Boxoffice Pro n°465 – 27 mars 2024

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TECHNIQUE Aujourd’hui, on sait faire du son immersif avec des écrans Led MARION ROSSET, PRÉSIDENTE D'ADDE ÉCRANS LED ET PROJECTEURS LASER Sur le plateau de l’Émission Boxoffice Pro, la présidente d’ADDE, fabricant et installateur d’équipements cinéma, a détaillé les évolutions en cours en matière de projection. Une entreprise familiale devenue un acteur de référence « Nous sommes une équipe de passionnés et mettons la technique au service du cinéma : si on nous appelle des “intégrateurs”, ADDE est d’abord intégrateur d’émotions », résume Marion Rosset, ingénieure à la tête de l’entreprise familiale créée en 1981, qui tire son nom des initiales de ses fondateurs, « mon père, mon oncle, ma mère et ma tante ». Aujourd’hui une équipe de 35 personnes travaille entre Lyon et Paris, dont ses six dirigeants – Marion Rosset, sa sœur, son mari, son beau-frère, le directeur commercial et le directeur technique, « qui possèdent ensemble ADDE, sans partenaire extérieur, et travaillent tous dans l'entreprise ». Au fil des années, la société est devenue l’un des partenaires techniques majeurs des cinémas français, un fabricant d’enceintes reconnu, et l’un des principaux acteurs de la Led Cinéma. ADDE a récemment accompagné le Pathé Casablanca, dont elle a notamment mis en oeuvre la salle Imax, les CGR de Castres, de Béziers et de Brignais, mais aussi le Grand Rex de Péage-de-Roussillon, le Ciné Chaplin de Rivede-Gier ou Le Travelling à Agde. Elle travaille actuellement sur des rénovations chez de nombreux indépendants, sur l’ouverture prochaine du Pathé Abidjan et sur « l’aventure hors norme du Pathé Palace à Paris, à laquelle nous sommes très fiers de participer », se réjouit Marion Rosset. Réinventer le son pour les écrans LED Pionnière, la société a installé le premier écran cinéma Led de France en 2019, au Pathé Beaugrenelle, après que la technologie ait été dévoilée au Cinemacon en 2018. « Depuis, nous en avons installé quatre, et nous dépasserons les 10 après ceux de cette année. Nous avons donc déjà du recul sur la technologie », dont Marion Rosset précise que « ce n’est pas une grande télé, mais vraiment du cinéma ». L’image, uniforme et sans distorsion, la reproduction des couleurs, les contrastes infinis et notamment le noir pur : « un rendu qui laisse bouche bée, pour un matériel qui ne demande que très peu de maintenance… même si ça coûte ©ADDE Emission à voir ou revoir sur notre chaîne YouTube encore très cher ». Le prix est à peu près sept fois celui d’un projecteur Laser équivalent, mais la durée de vie est bien plus longue : 100 000 heures (20 ans à 5 000 h par an) contre 30 000 h environ pour un Laser (avant de changer la source). Autres avantages du Led : on n’a plus besoin de cabine, ce qui permet de gagner de l’espace et notamment d’augmenter le nombre de fauteuils en salle. « Par ailleurs, la luminosité de l’image est telle que la salle peut rester éclairée : cela peut donc permettre certains services comme la restauration à la place, même si ce n’est pas encore dans la culture en France ». Pour en arriver là, il a fallu surmonter plusieurs challenges. « Tout d’abord, les écrans Led sont bien plus lourds : la structure aluminium sur-mesure doit supporter 1,5 T à l’avant pour un écran 10 m et 2,7 T pour un de 14 m. L’alignement de la structure doit être très précis et demande une installation méticuleuse. » Mais surtout, le défi du son, qui ne passe plus à travers l’écran, doit être adapté à chaque salle. « Nous avons beaucoup réfléchi, en imaginant des systèmes qui sur le papier ne devaient pas marcher… mais qui fonctionnent dans la réalité. En tant que fabricant, nous avons mis en œuvre des enceintes spécifiques, placées au-dessus et en dessous de l’écran. Les caissons sont allongés et beaucoup plus profonds pour pouvoir se loger dans cet espace. Il faut ensuite s’adapter au volume de chaque salle pour donner l’impression que le son sort des deux tiers de l’écran et pas du haut et du bas ». Au final, on a le sentiment que c’est le cas . « Aujourd’hui, notre système* est validé par Dolby pour tous ses formats sonores, du 5.1 à l’Atmos : on sait faire du son immersif avec un écran Led, et ça marche même très bien », affirme Marion Rosset. En témoigne la salle Onyx du Pathé Beaugrenelle. *système son Darkside ADDE ADDE : 3 000 m² de locaux à Rillieux-la-Pape en région lyonnaise et un stock de pièces en région parisienne à Fontenay-sous-Bois 32 N°465 / 27 mars 2024
Choisir son Laser Si l’on en n’est pas encore à la généralisation du Led… la transition au Laser, elle, suit son chemin. « Il ne s’agit pas d’une grosse vague d’installation comme lors du passage du 35 mm au numérique, et c’est très bien comme ça », souligne Marion Rosset, qui peut ainsi répondre progressivement à la demande. ADDE a commencé les installations en 2015 avec les premières générations de Laser Phosphor. « Nous avons installé 320 projecteurs laser à ce jour sur les 1 400 salles dont nous nous occupons, soit un peu moins du quart du parc. » Les projecteurs numériques au xénon n'étaient pourtant pas si vieux, rappelle la dirigeante, mais le Laser étant moins énergivore, « c’est un atout dans la conjoncture actuelle ». Laser Phosphor : 2 lasers bleus créent les autres couleurs au travers d’une roue Phosphor (jaune) et d’un miroir dichroïque (vert/rouge). Avantages : Très économique et faible consommation électrique Rendu équivalent au xénon avec une meilleure stabilité d’image et uniformité de lumière Espace colorimétrique DCI P3 identique à celui du xénon Inconvénients : Faibles puissances Laser RB ou « RB2 » : 2 lasers bleus et 1 laser rouge, le vert est créé au travers d’une roue Phosphor et miroir dichroïque Avantages : Bon compromis qualité/ prix et faible consommation électrique Rendu supérieur au xénon avec des bleus et rouges purs Espace colorimétrique supérieur au DCI P3 Inconvénients : Pas de très fortes puissances Limité dans l’espace colorimétrique Pour rappel, trois technologies existent aujourd’hui pour ce type de projecteurs : phosphor, lumière bleue, et RGB [voir détails ci-contre], chacune ayant ses avantages et inconvénients… avec lesquels il faut composer. « Les Laser Phosphor, qui utilisent 2 Led bleus, ont l’avantage d’être très compacts et peu chers, mais leur puissance n’est pas faite pour de très grands écrans. Pour les Laser RB, on ajoute une Led rouge, pour un espace colorimétrique plus étendu que celui d’un xénon et une meilleure uniformité de lumière, soit un progrès indéniable pour le spectateur. Mais au-delà de 35 000 Lumen, on est un peu limité en lumière. Enfin, avec le Laser RGB, on ajoute le vert, ce qui offre des couleurs incroyables, un meilleur contraste et une puissance allant jusqu’à 55 000 Lumen, qui permet notamment de grands écrans en 3D. Reste la problématique du “speckle” selon le gain de l’écran. En Laser RGB : 3 lasers purs, bleu, rouge et vert Avantages : Très bons contrastes et couleurs exceptionnelles Espace colorimétrique REC 2020 (mais pas de contenus aujourd’hui) Fortes puissances et faible consommation électrique Inconvénients : Technologie chère Speckle très visible avec toiles d’écran dont le gain > 1.4 Dérives colorimétriques Imax et en Dolby Cinema par exemple, on utilise des “shakers” qui vont faire vibrer la toile d’écran, annulant ce phénomène de vibration optique. Avec un projecteur RGB, pour limiter le speckle, on évite un gain de toile trop important et on utilise des projecteurs plus puissants ». Enfin, si l’on a peu de moyens, reste la solution du rétrofit, pour changer seulement la lanterne du projeteur, en la remplaçant par une source lumineuse laser. « Là aussi, c’est un compromis à trouver : cela aura peu d'intérêt pour une machine qui a 12 ans, mais un exploitant dont les projecteurs n’ont que 5 ou 6 ans pourra choisir le rétrofit, pour réduire sa consommation d’énergie sans engager trop de frais. » Autant de conseils que Marion Rosset prodigue avec pédagogie, fière que son entreprise soit à la pointe sur les nouvelles technologies de projection. Plus généralement, la France est d’ailleurs en avance. « Au tout début de la Led, nous avons présenté notre système de son à Toronto, où les professionnels ne comprenaient même pas à quoi il servait puisqu’il n’y avait pas encore un seul écran Led aux États-Unis, alors que nous en avions déjà deux en France. » Cécile Vargoz LA CST RASSEMBLE LE SECTEUR AUTOUR DES DÉFIS D’AUJOURD’HUI ET DEMAIN De la réduction de l’empreinte environnementale à l’accessibilité des salles, en passant par les ratios d’image, la Commission supérieure technique a organisé une journée de rencontre spécialement destinée à la diffusion. Au-delà de ses missions strictement techniques, la CST accompagne les professionnels de toute la filière dans leurs réflexions et leur formation face aux évolutions de la société… et aux promesses nouvelles à tenir. À l’initiative de trois de ses départements, Diffusion-Distribution- Exploitation, Postproduction et Image, elle a ainsi proposé trois conférences, le 20 mars à la Fémis, qui peuvent être revisionnées sur la chaîne YouTube de Boxoffice Pro, partenaire de cette journée exceptionnelle. ©CST Enjeux invisibles du public, essentiels pour le secteur La protection de l’environnement, qui s’est imposée à tous les exploitants, a fait l’objet d’interventions tant sur les bâtiments que sur la gestion de l’énergie au quotidien. Hélène Herschel, déléguée générale de la Fnef, a également pointé la responsabilité des distributeurs, qui doivent veiller à « conclure la révolution numérique » en matière d’acheminement de copies, tout en veillant à adopter des pratiques responsables lors des tournées nationales de promotion. Le cinéma, expérience collective par excellence, doit également se diriger vers un modèle plus inclusif. Thème d’une deuxième conférence – qui sera détaillée dans notre prochain numéro –, lors de laquelle les associations Ciné Sens, Inclusiv et Retour d’image, ont rappelé leurs travaux. Tour à tour, des entrepreneurs sont venus La journée de la CST s’est déroulée à la Fémis durant toute la journée du mercredi 20 mars présenter des solutions techniques d'accessibilité, telles que des applications pour générer des sous-titres sur un smartphone, des boucles à induction magnétique ou des lunettes avec les dialogues affichées dans les verres. Le ratio d’image et les problématiques qui l’accompagnent ont également fait l’objet d’un débat… qui n’est pas nouveau. Leur évolution, liée à celle de la technique mais aussi à des des choix artistiques, ne se retrouve pas toujours dans la projection en salle. Tous les projecteurs numériques sont aujourd’hui adaptés aux DCP “flat” pour le 1.85 et “scope” pour le 2.39… mais pas forcément adaptés à tous les ratios “normalisés”, comme le 1.78 (16/9 e ), le 1.33 ou le 1.66, ou de plus rares encore. Ils relèvent pourtant des choix des cinéastes : « C’est la mise en scène qui motive le choix de son ratio ; si je filme un groupe de personnes, ça sera en scope, mais pour une personne seule ou si je dois me focaliser sur des parties d’un corps, je serai en 1.33 », explique Karim Dridi, le réalisateur de Revivre. Et le débat se complique lorsqu'on évoque des ratios plus « atypiques », comme Les Huit salopards en Ultra Panavision 2.76 ou La La Land en 2.55. D.W. & C.V. N°465 / 27 mars 2024 33
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