlinoise<br />
de moins de 50 ans s’organise depuis<br />
plusieurs années autour des soirées<br />
FLINTA* (acronyme qui signifie femmes,<br />
lesbiennes, inter, non binaires, trans et<br />
agenre – en bref, tout le monde sauf les<br />
hommes cis) organisées par une flopée<br />
de bars. Seul pourvoyeur de socialité<br />
lesbienne hebdomadaire des années durant,<br />
le Möbel Olfe, un bar gay historique<br />
de Kreuzberg, a longtemps été la plaque<br />
tournante de la scène FLINTA* berlinoise.<br />
Le mardi soir, quand d’autres avaient piscine,<br />
nous, on avait Olfe, c’était impossible<br />
de prévoir autre chose. Mais depuis<br />
la fin des lockdowns, l’offre autrefois si<br />
frugale des autres bars (avant 2021 on<br />
s’estimait chanceuse·x s’il y avait quatre<br />
soirées FLINTA* dans le mois) a littéralement<br />
explosé. La FOMO (fear of missing<br />
out), cette crainte de privilégié·e·x·s qui a<br />
épargné si longtemps la vie nocturne de<br />
la lesbienne berlinoise, plane désormais,<br />
menaçante, sur les agendas des FLINTA*.<br />
Et en parallèle, la demande est désormais si forte<br />
que même le Möbel Olfe s’est retrouvé cet été pris<br />
d’assaut par des centaines de FLINTA* semaine<br />
après semaine. Tout le monde ne pouvant pas<br />
entrer dans le bar quand il fermait sa terrasse,<br />
d’immenses rassemblements s’étiraient jusque<br />
tard dans la nuit à ses abords, avec pour corollaire<br />
les problèmes de voisinage inévitables. Au<br />
point que la direction du Möbel Olfe, dépassée<br />
par la situation, s’est résolue au mois d’août à<br />
fermer le bar les mardis soirs avant de rouvrir,<br />
d’abord à petite dose. Cette affluence record, du<br />
jamais-vu, parole d’habituée, a montré clairement<br />
que plus que jamais, Berlin a besoin d’un bar lesbien.<br />
À bonne entendeuse !<br />
T<br />
SOCIÉTÉ<br />
LA CARTE POSTALE D’ANNABELLE GEORGEN<br />
2022<br />
V<br />
C<br />
IELLE<br />
Cédric<br />
Djedje<br />
I<br />
H<br />
T<br />
Général-Dufour 16<br />
CH-1204 Genève<br />
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1-13 novembre<br />
Le Grütli Centre<br />
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