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360 degrés magazine numéro 217

Octobre 2022

Octobre 2022

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<strong>360</strong>° N 0 <strong>217</strong><br />

Oct. 2022<br />

CHF<br />

6.-<br />

DOSSIER<br />

POLITIQUE SUISSE<br />

MUSIQUE


À quand<br />

ta prochaine fois?<br />

Le VIH est souvent transmis par des personnes<br />

qui ne savent pas qu’elles vivent avec le VIH. Fais<br />

tes dépistages pour être au clair. Liste des centres<br />

de dépistage VIH/IST sur drgay.ch/novembre<br />

En novembre, dépistages<br />

VIH et autres IST pour<br />

A partir de 1997<br />

ou plus jeune<br />

75.- 0.-<br />

Offre à destination des hommes et des personnes trans<br />

ayant des rapports sexuels avec des hommes<br />

Rédaction en chef<br />

Robin Corminboeuf<br />

robin.corminboeuf@<strong>360</strong>.ch<br />

Rédaction textes<br />

Natascia Bandecchi, Camille Beziane,<br />

Robin Corminboeuf, Edmée Cuttat,<br />

Aymeric Dallinge, Laure Dasinieres,<br />

Marlon Dietrich, Marius Diserens,<br />

Princesse GenderFuck,<br />

Annabelle Georgen, Dr·e Goudou,<br />

Dr. Hazbi, Celia Hofmann,<br />

Tal Madesta, Vagin Pirate, Léon Salin,<br />

Rafaela Santos<br />

Photo<br />

Angelina Bertrand, Laurent Bleuze RTS,<br />

Elizabeth La Rosa, Kevin Manand,<br />

Universal, Flo Pernet,<br />

Dana Trippe<br />

Couverture<br />

Aloïse Sauvage par Flo Pernet<br />

Corrections<br />

Robin Corminboeuf<br />

Laure Dasinieres<br />

Marius Diserens<br />

Arnaud Gallay<br />

Direction artistique et graphisme<br />

Balmer Hählen<br />

Typographies<br />

Newglyph<br />

Swiss Typefaces<br />

Optimo<br />

Pangram Pangram<br />

Ethan Nakache<br />

Publicité<br />

Philippe Scandolera<br />

pub@<strong>360</strong>.ch<br />

Christina Kipshoven<br />

christina@mannschaft.com<br />

Jérémy Uberto<br />

marketing@<strong>360</strong>.ch<br />

Abonnement<br />

abo@<strong>360</strong>.ch<br />

Expédition<br />

André, Laurentiù, Giovanni et Jérôme<br />

Editeur<br />

Association Presse <strong>360</strong><br />

Impression<br />

Appi, Gland<br />

<strong>360</strong> <br />

36, rue de la Navigation<br />

CP 2<strong>217</strong> - CH-1211 Genève 2<br />

Tél. 022 741 00 70<br />

<strong>magazine</strong>_<strong>360</strong><br />

<strong>magazine</strong>_<strong>360</strong><br />

<strong>magazine</strong><strong>360</strong>lgbt<br />

Retrouvez toutes les infos<br />

sur <strong>360</strong>.ch<br />

Sommaire N°<strong>217</strong><br />

ÉDITO<br />

p. 5<br />

ACTU<br />

L’actu vue par Laure Dasinieres<br />

p. 6<br />

SOCIÉTÉ<br />

Catherine Fussinger<br />

Déléguée LGBTIQ+ vaudoise<br />

p. 8 – 10<br />

Le mot du mois<br />

de Marius Diserens<br />

p. 11<br />

Chroniques<br />

Princesse GenderFuck et Dr. Hazbi<br />

p. 15<br />

Carte Postale<br />

Bons baisers de Berlin<br />

p. 16<br />

Grandeur Mature<br />

Marianne Huguenin<br />

p. 18 – 20<br />

Ticino<br />

Thomas Salati, portrait<br />

p. 22 – 23<br />

CULTURE<br />

Musique<br />

Aloïse Sauvage<br />

p. 24 – 30<br />

Humeurs de<br />

Aymeric Dallinge et Léon Salin<br />

p. 32<br />

Danse<br />

Lili Elbe Show<br />

p. 35<br />

Cinéma<br />

Bros<br />

p. 36 – 37<br />

Festival<br />

LUFF<br />

p. 38 – 39<br />

SANTÉ<br />

Monkeypox<br />

Le point sur la Suisse<br />

p. 47<br />

Dr·e Goudou<br />

Question sexo<br />

p. 48<br />

CLÔTURE<br />

Quotient Queer<br />

Mathias Reynard<br />

p. 50<br />

L’oracule du mois<br />

Politique de Qualité<br />

p. 51<br />

Horoscope<br />

p. 52 – 53<br />

Queer’stionnaire de Proust<br />

Aurélie Cuttat<br />

p. 54<br />

Livres<br />

Sélection de Payot<br />

p. 40 – 41<br />

Soutenu par<br />

TOUTE REPRODUCTION EST STRICTEMENT<br />

INTERDITE POUR TOUS LES PAYS, SAUF AU-<br />

TORISATION ÉCRITE DE <strong>360</strong>.<br />

DES EXEMPLAIRES VOUS SONT OFFERTS<br />

DANS TOUS LES LIEUX PARTENAIRES LG-<br />

BTIQ+ ET FRIENDLY DE SUISSE ROMANDE.<br />

<strong>360</strong> EST UN MAGAZINE INDÉPENDANT<br />

DONT LE CONTENU RÉDACTIONNEL NE<br />

REFLÈTE PAS NÉCESSAIREMENT LES POSI-<br />

TIONS DE L’ASSOCIATION <strong>360</strong>.<br />

Livres<br />

Mariage pour tous·tes·x en Suisse<br />

p. 42<br />

Vagin Pirate<br />

Les Pépites d’octobre<br />

p. 44 – 45


07 – 16 OCT. 2022<br />

FILMS INVITÉ·X·ES SPECTACLES EXPOSITIONS DÉBATS FÊTES<br />

FESTIVAL DE<br />

CINÉMA QUEER<br />

CINÉMA<br />

LESBIEN<br />

EVERYBODYSPERFECT.CH<br />

MAISON DES ARTS DU GRÜTLI<br />

GAY BISEXUEL TRANS* INTERSEXE QUEER +<br />

9 E ÉDITON · GENÈVE<br />

FESTIVAL DE CINÉMA LGBTIQ+<br />

SUJET<br />

POLITIQUE<br />

Par Robin Corminboeuf<br />

Rédacteur en chef<br />

C’est un exemple parmi tant d’autres: les manifestations<br />

en France, lors du débat autour de l’ouverture<br />

du mariage aux couples de même sexe, il y a<br />

dix ans de cela. Je revois la Manif pour tous, ses<br />

drapeaux et ses discours. Le nombre de participant·e·x·s<br />

et la violence de leurs arguments ont profondément<br />

marqué le tout jeune adulte que j’étais.<br />

Je me disais alors que si autant de personnes s’unissaient<br />

contre cette loi, c’est qu’iels devaient certainement<br />

avoir raison, en partie, qu’à quelque part<br />

certains arguments devaient tenir la route.<br />

Il y a quelques semaines, mon conjoint<br />

et moi nous sommes mariés. Place de la<br />

Palud à Lausanne, nous sortons de l’Hôtel<br />

de Ville après une brève cérémonie remplie<br />

d’émotions. Devant nous, nos deux<br />

familles proches, sans exception, nous<br />

font face, en demi-cercle, accompagnées<br />

de nos ami·e·x·s les plus intimes. Iels nous<br />

célèbrent sur cette place mille fois empruntée<br />

et délimitent un espace rempli<br />

d’amour entre la nouvelle famille que mon<br />

mari et moi sommes devenus et le reste<br />

du monde. À ce moment-là, quelque chose<br />

en moi se répare: la certitude profonde<br />

qu’aucun argument entendu dix ans plus<br />

tôt n’était vrai.<br />

Dans une tribune libre écrite dans le 24 Heures<br />

en 2004, Marianne Huguenin (voir son portrait<br />

p. 18-20) disait ceci à propos du partenariat civil<br />

enregistré alors débattu au parlement suisse : « Il<br />

n’y a aucun lien entre la loi sur le partenariat et le<br />

nombre d’enfants sur la Terre. Il n’y aura pas un enfant<br />

de moins si cette loi aboutit. Et il n’y aura pas<br />

un homosexuel de plus, mais seulement moins de<br />

jeunes homosexuel·le·s en difficulté. » Certaines de<br />

mes « difficultés » ont indéniablement été pansées<br />

à la place de la Palud, parce qu’à ce moment précis,<br />

la politique m’a accordé un droit qu’on m’avait<br />

jusqu’ici refusé.<br />

Être un sujet politique, c’est exactement<br />

cela. C’est pouvoir avoir accès à des institutions<br />

qui peuvent être réparatrices, qui<br />

donnent accès à une forme de protection.<br />

Être un sujet politique c’est aussi être un<br />

sujet duquel la politique se saisit, à propos<br />

duquel les autres parlent, une position<br />

inconfortable parfois et pourtant nécessaire,<br />

car être un sujet politique c’est la<br />

possibilité d’être ou de ne pas être, c’est<br />

avoir accès à des soins adéquats, à des institutions<br />

qui nous accueillent avec bienveillance,<br />

c’est être considéré, pris au sérieux<br />

dans son existence, être en sécurité<br />

face au risque…<br />

Être un sujet politique c’est aussi se battre pour<br />

ses droits, c’est prendre conscience des enjeux<br />

et trouver des allié·e·x·s pour faire avancer les<br />

choses, je vous renvoie à nouveau aux sages paroles<br />

de Marianne Huguenin dans nos pages. Ce<br />

travail-là nécessite ce que Dr Hazbi pointe du<br />

doigt dans sa dernière couche, en page 15 : « respect,<br />

résilience, sagesse. » Un programme exigeant<br />

mais nécessaire, car ce que je souhaite du<br />

plus profond de mon âme, c’est que le plus grand<br />

nombre d’entre nous puisse avoir accès, sous une<br />

forme ou une autre, à un espace au potentiel réparateur,<br />

reconnu par le politique, au sein duquel<br />

nos familles — choisie et/ou biologique — puissent,<br />

le temps d’une fête, nous célébrer.<br />

ÉDITO<br />

5


L'ACTU VUE PAR<br />

LAURE DASINIERES<br />

Si vous n'avez pas suivi les actus queer du mois dernier, <strong>360</strong>°<br />

vous propose un rattrapage en quelques lignes. Ce mois-ci, l’actualité<br />

est marquée par la poursuite d’une autre épidémie que<br />

celle du monkeypox : la transphobie.<br />

Il y a quelques jours, j’échangeais avec Lynn<br />

Bertolet, cofondatrice et présidente de l’association<br />

Épicène et lui disais mon intention de participer<br />

au colloque international Santé trans*,<br />

qui se tient début octobre à Genève (voir le programme<br />

ci-contre). Immédiatement, Lynn me dit :<br />

« N’oubliez pas de vous inscrire, au vu du climat<br />

général, nous allons faire attention à qui participe.<br />

» La militante pour les droits des personnes<br />

trans* faisait référence, notamment, à ces deux<br />

conférences aux intervenant·e·s transphobes qui<br />

se sont déroulées à l’UNIGE au printemps. Et, ce<br />

climat de transphobie est loin de se limiter à la<br />

Suisse, loin s’en faut… Dans de nombreux États<br />

des USA, la situation est alarmante. Par exemple,<br />

depuis le 9 septembre, le Montana refuse aux personnes<br />

trans* de modifier leur acte de naissance.<br />

Dans d’autres États, il est question d’interdire<br />

le sport aux enfants trans* ou de les soumettre<br />

à des contrôles génitaux pour qu’iels puissent<br />

participer à des activités sportives.<br />

Climat transphobe<br />

Au Royaume-uni, l’arrivée de Elizabeth<br />

Truss comme Première ministre inquiète<br />

déjà la communauté queer. Celle qui<br />

s’était illustrée contre une campagne<br />

contre le cancer du col de l’utérus incluant<br />

les hommes trans* a, à peine arrivée,<br />

demandé à une équipe juridique<br />

de se pencher en urgence et en priorité<br />

sur la Gender Recognition Reform Bill,<br />

un projet de loi de réforme de la reconnaissance<br />

du genre porté en ce moment<br />

même par le gouvernement écossais.<br />

En France, le mois de septembre a été marqué par<br />

de violentes accusations à l’encontre du Planning<br />

familial, dont une affiche de campagne de sensibilisation<br />

représentait en dessin un homme enceint<br />

et son compagnon. D’un même front, représentant·e·x·s<br />

et militant·e·x·s d’extrême droite,<br />

joint·e·x·s par des militantes féministes considérées<br />

comme TERF – c’est-à-dire considérant les<br />

femmes trans comme des hommes et excluant les<br />

personnes trans* de leurs luttes – ont trouvé un<br />

point de convergence pour attaquer le Planning<br />

familial et sa vocation d’inclusivité.<br />

Adelphité digitale<br />

Sur les réseaux sociaux, ces actualités<br />

donnent lieu à des attaques violentes,<br />

cumulant la haine et la bêtise. Elles affectent<br />

évidemment considérablement<br />

le moral des personnes concernées, alors<br />

même que ces dernières se tournent<br />

vers les réseaux, lieu de refuge où elles<br />

trouvent une adelphité difficilement accessible<br />

dans la vie de tous les jours.<br />

Rappelons qu’en Suisse, l’article 261bis<br />

du Code pénal relatif à la discrimnation et<br />

à l’incitation à la haine ne protège pas les<br />

personnes et les communautés concernées<br />

des actes et propos transphobes.<br />

Alors qu’au sein même des milieux féministes et<br />

LGBTIQ+ certain·e·x·s aimeraient exclure les personnes<br />

trans* de leurs luttes, oubliant ainsi notre<br />

histoire, mobilisons-nous pour nos adelphes.<br />

6<br />

ACTU<br />

LE RATTRAPAGE


Depuis le 1er mai, Catherine Fussinger occupe le poste<br />

de déléguée aux questions LGBTIQ+ pour le Canton de<br />

Vaud. Interview avec celle qui travaille d’arrache-pied<br />

à rendre l’administration cantonale plus inclusive pour<br />

les personnes queer.<br />

Par Robin Corminboeuf<br />

Catherine<br />

Fussinger<br />

« JE SOUHAITE<br />

N’OUBLIER PERSONNE<br />

EN CHEMIN »<br />

© ARC/SIEBER<br />

Catherine Fussinger,<br />

quel parcours vous a menée<br />

à ce poste ?<br />

J’ai un double parcours professionnel et<br />

associatif. À l’Université de Lausanne, j’ai participé<br />

au développement des études genres dans les<br />

années 1990, puis j’ai travaillé durant plus de deux<br />

décennies comme responsable de recherche au<br />

CHUV. Comme représentante des sciences humaines<br />

et sociales dans un hôpital universitaire,<br />

un des enjeux était de rendre accessibles et pertinents<br />

les apports de ces disciplines à différentes<br />

catégories de professionnel·le·x·s de la santé. Entre<br />

le milieu des années 2000 et 2010, j’ai élaboré un<br />

enseignement « genre et médecine, genre et santé<br />

», puis posé les fondations d’une institutionnalisation<br />

de ce champ au sein de la Faculté de biologie<br />

et médecine et du CHUV : un travail conceptuel et<br />

stratégique dont les défis ne sont pas sans points<br />

communs avec les missions de mon poste actuel.<br />

Au niveau associatif, j’ai vécu deux périodes<br />

d’engagement très intenses. La première débute au<br />

moment de la Grève des femmes de 1991 et, même si<br />

cela correspond à mon coming in et que j’ai été impliquée<br />

dans la création de Lilith, association vaudoise<br />

de femmes homosexuelles fondée en 1994,<br />

mon engagement était alors avant tout féministe. De<br />

2017 à 2022, je me suis investie au sein de l’Association<br />

faîtière Familles arc-en-ciel, dont j’ai aussi été<br />

la co-présidente au niveau national. Au travail très<br />

exigeant d’accompagnement de l’entrée en vigueur<br />

du nouveau droit de l’adoption en 2018 a succédé la<br />

campagne pour le mariage civil pour toutes et tous.<br />

J’ai aussi mis sur pied des sensibilisations à l’intention<br />

de différentes catégories de professionnel·le·x·s<br />

tout en apportant, avec d’autres membres de l’association,<br />

conseils et soutien aux (futures) familles.<br />

Lors de ma postulation, ce sont les apports de cette<br />

double trajectoire professionnelle et associative que<br />

je me suis efforcée de mettre en valeur.<br />

Qu’est-ce qui vous a donné<br />

l’envie de relever le défi<br />

du poste que vous occupez<br />

aujourd’hui ?<br />

En prolongement des récents progrès<br />

en matière de reconnaissance des droits des personnes<br />

LGBTIQ+ en Suisse, il importe qu’une politique<br />

publique inclusive, basée sur une réelle prise<br />

en compte de leurs réalités et trajectoires soit mise<br />

en œuvre. Comme pour d’autres catégories discriminées,<br />

il faut opérer le passage d’une égalité formelle<br />

à une égalité sociale. J’ai senti une vraie volonté<br />

politique au niveau vaudois et le fait que celle-ci<br />

s’inscrive dans une évidente évolution sociétale – les<br />

résultats des deux dernières votations nationales<br />

(février 2019 et septembre 2021) en attestent – m’a<br />

donné envie de relever le défi.<br />

Quelles sont les<br />

grandes lignes du travail<br />

que vous menez ?<br />

Ma mission première est d’élaborer un<br />

plan d’action cantonal LGBTIQ+, appelé à être validé<br />

par le Conseil d’État. Ce travail va se faire en<br />

plusieurs étapes.<br />

Actuellement, je réalise un état des lieux.<br />

Dans ce cadre, je rencontre successivement des<br />

représentant·e·x·s de toutes les associations et<br />

fondations actives sur le sol vaudois – plus d’une dizaine<br />

– afin de saisir au plus près la nature de leurs<br />

activités auprès des personnes LGBTIQ+, ainsi que<br />

l’historique de leur relation avec l’État. Les associations<br />

nationales seront sollicitées dans un deuxième<br />

temps. Parallèlement, je me renseigne auprès des<br />

personnes qui ont d’ores et déjà été amenées à travailler<br />

sur des dossiers LGBTIQ+ au sein des entités<br />

de l’État de Vaud, ou qui pourraient l’être à l’avenir.<br />

Par ailleurs, j’examine les nombreuses initiatives<br />

en matière de politique publique LGBTIQ+<br />

adoptées à l’international, ainsi qu’ailleurs en Suisse,<br />

au niveau municipal ou cantonal. La démarche vaudoise<br />

s’inscrit en effet dans une dynamique plus<br />

large, dont il s’agit de tirer profit.<br />

La synthèse des investigations menées durant<br />

cette première phase servira de base pour la<br />

deuxième étape du processus d’élaboration du plan<br />

d’action cantonal, laquelle se développera autour d’un<br />

large éventail de thématiques et, je l’espère, dans<br />

le cadre d’un processus de co-construction entre<br />

plusieurs partenaires, comme cela a été le cas au<br />

Québec dans les années 2000.<br />

Concrètement, quels sont les<br />

domaines de l’administration<br />

cantonale où vous pensez<br />

pouvoir agir ?<br />

De fait, les sept départements de l’administration<br />

cantonale vaudoise sont susceptibles<br />

d’être impliqués dans le plan d’action cantonal<br />

LGBTIQ+ au travers d’une ou plusieurs de leurs entités.<br />

Construire la transversalité du plan d’action<br />

constitue donc un défi majeur, mais aussi tout son<br />

intérêt, puisque l’objectif est de couvrir de manière<br />

lisible, cohérente et adaptée l’ensemble des besoins.<br />

Pour y parvenir, il s’agit d’initier une dynamique<br />

qui permette aux représentant·e·x·s des différentes<br />

entités étatiques de prendre conscience<br />

des vécus et besoins des personnes LGBTIQ+ et,<br />

sur cette base, de s’impliquer dans l’élaboration de<br />

mesures adaptées.<br />

POLITIQUE<br />

9


Pouvez-vous me donner des<br />

exemples plus concrets ?<br />

Dans deux contextes différents – l’élaboration<br />

de la politique municipale LGBTIQ+ lausannoise<br />

et un mémoire de fin de formation d’un officier de police<br />

– un questionnaire en ligne a été adressé à des<br />

représentant·e·x·s des services concernés pour identifier<br />

leur appréhension des difficultés que pouvaient<br />

rencontrer les personnes LGBTIQ+. Bon nombre de<br />

réponses montrent que beaucoup ne voient pas où<br />

est le problème : « Oui, on rencontre des situations<br />

de violences envers les personnes LGBTIQ+, mais<br />

elles sont rares et dans ces cas, on procède comme<br />

d’habitude, et cela va très bien pour tout le monde. »<br />

Dès lors, il importe d’amener des éléments de compréhension,<br />

des exemples, capables de faire levier<br />

et de susciter une prise de conscience.<br />

Il faut donc savoir se montrer pédagogue et<br />

tenir compte du fait que les professionnel·le·x·s n’ont<br />

généralement pas été formé·e·x·s sur les thématiques<br />

LGBTIQ+ et manquent dès lors d’outils pour réfléchir<br />

et agir adéquatement. Mais d’un autre côté, on se doit<br />

aussi d’être clair: ce n’est pas aux personnes LGBTIQ+<br />

de faire les frais du manque de connaissances des<br />

professionnel·le·x·s et représentant·e·x·s de l’État et<br />

d’y pallier au quotidien en assurant « à vif » leur formation<br />

continue « sur le tas ». En effet, en pareilles circonstances,<br />

les questions blessantes ou inutilement<br />

intrusives sont fréquentes et constituent autant de<br />

micro-agressions pour les personnes concernées.<br />

Ce n’est donc pas un hasard si le travail d’information<br />

et de formation, ainsi que l’élaboration de ressources<br />

occupent une place centrale dans la plupart des politiques<br />

publiques LGBTIQ+.<br />

Mais il est aussi essentiel de comprendre les<br />

réalités et les contraintes du terrain pour imaginer des<br />

ressources efficaces. On sait par exemple qu’il peut<br />

y avoir beaucoup d’homophobie et de transphobie<br />

dans les clubs sportifs. Des mesures doivent donc<br />

être prises pour éviter que jeunes et moins jeunes<br />

se trouvent privé·e·x·s des apports d’une activité<br />

physique pour cette raison. Mais les mesures proposées<br />

doivent tenir compte du fait que les coachs<br />

sont le plus souvent des bénévoles et que, dans bien<br />

des cas, les ressources des clubs sont limitées. Cela<br />

ne veut pas dire faire quelque chose au rabais, mais<br />

plutôt co-construire des solutions pertinentes pour<br />

tous·tes·x en fonction d’un contexte donné.<br />

10 POLITIQUE<br />

Quelle est votre marge de<br />

manœuvre au niveau cantonal,<br />

alors que les grandes<br />

décisions en faveur des<br />

droits LGBTIQ+ (mariage<br />

pour tous·tes·x et norme<br />

anti-raciste) ont été prises<br />

au niveau national ?<br />

Dans un pays comme la Suisse, je suis persuadée<br />

que le niveau cantonal est le plus pertinent<br />

pour agir, ceci en vertu du fédéralisme et de la souveraineté<br />

cantonale qui concerne des domaines aussi<br />

décisifs que la santé, la police, l’école ou encore la<br />

fonction publique. En outre, lors de la mise en œuvre<br />

des lois fédérales, un travail d’accompagnement au<br />

niveau cantonal peut vraiment faire la différence.<br />

J’en étais déjà convaincue, mais l’entrée en vigueur<br />

du mariage civil pour toutes et tous me l’a encore<br />

une fois démontré.<br />

Avez-vous identifié d’autres<br />

enjeux pour ce poste ?<br />

Derrière l’acronyme LGBTIQ+, il y a des expériences<br />

et des trajectoires qui ne sont pas identiques<br />

pour les différents groupes de personnes<br />

concernées. Les besoins de certaines d’entre<br />

elles sont mieux connus et acceptés, tandis que<br />

les réalités et les droits d’autres sont largement<br />

méconnus ou davantage remis en cause. Il en va<br />

de même au niveau des thématiques : ainsi la santé<br />

des jeunes LGBTIQ+ a fait l’objet de davantage<br />

de recherches et d’interventions que l’élaboration<br />

d’un accompagnement adapté pour les personnes<br />

LGBTIQ+ en situation de migration ou de demande<br />

d’asile, et ce n’est que récemment qu’on se préoccupe<br />

du vécu des seniors ou des familles LGBTIQ+…<br />

Ce n’est pas un scoop, il s’avère difficile<br />

d’être réellement inclusif, y compris au sein même<br />

de la communauté LGBTIQ+. Aussi, je souhaite n’oublier<br />

personne en chemin, ce qui requiert beaucoup<br />

de rigueur et de vigilance.<br />

LE MOT DU MOIS<br />

LE MOT DU MOIS<br />

LA NUANCE<br />

Marius Diserens est spécialiste en question de<br />

genre et de diversité, est chargé de garantir une<br />

large inclusion au sein du <strong>magazine</strong> et partage<br />

avec nous ses mots « coups de cœur » du mois.<br />

Dear reader,<br />

L’automne. Cette demi-saison où la nature<br />

n’a pas tout de vivant mais rien de mort, une saison<br />

de la demi-mesure, de la nuance, qui nous invitera<br />

peut-être à rechercher de la complexité dans notre<br />

vision des choses. C’est sûrement le rappel douloureux<br />

à notre existence éphémère, à la rapidité<br />

avec laquelle notre histoire s’écrit, ou s’oublie, d’où<br />

émergent ces mots.<br />

L’être humain a cette fâcheuse tendance à<br />

apprécier les faits et les gens selon les principes absolus<br />

du bien et du mal, sans état « intermédiaire »,<br />

sans complexité, tout en binarité : un point de vue<br />

manichéen. Considérer une personne dans son<br />

entier, c’est considérer ses horreurs certes, mais<br />

aussi ses beautés. Surtout pour nous, militant·e·x·s,<br />

qui nous efforçons de faire société autrement.<br />

Tolérer les plus grandes atrocités humaines<br />

? Non. Expliquer et accepter les comportements<br />

volontairement discriminants et violents<br />

? Jamais. Justifier les torts historiques de<br />

certain·e·x·s sans réparations ? Encore moins. Je<br />

ne sais pas ce que je ferais d’une couronne, du<br />

« pouvoir » ou même de la lumière. Ce que je sais,<br />

c’est que mon sens du devoir me fait et me fera sacrifier<br />

beaucoup, pour moi plus que pour les autres<br />

d’ailleurs; que j’en serai ainsi toujours tributaire<br />

mais que je me battrai inconditionnellement pour<br />

les plus marginalisé·e·x·s, en essayant toujours de<br />

nuancer. De construire au lieu de détruire.<br />

Au final, je veux faire preuve de compassion<br />

et de clémence, en sachant que, lorsque mon<br />

jour viendra, j’aimerais que l’on pleure mes beautés<br />

comme mes horreurs.<br />

SOCIÉTÉ<br />

PUBLICITÉ<br />

« Une<br />

J'ai eu un rapport anal protégé avec un autre homme.<br />

Après avoir éjaculé, lorsqu'il s'est retiré le préservatif<br />

est resté dans l'anus quelques secondes avant d'être<br />

extrait. Quel est le risque pour moi?<br />

Lors de rapports sexuels, le VIH se transmet par contact<br />

entre les muqueuses génitales/anales ou bien entre ces<br />

muqueuses et un liquide physiologique (sperme, sang…).<br />

Si le préservatif est resté en place durant<br />

toute la pénétration, il n’y a pas eu contact entre les<br />

muqueuses du pénis et de l’anus/rectum.<br />

Si le sperme n’a pas coulé à l’intérieur de l’anus alors il<br />

n’y a pas eu contact entre le sperme et la muqueuse<br />

anale/rectale.<br />

Si ces 2 affirmations sont justes, alors il n’y<br />

a pas d’exposition au VIH.<br />

Si l’une est fausse, alors il y a potentiellement<br />

eu une exposition au VIH.<br />

En cas d’exposition potentielle au VIH, il est<br />

possible de prendre un traitement d’urgence (PEP).<br />

Celui-ci doit être initié le plus tôt possible et au maximum<br />

48h après le rapport. Plus tôt le traitement d’urgence<br />

anti-VIH est initié plus il aura des chances de succès. Il<br />

ne faut donc pas attendre et se rendre au service d’urgence<br />

le plus proche.<br />

Plus d’information : www.drgay.ch/pep<br />

Cher Dr Gay<br />

J'entends souvent parler de la PrEP, mais aussi de la<br />

PEP. Quelle est la différence ?<br />

Les explications<br />

de DrGay ici ↓<br />

11


L’AVENIR<br />

DES COMBATS<br />

LGBTIQ+<br />

AU<br />

PARLEMENT<br />

SUISSE<br />

Victoire législative d’ampleur, le mariage pour tous·tes·x<br />

est entré en vigueur en juillet 2022 en Suisse. Mais cet<br />

acquis majeur ne signe pas la fin de la lutte. Quels grands<br />

combats reste-t-il à mener ?<br />

Par Tal Madesta<br />

Dans un contexte médiatico-politique de plus en<br />

plus lugubre pour les personnes LGBTIQ+, différentes<br />

associations tirent la sonnette d’alarme,<br />

soucieuses que la dynamique queerphobe notamment<br />

prégnante aux États-Unis soit importée en<br />

Europe. (voir article en p. 6) En effet, plus de 160<br />

lois anti-LGBTIQ+ ont été promulguées aux USA<br />

sur le seul premier semestre de 2022, dont une<br />

écrasante majorité sont anti-trans*. La situation<br />

est-elle aussi catastrophique de notre côté de l’Atlantique,<br />

particulièrement en Suisse ? « Il y a des<br />

attaques qui sont inquiétantes, mais des progrès<br />

importants sont faits. Plein de questions sortent de<br />

la sphère privée. Il y a des pas en arrière, mais la direction<br />

générale me semble bonne », rassure Julien<br />

Eggenberger, député au Grand Conseil vaudois et<br />

cofondateur du groupe queer du Parti socialiste.<br />

De fait, l’acceptation de la norme sur le mariage<br />

n’était pas gagnée d’avance dans un<br />

pays fracturé sur les enjeux LGBTIQ+, entre<br />

territoires progressistes et d’autres résolument<br />

conservateurs. Damien Cottier, député<br />

neuchâtelois libéral-radical au Conseil national<br />

et coprésident de l’intergroupe parlementaire<br />

sur les questions LGBTIQ+ commente :<br />

« Le fait qu’il y ait eu un référendum facultatif<br />

qui a statué largement en notre faveur a<br />

permis de démontrer une adhésion fondamentale<br />

de la société. Toute ma jeunesse,<br />

je me suis senti à part, sans représentations<br />

auxquelles m’accrocher. Tout à coup, mon<br />

pays me dit qu’il ne fait plus de différence sur<br />

cette question entre les personnes comme<br />

moi et les personnes hétérosexuelles. Ça a<br />

été extrêmement fort émotionnellement. »<br />

Cette absence de traitement différencié reste cependant<br />

à pondérer, au regard de nombreux enjeux de<br />

justice sociale qui restent sur le banc de touche. Au<br />

sein de l’acronyme, toutes les lettres ne sont pas sur un<br />

pied d’égalité politique, même pour des représentants<br />

engagés. Les problématiques spécifiques des personnes<br />

trans* en sont un bon exemple. Damien Cottier<br />

reconnaît à ce titre n’avoir « jamais entendu parlé de<br />

l’enjeu de la filiation pour les personnes trans* ». C’est<br />

d’ailleurs, explique-t-il, « la raison d’être de la création<br />

du groupe LGBTIQ+ au Parlement : pouvoir échanger<br />

sur les questions spécifiques de différents segments<br />

de la communauté, en rencontrant leurs représentants<br />

et des experts, et en analysant les besoins d’action<br />

au plan politique. » Une séance récente a notamment<br />

permis d’aborder un autre sujet négligé : les mutilations<br />

subies par les enfants intersexes à la naissance.<br />

Ainsi, les deux élus n’oublient pas que l’ouverture du<br />

mariage à toute la population n’est pas une fin en soi.<br />

Damien Cottier raconte : « Je suis engagé sur la question<br />

du don du sang, encore conditionné pour les hommes<br />

ayant des relations sexuelles avec les hommes à une<br />

abstinence obligatoire de 12 mois. C’est une restriction<br />

idiote, sans ancrage scientifique. Aujourd’hui on peut<br />

détecter le VIH dès 6 semaines post-exposition. » Ce<br />

sujet est poussé avec l’appui du gouvernement, auprès<br />

de la Croix-Rouge et de Swissmedic, l’autorité nationale<br />

des médicaments et produits thérapeutiques, qui<br />

sont responsables du processus. « Ce n’est pas nous qui<br />

prenons la décision, mais des scientifiques. Notre rôle,<br />

c’est simplement de dire : trouvez un moyen de mettre<br />

fin à cette discrimination. »<br />

Julien Eggenberger rappelle en outre le<br />

chantier sur lequel planchent actuellement<br />

les parlementaires : l’interdiction des thérapies<br />

de conversion. Un dossier hautement<br />

inflammable en raison de la mobilisation de<br />

groupes anti-trans*. « Notre plus gros obstacle<br />

au niveau législatif, c’est de maintenir<br />

l’unité. Sur cette proposition de loi, des voix<br />

s’élèvent pour faire retirer l’identité de genre<br />

du texte, s’opposant à l’autodétermination<br />

et aux modèles de traitement affirmatifs de<br />

genre. Ils ont maintenant des relais dans le<br />

canton de Vaud, ce qui veut dire qu’on les aura<br />

aussi. » Mais Julien Eggenberger appelle à<br />

faire front: « Tout progrès génère sa frange réactionnaire.<br />

Il ne faut pas se laisser détourner<br />

par ces vents-là lorsqu’ils sont minoritaires.<br />

Et on va tout faire pour qu’ils le restent. »<br />

Sur ces enjeux et sur d’autres, les élu·e·x·s<br />

LGBTIQ+ et allié·e·x·s ont une responsabilité cruciale<br />

et doivent maintenir le cap. « C’est l’erreur<br />

qu’on a faite jusque-là, suite au partenariat enregistré<br />

en 2007. Le parlement s’est endormi, comme<br />

si on avait réglé les questions LGBTIQ+ et qu’on pouvait<br />

passer à autre chose. On est dans une autre dynamique<br />

actuellement», estime Damien Cottier.<br />

Forts de leurs récentes victoires législatives, les<br />

élus restent optimistes malgré le contexte politique.<br />

Une nécessité, selon Julien Eggenberger : « Pour<br />

convaincre les gens de se battre, il faut montrer que<br />

parfois l’on gagne ».<br />

SUISSE<br />

POLITIQUE<br />

13


Marianne<br />

Huguenin :<br />

« Il faut sortir<br />

des ghettos »<br />

14<br />

Quelques mois après l’entrée en vigueur<br />

du mariage civil pour les couples de même<br />

sexe en Suisse, <strong>360</strong>° a rencontré Marianne<br />

Huguenin. Portrait de la popiste, figure de<br />

proue de la campagne lors du référendum<br />

sur le partenariat civil enregistré en 2004<br />

et première personnalité politique romande<br />

à avoir fait son coming out alors qu’elle officiait<br />

sous la coupole fédérale.<br />

Un beau jardin entoure la maison où Marianne<br />

Huguenin vit depuis 2017 avec sa compagne avec<br />

laquelle elle est partenariée depuis cinq ans. Elle<br />

nous accueille dans leur salle à manger, baignée<br />

de soleil en ce lumineux matin de septembre. Pas<br />

très loin de ce havre de paix renanais se construit<br />

le tram qui reliera dans quelques années le Flon à<br />

la gare de la ville de l’ouest lausannois, cinquième<br />

métropole vaudoise. Cette ville, la Locloise d’origine<br />

la connaît bien, puisqu’elle en a été la syndique<br />

jusqu’en 2016, année où elle s’est retirée de la vie<br />

politique institutionnelle. Elle y avait déjà occupé<br />

le rôle de municipale chargée des questions sociales<br />

notamment. Ce sont des problématiques qui<br />

la touchent depuis longtemps. En effet, fille d’un<br />

père directeur de l’entreprise familiale Huguenin<br />

au Locle et d’une mère féministe, elle a hérité de<br />

ses parents, dit-elle, une attention particulière pour<br />

son prochain et un besoin de défendre les plus démunis.<br />

Des engagements qu’elle a tenus chevillés<br />

au corps durant toute sa carrière politique.<br />

La septuagénaire fait ses premiers pas au<br />

Parti Ouvrier Populaire (POP) alors qu’elle<br />

a 20 ans, au tout début des années septante.<br />

À 30 ans, celle qui est médecin généraliste<br />

de formation tombe amoureuse<br />

d’une femme. Elle raconte en avoir très<br />

vite parlé à sa sœur et à ses ami·e·x·s,<br />

pour « le partager et le vivre pleinement ».<br />

Les choses sont un peu différentes avec<br />

ses parents en ce temps-là : « Ce n’était<br />

pas caché, mais ce n’était pas dit non<br />

plus. C’était un flou, un entre-deux. »<br />

En parallèle à sa carrière médicale, elle mène une<br />

vie politique engagée, sans pour autant parler<br />

publiquement de sa vie amoureuse : « Lorsque j’ai<br />

été candidate au Conseil des États ou au Conseil<br />

d’État dans les années nonante, je ne parlais pas<br />

de mon homosexualité. » Dans son parti, « cela n’a<br />

PAR ROBIN CORMINBOEUF<br />

jamais fait l’objet d’un discours public. J’ai appris<br />

que certain·e·x·s avaient souligné que j’étais<br />

avec une femme, ce à quoi d’autres anciens ont<br />

rétorqué “ On s’en fout, ce n’est pas important ”. »<br />

« EXPLIQUER D’OÙ JE PARLE »<br />

La popiste détaille ses combats : « Dans ma<br />

vie de militante, j’ai passé énormément de temps à<br />

me battre pour les droits des femmes, que ce soit<br />

autour de l’IVG, du droit à l’assurance maternité ou<br />

sur la question de la garde des enfants. J’ai fait ceci<br />

par solidarité, par engagement féministe. Peut-être<br />

paradoxalement, cet axe-là pour moi a été beaucoup<br />

plus central dans ma vie politique que celui des<br />

droits LGBTIQ+. » Les choses vont être chamboulées<br />

en 2003 : « Alors que j’étais municipale depuis sept<br />

ans à Renens, j’ai été élue au Conseil national. En<br />

y arrivant, une des premières sessions traitait de<br />

la loi sur le partenariat civil enregistré, et je suis<br />

intervenue directement. » L’opposition à la loi sur le<br />

partenariat (LPart) oriente sa campagne autour de<br />

la question du couple et de la fécondité de celui-ci,<br />

ce que la jeune conseillère nationale trouve alors<br />

« brutal aussi envers toutes les personnes hétérosexuelles<br />

qui auraient voulu des enfants sans pouvoir<br />

en avoir. » Lors des débats, Marianne Huguenin<br />

explique ne pas pouvoir rester silencieuse. « Je sentais<br />

qu’il fallait que j’explique d’où je parlais. Est-ce<br />

que j’intervenais en tant que médecin, en tant que<br />

personne concernée ? »<br />

15


Durant l’été 2004, Femina lui propose un entretien<br />

dans ses pages. « Je me suis dit : “ Si la journaliste<br />

est sympa et si elle m’interroge sur ma vie privée,<br />

je ne vais pas mentir ”. Ce qui a été le cas. Je lui ai<br />

simplement demandé de ne pas titrer l’article sur<br />

mon homosexualité. » Finalement, le papier ne suscite<br />

pas de réactions directes.<br />

C’est quelques mois plus tard que<br />

Marianne Huguenin est invitée à commenter<br />

un reportage de l’émission Mise<br />

au Point, rendez-vous incontournable du<br />

paysage télévisuel dominical, traitant de<br />

la différence entre la Suisse romande et<br />

la Suisse alémanique quant au coming out<br />

des personnalités publiques.<br />

En effet, outre-Sarine, il n’est alors pas si rare<br />

qu’un·e politique affirme publiquement son orientation<br />

sexuelle, ce qui n’était pas le cas en terres<br />

francophones. « J’avais préalablement prévenu mes<br />

proches, dont ma mère qui avait 86 ans à l’époque,<br />

et le jour J, j’ai eu l’impression de partir au front<br />

en quelque sorte. Finalement, le coming out ne<br />

concerne pas que soi. Ceux que l’on out en parlant<br />

publiquement, c’est notre famille également, nos<br />

proches. » L’émission fait grand bruit et la presse<br />

s’arrache l’élue qui, lors de l’entretien télévisé, explique<br />

que les personnes qui ont compté dans sa vie<br />

sont des femmes. « J’avais complètement sous-estimé<br />

l’impact de cette émission », se souvient-elle.<br />

« Je n’ai jamais eu autant de réactions, de lettres,<br />

de SMS. » Les retours sont pratiquement tous positifs,<br />

ce qui touche la conseillère nationale, qui<br />

souhaite avant tout parler publiquement afin de<br />

donner l’exemple. En effet, comme elle le rappelle<br />

dans l’entretien accordé à Mise au Point ce soir-là, il<br />

est important d’offrir des figures d’identifications<br />

positives aux jeunes concerné·e·x·s qui se suicident<br />

beaucoup plus que les personnes hétérosexuelles.<br />

SE BATTRE POUR LE « OUI »<br />

Cet entretien est diffusé au début de la campagne<br />

référendaire autour de la LPart, durant<br />

laquelle la femme politique s’engage<br />

en faveur du « oui ». Rapidement, elle devient<br />

le visage suisse romand de cette votation.<br />

Le processus s’accompagne de son<br />

lot de débats médiatiques qui l’opposent en<br />

particulier à Maurice Chevrier, PDC (Parti<br />

démocrate-chrétien, dorénavant nommé<br />

Le Centre) valaisan. En première ligne pour<br />

défendre ce grand pas vers l’égalité pour<br />

les couples de même sexe, la politicienne<br />

se souvient : « Cette campagne a parfois<br />

été difficile. Je me suis sentie considérée<br />

comme une citoyenne de seconde zone<br />

face à la ligne qui défendait la famille et le<br />

couple fécond comme modèle. »<br />

Sur le contenu de la LPart, Marianne Huguenin se<br />

rappelle que même si l’égalité n’était pas atteinte – le<br />

partenariat était réservé aux couples de même sexe,<br />

ne donnait pas accès à l’institution du mariage en<br />

tant que tel, ni à l’adoption, par exemple – « il y avait<br />

un consensus général dans tous les milieux concernés<br />

pour soutenir cette loi. Au fond, le fait que ce<br />

partenariat soit réservé aux couples de même sexe<br />

nous permettait de proposer quelque chose qui était<br />

beaucoup plus proche des droits obtenus à travers<br />

le mariage hétérosexuel. En même temps, cela arrangeait<br />

les conservateurs traditionalistes, qui ne<br />

voulaient pas que l’on fasse un “ sous-mariage ” sur<br />

le modèle du pacs français qui aurait pu dissuader<br />

les couples de se marier. Finalement, la recette proposée<br />

convenait à tout le monde. » Un joli exemple<br />

de compromis helvétique peut-être…<br />

Elle se souvient également que peu<br />

d’élu·e·x·s de gauche étaient présent·e·x·s<br />

sur les stands, lors de la campagne pour le<br />

« oui ». « Il faut reconnaître que le gros du<br />

travail a été mené par les associations de<br />

personnes concernées. » La campagne a été<br />

un succès, et la loi acceptée par le peuple,<br />

à 58%, le 5 juin 2005.<br />

«“ CAMARADE ”, C’EST PLUS SIMPLE !»<br />

Quand on lui demande quel regard elle<br />

porte sur les luttes LGBTIQ+ contemporaines,<br />

la popiste est parfois perplexe : « Je regarde avec<br />

un peu de distance et de critique certaines évolutions,<br />

qui tendent à diviser plutôt qu’à rassembler.<br />

» Parlant du discours inclusif, elle reconnaît<br />

ne pas l’utiliser de manière rigide et permanente<br />

et s’amuse : « Finalement, “ camarade ”, c’est plus<br />

simple !» lâche-t-elle en riant.<br />

<br />

Pour conclure, elle nous laisse avec ces<br />

quelques mots, comme autant de conseils<br />

pour les prochains combats à mener : « En<br />

stratège politique, il ne faut pas que le<br />

camp du “ oui ” soit constitué uniquement<br />

par des personnes concernées, sans quoi<br />

on est mort. Il ne faut pas défendre sa peau<br />

tout le temps, il faut défendre des valeurs<br />

humanistes et surtout ne pas exclure. Ma<br />

peur, c’est que la communauté soit divisée,<br />

qu’elle se renferme dans de petits ghettos.<br />

Il faut en sortir et laisser de côté l’individualisme<br />

pour voir l’autre. » Un appel à l’unité<br />

nécessaire à l’heure où les luttes LGBTIQ+<br />

semblent plus fragmentées que jamais.<br />

16


Thomas<br />

Salati à cœur ouvert<br />

par<br />

Natascia Bandecchi<br />

Photo<br />

Elizabeth La Rosa<br />

Régulièrement, <strong>360</strong>° vous propose un aller-retour direct avec le<br />

Tessin. Ce mois-ci, rencontre en tête-à-tête avec Thomas Salati,<br />

jeune figure du monde politique par delà le Gothard.<br />

Thomas est né à Lugano le 16 novembre 1994,<br />

quelques jours après la sortie de la première<br />

Playstation, une console qui, comme il le souhaiterait<br />

pour sa propre vie, a révolutionné la société<br />

(nous y reviendrons dans quelques lignes). Il a toujours<br />

aimé s’occuper des autres, c’est pourquoi il<br />

a choisi une carrière dans le social. Aujourd’hui,<br />

Thomas travaille dans un centre d’hébergement et<br />

de soins à Bellinzone. Bien que son emploi soit très<br />

prenant, il trouve toujours du temps pour s’adonner<br />

à ce qui l’anime en dehors de son travail : la politique,<br />

notamment à travers son engagement au sein<br />

de la Gioventù Socialista Ticino, les Jeunes socialistes<br />

du Tessin. Sur le plan personnel Thomas est<br />

depuis 4 ans fiancé à Stefano, avec qui il partage<br />

sa passion pour les chiens et le cinéma. Ils aiment<br />

particulièrement les films qui laissent une trace et<br />

qui font réfléchir. L’un des derniers qui a marqué<br />

Thomas ? Love, Simon, une œuvre qui traite du coming<br />

out et de l’outing. D’une manière générale,<br />

l’art l’anime et à Lugano il apprécie particulièrement<br />

la Villa Ciani, au cœur du parc éponyme, à<br />

deux pas du lac.<br />

Thomas confie ne pas s’être toujours accepté<br />

tel qu'il est. Il réalise être attiré par<br />

les hommes à l’âge de 18 ans. « Le défi le<br />

plus compliqué à relever a été d’établir un<br />

dialogue avec moi-même. Je suis passé<br />

par un processus très douloureux pour<br />

m’aimer et m’accepter tel que je suis. »<br />

Thomas se souvient avoir entendu des<br />

expériences de ses pairs rejeté·e·x·s et<br />

abandonné·e·x·s après avoir fait leur coming-out<br />

auprès de leur famille. « J’étais<br />

terrifié à l’idée que la même chose m’arrive.<br />

Je suis reconnaissant à ma famille et<br />

à mes amis de m’avoir écouté et accueilli<br />

à bras ouverts, sinon à cœur ouvert. »<br />

OUI, JE LE VEUX !<br />

Le jeune Tessinois a toujours voulu se marier,<br />

même s’il n’était pas certain, lorsqu’il était enfant,<br />

de qui serait à ses côtés ce jour-là. Aujourd’hui<br />

les choses sont différentes, son mariage est agendé<br />

pour novembre : « Je suis romantique et un peu vieux<br />

jeu, mais je pense que le mariage symbolise la plus<br />

haute dimension de l’amour pour son partenaire.<br />

Je suis impatient de dire: “ Je suis marié, Stefano<br />

est mon mari. ” » Cependant le tessinois tempère:<br />

« Là où j’ai grandi, à Viganello, il n’y avait pas de<br />

sensibilité ni de connaissances particulières sur<br />

les thématiques LGBTIQ+. Je ne garde pas un bon<br />

souvenir de mes années de collège », nous confiet-il.<br />

« J’ai été insulté, on a utilisé toutes sortes de<br />

termes dégradants envers moi, insinuant que j’étais<br />

quelqu’un de sale, un maniaque sexuel. J’ai été victime<br />

d’intimidation pendant plusieurs années et j’ai<br />

même été frappé. » Cette période sombre et tourmentée<br />

a forgé Thomas : « Ces années m’ont aidé<br />

à m’autodéterminer profondément. »<br />

UTOPIES<br />

Au XIXe et au début du XXe siècle, le<br />

Tessin était une destination prisée de communautés<br />

utopistes à la recherche d’une vie alternative<br />

à deux pas d’Ascona, au Monte Verità. Thomas<br />

ne se compare pas aux membres de ces communautés<br />

bohèmes, mais s’identifie au terme utopiste<br />

: « Je me consacre à la politique parce que je<br />

voudrais améliorer la société dans laquelle je vis,<br />

la transformer (la Playstation, vous vous souvenez<br />

?). Je suis convaincu qu’avec de l’intelligence,<br />

du professionnalisme et du dévouement, on peut<br />

changer beaucoup de choses. Pensons aux luttes<br />

LGBTIQ+ : la loi contre l’homophobie et le mariage<br />

pour tous·tes·x sont de belles victoires ! » Y a-t-il<br />

encore du travail à faire en Suisse ? « Beaucoup !<br />

Des sujets complexes comme la gestation pour<br />

autrui qui, même à gauche, seront difficiles à faire<br />

passer. » Thomas ajoute qu’il est par exemple inacceptable<br />

que le programme d’éducation sexuelle<br />

dans les écoles obligatoires et post-obligatoires<br />

ne comprenne pas un programme d’information<br />

et de sensibilisation aux questions d’orientation<br />

sexuelle et d’identité de genre.<br />

Ses convictions chevillées au corps, on<br />

ne peut que souhaiter au jeune homme la<br />

possibilité de continuer à défendre ses<br />

idéaux dans l’arène politique cantonale<br />

et qui sait, un jour peut-être, nationale.<br />

18 POLITIQUE SUISSE<br />

SUISSE<br />

POLITIQUE<br />

19


DANSE<br />

LILI ELBE SHOW<br />

RIVA & REPELE<br />

JEUDI 20 & VENDREDI 21 OCTOBRE 2022<br />

20H • SALLE DU LIGNON<br />

PRINCESSE GENDERFUCK<br />

LE JOURNAL D’UNE PRINCESSE<br />

Au prisme de sa culture québécoise, de ses activités<br />

militantes et artistiques, Princesse GenderFuck<br />

vous partage ses aventures entre son pays d’accueil,<br />

la Suisse, et son pays d’origine, le Canada.<br />

Voir la ville de Québec depuis le petit hublot de<br />

l’avion, après toutes ces années, m’a donné un<br />

sentiment de turbulence. Il faut dire que j’ai bien<br />

changé·e depuis que j’ai quitté le Canada. Alors<br />

que je suis considéré·e comme étranger·ère en<br />

Suisse, me voilà à me sentir étranger·ère dans<br />

mon propre pays. Il mouillait à siaux quand mon<br />

père est venu nous chercher, Aleks et moi, pour<br />

nous conduire chez nous. Dans l’auto, on échangeait<br />

des regards-sourires par le biais du rétroviseur.<br />

C’était la première fois que je présentais<br />

un amoureux à mon père. La rencontre avait toutefois<br />

son fond de malaise, car il appelait Aleks<br />

« ton ami ». En naviguant dans les rues de mon village,<br />

nous avons croisé mon oncle qui nous saluait<br />

à grands coups de bras. La vitre latérale était à<br />

peine descendue que je l’entendais déjà nous<br />

crier la bienvenue : « Comment ça va Mathieu !<br />

Tu sais que mes enfants te suivent sur Instagram !<br />

Tu fais du bon ! » Alors que plus jeune, il m’achetait<br />

des affiches de Pamela Anderson pour que<br />

je devienne un homme, ce jour-là, je ne voyais<br />

que fierté et joie de me retrouver. En parallèle,<br />

je commençais à recevoir des messages d’amour<br />

de la Suisse sur mon Natel. Je suis peut-être un·e<br />

éternel·le étranger·ère. D’ailleurs, n’est-ce pas<br />

également ça, être queer ? Dans tous les cas, tout<br />

cet amour me fait me sentir chez moi.<br />

Culture et communication<br />

022 306 07 80 • scc@vernier.ch<br />

www.vernier.ch/billetterie<br />

Ville de Vernier<br />

© Svend Andersen<br />

© Paolo Laudicina<br />

L'HUMEUR DE DR. HAZBI<br />

UNE D’CES COUCHES !<br />

Dr. Hazbi est enseignant·x universitaire·x,<br />

artiste·x et politicien·x. Son téléphone est bourré<br />

de réflexions qu'iel s'empresse de retranscrire,<br />

couche par couche.<br />

Couche #53<br />

Troisième fois en un an qu’un mec cishet occidental<br />

me dit que le Kosovo devrait prendre exemple<br />

sur l’Europe occidentale pour avancer. Haha. Gars, si ton<br />

pays a réussi, c’est parce qu’il a écrasé des populations<br />

sur son sol ou ailleurs. Le Kosovo a été écrasé depuis des<br />

siècles. Ton pays a pu avancer grâce à la misère qu’ont<br />

vécu nos familles. Elles ont travaillé dans les jobs que<br />

toi tu ne voudrais pour rien au monde. Et après moins<br />

de deux décennies de liberté, le Kosovo figure parmi les<br />

cinq pays les plus démocratiques en Europe. Montrez<br />

du respect plutôt que de la condescendance. Flm [ndlr :<br />

abréviation de faleminderit, soit merci en albanais].<br />

Couche #54<br />

À quand un changement du nom du pays<br />

pour Dardania d’ailleurs ?<br />

Couche #55<br />

Dès que je vois qu’une personne en a rien à<br />

carrer de laisser un monde dévasté et dévastateur<br />

à ses propres enfants, je ne me fatigue même plus<br />

à essayer de leur faire comprendre les enjeux de<br />

justice environnementale envers les personnes les<br />

plus fragilisées à l’extérieur de notre cocon helvétique<br />

(et aussi à l’intérieur). Je les vois comme des<br />

virus dans la matrice. Et un virus, tu le prends pas<br />

par la main avec toute la pédagogie du monde pour<br />

lui montrer comment faire moins de mal. Surtout<br />

quand tu vois que les réseaux sociaux créent le plus<br />

de fric à travers les fakes news, les émotions négatives,<br />

les infos qui confirment ce qu’on pense déjà,<br />

la simplicité plutôt que la complexité dans l’info…<br />

Couche #56<br />

Respect, résilience, sagesse.<br />

20<br />

CHRONIQUES<br />

SOCIÉTÉ<br />

21


BONS<br />

BAISERS<br />

DE<br />

BERLIN<br />

Chaque mois, notre correspondante à Berlin Annabelle Georgen<br />

nous envoie des nouvelles fraîches et acidulées de la capitale<br />

queer européenne. Sans traces de rouge à lèvres.<br />

22<br />

« Il n’y a pas de bar lesbien à Berlin. » Chaque fois que<br />

je laisse choir d’un air désolé cette réponse lapidaire<br />

à des copines de France ou d’ailleurs qui veulent en<br />

savoir plus sur les nuits folles de la communauté<br />

LGBTIQ+, c’est la consternation que je vois tordre<br />

les traits de leur visage : « Comment ? Quoi ? C’est<br />

une blague ? Non mais c’est pas possible ! Il n’y a PAS<br />

de bar à gouines à Berlin ? » Il y en a eu, pourtant,<br />

des bars lesbiens à Berlin. Dans les années 1920, la<br />

capitale allemande en comptait des dizaines. Dans<br />

les années post-chute du Mur, quand Berlin avait<br />

soudain doublé de taille, une jungle de bars, clubs,<br />

squats et autres lieux autogérés lesbiens avaient<br />

pignon sur rue. Le dernier bar lesbien en tant que<br />

tel, le Serene Bar, a fermé ses portes en 2016. Il reste<br />

bien un bar à goudous de la vieille époque à Berlin,<br />

Die Begine, qui opère sous l’étiquette pudique de<br />

« bar de femmes », mais celui-ci a si bien fidélisé<br />

son public au fil des ans qu’il est devenu une antichambre<br />

de la maison de retraite.<br />

La vie nocturne de la communauté lesbienne<br />

et queer-féministe berlinoise<br />

de moins de 50 ans s’organise depuis<br />

plusieurs années autour des soirées<br />

FLINTA* (acronyme qui signifie femmes,<br />

lesbiennes, inter, non binaires, trans et<br />

agenre – en bref, tout le monde sauf les<br />

hommes cis) organisées par une flopée<br />

de bars. Seul pourvoyeur de socialité<br />

lesbienne hebdomadaire des années durant,<br />

le Möbel Olfe, un bar gay historique<br />

de Kreuzberg, a longtemps été la plaque<br />

tournante de la scène FLINTA* berlinoise.<br />

Le mardi soir, quand d’autres avaient piscine,<br />

nous, on avait Olfe, c’était impossible<br />

de prévoir autre chose. Mais depuis<br />

la fin des lockdowns, l’offre autrefois si<br />

frugale des autres bars (avant 2021 on<br />

s’estimait chanceuse·x s’il y avait quatre<br />

soirées FLINTA* dans le mois) a littéralement<br />

explosé. La FOMO (fear of missing<br />

out), cette crainte de privilégié·e·x·s qui a<br />

épargné si longtemps la vie nocturne de<br />

la lesbienne berlinoise, plane désormais,<br />

menaçante, sur les agendas des FLINTA*.<br />

Et en parallèle, la demande est désormais si forte<br />

que même le Möbel Olfe s’est retrouvé cet été pris<br />

d’assaut par des centaines de FLINTA* semaine<br />

après semaine. Tout le monde ne pouvant pas<br />

entrer dans le bar quand il fermait sa terrasse,<br />

d’immenses rassemblements s’étiraient jusque<br />

tard dans la nuit à ses abords, avec pour corollaire<br />

les problèmes de voisinage inévitables. Au<br />

point que la direction du Möbel Olfe, dépassée<br />

par la situation, s’est résolue au mois d’août à<br />

fermer le bar les mardis soirs avant de rouvrir,<br />

d’abord à petite dose. Cette affluence record, du<br />

jamais-vu, parole d’habituée, a montré clairement<br />

que plus que jamais, Berlin a besoin d’un bar lesbien.<br />

À bonne entendeuse !<br />

T<br />

SOCIÉTÉ<br />

LA CARTE POSTALE D’ANNABELLE GEORGEN<br />

2022<br />

V<br />

C<br />

IELLE<br />

Cédric<br />

Djedje<br />

I<br />

H<br />

T<br />

Général-Dufour 16<br />

CH-1204 Genève<br />

w w w. grutli.ch<br />

1-13 novembre<br />

Le Grütli Centre<br />

Le Grütli de production<br />

Le Grütli et<br />

Le Grütli de diffusion<br />

Le Grütli des Arts vivants<br />

Réservations :<br />

+41 (0)22 888 44 88<br />

reservation@grutli.ch


Aloïse<br />

Sauvage<br />

Vagin Pirate a eu la chance d’échanger avec la talentueuse<br />

Aloïse Sauvage.<br />

Musicienne,<br />

danseuse,<br />

actrice<br />

et circassienne, elle sort un magnifique nouvel album,<br />

SAUVAGE, le 7 octobre.Ça déborde d’énergie positive filant<br />

droit vers un monde nouveau, le tout sans concession.<br />

Vagin Pirate est fan !<br />

Photos : Flo Pernet<br />

Cheffe de meute<br />

24 RENCONTRE<br />

ALOÏSE SAUVAGE<br />

25


Ton nouvel album commence<br />

avec Montagnes<br />

Russes. On a l’impression<br />

que tu y donnes le ton<br />

pour toute la suite de l’album.<br />

Quel est le message<br />

principal de cet album ?<br />

Cet album parle beaucoup d’amour, que ça soit<br />

l’amour de soi, l’amour que tu portes aux autres, l’amour<br />

amoureux ou l’amour du collectif. C’est une thématique<br />

que j’aborde énormément, même si ça ne fait pas longtemps<br />

que je fais de la musique. Mais avant tout, j’ai<br />

l’impression que dans cet album, ça parle beaucoup de<br />

renaissance, de métamorphose, de transcendance et de<br />

ce passage de l’ombre vers la lumière, de ce clair-obscur<br />

constant. En tout cas, je suis passée par pas mal<br />

d’étapes personnelles et professionnelles, des petites<br />

cascades, un peu déceptives, un peu violentes, un peu<br />

compliquées à vivre, mais j’en ai fait des chansons.<br />

Dans tes chansons,<br />

on trouve toujours<br />

une dimension optimiste,<br />

même quand tu<br />

parles de situations<br />

tristes. C’est important<br />

pour toi ?<br />

Oui, c’est vrai ! Il y a trois jours, j’étais en tournage,<br />

je suis partie avec mon meilleur pote Zenzel qui a<br />

réalisé mes deux derniers clips, Focus et Crop Top. Bref,<br />

à quatre dans une voiture, à vadrouiller, Zenzel nous a<br />

demandé : « C’est quoi vos défauts et vos qualités ? ». On<br />

en vient à mes qualités, et je lui ai demandé: « Toi qui me<br />

connais, c’est quoi ma qualité ? ». Je m’attendais à plein de<br />

réponses, mais il m’a dit : « Toi, tu as la foi, pas religieuse, la<br />

foi dans la vie, dans la transcendance, dans l’éthique, la foi<br />

en l’être humain. » Et pour moi, ce rapport à la foi, il est lié<br />

avec l’espoir, et j’essaie de retranscrire ça dans mes chansons.<br />

C’est cette luminosité que j’essaie de toujours avoir<br />

en conclusion, même sur des thématiques plus sombres.<br />

Je sens que les gens me renvoient ça, que ça donne envie<br />

de vivre, de faire des choses, que ça donne de l’espoir<br />

et pour moi, ça c’est royal ! Ça me touche énormément.<br />

Après, quand je fais ce genre de chansons, ce n’est<br />

pas pour faire de la pédagogie, c’est avant tout pour<br />

exprimer ce que je ressens. J’ai une colère qui vient<br />

de situations vécues, ça se transforme en images et<br />

ça devient une chanson.<br />

Dans tes chansons, tu<br />

parles de sentiments<br />

et de situations quotidiennes<br />

auxquels la<br />

majorité des gens peuvent<br />

s’identifier. Mais le fait que<br />

tu les exprimes à<br />

travers ton prisme<br />

d’artiste ouvertement<br />

queer et lesbienne te transforme<br />

de facto en<br />

artiste militante. Tu en<br />

penses quoi ?<br />

Je l’accepte en tout cas, c’est une responsabilité,<br />

mais aussi un honneur qu’on me fait. C’est important.<br />

Là où j’avais du mal au début de mon parcours,<br />

c’est qu’on me demandait sans cesse si j’étais<br />

militante. J’avais du mal avec cette question, car<br />

j’écrivais depuis mon canapé sur mes découvertes,<br />

mes peines de cœur, je ne me sentais pas du tout<br />

légitime qu’on me labellise ainsi.<br />

Aujourd’hui je peux dire que oui, je suis militante,<br />

je suis une femme blanche lesbienne, c’est une<br />

minorité. C’est important pour moi que les artistes<br />

queer soient des porte-drapeaux, plus nous serons<br />

nombreux·ses·x, moins il y aura besoin de porte-drapeaux.<br />

Du coup, je pense que je n’ai pas trop le choix.<br />

Que je le veuille ou non, ce que je fais est politique,<br />

je suis engagée émotiellement, mais puisque je suis<br />

une jeune femme ouvertement queer, je suis engagée<br />

politiquement. Je pense que mon parcours parle de<br />

moi, on ne peut pas en faire des généralités, mais il<br />

parle aussi pour tous·tes·x les autres qui n’ont peutêtre<br />

pas la parole.<br />

Par contre, je sais aussi qu’on va toujours<br />

me poser ces questions-là en premier. Parce que les<br />

journalistes ont besoin de définir, de mettre les gens<br />

dans des cases : Aloïse Sauvage, c’est l’artiste toucheà-tout,<br />

féministe et lesbienne. Du coup, je réponds aux<br />

questions qu’on me pose et je pense que ça a accéléré<br />

mon processus de déconstruction et de réflexion.<br />

J’essaie de m’instruire pour pouvoir dire des choses<br />

sensées qui font avancer un petit peu le débat. Tout ça<br />

fait que j’accepte qu’on me voie à travers ce prisme,<br />

et je vais continuer de revendiquer mon identité queer<br />

haut et fort !<br />

Est-ce qu’il y a eu de<br />

déclics qui t’ont permis<br />

d’appréhender l’importance<br />

de cette visibilité ?<br />

Un déclic personnel, pour moi, ç’a été de<br />

faire le podcast Coming Out sur Spotify, qui est sorti<br />

en février 2021. C’était un gros déclic, premièrement<br />

car je n’osais pas avant, on m’avait proposé un an<br />

auparavant, et je ne me sentais pas prête. Du coup,<br />

j’étais déjà fière de le faire. À ce moment-là, mon coming<br />

out était public mais le fait d’en parler comme<br />

ça, intimement, c’était différent.<br />

Et puis j’ai eu… c’est impossible à expliquer…<br />

une vague de messages, qui a duré toute l’année, des<br />

gens super différents qui se sentaient aidés, touchés,<br />

célébrés et compris. Et c’est là que je me suis dit, à<br />

partir de maintenant je vais le clamer haut et fort,<br />

c’est primordial !<br />

Il y a des chansons<br />

J’ai lu que tu disais que cet<br />

carrément gouines sur cet<br />

album était comme un<br />

album, c’est vraiment<br />

deuxième premier album.<br />

super ! Comme tu le dis, tu<br />

C’est quoi la différence Dans ton super 2 e single,<br />

te sens lesbienne<br />

entre ces deux Aloïse ? Crop Top, hymne au<br />

aujourd’hui. Comment te<br />

Je dis surtout que le premier album n’a pas consentement, tu répètes<br />

sens-tu par rapport à<br />

vécu, enfin il n’a pas vécu physiquement, il n’y a pas<br />

« Nan c’est nan c’est nan,<br />

l’utilisation de ce mot qui,<br />

eu de tournées. J’étais aux Victoires de la musique<br />

comme révélation scène, j’ai sorti mon album, et trois quand on dit nan nan » On<br />

par un passé pas si lointain,<br />

jours après c’était le confinement. Ça a été une première<br />

cascade qui m’a obligée à prendre du recul et<br />

en a pas marre de devoir<br />

avait une connotation<br />

à reconsidérer ce que je voulais faire, ce que j’étais. prendre du temps pour<br />

assez négative ?<br />

Après plusieurs reports de concerts, j’ai fait le choix<br />

Moi je me définis en tant que lesbienne,<br />

éduquer les bons hommes<br />

d’annuler la tournée, notamment car j’avais changé<br />

et j’ai pas de problème à l’utiliser. Pour qu’énergétiquement<br />

notre affirmation intérieure s’exprime à<br />

d’équipe. Il fallait que je reprenne les rênes de ma vie au bout d’un moment ?<br />

professionnelle et artistique. Donc ce ressenti par rapport<br />

à ce 2e album, c’est : « Maintenant on y est !» Avant,<br />

c’était l’introduction et maintenant on peut y aller !<br />

Je suis très fière des titres Dévorantes et<br />

Jimy, mais il y avait une effervescence autour de moi<br />

à ce moment-là et j’ai pris moins de recul. Par contre,<br />

pour cet album, j’ai eu le temps de construire ce que<br />

je voulais faire, j’ai réussi à reprendre confiance en<br />

moi, à m’affirmer et à retrouver la lumière dans les<br />

choses. Tout cela a impacté et nourri le rapport à mon<br />

projet. Cet album, je l’ai coréalisé avec mon ingé son,<br />

j’étais de A à Z dans le processus, je me suis complètement<br />

investie. C’est pas pour rien que cet album<br />

s’appelle SAUVAGE, je reviens en cheffe de meute,<br />

avec mon noyau dur, avec les gens avec qui j’ai réellement<br />

envie de fonctionner, avec mes valeurs et zéro<br />

compromis. SAUVAGE, c’est cette pierre-là que je<br />

pose à l’édifice.<br />

Ha ben moi, j’en ai carrément marre, sauf que tu<br />

sais, on ne nous laisse pas vraiment le choix. J’aimerais<br />

ne pas avoir à le faire, mais je ne peux pas juste dire<br />

non, ça me fait chier, et ne pas le faire. J’ai pris du recul<br />

par rapport à ça. Au début je ne savais pas comment<br />

m’y prendre, j’étais aussi dans mon parcours de jeune<br />

femme, de jeune citoyenne, de jeune lesbienne, je ne<br />

me sentais pas forcément légitime. Mais je me rends<br />

compte maintenant que je suis obligée de prendre cette<br />

place, je suis obligée de faire de la pédagogie parce qu’<br />

il y a une petite lucarne qui fait que moi, je suis visible.<br />

Quand je vois les commentaires que je reçois<br />

sur une chanson comme Crop Top, d’une majorité<br />

d’hommes qui se sentent sûrement concernés,<br />

mais qui ne voient pas où est le problème, je me dis<br />

qu’il y a encore du boulot. J’aimerais que ces gens<br />

prennent leurs responsabilités et s’éduquent euxmêmes,<br />

mais on n’y est pas encore.<br />

l’extérieur et donc s’exprime au monde, qui n’est pas<br />

majoritairement lesbien, je pense qu’il convient qu’on<br />

soit fières des mots employés pour nous représenter.<br />

Mais moi aussi avant j’avais cette homophobie intériorisée,<br />

qui fait que j’osais pas trop employer ce mot,<br />

« lesbienne ». Mais par contre, l’Aloïse d’aujourd’hui<br />

trouve que c’est un très joli mot et pense qu’il ne faut<br />

pas avoir honte de le dire !<br />

Suite de l'interview en p. 30<br />

26 RENCONTRE<br />

ALOÏSE SAUVAGE<br />

27


28


Alors qu’on vit à une<br />

époque super florissante<br />

de références et représentations,<br />

comment on<br />

fait pour réussir à se trouver<br />

soi, sans tomber dans le<br />

mimétisme, la recherche<br />

du cool ou des attentes des<br />

autres ?<br />

Le fait qu’il y ait énormément de choses qui<br />

sortent, c’est assez angoissant. Des fois j’appréhende,<br />

ça fait deux ans que je n’ai rien sorti, je me dis qu’en<br />

trois ans les gens passent à autre chose. Je trouve ça<br />

difficile, d’exister quand tu n’es pas encore établi·e·x.<br />

Ensuite pour le mimétisme, je ne ressens pas<br />

cette problématique-là en studio. Je fais la musique<br />

que j’aime, elle évolue. On pourrait l’appeler pop urbaine,<br />

ou chanson française avec influence rap, mais<br />

moi j’aime le hip-hop, le rap et j’essaie, tout en bossant<br />

avec des producteurs qui viennent de cet univers-là,<br />

de faire quelque chose qui m’appartient, avec mon<br />

écriture, mon sens des mélodies et ma vision artistique.<br />

Donc je n’ai pas l’impression de devoir mimer,<br />

d’ailleurs quand je suis en studio je n’écoute pas beaucoup<br />

de musique, je suis vraiment dans ma bulle à moi.<br />

À mon échelle, ce que je recherche dans la<br />

musique c’est aussi d’aller plus loin dans les productions,<br />

d’aller chercher des sons là où on ne m’attend<br />

pas. Par exemple, enregistrer des instruments de manière<br />

organique, des quatuors à cordes, des batteries;<br />

je me suis amusée à triturer les morceaux. Et j’espère<br />

pouvoir aller encore plus loin dans le futur !<br />

On aura la chance de t’avoir<br />

en Suisse, le 4 novembre<br />

aux Docks de Lausanne.<br />

Sur les réseaux ça tease sec,<br />

avec un set up qui a<br />

l’air dingue. Tu peux nous<br />

en dire un peu plus ?<br />

Beaucoup d’énergie! Mais aussi, je l’espère,<br />

un show unique qui va mettre en valeur ce nouvel<br />

album. Un peu tout ce que je suis, en fait. Il y aura<br />

des salles où je ne pourrai pas tout faire en fonction<br />

de l’espace scénique, mais il ne faut pas s’inquiéter,<br />

où qu’on sera, ça sera magnifique. Je vais enfin<br />

pouvoir dérouler mon histoire et être moi-même. J’ai<br />

vraiment hâte de commencer une vraie tournée et<br />

de pouvoir défendre mon projet. J’aime la scène, je<br />

pense être née pour ça.<br />

Et en plus, je me réjouis de revenir en<br />

Suisse, car j’ai fini ma tournée de festivals cet été à<br />

Estavayer-le-Lac et j’ai promis que je reviendrai plus<br />

forte que jamais en novembre !<br />

LES<br />

OCÉANOGRAPHES<br />

John Corporation<br />

– Émilie Rousset<br />

et Louise Hémon<br />

2 – 5<br />

NOVEMBRE 2022<br />

Tu aimes t’exprimer via tes<br />

talents multiples, la musique,<br />

la danse, le cirque, ta<br />

carrière d’actrice…Il y a<br />

encore d’autres formes<br />

d’expression qui te titillent ?<br />

Déjà, j’aimerais bien réussir à développer ce<br />

que j’ai dans la tête avec les cordes que j’ai à mon arc.<br />

Typiquement pour la mise en scène des concerts, en<br />

ce qui concerne ce que j’ai envie de développer, on en<br />

est encore à l’apéritif. J’ai encore beaucoup de choses<br />

à faire pour incorporer la danse, le cirque contemporain,<br />

l’aspect théâtral ou encore la vidéo ou la scénographie.<br />

J’aimerai vraiment bien me concentrer là-dessus d’abord.<br />

Dans le futur, j’aimerais beaucoup écrire, de<br />

la poésie ou quelque chose de plus fictionnel. Mais<br />

d’abord, je vais devoir me calmer et me concentrer<br />

sur ce que j’ai !<br />

30 RENCONTRE<br />

GRANGE-UNIL.CH<br />

SOUS-RUBRIQUE<br />

RUBRIQUE<br />

31<br />

© PHILIPPE LEBRUMAN / Z-LO IMAGES


L'HUMEUR D'AYMERIC DALLINGE<br />

SAINTE ANGOISSE<br />

Aymeric Dallinge s’amuse des mots et crée des ambiances<br />

saisies dans l’instant.<br />

Je sens grimper en moi cette chose qui me grignote.<br />

Plus le temps passe, plus elle s’empare de moi. Je<br />

me tortille sur moi-même. Tous mes muscles sont<br />

contractés. La sensation de n’être que douleur<br />

m’envahit. Je sens que je perds la raison. Ma vue<br />

se trouble. Mes mains tremblent. Ma respiration se<br />

bloque. J’aimerais ne pas la laisser m’engouffrer.<br />

Je lutte. Pourtant, rien n’y fait.<br />

Cette petite bête je la connais bien. Je l’ai rencontrée<br />

il y a quelques années. La première fois, elle<br />

s’est présentée sous le nom de dépression. Un mot<br />

que j’avais appris dans mes livres de psychologie.<br />

Mais vivre avec, je ne pensais pas. Tous les stéréotypes<br />

construits dans l’inconscient collectif étaient<br />

présents pour que je ne me sente pas concerné.<br />

Avec le temps, j’ai appris à apprivoiser<br />

l’anxiété et à anticiper les contextes déclencheurs.<br />

J’ai développé des ressources internes et externes<br />

pour caresser l’angoisse et me permettre de réduire<br />

la sensation de perte de contrôle. Cet apprentissage<br />

a nécessité d’accepter les émotions au<br />

travers desquelles je pouvais passer et de prendre<br />

du recul par rapport aux choses qui se passent et<br />

sur lesquelles je n’ai pas de pouvoir. Oser nommer<br />

mes ressentis n’a pas été simple, mais m’a permis<br />

d’accueillir et de comprendre un fonctionnement<br />

dont j’ignorais les notions.<br />

Le 10 octobre est célébrée la Journée mondiale<br />

de la santé mentale. Parler de sa santé mentale<br />

n’est pas une honte. Au contraire, ouvrir la parole sur<br />

ses maux amène à briser les tabous ainsi qu’à s’offrir<br />

une fenêtre de repos.<br />

stop-suicide.ch<br />

santepsy.ch<br />

N.25+1<br />

LGBTIAQ+-FILM-<br />

FESTIVAL BERN<br />

FESTIVAL<br />

DE FILMS LGBTIAQ+<br />

DE BERNE<br />

L'HUMEUR DE LÉON SALIN<br />

CULTURISTE<br />

Léon est un homme transgenre romand. Il tient les<br />

comptes Instagram et TikTok @salinleon dans lesquels<br />

il lutte pour une représentation positive des<br />

personnes transgenres.<br />

Dans cette chronique, je continue ma discussion<br />

avec Julien, un homme cisgenre, hétéro, avec qui je<br />

partage certaines de mes pensées. Il est fictif, sans<br />

être irréel. Julien ça pourrait être toi, moi et/ou nous.<br />

Cher Julien, je t’observe. Collé au miroir,<br />

tu bombes ton torse. Menton élevé, mâchoire ser-<br />

rée, yeux perçants et t-shirt moulant. Entre deux<br />

séries de biceps, tu scrutes chacun de tes muscles<br />

gonflés. Mes yeux sont incontrôlables: je te mate.<br />

Et moi alors ? Mes muscles sont-ils aussi<br />

gonflés ? Sont-ils aussi éclatants, saillants, volumineux<br />

? Non. Mon esprit ne les perçoit pas ainsi.<br />

Aigreur aux lèvres, je me lance. Première série<br />

de pecs. Allongé sur le banc, je soulève la barre<br />

emparé d’une rage profonde. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8,<br />

9, 10, 11 et 12. Mes veines ressortent, le sang pulse<br />

à flots rapides dans chacun de mes membres.<br />

Ça gonfle. Mon regard s’élance viscéralement à<br />

ta recherche. Toujours collé au miroir, tu pues<br />

la testostérone. Celle que je m’injecte chaque<br />

mois et qui me permet de ressembler à qui je suis.<br />

1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11 et 12. Je ne peux plus<br />

éviter cette question, la question qui m’a amené<br />

à payer ce putain d’abo de fitness. Si j’étais né<br />

homme, est-ce que je mènerais cette recherche<br />

interminable du corps de Schwarzenegger ? Estce<br />

que tous ces muscles seront un jour assez volumineux<br />

pour combler le vide entre mon reflet et<br />

mon ressenti d’homme ? Tu ne nais pas homme,<br />

tu le deviens. Je n’ai pas trouvé mon apaisement<br />

dans la sueur déposée sur les haltères de la salle<br />

de fitness. Je n’arrive pas à m’arrêter de chercher<br />

la réponse à ma question.<br />

32 CULTURE<br />

L'HUMEUR DE<br />

QUEERSICHT.<br />

CH<br />

3.—9.<br />

11.2022<br />

HAUPTSPONSOREN – SPONSORS PRINCIPAUX<br />

PARTY<br />

5.11.2022<br />

GASKESSEL<br />

BERN


HOMMAGE<br />

TRANS*<br />

PAR<br />

LA DANSE<br />

Dans leur dernière création, le duo de chorégraphes et danseurs<br />

Simone Repele et Sasha Riva se penchent sur l’histoire de la<br />

peintre danoise trans Lili Elbe rendue populaire par le filmThe<br />

Danish Girl. Un voyage intime au cœur de son monde intérieur à<br />

découvrir à la Salle du Lignon à Vernier.<br />

Par Celia Hofmann<br />

© ANGELINA BERTRAND<br />

MARCOS CARAMÉS-BLANCO TEXTE ⁄ ISIS FAHMY MISE EN SCÈNE<br />

JEU – BÉNÉDICTE AMSLER DENOGENT . JÉRÔME DENIS . AURÉLIEN GSCHWIND . ZACHARIE JOURDAIN<br />

03—23.10<br />

Trigger Warning<br />

⁄⁄ Aimez-vous vous-mêmes. Aimez vous les uns les autres.<br />

Et abonnez-vous surtout. ⁄⁄<br />

THÉÂTRE⁄VIEILLE-VILLE<br />

POCHE---GVE.CH<br />

Copenhague,1920. Alors que sa femme Gerda lui<br />

demande de remplacer un modèle féminin pour<br />

l’un de ses tableaux, Lili Elbe – alors connue sous<br />

le nom d’Einar Wegener - commence à questionner<br />

son identité de genre. Peu à peu, elle explore<br />

sa féminité en continuant de poser pour<br />

sa femme. C’est ainsi que naît Lili Elbe, d’abord<br />

présentée comme la sœur d’Einar. Mais la réalité<br />

prend vite le pas sur la fiction, et Einar finit par<br />

disparaître pour laisser la place à Lili.<br />

Lili Elbe est connue pour avoir été l’une<br />

des premières femme trans de l’histoire<br />

moderne à bénéficier d’une chirurgie<br />

d’affirmation de genre. Pionnier de la<br />

médecine trans*, Fernand Warnekros est<br />

alors le seul médecin à ne pas considérer<br />

la transidentité comme une perversion<br />

et à accepter de l’opérer. Après plusieurs<br />

interventions réussies et mue par un désir<br />

de maternité, Lili se fait implanter un<br />

utérus. Cette dernière opération lui sera<br />

fatale, et elle finira par succomber aux<br />

suites de la greffe.<br />

Dans Lili Elbe Show, son destin tragique est<br />

raconté par cinq danseurs·euses·x évoluant<br />

au rythme de musiques folkloriques danoises.<br />

Une danseuse incarne Gerda, tandis que quatre<br />

d’entre elleux représentent les différentes facettes<br />

de la personnalité de Lili. Mettant en lumière<br />

les relations entre les personnages et leur<br />

émotionnalité, la pièce est un voyage au cœur de<br />

l’univers intime de Lili Elbe, qui raconte la découverte<br />

et l’acceptation de son identité profonde.<br />

Tous deux issus du ballet, Sasha Riva et<br />

Simone Repele mettent leur technique<br />

classique au service d’une théâtralité<br />

saisissante pour raconter des histoires<br />

au travers de leurs chorégraphies<br />

contemporaines. Les danseurs·euses·x y<br />

jouent un rôle et font voyager les spectateurs·ices·x<br />

à travers l’univers des chorégraphes<br />

en interprétant une palette<br />

d’émotions extrêmement denses.<br />

Originalement commissionnée par le 46e Cantiere<br />

Internazionale d’Arte de Montepulciano, la<br />

création est à découvrir en octobre à la Salle du<br />

Lignon à Vernier.<br />

Lili Elbe Show<br />

Jeudi 20 et vendredi 21 octobre 2022 à 20h<br />

Salle du Lignon, Vernier (GE).<br />

Infos et réservations : vernier.ch/billetterie<br />

30 ans<br />

Accueil<br />

Du Lundi au Jeudi<br />

de 14h00 à 18h00<br />

Repas convivial<br />

Les Lundis à 19h30<br />

à PVA-Genève<br />

Peinture thérapeutique<br />

Les Mardis de 14h30 à 16h30<br />

à PVA-Genève<br />

Atelier tricot<br />

Les Jeudis de 14h30 à 17h30<br />

à PVA-Genève<br />

Service social<br />

Les Jeudis de 14h30 à 17h30<br />

sans RDV à PVA-Genève<br />

PVA À EVERYBODY’S PERFECT<br />

Une soirée toute spéciale jeudi 13 octobre !<br />

Vernissage de l’exposition des archives photos de l’association PVA, accompagné<br />

par un apéro-dînatoire.<br />

Exposition à découvrir du 7 au 16 octobre à la Maison des Arts du Grutlï dans<br />

le cadre du Geneva International Queer Film Festival (everybodysperfect.ch).<br />

Association Genevoise des Personnes Vivant avec le VIH/SIDA et leurs proches<br />

Rue des Pâquis 35, 1201 Genève - 5ème étage<br />

+41 22 732 44 45 - secretariat@pvageneve.ch - www.pvageneve.ch<br />

photo: archives PVA<br />

34<br />

CULTURE<br />

DANSE


En dépit de leur peur panique de l’engagement, deux hommes se<br />

lancent dans une relation amoureuse. C’est le pitch de Bros, amusante<br />

rom-com queer signée Nicholas Stiller et Billy Eichner. Chose<br />

inédite: elle est produite par une major, avec le casting qui va avec.<br />

Par Edmée Cuttat<br />

D’amour,<br />

d’humour<br />

& d’histoire<br />

queer<br />

© UNIVERSAL<br />

De nombreux cinéastes indépendants ont réalisé<br />

des films LGBTIQ+, mais Bros est une grande première:<br />

d’une part le film est produit et distribué<br />

par une major hollywoodienne, en l’occurrence<br />

Universal, mais aussi il est écrit et porté par le<br />

comédien ouvertement homosexuel Billy Eichner,<br />

connu pour son l’humour caustique. Autre spécificité:<br />

la quasi-totalité du casting se revendique<br />

queer, à l’exception des actrices Debra Messing<br />

et Kristin Chenoweth.<br />

Aux manettes de cette aventure entre<br />

deux hommes qui se lancent dans une<br />

relation amoureuse en dépit de leur réticence<br />

crasse et de leur peur panique de<br />

l’engagement, on trouve le spécialiste du<br />

genre Nicholas Stoller (Forgetting Sarah<br />

Marshall, Nos pires voisins 1 et 2, par<br />

exemple). Mais comme il est straight,<br />

il lui était impossible de se débrouiller<br />

seul. Il a donc fait appel à Eichner pour<br />

l‘écriture du scénario.<br />

UN MUSÉE LGBTIQ+<br />

Ce dernier joue en quelque sorte son<br />

double, Bobby Leiber, animateur new-yorkais à<br />

succès d’un podcast queer d’histoire. Cet angoissé<br />

existentiel dirige par ailleurs le premier musée<br />

de la culture LGBTIQ+, sur le point d’ouvrir.<br />

Au conseil d’administration de cette institution<br />

on trouve notamment une bisexuelle agressive,<br />

une lesbienne butch, une trans* noire ou encore<br />

un personnage non binaire. Ce sont autant de<br />

personnages riches, prétextes à des moments<br />

de folie, avec prises de bec mémorables.<br />

Quadra professoral du genre « pain in<br />

the ass » à l’excessive verve allénienne,<br />

Bobby, bien entouré par ses amis, a toujours<br />

vécu seul et n’a pas l’intention de<br />

changer, expliquant qu’il ne fait pas<br />

confiance aux gais parce qu’ils sont<br />

égoïstes et stupides et qu’il préfère les<br />

rencontres sur Grindr à une relation durable.<br />

En d’autres termes, il a un regard<br />

cynique sur l’amour. Jusqu’au jour où il<br />

fait la connaissance, dans un club, du bel<br />

Aaron Shepard (Luke Macfarlane), avocat<br />

viril, spécialisé dans les testaments et<br />

les successions. Il passe pour un chaud<br />

lapin balourd qui, sans trop de surprise,<br />

révélera pourtant une nature beaucoup<br />

plus riche.<br />

DES SCÈNES À LA FOIS TORRIDES<br />

ET MARRANTES<br />

S’ils sont immédiatement attirés l’un vers<br />

l’autre, tout ne va pas comme sur des roulettes,<br />

chacun restant sur une volonté de ne pas s’impliquer<br />

émotionnellement. Ce qui donne lieu à<br />

une série de situations peu communes, pour ne<br />

CINÉMA<br />

CULTURE<br />

pas dire jamais vues dans les films de grands<br />

studios. Principalement en ce qui concerne les<br />

séquences sexuelles. Évoquant son propre cas,<br />

Billy Eichner explique que les gais ont leurs<br />

règles et leurs façons de se comporter. D’où de<br />

nombreuses prestations torrides, certaines avec<br />

trois ou quatre participants. Toutefois Nicholas<br />

Stoller, incapable de premier degré, tient à les<br />

garder marrantes, comme il dit. Et elles le sont!<br />

Marrante, comme d’ailleurs la majorité<br />

de l’opus, qui reste de la pure comédie<br />

adulte, grand public, avec un happy end<br />

assez original, mais on ne vous en dira<br />

pas plus. Le but de Stoller et Eichner<br />

était de réaliser un film authentique et<br />

réaliste, évitant de recycler les tropes<br />

hétéros, tout en dépassant les attentes<br />

d’un public dit cible. En résumé, un film<br />

qu’un hétéro peut aimer et regarder avec<br />

sa petite amie, estiment-ils. Tout en réfutant<br />

le fait que les rapports des deux<br />

bords peuvent se comparer, Bros met en<br />

scène des personnages certes en quête<br />

de sexe, mais également d’amour, de passion,<br />

de romantisme.<br />

Les auteurs du film poursuivent également la<br />

volonté d’instruire leur audience. C’est justement<br />

la fonction du musée présent dans cette<br />

œuvre, avec ses vitrines consacrées à de grandes<br />

personnalités queer, comme l’auteur James<br />

Baldwin, la poétesse Gertrude Stein, l’activiste<br />

trans* Sylvia Rivera ou le sexologue allemand<br />

Magnus Hirschfeld, traqué par les nazis. Une<br />

forme d’hommage rendu aux pionnier·ère·x·s,<br />

histoire de rappeler que les droits des personnes<br />

LGBTIQ+ restent menacés.<br />

Sortie dans les salles de Suisse romande<br />

dès mercredi 19 octobre.<br />

SUPER CADEAU POUR NOS<br />

LECTEURICES ET NOS INTERNAUTES :<br />

2 x 25 places à gagner pour Bros pour<br />

n'importe quelle séance à partir du 19 octobre, un<br />

must ! Au Ciné17, Rue de la Corraterie 17 à Genève,<br />

www.cine17.ch. Envoyez tout simplement vos<br />

noms et prénoms à pub@<strong>360</strong>.ch !<br />

37


amp<br />

LE<br />

’HON<br />

NEUR<br />

U<br />

KEN SCUDDER & MARION EATON DANS THUNDERCRACK!<br />

LA 21E ÉDITION DU LAUSANNE UNDERGROUND FILM & MUSIC FESTIVAL REVIENT DU 19 AU 23<br />

OCTOBRE 2022 AU CASINO DE MONTBENON ET DANS DIFFÉRENTS LIEUX LAUSANNOIS.<br />

On ne présente plus le festival emblématique<br />

qui rythme le début de l’automne lausannois.<br />

Cette année, le festival underground s’intéresse<br />

au camp, avec notamment un cinérama intitulé<br />

Bad Taste is Good Taste: Underground Camp<br />

Melodrama. La sélection présentera entre autres<br />

Multiple Maniacs du génialissime John Waters, réalisateur<br />

fantasque américain qui révéla au monde<br />

la non moins génialissime drag Divine, ou encore<br />

Thundercrack que le festival décrit comme « une<br />

fresque gothico-porno ». Comme à son habitude,<br />

le LUFF explore également d’autres univers artistiques<br />

entre musique, expositions et workshops.<br />

Dans cette dernière catégorie, Elena Biserna, historienne-curatrice<br />

indépendante, mènera un atelier<br />

intitulé Feminist Steps, dont la vocation est<br />

de proposer « une plateforme de réflexion sur les<br />

expériences d’écoute genrées dans l’espace public<br />

et de désapprentissage de certains comportements<br />

considérés comme appropriés, sûrs ou<br />

attendus lorsque nous marchons». Ce workshop<br />

réservé exlusivement aux femmes, personnes non<br />

conformes au genre et personnes queer se tiendra<br />

à deux reprises, le jeudi 20 et le vendredi 21 octobre<br />

de 20h à 23h. Le programme complet est à<br />

retrouver sur le site 2022.luff.ch<br />

<strong>360</strong>° A POSÉ TROIS QUESTIONS À ERIC PERETTI,<br />

PROGRAMMATEUR CINÉMA POUR LE LUFF<br />

PAR ROBIN CORMINBOEUF<br />

le kitsch dépassant le domaine esthétique pour<br />

pénétrer la sphère comportementale.»<br />

L’origine du mot en lui-même reste floue, mais il<br />

semblerait qu’il s’agit d’une dérivation du verbe<br />

français «camper» lorsqu’il est employé pour parler<br />

d’une interprétation. Camper, c’est prendre la pose.<br />

S’IL N’Y EN AVAIT QU’UNE SEULE À CHOISIR, QUEL-<br />

LE ŒUVRE CINÉMATOGRAPHIQUE DE LA 21E ÉDI-<br />

TION DU LUFF RECOMMANDERIEZ-VOUS À NOTRE<br />

LECTORAT ?<br />

C’est une question horrible! Mais il est vrai que le<br />

LUFF propose tellement de séances que celles·eux<br />

qui n’ont pas forcément le temps, les ressources,<br />

ou tout simplement le don d’ubiquité, vont devoir<br />

cibler certains titres au détriment d’autres.<br />

Personnellement, je recommande Thundercrack.<br />

Avec ses 159 minutes au compteur, dont 17 d’interlude<br />

musical à mi-parcours pour pouvoir souffler<br />

et faire connaissance avec ses voisins de fauteuil,<br />

c’est un peu l’Autant en emporte le vent de la sélection.<br />

Un mélange improbable de pornographie<br />

non consensuelle, d’humour, de drame, de passion<br />

et d’horreur, écrit une nuit d’orage et tourné sans<br />

moyens, dont les excès en tout genre (visuels, narratifs<br />

ou au niveau de l’interprétation) finissent par<br />

le transformer en une œuvre définitive. Il faut savoir<br />

que le film n’a jamais trouvé son public à l’époque<br />

[ndlr: en 1975]. Trop long, trop fou, trop porno, trop<br />

gai, trop fauché. C’est dans les années 90 qu’une<br />

copie remontée et raccourcie a circulé illégalement.<br />

Le LUFF va proposer le montage intégral et restauré<br />

du film, pour qu’il puisse être à nouveau (re)découvert<br />

et apprécié dans toute sa géniale démesure.<br />

QUE SIGNIFIE LE TERME CAMP ET D’OÙ VIENT-IL ?<br />

Le terme camp fait partie de ce lexique que l’on<br />

utilise fréquemment tout en sachant qu’il est compliqué<br />

de le définir clairement. C’est l’essayiste<br />

et romancière Susan Sontag qui sera la première<br />

à tenter de le théoriser, en 1964, dans Notes on<br />

Camp. Si c’est un texte important qui pose un bon<br />

nombre de bases, il ressemble plus à un jeu de<br />

pistes réflexives qu’à une véritable étude. À sa<br />

suite, l’écrivain Pascal Françaix propose une très<br />

bonne définition : « Le camp, c’est la pose effrénée,<br />

l’affectation érigée en système, la dérision par<br />

l’outrance, l’exhibitionnisme exacerbé, la primauté<br />

du second degré, la sublimation par le grotesque,<br />

LUFF<br />

UN·E·X ARTISTE·X QUE VOUS VOUS RÉJOUISSEZ<br />

PARTICULIÈREMENT DE VOIR PERFORMER DANS<br />

CE FESTIVAL ?<br />

J’ai hâte de vivre (oui, au LUFF, on n’assiste pas platement<br />

au concert, on s’y immerge totalement!) la<br />

performance de Deli Girls, le duo de Brooklyn dont<br />

la musique, déjà bien sale, chaotique et violente<br />

lors d’une gentille écoute chez soi, devrait faire<br />

résonner nos corps de plaisir.


LES OUVRAGES<br />

D’OCTOBRE<br />

Chaque mois, Payot Libraire nous propose une sélection littéraire<br />

queer. Au programme pour ce <strong>numéro</strong>, cinq coups de cœur<br />

à dévorer en octobre.<br />

Par Rafaela Santos<br />

SOCIOLOGIE<br />

Théologie queer, Linn Marie Tonstad,<br />

éditions Labor et Fides<br />

Linn Marie Tonstad est une théologienne<br />

américaine travaillant sur la religion et l’intersection<br />

de la théologie systématique avec la théorie<br />

féministe et queer. Elle est aussi professeure à<br />

l’université de Yale et dirige une unité pionnière<br />

d’études queer dans la religion.<br />

Décoiffante, la théologie queer a fait son<br />

apparition il y a trois décennies dans les pays anglophones,<br />

avec pour objectif de perturber et de complexifier<br />

des visions théologiques stables, binaires<br />

et hétéronormatives de la sexualité et du genre. Dans<br />

ce livre, on interroge la théologie en entier, non seulement<br />

pour favoriser l’inclusion de personnes au-delà<br />

de la binarité du sexe et du genre, mais aussi pour<br />

proposer une autre vision, plus juste, des relations<br />

entre êtres humains en société.<br />

Le système blanc patriarcal hétéronormé<br />

occidental s’en trouve radicalement remis en<br />

question, avec des sources théologiques, philosophiques<br />

et littéraires telles que Judith Butler,<br />

Marcella Althaus-Reid, Toni Morrison, Karl Marx<br />

et Augustin d’Hippone. Ce livre a le mérite de se<br />

mettre à l’écoute des diverses voix qui s’expriment<br />

en théologie, y compris celles issues de la<br />

perspective queer, pour interroger et dépasser<br />

certains présupposés et certaines pratiques discriminantes<br />

dans nos sociétés. La référence parfaite<br />

pour suivre l’évolution entre la religion et la<br />

communauté queer!<br />

SOCIOLOGIE<br />

L’amour au pluriel, Franklin Veaux et Eve<br />

Rickert, éditions Améthyste<br />

Franklin Veaux est notamment connu pour<br />

ses écrits sur le polyamour. ll s’est fait connaître sur<br />

son blog morethantwo.com, puis à travers différents<br />

ouvrages, devenant une des références mondiales<br />

sur ce sujet, Eve Rickert est polyamoureuse et auteure.<br />

Elle est la fondatrice de la maison d’édition<br />

indépendante Thorntree Press, spécialisée dans<br />

les questions LGBTIQ+ et les nouvelles formes de<br />

relations et sexualités. Tous les deux nous offrent<br />

L’amour au pluriel. Cet ouvrage complet présente les<br />

débuts du polyamour dans notre société, explore la<br />

façon dont il s’est développé sur une base de liberté<br />

romantique et a même fini par être adopté dans certains<br />

mouvements politiques comme le marxisme<br />

et le libéralisme. Nous apprenons que le polyamour<br />

combat tous les clichés sur la polygamie et l’infidélité<br />

et que parfois il est confondu, à tort, avec l’échangisme,<br />

l’adultère ou encore même le libertinage.<br />

On y trouve un polyamour éthique, entièrement<br />

basé sur le dialogue, la confiance et le<br />

désir et les moyens de créer un environnement<br />

polyamoureux sain et positif.<br />

Grâce à ce livre, on découvre des conseils<br />

pour mieux construire des relations amoureuses<br />

saines, quelles sont les clefs d’une communication<br />

équilibrée et comment faire confiance à l’autre et<br />

à soi-même... C’est, au-delà du polyamour, un véritable<br />

guide pratique. Une lecture essentielle pour<br />

en apprendre plus sur cette variante de l’amour et<br />

vaincre les préjugés. À lire absolument!<br />

BANDE DESSINÉE<br />

L’histoire d’un garçon comme les autres:<br />

sur le chemin d’une nouvelle masculinité,<br />

Marie Bailliard, Je Suis Une Légume, éditions<br />

Mango<br />

Cette année, Arthur et sa jumelle Elsa<br />

entrent en école d’ingénieur. Arthur est un garçon<br />

comme les autres: il aime sortir et faire la fête, il<br />

rigole aux blagues, parfois lourdes, de sa bande<br />

de potes et il aime passer du temps avec sa sœur<br />

– même s’il ne la comprend pas toujours.<br />

C’est une de ses camarades qui lui ouvre<br />

les yeux: alors qu’il lui soumet une chanson qu’il a<br />

écrite pour son groupe de musique, elle lui fait remarquer<br />

que ses paroles sont carrément sexistes<br />

et offensantes pour la communauté queer.<br />

Complètement dérouté, Arthur va petit<br />

à petit porter un autre regard sur le monde qui<br />

l’entoure. Entre discussions avec ses proches,<br />

lectures et réflexions, les prises de conscience<br />

s’enchaînent... Au fil du récit, ponctué de pages<br />

de ressources sur de nombreux sujets de société,<br />

Marie Bailliard offre une réflexion puissante<br />

sur la place des hommes au sein de la société d’aujourd’hui.<br />

À travers le point de vue d’Arthur, ce livre<br />

nous permet de voir le monde et nous-même sous<br />

un jour nouveau.<br />

POLAR<br />

Nuages baroques, Antonio Paolacci et Paola<br />

Ronco, éditions Rivages<br />

En Italie, le cadavre d’un étudiant en<br />

architecture d’une vingtaine d’années est retrouvé<br />

battu à mort à proximité du lieu où était<br />

organisée une fête en soutien à l’union civile qui<br />

doit bientôt consacrer en Italie le mariage homosexuel.<br />

Paolo Nigra, bel homme à la quarantaine<br />

élégante, sous-préfet de police, se rend sur les<br />

lieux. Tout semble indiquer un crime homophobe,<br />

mais Nigra se méfie des évidences...<br />

Un roman cru et dur, mais important<br />

pour appréhender le quotidien parfois dangereux<br />

d’une personne queer.<br />

LITTÉRATURE. JEUNES ADULTES<br />

Porté disparu, Brigitte Giraud, éditions<br />

L’École des Loisirs<br />

Porté disparu est une reconstruction du<br />

roman Jour de courage, conçu pour un public plus<br />

jeune. Cinq personnes y racontent la même histoire,<br />

mais avec des points de vue différents. On découvre<br />

la vie de Livio, un garçon de 17 ans qui, un jour, décide<br />

de préparer un exposé incroyable sur le parcours<br />

de Magnus Hirschfeld. Ce grand médecin juif allemand<br />

a, dès la fin du XIXe siècle, lutté pour l’égalité<br />

femmes-hommes et les droits des homosexuels. Livio<br />

parle de la théorie du troisième sexe développée par<br />

Hirschfeld et de Lili Elbe (voir p. 35), cette peintre<br />

danoise devenue femme après la première opération<br />

de changement de sexe en Allemagne, en 1930.<br />

Livio profite de l’occasion pour annoncer<br />

à sa classe son homosexualité et le sujet devient<br />

un grand débat. L’adolescent ne se doute pas, à<br />

ce moment-là, qu’il va devoir disparaître sans<br />

laisser aucune trace disparaître…<br />

Avec un discours engagé et politique,<br />

sans compter toutes les références historiques,<br />

ce livre est profondément humain. Il faut absolument<br />

le lire car il éclaire avec subtilité tout ce<br />

que vit une personne qui se sent différente et les<br />

drames que cela peut causer.<br />

40<br />

CULTURE LIVRE LIVRE CULTURE<br />

41


MARIAGE<br />

POUR<br />

TOUS·TES·X<br />

EN SUISSE<br />

ET APRÈS ?<br />

Par Laure Dasinieres<br />

Si le mariage des couples de même<br />

sexe est une avancée considérable,<br />

il ne doit pas occulter les discriminations<br />

qui demeurent envers les<br />

personnes LGBTIQ+, notamment en<br />

termes d’accès à la parentalité. On en<br />

parle avec Thierry Delessert, spécialiste<br />

de l’histoire de l’homosexualité<br />

en Suisse.<br />

Alors que nous préparions cet article, nous avons<br />

appris avec effarement et colère que les caissesmaladies<br />

refusaient de prendre en charge la PMA<br />

(procréation médicalement assistée) pour les<br />

couples de lesbiennes. Une vraie douche froide<br />

qui tempère l’enthousiasme autour du mariage<br />

pour tous·tes·x entré en vigueur cet été et qui questionne<br />

la mise en application pratique de la loi.<br />

Nous avons échangé avec Thierry Delessert, qui<br />

co-signe avec Marta Roca Le mariage pour tous et<br />

toutes - Reconnaître les couples de même sexe en<br />

Suisse, aux Presses Polytechniques Romandes.<br />

Le mariage pour tous·tes·x est-il, en l’état actuel,<br />

satisfaisant ?<br />

Qu’on soit bien clair, le mariage pour<br />

tous·tes·x en Suisse est une immense<br />

avancée. C’est un mariage avec clauses<br />

extensives et inclusives qui a été décidé.<br />

Il inclut en effet le droit à l’adoption<br />

large et externe pour les couples de même<br />

sexe ainsi que l’accès à la PMA pour les<br />

couples lesbiens.<br />

Et cet accès à la PMA pour les<br />

couples de lesbiennes est refusé au prétexte<br />

d’une stérilité sociale. On voit que les arguments<br />

de celleux qui s’étaient opposé·e·x·s<br />

au mariage pour tous·tes·x sur la base d’une<br />

quelconque naturalité ont fait leur lit dans<br />

les contreforts de la loi en créant une opposition<br />

entre stérilité sociale et stérilité biologique<br />

– celle qui permet aux couples hétéro<br />

d’être pris en charge pour cette assistance<br />

à la procréation.<br />

Qu’en est-il du droit à l’adoption?<br />

Pour l’instant, il n’y a pas de freins mis<br />

en évidence au niveau de l’adoption par<br />

les couples de même sexe. Toutefois, on<br />

ne peut pas préjuger de l’avenir: je crains<br />

que les adoptions externes subissent des<br />

discriminations. Je me pose, là aussi, des<br />

questions sur la mise en œuvre de la loi.<br />

En termes d’accès à la parentalité, on pense aussi<br />

au droits aux personnes trans* à préserver<br />

leur fertilité…<br />

Tout à fait. Il est désormais possible<br />

pour les personnes trans* de changer<br />

de prénom ainsi que de sexe à l’état civil<br />

sans passer par un quelconque diagnotic<br />

ou une quelconque expertise. La<br />

Suisse est le premier pays en Europe<br />

à ouvrir ce droit, et cela pose de nombreuses<br />

questions, notamment concernant<br />

la préservation des ovocytes et des<br />

spermatozoïdes. Je n’ai pas de réponse<br />

aujourd’hui, mais j’espère que nous suivrons<br />

la voie de l’Allemagne et que nous<br />

écarterons des clivages que l’on voit en<br />

France, notamment au sein même des<br />

communautés LGBTIQ+. Oui, il y a d’un<br />

côté les questions d’orientation qui sont<br />

historiquement objet de lutte et de l’autre,<br />

des questions d’identité qui sont nouvellement<br />

objets de lutte . Il faut qu’on puisse<br />

arriver à se rendre compte que ce sont les<br />

mêmes luttes. Les vieux·eille·x pédés et<br />

gouines se trompent quand iels cherchent<br />

à exclure les trans* et les inter. Il ne faut<br />

pas oublier notre histoire, c’est dangereux<br />

d’oublier.<br />

42 CULTURE<br />

LIVRE<br />

Et bien plus encore sur<br />

www.lestime.ch<br />

Agenda<br />

SAMEDI 15 OCTOBRE<br />

La Goudou Manif a 40 ans,<br />

ça se fête en jouant !<br />

A l’occasion du mois<br />

de l’Histoire LGBTIQ+,<br />

Lestime et Queer Code,<br />

avec le soutien de la Ville<br />

de Genève, vous invitent<br />

au lancement de leur jeu<br />

vidéo dédié aux 40 ans<br />

de la 1 re manifestation lesbienne de Suisse Romande :<br />

la Goudou Manif de mai 1982 à Genève.<br />

Lors de ce moment convivial, vous découvrirez les<br />

coulisses de la création de ce jeu vidéo et les archives<br />

de cette manifestation qui sont présentées lors de cette<br />

narration vidéoludique, ainsi que d’autres archives<br />

plus contemporaines qui font partie du jeu. Vous<br />

jouerez à ce jeu et à d’autres queer games. L’occasion<br />

de découvrir ensemble un pan de l’Histoire LGBTIQ+<br />

de Genève. En présence des concepteur-ice-x : Paulette<br />

et Isabelle Sentis de Queer Code, et de l’équipe<br />

de Notre Histoire Compte – Lestime<br />

De 15h à 16h30 | Sur inscription: https://bmgeneve.agenda.ch<br />

Bibliothèque de la Cité à l’Espace le 4e<br />

Pl. des Trois-Perdrix 5 | Genève<br />

VENDREDI 28 OCTOBRE<br />

Soirée Halloween<br />

Sorcières, magiciennes, gnomes et autres zombies<br />

s’invitent à Lestime. N’hésitez pas à vous déguiser !<br />

Buffet canadien, dance et projection au programme.<br />

Infos à venir sur www.lestime.ch | *Mixité choisie : femmes,<br />

lesbiennes, personnes trans, non binaires, intersexes<br />

Consultation en santé sexu-elle pour les femmes<br />

qui ont du sexe avec les femmes.<br />

Contact : entre.nous.consult@lestime.ch<br />

Devenez membre en vous inscrivant sur notre site<br />

Faire un don : CCP 17-177538-7<br />

Lestime, communauté lesbienne<br />

5, rue de l‘Industrie | 1201 Genève | Tél. 022 797 27 14<br />

info@lestime.ch | www.lestime.ch<br />

Les prochaines<br />

rencontres des groupes<br />

Groupe Trans*<br />

◗ Mercredi 5 et 19 octobre et mercredi 2 novembre<br />

Groupe de rencontre et de discussion de 19h à 21h30<br />

au local de <strong>360</strong>.<br />

◗ Infos, conseils et entretiens<br />

w :association<strong>360</strong>/trans<br />

e : trans@association<strong>360</strong>.ch, t : 078 322 34 60<br />

Pôle Familles LGBTQ+<br />

◗ Jeudi 20 octobre de 19h à 21h réunion de<br />

discussions, partages et infos au local de <strong>360</strong>.<br />

◗ Dimanche 6 novembre : Sorties FamilleS –<br />

Save the date !<br />

◗ Le programme suivra prochainement sur<br />

le site de <strong>360</strong> !<br />

◗ Infos, conseils et entretiens : association<strong>360</strong>.ch/<br />

homoparents, familleslgbtq@association<strong>360</strong>.ch<br />

t : 079 236 03 58<br />

Groupe Tamalou<br />

◗ Dimanche 2 octobre, rencontre jeux de société<br />

de 14h à 18h à la salle de la Codha : chemin des<br />

Ouches 14, 1203 Genève, à l’occasion de la Journée<br />

internationale des personnes âgées !<br />

◗ Pour les autres sorties, suivez le programme des<br />

Tamalou sur leur Facebook : https://www.facebook.<br />

◗ Tous les mardis dès 17h30 : apéros convivial en ville !<br />

Pour intégrer le groupe WhatsApp : envoyer un<br />

courriel à andr.lauper@yahoo.com<br />

◗ Renseignements et inscription : t : 022 741 00 70<br />

Groupe les Babayagas<br />

◗ Dimanche 2 octobre, rencontre jeux de société<br />

de 14h à 18h à la salle de la Codha : chemin des<br />

Ouches 14, 1203 Genève, à l’occasion de la Journée<br />

internationale des personnes âgées !<br />

◗ Mercredi 12 octobre, rencontre conviviale et repas<br />

canadien au local de <strong>360</strong> !<br />

◗ Restez en contact avec les membres des Babayagas<br />

grâce à son groupe WhatsApp ! Pour participer,<br />

veuillez adresser un courriel à babayagas@<br />

association<strong>360</strong>.ch<br />

◗ Infos, conseils et entretiens t : 079 544 94 30<br />

Groupe BiPan+<br />

◗ Vendredi 21 octobre, dès 20h, réunion conviviale<br />

mensuelle au local de <strong>360</strong> !<br />

◗ Infos, conseils et entretiens<br />

e : bipanplus@association<strong>360</strong>.ch, t : 079 632 70 48<br />

En 2022, la coti c’est toujours la vie !<br />

Soutenez l’association <strong>360</strong> : cotisation annuelle<br />

de CHF 55.- ou 100.- pour les couples !<br />

CCP 17-596 500-6<br />

Service Juridique<br />

Lu 9h – 13h et 14h – 18h<br />

Ve 14h – 18h<br />

« Uniquement sur<br />

rendez-vous »<br />

juri@<strong>360</strong>.ch<br />

022 731 42 13<br />

Permanence Trans<br />

au 078 322 34 60 du lu<br />

au ve, 10h à 12h et 14h<br />

à 17h30<br />

Infos, conseils et<br />

entretien sur RDV<br />

Perm. d’accueil au local<br />

Lu au Ve 14h – 18h<br />

Association <strong>360</strong> | 022 741 00 70 | association<strong>360</strong>@<strong>360</strong>.ch<br />

Rue de la Navigation 36 | 1201 Genève


Les Pépites d’octobre<br />

L’automne est là, les mini shorts sont rangés et les dykes sont<br />

dans les starting-blocks pour ressortir leur bonnet pref’.<br />

Vagin Pirate vous sert ce mois-ci :<br />

Vagin Pirate est un compte Instagram lesbien<br />

romand qui s’engage à amplifier les messages<br />

des communautés marginalisées. Notre Vagin<br />

est un vagin mental, c’est un totem au féminisme<br />

queer, anti-terf et intersectionnel.<br />

Paulette Éditrice<br />

WILLOW<br />

© DANA TRIPPE<br />

Alex Lahey<br />

Paulette Éditrice, c’est une maison d’édition<br />

suisse romande engagée. En 2021, la maison<br />

lance la première collection suisse dédiée aux<br />

écrits LGBTIQ+, Grattaculs. Depuis, déjà trois<br />

tomes sont sortis: Cuisson au feu de bois, recueil<br />

de textes sur les thématiques LGBTIQ+, Quelques<br />

fleurs/Some Flowers, un ensemble de poèmes de<br />

l’artiste Romy Colombe. K et Parades, de Julien<br />

Burri, poèmes en prose qui traitent de cruising et<br />

autres rencontres sexuelles éphémères.<br />

La maison d’édition a lancé début septembre<br />

un appel aux écritures lesbiennes*,<br />

baptisé «Goudous, où êtes-vous?». Vagin<br />

Pirate n’a pas besoin de vous expliquer<br />

pourquoi ce genre de démarche est ultra<br />

importante. Lesbienne des villes, lesbiennes<br />

des champs, sortez vos stylos et<br />

lancez-vous! Qui sait, vous pourriez vous<br />

retrouver dans le premier recueil d’écriture<br />

lesbienne suisse romand (like wow!).<br />

Le format et le genre des propositions sont libres et le<br />

délai de participation est fixé au 30 novembre 2022.<br />

Ça fait quand même un petit bout de temps qu’on<br />

voit évoluer WILLOW et avec la sortie de son nouvel<br />

album, le 23 septembre, on s’est dit que ça<br />

serait l’occasion parfaite pour faire le topo! Alors<br />

ok, Willow Smith c’est pas n’importe qui, avec des<br />

parents qu’on pourrait labelliser comme ultra-célèbre:<br />

Will Smith et Jada Pinkett Smith, sa carrière<br />

partait avec quelques longueurs d’avance.<br />

Mais quand bien même, au fil des années, elle a<br />

réussi à se détacher de son statut et à se créer<br />

une identité bien à elle et un univers musical franchement<br />

intéressant.<br />

Son album de 2021, Lately I Feel EVERY-<br />

THING s’engageait dans une direction très<br />

pop rock, limite punk. Il semblerait que le<br />

nouvel album, Coping Mechanism, continue<br />

dans cette lignée. Elle s’entoure des gens<br />

qui pèsent dans le game (Travis Barker,<br />

Chris Greatti ou encore PinkPantheress)<br />

et ne fait aucune concession. Son ton nouveau<br />

single, Curious/Furious, saura vous<br />

mettre l’eau à la bouche.<br />

Laval La Rue<br />

Laval La Rue est unx artiste d’origine jamaïcaine et<br />

anglaise venant de l’ouest de Londres. Sa musique<br />

est un savant mélange de hip-hop nineties et d’indie<br />

psyché, le tout parlant de résistance politique,<br />

d’amour queer et de sororité avec des super lignes<br />

de basse. Encensée par toute la presse musicale<br />

anglaise depuis ses débuts, iel sort fin juillet un<br />

EP, Hi-Fidelity. Le single Don’t Come Back est une<br />

très bonne chanson à envoyer à votre crush dont<br />

vous vous lassez, low key stylish break-up vibes. Iel<br />

l’annonce, ce projet sera le dernier avant d’entrer<br />

dans une nouvelle ère de Laval La Rue, on piétine<br />

déjà d’impatience.<br />

Vagin Pirate a un gros crush sur Laval La<br />

Rue et adore aussi son single de début d’année,<br />

Vest & Boxers (very queer, no explanations<br />

needed).<br />

Congratulations, c’est le nouveau single de la<br />

rockeuse australienne Alex Lahey. La chanson<br />

parle de ce sentiment bizarre que l’on peut ressentir<br />

quand on apprend que des personnes avec<br />

qui on a relationné vont de l’avant avec leur vie<br />

(sans nous, obvi). L’indie rock de Aley Lahey est<br />

catchy, moody et efficace.<br />

Vagin Pirate avait découvert Alex Lahey<br />

dans la BO du super film d’animation Les<br />

Mitchell contre les machines, sur Netflix.<br />

Un super film du dimanche soir dans<br />

lequel Katie, une jeune fille queer qui<br />

s’apprête à rentrer a l’uni, se retrouve<br />

embarquée par sa famille dans une lutte<br />

absurde contre une rébellion mondiale<br />

des appareils électroniques.<br />

Tegan & Sara<br />

On pense bien que la majorité d’entre vous connaît<br />

Tegan & Sara. Enfin, si vous ne les connaissez pas,<br />

ça voudrait dire que: A vous êtes nées après les<br />

années 2000 (aouch), B vous n’avez jamais regardé<br />

The L Word (like wow), C vous n’êtes tout simplement<br />

pas lesbienne (no, thanks). Breeef, les deux jumelles<br />

ont pas mal d’actu ces temps, dont un nouvel<br />

album (Crybaby, qui sort le 21 octobre). Et les petites<br />

âmes punk rock emo que nous sommes seront toujours<br />

là quand elles sortiront des nouveautés (sauf<br />

quand c’est une BO pour un film LEGO ou un remix<br />

de Tiësto, faut pas abuser non plus!)<br />

L’adaptation de leur livre biographique<br />

High School sortira sous forme de série<br />

le 15 octobre prochain chez Amazon<br />

Freevee. On y découvrira T&S alors<br />

qu’elles commencent la musique: deux<br />

ados en pleine recherche d’identité, sentiment<br />

qui est encore plus difficile à appréhender<br />

quand vous vivez avec une copie<br />

conforme de vous-même. Ah et on a oublié<br />

de vous dire que c’est produit et réalisé<br />

par la très cool Clea Duvall!<br />

44<br />

CULTURE VAGIN PIRATE<br />

VAGIN PIRATE<br />

CULTURE<br />

45


7 JOURS SUR 7<br />

Mixte toute tendance, gay,<br />

bi, femme, hétéro tolérant<br />

lundi à jeudi 12h-24h<br />

vendredi 12h-1h<br />

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Même s’ils ne représentent pas un totem d’immunité, les vaccins<br />

contre la variole du singe sont attendus pour réduire les<br />

risques et participer à la prévention.<br />

Par Laure Dasinieres<br />

MONKEYPOX :<br />

LA SUISSE TOUJOURS<br />

A LA TRAINE<br />

ET DES VACCINS<br />

ATTENDUS<br />

Au moment où nous écrivons ces lignes - le 19<br />

septembre 2022, près de 500 cas de monkeypox<br />

(variole du singe) ont été déclarés en Suisse, ce<br />

qui, rapporté au nombre d’habitant·e·x·s la place<br />

parmi les pays européens les plus touchés.<br />

La bonne nouvelle est que depuis début septembre,<br />

la situation dans toute l’Europe semble<br />

se stabiliser, y compris en Suisse où la vaccination<br />

n’a pas encore commencé.<br />

Le Pr Antoine Flahault, directeur de<br />

l’Institut de santé globale à la Faculté<br />

de médecine de l’Université de Genève<br />

avance une explication: «Mon hypothèse<br />

est que les Suisses les plus exposés<br />

au monkeypox se sont fait vacciner<br />

en France, Italie et Allemagne,<br />

et qu’ils ont tous fait plus attention<br />

qu’avant.» Par faire plus attention, entendons:<br />

réduire le nombre de ses partenaires,<br />

limiter sa présence dans les<br />

lieux clos où on est nu ou habillé très<br />

légèrement, s’abstenir d’avoir des relations<br />

sexuelles avec une personne qui<br />

présente des symptômes et s’isoler en<br />

cas de symptômes et/ou de test positif.<br />

Si la situation se stabilise aujourd’hui, cela ne<br />

veut pas dire qu’il faille baisser la garde, ni que<br />

le vaccin sera moins nécessaire lorsqu’il sera<br />

disponible. En effet, on ne peut pas, à ce stade,<br />

prévoir l’évolution de l’épidémie. Et, à l’aune des<br />

dernières études cliniques, il apparaît que face<br />

au monkeypox, la prévention doit être du type<br />

«ceinture et bretelles», à savoir mesures individuelles<br />

et vaccination complète. Ces deux mesures<br />

de précautions ne sont pas parfaites mais,<br />

combinées, elles permettent de réduire efficacement<br />

les risques.<br />

DES DOSES DE VACCINS ATTENDUES<br />

À mi-septembre, les vaccins contre la variole,<br />

utilisés contre le monkeypox, n’étaient toujours<br />

pas disponibles en Suisse alors que les pays<br />

frontaliers vaccinent depuis juillet. Mais, l’acquisition<br />

de doses est en cours, en collaboration avec<br />

la Pharmacie de l’armée. Une fois disponible, le<br />

vaccin sera livré aux cantons. Chacun devra alors<br />

définir les lieux de vaccination, organiser et exécuter<br />

la vaccination, vraisemblablement avant que<br />

Swissmedic n’autorise le produit. Cela ne veut en<br />

aucun cas dire que le vaccin n’est pas efficace<br />

ou qu’il est dangereux – il n’y a aucun doute sur<br />

son innocuité – mais le laboratoire qui le produit,<br />

Bavarian Nordic, n’a pas déposé de demande auprès<br />

de l’autorité d’autorisation et de surveillance<br />

des produits thérapeutiques.<br />

LA VACCINATION EN PRATIQUE<br />

Concrètement, la vaccination contre le monkeypox<br />

se fera en deux doses, la seconde espacée<br />

d’au moins 28 jours avec la première,<br />

avec une efficacité optimale atteinte près de<br />

15 jours après la seconde injection.<br />

L’Office fédéral de la santé publique et la Com- mission<br />

fédérale pour les vaccinations (CFV), recommandent<br />

d’ores et déjà la vaccination aux groupes<br />

de population suivants:<br />

● à titre préventif, aux hommes ayant des<br />

rapports sexuels avec d’autres hommes<br />

46 RUBRIQUE<br />

SOUS-RUBRIQUE<br />

MONKEYPOX<br />

SANTÉ<br />

47<br />

●<br />

et aux personnes trans* multipartenaires,<br />

à titre préventif, aux personnes exposées<br />

au virus dans le cadre professionnel<br />

(p. ex. personnel médical ou personnel<br />

de laboratoires spécialisés); aux personnes<br />

cas contact, afin d’interrompre<br />

les chaînes de transmission.


DR·E GOUDOU<br />

QUESTIONS SEXO POUR<br />

LES PERSONNES À VULVES<br />

Ma nouvelle partenaire est bi. Y a-t-il plus de<br />

risques concernant les infections sexuellement<br />

transmissibles (IST)?<br />

Attention, confusion! Il y a des personnes faisant<br />

partie de groupes dits «à risques» et des comportements<br />

considérés comme «à risque» pour les IST. Pas<br />

la peine de faire monter le suspens: les personnes<br />

ayant une vulve / femmes bisexuelles ne font pas<br />

partie des groupes dits «à risque» pour les IST définis<br />

par l’OFSP. En revanche, elles peuvent, comme<br />

tous·tes·x un·e·x chacun·e·x, avoir des comportements<br />

sexuels à risque: bouder la digue dentaire,<br />

(cf. Dr·e Goudou de mai 2022), oublier leurs gants,<br />

snober le préservatif, maltraiter leurs toys, etc.<br />

Nonobstant – très jolie préposition que<br />

nous vous invitons à placer dans un repas de famille<br />

– l’orientation sexuelle, ce qui compte, c’est de<br />

savoir ce que l’on a pris comme potentiels risques<br />

et de se faire dépister si besoin (cf. Dr·e Goudou de<br />

juillet 2022).<br />

Autre donnée importante: le nombre de partenaires<br />

augmente le risque de contracter une IST,<br />

quelle que soit l’orientation sexuelle. C’est pourquoi,<br />

sauf relation stable et exclusive sexuellement, il est<br />

recommandé pour tous·tes·x de faire un dépistage<br />

complet (VIH et autres IST) une fois par année ou<br />

deux fois si plus de dix partenaires par an. Cette<br />

recommandation est valable même sans symptôme.<br />

Comme l’a dit un certain dramaturge britannique<br />

qui laisse couler beaucoup d’encre autour<br />

de sa sexualité: to bi or not to bi, that is the question.<br />

Camille Beziane,<br />

responsable de l’association Les Klamydia’s<br />

Zoé Blanc-Scuderi,<br />

sexologue et directrice de SexopraxiS<br />

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Mathias Reynard :<br />

pour un Conseil d’état<br />

engagé<br />

Par Tal Madesta<br />

L’ORACLE DU MOIS<br />

POLITIQUE DE QUALITÉ<br />

Gouverner un pays efficacement en s’appuyant sur des bases solides.<br />

Homme politique et enseignant, Mathias Reynard s’illustre par<br />

son soutien sans faille aux personnes LGBTIQ+. Ce mois-ci, on<br />

fait le Quotient Queer d’un élu haut en couleurs (arc-en-ciel).<br />

Mathias Reynard peut se prévaloir d’une véritable<br />

vocation politique, lui qui a été président des<br />

Jeunes socialistes du Valais romand dès 2005,<br />

à 18 ans à peine. Depuis, il continue sa brillante<br />

ascension: élu au Conseil National de 2011 à 2021,<br />

il siège désormais comme conseiller d’État en<br />

Valais, où il occupe le poste de chef du Département<br />

de la santé, des affaires sociales et de la<br />

culture. Engagé dans la défense des minorités,<br />

il est particulièrement audible sur les questions<br />

LGBTIQ+ (et on s’en réjouit).<br />

10/10 L’HOMME QUI A FAIT<br />

DE L’HOMOPHOBIE UN CRIME<br />

Le principal fait d’armes de Mathias<br />

Reynard: il s’est battu pour faire passer la norme<br />

anti-homophobie, qui prévoit des sanctions contre<br />

les appels à la haine et les actes discriminatoires<br />

basés sur l’orientation sexuelle. Acceptée après référendum<br />

à 63,1%, en février 2020, cette norme est<br />

historique pour la société helvétique. Un «signal<br />

magnifique» pour l’élu, sans qui le texte n’aurait<br />

pas vu le jour. «La haine et la discrimination n’ont<br />

pas leur place dans notre pays», réaffirme-t-il,<br />

pour les dernières personnes qui ne se seraient<br />

pas encore mises à la page…<br />

10/10 Un engagement social pluriel, au nom<br />

de toutes les minorités<br />

Mathias Reynard brille par la diversité<br />

de son travail politique. Loin de se cantonner à<br />

la lutte pour les droits des personnes LGBTIQ+<br />

(ce qui serait déjà fort honorable), il a à cœur de<br />

défendre un ensemble de mesures globales sur<br />

l’égalité. Congé parental, égalité salariale, accès<br />

aux services publics, éducation accessible pour<br />

tous·tes·x : l’homme politique est définitivement<br />

sur tous les fronts.<br />

10/10 Un sans-faute pour cet élu accessible qui<br />

sait faire bon usage de sa vision politique<br />

pour défendre les plus marginalisé·e·s·x.<br />

En espérant que certain·e·s·x de ses collègues<br />

en prennent de la graine !<br />

DU 1 e AU 9 OCTOBRE<br />

2<br />

septembre<br />

Paternalisme bien tempéré.<br />

Surtout que rien ne change - gouverné<br />

sous la casquette de la tradition, un pays<br />

reste stable et sa politique efficacement<br />

protégée des influences novatrices<br />

et par trop idéalistes.<br />

DU 10 AU 16 OCTOBRE<br />

Information subtilement anxiogène.<br />

Afin de garder la population dans une<br />

dynamique de groupe maîtrisable,<br />

distiller à intervalles réguliers des marches<br />

à suivre opaques permet de garder sous<br />

contrôle tout mouvement de rébellion<br />

inopportun.<br />

10/10 Un plan ambitieux contre<br />

les discriminations LGBTIQ+phobes<br />

Dernier engagement fort en date: le<br />

Valais lance début 2022 un projet de lutte contre<br />

les discriminations faites à l’égard des personnes<br />

LGBTIQ+. Le plan prévoit une dizaine de mesures,<br />

comme une campagne cantonale de sensibilisation,<br />

ou encore l’ouverture d’une permanence<br />

psycho-sociale. Un changement de paradigme<br />

porteur d’espoir pour ce territoire qui n’a pas<br />

toujours été un modèle sur ces questions: «Cela<br />

fait plaisir de voir un canton qui était parfois<br />

pointé du doigt comme rétrograde et qui devient<br />

aujourd’hui un des cantons pionniers en termes<br />

de lutte contre les discriminations à l’égard des<br />

personnes LGBTIQ+», s’enthousiasme l’élu.<br />

50 CULTURE<br />

QUOTIENT QUEER<br />

© Kevin Manand Linda Photography Sàrl<br />

@shop.monokini.ch<br />

DU 17 AU 23 OCTOBRE<br />

Esprit de clocher progressiste.<br />

Les débats dans l’hémicycle fleurent<br />

bon les valeurs et le bon sens terriens.<br />

La campagne intime aux développements<br />

de société un rythme de croisière qui<br />

permet d’atténuer aisément les urgences.<br />

DU 24 AU 31 OCTOBRE<br />

L’immobilisme dynamique.<br />

Lorsque la situation politique devient brûlante<br />

et nauséabonde, s’attabler résolument autour<br />

d’un plat national communautaire fait fondre<br />

toutes les dissensions dans la bonne humeur.<br />

La fondue est l’opium du peuple.


Attraction<br />

des astres<br />

Pour garder les pieds sur terre,<br />

rien ne vaut un plongeon la tête<br />

dans les étoiles. Ce mois, le signe<br />

à l’honneur est Balance.<br />

VERSEAU<br />

21 JAN – 19 FÉV<br />

POISSON<br />

20 FÉV – 20 MAR<br />

BÉLIER<br />

21 MARS –20 AVRIL<br />

TAUREAU<br />

21 AVRIL – 20 MAI<br />

Par<br />

Marlon<br />

Dietrich<br />

BALANCE<br />

23 SEP – 22 OCT<br />

Ta chanson du mois:<br />

Comme un ange,<br />

Régina Demina<br />

«Savoir bien s’entourer,<br />

c’est tout un art», te<br />

rappellent les astres. Ce<br />

mois-ci, les personnes<br />

autour de toi seront déterminantes<br />

pour t’aider<br />

dans le développement<br />

d’un projet qui te tient à<br />

cœur. N’hésite pas à demander<br />

conseil aux personnes<br />

de confiance qui<br />

comprennent tes rêves.<br />

Ton sens de l’organisation<br />

et ta détermination<br />

feront le reste.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Break My Soul,<br />

Beyoncé<br />

Il n’y a pas que le boulot<br />

dans la vie! Ne laisse pas<br />

ton ambition dévorer ta<br />

vie personnelle. Mis à<br />

rude épreuve, tes nerfs<br />

te remercieront. Quant<br />

à toi, tu apprécieras<br />

la spontanéité retrouvée<br />

avec tes ami·e·x·s<br />

sans prévoir six mois à<br />

l’avance. Pour repartir<br />

de bon pied, les astres te<br />

conseillent de renouer<br />

avec une activité sportive<br />

régulière.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Monday,<br />

The Regrettes<br />

Pas encore complètement<br />

remis·e·x de tes<br />

émotions estivales, c’est<br />

le bordel dans ta tête. Tu<br />

laisses traîner des vieux<br />

dossiers qui te semblent<br />

une montagne administrative.<br />

C’est pas si<br />

grave. «Ne repousse pas<br />

à demain ce que tu peux<br />

faire aujourd’hui», te<br />

scandent les astres. Une<br />

fois dissipée cette brume<br />

passagère, tu te sentiras<br />

d’attaque pour entamer<br />

une année 2023 pleine<br />

de nouveaux défis.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Sorry Not Sorry,<br />

Demi Levato<br />

Ton enthousiasme<br />

débordant n’est pas<br />

toujours compris. Songe<br />

à baisser d’un ton pour<br />

ménager les susceptibilités<br />

autour de toi, qui ont<br />

tendance à confondre<br />

tes convictions avec de<br />

l’agressivité. «Plutôt<br />

que t’enfermer dans ta<br />

tour d’ivoire pour tout<br />

faire tout·e·x seul·e·x,<br />

entoure-toi cette fois de<br />

personnes qui sauront<br />

amplifier ta voix», stratégisent<br />

les astres.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Savage,<br />

Megan Thee Stallion<br />

Tu n’es pas du genre à<br />

lâcher ta proie. Cette<br />

ténacité te vaut d’intimider<br />

certaines personnes<br />

dans ta vie personnelle<br />

et professionnelle. Si<br />

tu n’as peur de rien, fais<br />

gaffe toutefois à ne pas<br />

traumatiser tout le monde<br />

sur ton passage. Souvienstoi<br />

que ton aplomb à toute<br />

épreuve n’est pas donné à<br />

tous·tes·x. «Faire preuve de<br />

souplesse en phase de négociation<br />

porte souvent ces<br />

fruits, surtout en Suisse» te<br />

murmurent les astres.<br />

SCORPION<br />

23 OCT – 22 NOV<br />

SAGITTAIRE<br />

23 NOV – 22 DÉC<br />

CAPRICORNE<br />

22 DÉC – 20 JAN<br />

GÉMEAUX<br />

21 MAI – 21 JUIN<br />

CANCER<br />

22 JUN – 22 JUL<br />

LION<br />

23 JUL – 22 AOÛT<br />

VIERGE<br />

23 AOÛ – 22 SEP<br />

Collages : Amina Belkasmi<br />

Ta chanson du mois:<br />

God is a Woman,<br />

Ariana Grande<br />

Certain·e·x·s font l’éloge<br />

de la lenteur, pas si<br />

con! Souvent, ralentir le<br />

rythme est synonyme de<br />

qualité et de profondeur.<br />

Tout en méditant ces<br />

préceptes, entends les<br />

astres qui te rassurent:<br />

«La lenteur d’un processus<br />

ne signifie pas son<br />

inertie.» La chance est<br />

de ton côté, prends le<br />

temps de réfléchir à ce<br />

que tu souhaites vraiment<br />

pour toi.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Let’s Do This Again,<br />

Jamie XX<br />

Tel un volcan en pleine<br />

éruption, ta créativité<br />

explose. Tes bonnes idées<br />

séduisent ton entourage,<br />

qui n’a qu’une envie: te<br />

suivre dans ton délire. Le<br />

danger quand le cerveau<br />

est en ébullition, c’est de<br />

se disperser. La discipline<br />

n’est pas la meilleure<br />

amie des bonnes idées qui<br />

fusent! Qu’à cela ne tienne:<br />

«Note-les toutes religieusement<br />

afin de n’en perdre<br />

aucune», te suggèrent les<br />

astres. rôdent jalousement<br />

autour de toi.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Free,<br />

Florence + The Machine<br />

«Prends de la hauteur!»<br />

t’encouragent les astres.<br />

Vus d’en haut et transposés<br />

dans une perspective<br />

plus large, tes tracas<br />

quotidiens te sembleront<br />

anecdotiques. Apprends<br />

de tes erreurs du passé<br />

pour moins stresser<br />

dans tes projets actuels.<br />

N’oublie pas que la peur<br />

est un frein paralysant.<br />

Quitte à tomber sept<br />

fois, tu te relèveras huit!<br />

Ta chanson du mois :<br />

Scarlett,<br />

Holly Humberstone<br />

Un petit coup de mou se<br />

fait ressentir, mets ça<br />

sur le compte du changement<br />

de saison. «Rien<br />

de tel qu’une cueillette<br />

aux champignons suivie<br />

d’une bonne sieste pour<br />

recharger les batteries<br />

avant l’automne», météorisent<br />

les astres à ton<br />

encontre. À tête reposée,<br />

tu relativiseras avec philosophie,<br />

et la confiance<br />

en toi reprendra enfin<br />

l'ascenseur vers le haut.<br />

Ta chanson du mois :<br />

As It Was,<br />

Harry Styles<br />

À force de tout vouloir<br />

faire tout·e·x seul·e·x, tu<br />

as perdu ton aptitude à<br />

déléguer. C’est pourtant<br />

le maître-mot pour toi cet<br />

automne. Et cela ne se<br />

fera pas sans crise, tes<br />

collègues ont, elleux aussi,<br />

perdu l’habitude! Une<br />

fois la confiance retrouvée,<br />

tout devrait rentrer<br />

dans l’ordre. «Cerise sur<br />

le gâteau, un nouveau<br />

contrat et une rencontre<br />

déterminante ne sont pas<br />

exclus à la fin du mois»,<br />

exultent les astres.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Dream On,<br />

Aerosmith<br />

La période est propice à<br />

la réalisation d’un rêve.<br />

Fonce! Veille à respecter<br />

les délais, et tout se<br />

déroulera harmonieusement.<br />

Dans cette phase<br />

très créative, les astres<br />

te mettent en garde: «Il<br />

est important de partager<br />

tes idées avec des<br />

personnes de confiance,<br />

tout en les protégeant<br />

afin d’éviter le plagiat.»<br />

Il va falloir jouer stratégiquement,<br />

tu en es tout<br />

à fait capable.<br />

Ta chanson du mois :<br />

Virgo’s Groove,<br />

Beyoncé<br />

Ton audace et ton culot<br />

sont de retour! Après<br />

avoir reconnecté avec ta<br />

créativité pure cet été,<br />

tu ne crains pas de te<br />

lancer dans des projets<br />

grandioses. En pleine<br />

possession de tes moyens,<br />

tu n’oublies pas les leçons<br />

du passé et avances avec<br />

finesse et intelligence.<br />

Longtemps mis en berne<br />

à cause de trahisons et de<br />

certaines blessures à vif,<br />

ton instinct te guide. «Tu<br />

peux y aller les yeux fermés»,<br />

affirment les astres.<br />

52 HOROSCOPE<br />

LA TÊTE DANS LES ÉTOILES<br />

LA TÊTE DANS LES ÉTOILES<br />

HOROSCOPE<br />

53


« J’aimerais mourir seule,<br />

sur le sable<br />

les yeux dans l’eau<br />

l’été qui s’achève… »<br />

© Laurent Bleuze RTS<br />

Journaliste à la RTS, Aurélie Cuttat a co-créé avec sa compagne<br />

Christine Gonzalez le podcast Voyage au Gouinistan qui met à<br />

l’honneur la beauté souterraine de la culture lesbienne. Autoportrait<br />

bariolé de cette reporter pas comme les autres.<br />

MA VERTU QUEER PRÉFÉRÉE<br />

Le souci d’inclusivité. Même si on est<br />

imparfait·e·s·x, on essaie, on réfléchit,<br />

on débat, on avance.<br />

LA QUALITÉ QUE JE PRÉFÈRE<br />

CHEZ UN HOMME<br />

Son féminisme. Un mec déconstruit, ça<br />

me donne envie de danser la carioca.<br />

LA QUALITÉ QUE JE PRÉFÈRE<br />

CHEZ UNE FEMME<br />

Son sens de l’humour. Il faut être intelligente<br />

et généreuse pour être drôle.<br />

CE QUE J’APPRÉCIE LE PLUS<br />

CHEZ MES AMI·E·X·S<br />

Leur créativité dans la manière de voir et<br />

penser le monde. Et surtout leur gentillesse.<br />

MON PRINCIPAL DÉFAUT<br />

Je dis «tac-tac-tac» à haute voix quand je<br />

prépare mes affaires. Ce n’est évidemment<br />

pas mon pire défaut, mais mes employeurs<br />

are watching me.<br />

CE QUE JE VOUDRAIS ÊTRE<br />

Un danseur de flamenco hyper stylé dans<br />

un costume vert avec des chaussures en<br />

cuir qui font «tac-tac-tac».<br />

MES AUTEUR·E·X·S FAVORI·TE·X·S EN PROSE<br />

Annie Ernaux. Ses livres me bouleversent<br />

à chaque fois.<br />

MA DEVISE FAVORITE<br />

«Oublie que t’as aucune chance, vas-y<br />

fonce», Jean-Claude Dusse.<br />

COMMENT J’AIMERAIS MOURIR<br />

Seule sur le sable, les yeux dans l’eau,<br />

l’été qui s’achève. Si tu n’as pas la réf’,<br />

c’est que tu es plus jeune que moi.<br />

QUEL SERAIT MON GRAND MALHEUR<br />

Que la communauté queer ait à mener de<br />

nouveau les rares combats gagnés.<br />

54<br />

QUEER’STIONNAIRE DE PROUST<br />

LE MOT DE LA FIN


RECUEIL DE TEXTES<br />

ET D’ILLUSTRATIONS<br />

Dans le cadre du projet<br />

« Mémoires LGBTIQ+ »,<br />

découvrez les textes écrits<br />

par des personnes LGBTIQ+<br />

lors de six ateliers<br />

animés par l’artiste<br />

Klimte.<br />

Graphisme : Chatty Ecoffey<br />

Commande et informations :<br />

www.geneve.ch/memoireslgbt

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