Rencontre de l'Est et de l'Ouest
Rencontre de l'Est et de l'Ouest - ELTE Eötvös József Collegium
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102 Christine Ferlampin-Acherpartiellement, une origine grecque, <strong>et</strong> conservent, au sein <strong>de</strong> leur narration,un cadre méditerranéen, où résonnent <strong>de</strong>s toponymes comme Antioche dansApollonius, Égypte dans la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> saint Eustache. Comment comprendrel’effacement <strong>de</strong> l’Orient dans Guillaume <strong>de</strong> Palerne ? Il est plus attendud’évoquer l’influence d’Apollonius sur Floire <strong>et</strong> Blancheflor, dont le cadre estclairement byzantin, que Guillaume d’Angl<strong>et</strong>erre 3 , qui se déroule exclusivementen Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> en Écosse. Et pourtant…On reviendra d’abord sur les sources <strong>de</strong> Guillaume d’Angl<strong>et</strong>erre pour proposer<strong>de</strong>ux ajustements, portant d’une part sur la réévaluation d’Apollonius<strong>de</strong> Tyr, considéré à tort selon moi comme une source indirecte, <strong>et</strong> d’autrepart sur les sources hagiographiques, auxquelles il faut ajouter le modèle <strong>de</strong>saint Clément, dont l’histoire promène ses héros à travers la Méditerranée,à Athènes, dans les îles (Arados, au large <strong>de</strong> la Syrie actuelle). L’arrière-planoriental <strong>de</strong> ces intertextes <strong>de</strong> Guillaume d’Angl<strong>et</strong>erre, bien connus au MoyenÂge, ne pouvait vraisemblablement pas échapper aux lecteurs du xiii e siècle :ceux-ci n’étaient-ils pas désorientés par c<strong>et</strong>te transposition géographique ?Nous évaluerons dans un premier temps les rapports <strong>de</strong> Guillaume d’Angl<strong>et</strong>erreavec Apollonius <strong>de</strong> Tyr, puis avec quelques récits hagiographiques, avant<strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en évi<strong>de</strong>nce le détournement <strong>de</strong> ces sources, qui pourrait expliquer,au moins en partie, l’effacement du cadre oriental.1. Guillaume d’Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> Apollonius <strong>de</strong> TyrL’Historia Apollonii regis Tyri, qui remonte vraisemblablement à un textegrec perdu 4 , a connu au Moyen Âge <strong>de</strong> nombreuses versions, étudiées pardans <strong>de</strong> très nombreux manuscrits (L’Historia Apollonii regis Tyri se lit dans une soixantaine <strong>de</strong>manuscrits, six versions en prose française ont été conservées) : sur ce plan le succès est indéniable.On ne peut cependant pas en conclure automatiquement que ce récit a exercé une influencelittéraire importante. L’évaluation est rendue difficile par le fait que le succès d’Apollonius a étéprécoce <strong>et</strong> qu’il a popularisé <strong>de</strong>s motifs qui sont <strong>de</strong>venus si banals – inceste, navigation périlleuse<strong>et</strong>c. – qu’on hésite à lui en attribuer la paternité dans certains textes, sans oublier que cerécit peut avoir été, dès son origine, une habile conjonction <strong>de</strong> motifs à succès. La chronologierelative incertaine, la perte <strong>de</strong> témoins, compliquent la tâche.3Voir F. Gingras, « Errances maritimes <strong>et</strong> explorations romanesques dans Apollonius <strong>de</strong> Tyr<strong>et</strong> Floire <strong>et</strong> Blancheflor », In : Mon<strong>de</strong>s marins du Moyen Âge, textes réunis par C. Connochie-Bourgne, Senefiance, t. 52, 2006, p. 169-185.4Le texte est édité par G. A. A. Kortekaas (The Story of Apollonius, King of Tyre, op. cit.) <strong>et</strong> traduitpar E. Wolff, Histoire du roi Apollonius <strong>de</strong> Tyr, Paris, Anatolia Editions, 1996. G. A. A. Kortekaas(The Story of Apollonius, King of Tyre, op. cit.) <strong>et</strong> M. Zink (« Apollonius <strong>de</strong> Tyr : le mon<strong>de</strong> grecaux sources du roman français », In : La Grèce antique sous le regard du Moyen Âge occi<strong>de</strong>ntal,