I Tamburini di Mendrisio - Schweizer Blasmusikverband

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Revue des musiques UNISONO 3 • 2006
Les solistes du Sousa Band (9) – Frank Simon, cornet (2 e partie)
Le génie de l’enseignement
Frank Simon a marqué la pratique du cornet plus que beaucoup d’autres instrumentistes de talent. Pourtant,
il aura tiré beaucoup de son enseignement de sa formidable capacité à saisir la substantifique moelle
de ses maîtres, Herman Bellstedt et Herbert L. Clarke. La preuve par l’exemple.
Jean-Raphaël Fontannaz
Avant de voler de ses propres ailes, Frank Simon
a écouté avec concentration et passion
ses maîtres et ses collègues de registre. En
particulier, il s’est beaucoup inspiré des leçons
d’Herbert L. Clarke dont il était l’assistant
solo cornet au sein du Sousa Band. Frank Simon
témoigne: «M. Clarke était à la fois un
homme très modeste et un gentleman distingué.
Il s’est occupé de moi comme un père le
ferait de son fils. A cette époque, j’étais un
jeune homme dont il a pleinement fait profiter
de sa très large expérience.»
Des débuts difficiles
Cette attention a permis de presque sauver la
carrière de Frank Simon. «A la fin de la troisième
semaine avec le Sousa Band, j’étais prêt à le
quitter et à rentrer à la maison. Il ne m’était en
effet jamais arrivé de jouer autant de musique
en un seul jour, comme nous le faisions avec
le Sousa Band. Mes lèvres étaient terriblement
gonflées et je sentais qu’un petit cal
s’était formé à l’intérieur de ma lèvre et pendouillait
dans ma bouche. C’était un vrai durillon
et, chaque matin, j’essayai de nettoyer
ma lèvre avec une paire de pincettes.»
En clair, Frank Simon n’en pouvait plus. Par
chance, avant de quitter le Sousa Band, il s’en
est ouvert à son voisin de registre: «J’ai dit à
M. Clarke: ‹Je suis vraiment désolé, mais je
vais être obligé de rentrer chez moi. Je ne suis
en effet pas capable de tenir cette place. Ce
travail est plus dur que tout ce que j’ai jamais
fait dans ma vie. Je vais demander un entretien
à M. Sousa pour lui en parler.› Ainsi dit,
ainsi fait. J’ai expliqué à John Philip Sousa: ‹Je
regrette, mais je suis à bout. Mes lèvres sont
en effet tellement enflées et tellement fatiguées
que je ne suis plus capable de jouer.›»
Tirant profit des leçons de ses différents maîtres,
Frank Simon a fondé sa propre formation.
L’incroyable réponse de Sousa
Si Frank Simon comptait sur un peu de compréhension,
voire de compassion de Sousa, il
a allait tomber de haut: «Sa réponse fut l’une
des assertions les plus insensées et stupides
que j’aie jamais entendu dans la bouche de ce
grand chef. Il m’a dit: ‹Je ne vois pas pourquoi
un cornettiste ne peut jouer aussi longtemps
qu’un violoniste.› J’ai trouvé cette réponse si
ridicule que je suis sorti et ai rejoint ma chaise
sur la scène pour pleurer des larmes de chagrin
et de désespoir.»
Au fond du trou, le jeune Frank va pouvoir
compter sur l’appui amical de son célèbre voisin.
«M. Clarke s’est penché vers moi et m’a dit:
‹A partir de maintenant, tu ne joues plus une
seule note et, demain, dans la matinée, passeme
voir, je t’expliquerai comment il faut faire.›
La leçon d’Herbert Clarke
Le lendemain, je me suis rendu chez lui et il
m’a donné ce conseil: ‹Frank, je vais t’expliquer
une chose importante. Tu es un musicien
formidable quand tu es encore frais.
Mais, avec cette formation, tu ne seras jamais
frais. Tu peux me croire. J’ai passé par tout ce
que tu vis actuellement. Et même pire encore.
Et c’est parce que j’ai réussi à surmonter cette
expérience que je suis parvenu à trouver une
méthode afin de développer l’endurance
nécessaire pour réussir dans ce job. Il m’a fallu
des années pour y parvenir.›»
Des études «fantastiques»
De l’avis de Frank Simon, les «Technical Studies»
d’Herbert Clarke étaient «fantastiques».
Pourquoi? «Regardez la plupart des jeunes
instrumentistes: ils placent leur embouchures
sur leurs lèvres et trouvent une position
pour leur bouche, puis ils essaient de jouer
dans cette position dans tous les registres du
cornet, au bien dans l’aigu que dans le grave.»
Selon Frank Simon, c’était précisément son
erreur. Herbert L. Clarke la lui a démontrée en
développant sa théorie des voyelles. «M. Clarke
m’a demandé de prononcer les voyelles de
l’alphabet et j’ai dit: ‹A, E, I, O, U.› ‹Très bien›,
a-t-il ajouté. ‹N’as-tu pas remarqué que ta
bouche a pris cinq positions différentes pour
chacun de ces sons? Maintenant, essaie de
dire à nouveau ces voyelles, mais sans bouger
ta bouche. Aha, tu n’arrives pas. Tu vois!›»
Frank Simon va retenir le message et exercer
chaque jour ce mouvement du son des
La première formation où Frank Simon a tâté du
cornet.
Les leçons d’Herbert Clarke étaient aussi
claires que simples et limpides: «Tout d’abord,
Frank, quand tu joues, tu mets trop de pression
sur tes lèvres. Je vais te montrer comment
renforcer les muscles de tes lèvres et
fortifier ta position avec l’embouchure de façon
à ce que tu puisses développer ta résistance
et maîtriser ce boulot.»
Learning by doing
Pour ce genre d’enseignement, rien ne vaut
l’exemple et la mise en pratique. C’est exactement
ce que Herbert L. Clarke va offrir au
jeune Frank. «Après cette explication, il m’a
fait monter dans la chambre où il répétait et il
m’a donné la plus formidable leçon de cornet
que je n’ai eu de ma vie. Il m’a montré com-
voyelles, jusqu’au
dernier jour où il a
joué de son instrument.
«J’avais l’habitude
d’aller une demi-heure
ou trois
quarts d’heure avant
les répétitions pour
effectuer ces exercices
de sons sur les
voyelles. C’est comme
lors des repas.
Une des multiples versions
publiées des
«Technical Studies»
d’Herbert L. Clarke.
Vous ne mangez pas les mêmes mets à chaque
repas. Vous changez de régime d’un plat
à l’autre. Cela offre de la variété et favorise
votre appétit. Ainsi, en pratiquant ces différentes
constructions sur les voyelles et en
jouant les exercices que M.Clarke a écrit pour
travailler chacune d’elles, vous pouvez véritablement
renforcer vos muscles faciaux.»